Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 28/09/2016, 390111

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :

L'association Moto Club de Goult et la Fédération française de motocyclisme ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 avril 2012 par laquelle le préfet de Vaucluse a refusé d'autoriser la manifestation sportive dénommée " championnat de Provence de moto-cross et quad " programmée le 8 mai 2012. Par un jugement n° 1201192 du 21 novembre 2013, le tribunal administratif a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 14MA00313 et 14MA00348 du 12 mars 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté les appels présentés par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et l'association Luberon nature contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 mai et le 12 août 2015, l'association Luberon nature demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, faite à Aarhus le 25 juin 1998 et publiée par le décret n° 2002-1187 du 12 septembre 2002 ;

- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code du sport ;

- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de l'association Luberon Nature et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, avocat de M.A..., de la Fédération française de motocyclisme et de l'association Moto Club de Goult ;



1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 4 avril 2012, le préfet de Vaucluse a refusé l'autorisation d'organiser une manifestation sportive programmée le 8 mai 2012 et dénommée " championnat de Provence de moto-cross et quad " ; que l'association Moto Club de Goult, qui avait sollicité l'autorisation, et la Fédération française de motocyclisme ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision devant le tribunal administratif de Nîmes ; que l'association Luberon nature est intervenue en défense ; que, par un jugement du 21 novembre 2013, le tribunal administratif a admis cette intervention et, faisant droit aux conclusions de la requête, annulé la décision du préfet ; que, par l'arrêt du 12 mars 2015 contre lequel l'association Luberon nature se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, rejeté comme irrecevable l'appel de l'association contre ce jugement et, d'autre part, rejeté comme non fondé l'appel du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ;

Sur les moyens par lesquels l'association Luberon nature critique l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il rejette son appel comme irrecevable :

2. Considérant que la personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue en défense à un recours pour excès de pouvoir n'est recevable à interjeter appel du jugement rendu contrairement aux conclusions de son intervention que lorsqu'elle aurait eu qualité, à défaut d'intervention de sa part, pour former tierce opposition au jugement faisant droit au recours ; qu'aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision " ;

3. Considérant, d'une part, que, en jugeant que l'association Luberon nature, qui était agréée au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et justifiait ainsi, en vertu de l'article L. 142-1 du même code, d'un intérêt pour agir contre une décision administrative d'autorisation d'une manifestation telle que la compétition sportive litigieuse, n'avait pas, de ce seul fait, qualité, à défaut d'intervention de sa part, pour former tierce opposition au jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes avait annulé le refus d'autoriser cette manifestation et en en déduisant qu'elle n'était pas recevable à en relever appel, la cour administrative d'appel a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 832-1 du code de justice administrative et n'a pas méconnu celles de l'article L. 142-1 du code de l'environnement ;

4. Considérant, d'autre part, que les dispositions de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 ne concernent, en vertu de ses articles 2 et 5, que les projets soumis à une évaluation environnementale en application de son article 4, dont le champ d'application est défini par les annexes I et II de la directive ; que l'organisation d'une épreuve de moto-cross n'entre dans aucune des catégories d'installations ou d'opérations énumérées par ces annexes ; qu'ainsi, en tout état de cause, l'association requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles 1er et 11 de cette directive pour soutenir qu'elle avait qualité pour faire appel du jugement du tribunal administratif annulant le refus du préfet d'autoriser l'organisation d'une telle manifestation ; qu'elle ne peut davantage se prévaloir des stipulations de l'article 9 paragraphe 2 de la convention d'Aarhus visée ci-dessus, qui ne sont applicables, conformément aux stipulations de l'article 6, qu'aux activités énumérées à l'annexe I, au nombre desquelles ne figure pas l'organisation d'une épreuve de moto-cross, ainsi qu'aux activités que la législation nationale soumet à autorisation après mise en oeuvre d'une procédure de participation du public, ce qui n'est pas le cas d'une épreuve de moto-cross soumise à autorisation en application des dispositions des articles R. 331-18 et suivants du code du sport ;

Sur les moyens relatifs aux motifs par lesquels la cour administrative d'appel a rejeté comme non fondé l'appel du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

5. Considérant que l'association Luberon nature n'est recevable à se pourvoir en cassation contre l'arrêt attaqué qu'en ce qu'il rejette son appel ; que les moyens par lesquels elle critique les motifs par lesquels la cour a rejeté l'appel du ministre ne peuvent, par suite, qu'être écartés ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Luberon Nature n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la Fédération française de motocyclisme présentées au même titre ;




D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de l'association Luberon nature est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Fédération française de motocyclisme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Luberon nature, à l'Association moto club de Goult, à la Fédération française de motocyclisme et au ministre de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie.

ECLI:FR:CECHR:2016:390111.20160928
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