CAA de MARSEILLE, 3ème chambre - formation à 3, 17/11/2016, 15MA00814, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme sportive professionnelle (SASP) Olympique de Marseille a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge en droits et intérêts de retard des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 dans les rôles de la commune de Marseille.

Par un jugement n° 1205166 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2015, et des mémoires enregistrés les 27 juin 2016 et 11 août 2016, la SASP Olympique de Marseille, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1205166 du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :

- le produit retiré de la cession des contrats de joueurs ne peut être inclus dans le calcul de la valeur ajoutée pour la détermination de la cotisation de taxe professionnelle dès lors que ces cessions présentent un caractère exceptionnel et ne relèvent pas de l'activité ordinaire du club ;

- l'administration fiscale n'établit pas que la part de son chiffre d'affaires tirée de la cession de joueurs revêtirait un caractère substantiel au regard du chiffre d'affaires global ;

- les indemnités de transfert revêtent un caractère accessoire ;

- les cessions, dont elle n'a pas tiré profit, s'inscrivent dans une logique unique de compétitivité sportive.


Par des mémoires en défense enregistrés le 18 septembre 2015 et 18 juillet 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SASP Olympique de Marseille ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.


Vu :

- le règlement n° 2004-07 du 23 novembre 2004 du comité de la règlementation comptable ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli,
- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la SASP Olympique de Marseille.


1. Considérant que la SASP Olympique de Marseille, qui a pour objet la gestion professionnelle du club de football du même nom, relève appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et intérêts de retard, des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 dans les rôles de la commune de Marseille à la suite d'une vérification de comptabilité ;




2. Considérant qu'aux termes du I. de l'article 1647 D du code général des impôts, alors en vigueur : " (...) tous les redevables de la taxe professionnelle sont assujettis à une cotisation minimum établie au lieu de leur principal établissement (...) " ; qu'aux termes du I. de l'article 1647 E du même code, alors en vigueur : " La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie au II. de l'article 1647 B sexies. Le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l'exercice de douze mois clos pendant l'année d'imposition ou, à défaut d'un tel exercice, ceux de l'année d'imposition " ; qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du même code, dans sa version alors en vigueur : " I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II (...) / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges mentionnées aux troisième et quatrième alinéas ainsi que les transferts de charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprise ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au même code : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt " et qu'aux termes du 5. de l'annexe au règlement n° 2004-07 du 23 novembre 2004 du comité de la règlementation comptable susvisé : " Les indemnités de mutation reçues de la part d'une autre société à objet sportif sont comptabilisées en résultat " ;




3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la valeur ajoutée à retenir pour déterminer le montant de la cotisation minimale de taxe professionnelle prévue à l'article 1647 E du code général des impôts correspond à celle définie par les dispositions de l'article 1647 B sexies du même code, relatif au plafonnement des cotisations de taxe professionnelle ; que les dispositions de l'article 1647 B fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; qu'en application des prescriptions du plan comptable général applicable aux années d'imposition en litige, le chiffre d'affaires s'entend du montant des produits réalisés par l'entité avec les tiers dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante ; qu'en particulier, des cessions d'immobilisations corporelles ou incorporelles peuvent constituer des ventes à comptabiliser en produits de l'exercice lorsque ces cessions revêtent, compte tenu de la spécificité de l'activité de l'entreprise, un caractère habituel ;





4. Considérant que la SASP Olympique de Marseille a pour activité l'exploitation d'un club de football professionnel dont les produits comprennent notamment les recettes des matchs, les abonnements, les recettes publicitaires, les droits de télévision et les redevances de licences de marque ; que la société a également procédé, au cours des saisons 2007-2008 et 2008-2009, à la cession à d'autres clubs de football professionnel de droits incorporels qu'elle détenait au titre des contrats de travail de douze joueurs et a comptabilisé les indemnités de transfert correspondantes et les compléments de prix perçus à l'occasion des cessions précédentes de trois autres joueurs en produits à caractère exceptionnel au crédit du compte n° 775000 pour des montants de 13 000 000 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2008 et de 19 490 000 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2009 ; que l'administration fiscale a estimé qu'eu égard au caractère récurrent des cessions de joueurs et à l'importance de leurs montants, les indemnités comptabilisées au compte n° 775000 ne présentaient pas un caractère exceptionnel et constituaient des produits d'exploitation courants entrant dans le calcul de la valeur ajoutée ; que le montant des cotisations minimales de taxe professionnelle dues par la SASP Olympique de Marseille au titre des années 2008 et 2009 a en conséquence été rehaussé ;





5. Considérant que les acquisitions et cessions de joueurs sont susceptibles d'intervenir à deux reprises lors de chaque année civile, à l'intersaison, soit entre les mois de mai et d'août, et lors de la pause hivernale, durant les périodes dites de " mercato " et présentent un caractère habituel pour un club de football professionnel comme l'Olympique de Marseille, si bien qu'en l'espèce, eu égard au nombre de cessions effectuées, les sommes perçues à l'occasion de celles-ci représentent pour le club des produits réguliers se rattachant à son activité professionnelle normale et courante alors même que son " modèle économique " ne reposerait pas au premier chef sur une politique de formation de jeunes joueurs destinés à être revendus ; que, dans ces conditions, les indemnités de transfert de joueurs perçues par la société ne constituaient pas des produits exceptionnels mais des produits réalisés par la société requérante dans le cadre de son activité normale et courante de club sportif professionnel, devant être comptabilisés en produits ordinaires ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que les recettes correspondant aux indemnités de transfert litigieuses devaient être prises en compte pour la détermination du chiffre d'affaires visé à l'article 1647 E du code général des impôts ;





6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SASP Olympique de Marseille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




D É C I D E :


Article 1er : La requête de la SASP Olympique de Marseille est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SASP Olympique de Marseille et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2016.
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N° 15MA00814



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