Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 09/12/2016, 390892
Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 09/12/2016, 390892
Conseil d'État - 5ème - 4ème chambres réunies
- N° 390892
- ECLI:FR:CECHR:2016:390892.20161209
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
09 décembre 2016
- Rapporteur
- Mme Catherine Bobo
- Avocat(s)
- SCP SEVAUX, MATHONNET ; LE PRADO
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. et Mme C...A...B...ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) la réparation des préjudices subis par eux et leurs enfants du fait des conséquences de l'intervention subie par M. A...B...le 14 décembre 2010 au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand. Par un jugement n°1200775 du 12 juillet 2013, le tribunal administratif a mis à la charge de l'ONIAM le versement à M. A...B...d'une somme de 71 088,30 euros, à Mme A...B...d'une somme de 4 000 euros et à chacun de leurs trois enfants d'une somme de 2 000 euros.
Par un arrêt n° 13LY02347, 13LY02427 du 9 avril 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par l'ONIAM contre ce jugement et a partiellement fait droit à l'appel de M. A...B...en portant à 74 835,37 euros l'indemnité due par l'ONIAM à celui-ci.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juin et 10 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ONIAM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme A...B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Catherine Bobo, auditeur,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand.
1. Considérant que, par un arrêt du 9 avril 2015 réformant un jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, la cour administrative d'appel de Lyon a mis à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), en application des dispositions du 1° de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, la réparation au titre de la solidarité nationale des préjudices subis par M. A...B...du fait d'une infection nosocomiale contractée au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand ; que la cour a également mis à la charge de l'office la réparation des préjudices subis, du fait de la dégradation de l'état de santé de M. A...B..., par son épouse et leurs trois enfants ; qu'à l'appui de son pourvoi en cassation, l'ONIAM soutient que la cour a commis une erreur de droit en retenant qu'il devait assurer l'indemnisation des proches de la victime de l'infection ;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, introduit dans le code par la loi du 4 mars 2002, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute./ Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. / II.- Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire " ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, introduit dans le code par la loi du 30 décembre 2002, dans sa rédaction applicable au litige : " Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : /1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) " ;
4. Considérant que s'il résulte des termes mêmes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, cité au point 2, que le régime d'indemnisation au titre de la solidarité nationale qu'il prévoit ne peut bénéficier qu'à la victime du dommage corporel et, en cas de décès, à ses ayants droit, les dispositions citées au point 3 de l'article L. 1142-1-1 du même code instituent un régime spécifique de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales les plus graves qui a vocation à réparer l'ensemble de ces dommages, qu'ils aient été subis par les patients victimes de telles infections ou par leurs proches ; qu'il suit de là que la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit en mettant à la charge de l'ONIAM le versement à l'épouse et aux enfants de M. A... B...d'indemnités réparant les préjudices ayant résulté pour eux de l'infection contractée par celui-ci au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de l'ONIAM doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de l'ONIAM est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, au centre hospitalier de Clermont-Ferrand et à M. et Mme C...A...B....