Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 25/10/2016, 14BX02273, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Climatec Pyrénées a demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1201407 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2014 et des mémoires présentés les 16 mars 2015 et 11 décembre 2015, la société Climatec Pyrénées, représentée par Me A...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 28 mai 2014 ;

2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2008 et 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.


Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 ;
- le décret n° 2001-312 du 11 avril 2001 relatif à la prime d'aménagement du territoire ;
- le décret n° 2007-732 du 7 mai 2007 relatif aux zones d'aide à finalité régionale et aux zones d'aide à l'investissement des petites et moyennes entreprises ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sabrina Ladoire,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. La société Climatec Pyrénées, créée le 1er mars 2006, disposait d'un siège social à Soumoulou (Pyrénées-Atlantiques) et d'un local de stockage à Lourdes. Cette société exerce une activité industrielle et commerciale consistant en la " vente, l'installation, le montage, le démontage de systèmes de climatisation, pompes à chaleur, de systèmes hydrauliques, aérauliques, frigorifiques et électriques ". Elle a entendu bénéficier, au titre de cette création, de la mesure d'exonération prévue, pour les entreprises implantées dans une zone d'aménagement du territoire, par les dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts. Le 1er novembre 2007, son siège social a été transféré dans la commune voisine d'Espoey (Pyrénées-Atlantiques). A l'issue d'une vérification de sa comptabilité portant sur la période du 1er mars 2006 au 31 mars 2009, l'administration fiscale a considéré que le transfert de son siège social lui avait fait perdre le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 44 sexies du code général des impôts au titre des exercices clos 2008 et 2009. La société a alors demandé au tribunal administratif de Pau de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, assorties des intérêts de retard, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009. Elle relève appel du jugement n° 1201407 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.


Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Dans sa rédaction en vigueur au cours des années 2005 et 2006, l'article 44 sexies du code général des impôts prévoyait que seraient exonérées, en tout ou partie, d'impôt sur les sociétés ou sur les bénéfices industriels et commerciaux, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création, les entreprises industrielles, commerciales ou artisanales soumises à un régime réel d'imposition et créées entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2009 dans les " zones d'aménagement du territoire ", à la condition notamment " que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans l'une de ces zones ", ces dernières étant elles-mêmes définies comme " les zones éligibles à la prime d'aménagement du territoire classées pour les projets industriels ". Le périmètre de ces zones, qui incluait l'ensemble des communes des Pyrénées-Atlantiques, était alors fixé par le décret du 11 avril 2001 relatif à la prime d'aménagement du territoire.

3. Si le III de l'article 87 de la loi du 30 décembre 2006 portant loi de finances rectificative pour 2006 a modifié l'article 44 sexies du code général des impôts pour instituer un régime applicable aux entreprises qui se créeraient dans les zones d'aide à finalité régionale à compter du 1er janvier 2007, cette modification, limitée à l'avenir, n'a pu mettre fin au régime d'exonération applicable, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création, aux entreprises créées avant le 1er janvier 2007 dans les zones d'aménagement du territoire et continuant à respecter les conditions alors applicables à ce régime.

4. Pour rejeter la demande de décharge présentée par la société Climatec Pyrénées, le tribunal administratif de Pau a relevé que le 1er novembre 2007, date à laquelle la société a transféré son siège social à Espoey, le décret du 11 avril 2001 était devenu caduc et que, cette commune ne faisant dès lors plus partie d'une zone d'aménagement du territoire, la société requérante ne pouvait plus bénéficier de l'exonération prévue par l'article 44 sexies du code général des impôts, ni se prévaloir du fait qu'elle aurait disposé d'un établissement secondaire à Lourdes. Il a en outre estimé qu'elle ne pouvait se prévaloir utilement du fait que le transfert de son siège social aurait constitué un cas de force majeure du fait de la séparation de ses associés.

5. Il est constant que le siège social de la société Climatec Pyrénées, implanté à Soumoulou (Pyrénées-Atlantiques) lors de sa création en 2006, a été transféré à Espoey le 1er novembre 2007. Or, si les communes de Soumoulou et d'Espoey étaient toutes deux comprises dans la zone d'aménagement du territoire définie par le décret n° 2001-3 12 du 1er avril 2001, la commune d'Espoey n'a pas été intégrée au sein de la zone d'aide à finalité régionale délimitée par le décret n° 2007-732 du 7 mai 2007. Cependant, et conformément au principe énoncé au point 3, la commune d'Espoey étant initialement incluse dans la zone d'aménagement du territoire lors de la création de la société, le fait que celle-ci ait ensuite transféré son siège social, dans le délai de vingt-quatre mois suivant sa création, dans cette commune, ne saurait la priver, bien que cette commune n'ait pas été intégrée dans la zone d'aide à finalité régionale, du bénéfice du régime d'exonération prévu par l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006.



6. Il résulte de ce qui précède que la société Climatec Pyrénées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à être déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et des intérêts de retard y afférents.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à la société Climatec Pyrénées au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :

Article 1er : Le jugement ° 1201407 du 28 mai 2014 du tribunal administratif de Pau est annulé.
Article 2 : La société Climatec Pyrénées est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et des intérêts de retard y afférents.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la société Climatec Pyrénées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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