Conseil d'État, 6ème - 1ère chambres réunies, 28/04/2017, 397015
Conseil d'État, 6ème - 1ère chambres réunies, 28/04/2017, 397015
Conseil d'État - 6ème - 1ère chambres réunies
- N° 397015
- ECLI:FR:CECHR:2017:397015.20170428
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
28 avril 2017
- Rapporteur
- Mme Laurence Franceschini
- Avocat(s)
- SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
MmeD..., la société civile immobilière (SCI) Ker Ael Coz et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 21 novembre 2011 par lequel le préfet du Finistère a approuvé la modification ou la suppression de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Fouesnant dans le secteur de Beg Meil. Par un jugement n° 1200314 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 14NT02011 du 11 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme D...et autres, annulé ce jugement ainsi que l'arrêté attaqué.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 février et 29 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre du logement et de l'habitat durable demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme D...et autres.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme D...et autres.
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. / L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : / a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; / b) A titre exceptionnel, la suspendre. " ; qu'aux termes de l'article R. 160-18 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête peut décider de procéder à une visite des lieux. Dans ce cas, le commissaire enquêteur ou le président de la commission avise le maire et convoque sur place les propriétaires intéressés ainsi que les représentants des administrations ; après les avoir entendus, il dresse procès-verbal de la réunion. " ;
2. Considérant que la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit dans l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 160-18 du code de l'urbanisme en jugeant que l'obligation de convocation qu'elles prévoient n'est pas limitée aux seuls propriétaires ayant exprimé le souhait qu'il soit procédé à une visite des lieux ;
3. Considérant, toutefois, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une enquête publique n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que tel est notamment le cas s'il a eu pour effet de nuire à l'information et à la participation de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ; qu'il suit de là qu'en jugeant que l'arrêté préfectoral attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière et doit par suite être annulé, sans rechercher si, dans les circonstances de l'espèce qui lui était soumise, le vice de procédure résultant de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 160-18 du code de l'urbanisme avait été susceptible d'exercer une influence sur l'arrêté attaqué ou avait privé d'une garantie les propriétaires non convoqués à la visite des lieux, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 11 décembre 2015 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme D...et autres au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre du logement et de l'habitat durable et à Mme C...D..., premier défendeur dénommé. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.
ECLI:FR:CECHR:2017:397015.20170428
MmeD..., la société civile immobilière (SCI) Ker Ael Coz et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 21 novembre 2011 par lequel le préfet du Finistère a approuvé la modification ou la suppression de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Fouesnant dans le secteur de Beg Meil. Par un jugement n° 1200314 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 14NT02011 du 11 décembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme D...et autres, annulé ce jugement ainsi que l'arrêté attaqué.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 février et 29 mars 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre du logement et de l'habitat durable demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme D...et autres.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mme D...et autres.
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. / L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : / a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; / b) A titre exceptionnel, la suspendre. " ; qu'aux termes de l'article R. 160-18 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête peut décider de procéder à une visite des lieux. Dans ce cas, le commissaire enquêteur ou le président de la commission avise le maire et convoque sur place les propriétaires intéressés ainsi que les représentants des administrations ; après les avoir entendus, il dresse procès-verbal de la réunion. " ;
2. Considérant que la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit dans l'application des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 160-18 du code de l'urbanisme en jugeant que l'obligation de convocation qu'elles prévoient n'est pas limitée aux seuls propriétaires ayant exprimé le souhait qu'il soit procédé à une visite des lieux ;
3. Considérant, toutefois, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une enquête publique n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que tel est notamment le cas s'il a eu pour effet de nuire à l'information et à la participation de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ; qu'il suit de là qu'en jugeant que l'arrêté préfectoral attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière et doit par suite être annulé, sans rechercher si, dans les circonstances de l'espèce qui lui était soumise, le vice de procédure résultant de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 160-18 du code de l'urbanisme avait été susceptible d'exercer une influence sur l'arrêté attaqué ou avait privé d'une garantie les propriétaires non convoqués à la visite des lieux, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, son arrêt doit être annulé ;
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 11 décembre 2015 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme D...et autres au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre du logement et de l'habitat durable et à Mme C...D..., premier défendeur dénommé. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.