CAA de LYON, 1ère chambre - formation à 3, 27/09/2016, 15LY00107, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Savoie a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2013 par lequel le maire de la commune de Val-d'Isère a accordé un permis de construire à M. B...pour l'édification d'un chalet comprenant cinq logements.

Par un jugement n° 1400706 du 2 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté du 30 octobre 2013.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 19 juillet 2016 non communiqué, la commune de Val-d'Isère, représentée par le cabinet Adamas, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 décembre 2014 ;
2°) de rejeter le déféré du préfet de la Savoie ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le plan de prévention des risques (PPR) n'a pas vocation à se substituer aux décisions des communes qui s'administrent librement et sont compétentes pour intégrer dans leurs choix en matière d'occupation des sols les risques naturels ;
- les risques invoqués ne sont pas de nature à justifier vraiment l'interdiction de construire dans le secteur où est implanté le terrain d'assiette du projet qui est déjà largement urbanisé ;
- d'ailleurs, la limite du zonage N du PPR traverse la parcelle sur laquelle a été attribué le permis déféré ;
- des précautions adaptées auraient pu être prévues pour prévenir les risques auxquels est exposé ce secteur ;
- le risque d'avalanche sur ce secteur est seulement modéré à moyen et ne justifie pas l'inconstructibilité ;
- s'agissant du risque de chutes de blocs de pierre, l'aléa est seulement moyen sur la partie haute de la parcelle et faible en sa partie basse ;
- le permis, eu égard à la conception de l'ouvrage projeté, avait pris en compte les risques réels.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2015, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la commune de Val d'Isère sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segado, premier conseiller,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour la commune de Val d'Isère.





1. Considérant que la commune de Val d'Isère relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande du préfet de la Savoie, le permis de construire que son maire avait accordé le 30 octobre 2013 à M. B... pour l'édification d'un chalet comportant cinq logements ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe pour moitié en zone N inconstructible du plan de prévention des risques d'avalanche de la commune de Val d'Isère du 27 avril 2006 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, dites " zones de danger ", en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / (...) 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; (...) " ;

4. Considérant que les plans de prévention des risques naturels (PPRN) prévisibles ont ainsi pour objet et pour effet de délimiter des zones exposées à des risques naturels à l'intérieur desquelles s'appliquent des contraintes d'urbanisme importantes s'imposant directement aux personnes publiques et aux personnes privées ; que le règlement de ces plans comprend des prescriptions, ou interdictions de construire, pouvant notamment fonder l'octroi ou le refus d'une autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol ; que par suite, les dispositions de leur règlement relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol, qu'elles soient ou non incorporées au plan local d'urbanisme, s'imposent directement aux autorisations de construire et leur application est contrôlée par l'autorité compétente en matière de permis de construire ; que, par suite, dès lors que le terrain d'emprise du projet était situé en zone N non constructible du PPRN applicable, le maire de Val d'Isère était en principe tenu de refuser la délivrance du permis contesté, quand bien même le plan local d'urbanisme ne prévoyait pas lui-même une telle inconstructibilité ;

5. Considérant que si la commune entend voir écarter l'application du PPRN en invoquant son illégalité, il ressort des pièces du dossier que, à l'époque à laquelle ce document a été approuvé, le secteur concerné, déjà en partie urbanisé, était exposé à un risque certes modéré d'avalanche mais aussi à un risque important de chutes de blocs de pierre, ainsi que l'admet d'ailleurs expressément un rapport du bureau d'études SAGE réalisé à la demande de la commune ; qu'eu égard à la gravité de ses conséquences, la prévention d'un tel risque, en dépit du fait que sa fréquence de réalisation, dite période de retour, est faible, a pu justifier sans erreur manifeste d'appréciation le classement du secteur en zone inconstructible ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Val d'Isère n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté de son maire du 30 octobre 2013 accordant un permis de construire à M. B... ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Val d'Isère demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;






DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Val-d'Isère est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Val d'Isère et au ministre du logement et de l'habitat durable.
Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre,
M. Gille, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 septembre 2016.
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N° 15LY00107
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