Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 27/06/2016, 14BX00938, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 6 février 2009 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours administratif préalable obligatoire qu'il a formé devant la commission de recours des militaires contre la décision du 11 août 2008 portant rejet de sa demande de réorientation professionnelle pour raisons médicales et de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'il a subis du fait de la discrimination dont il a été victime.

Par un jugement n° 0901956 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mars 2014, complétée par un mémoire complémentaire enregistré le 18 mai 2016 et des pièces enregistrées le 1er décembre 2015 et le 18 février 2016, M. C...B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 janvier 2014 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation ;

2°) d'annuler la décision du 6 février 2009 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours administratif préalable obligatoire qu'il a formé devant la commission de recours des militaires contre la décision du 11 août 2008 portant rejet de sa demande de réorientation professionnelle pour raisons médicales ;

3°) d'enjoindre au ministre de la défense de procéder à son reclassement dans l'armée de l'air, à un poste compatible avec les préconisations des médecins du service de santé des armées sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles combinées 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.


Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;
- le code de la défense ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Philippe Delvolvé ;
- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;
- et les observations de MeA..., représentant M.B....



Considérant ce qui suit :


1. M.B..., né le 23 août 1980, s'est engagé dans l'armée de l'air comme militaire technicien de l'air dans la spécialité " conducteur routier " le 1er septembre 1999. Après une demande de réorientation professionnelle pour convenance personnelle, il a été réengagé en qualité de " conducteur de chien ". Son engagement a été renouvelé à compter du 1er septembre 2007 pour une durée de deux ans. A la suite de l'apparition en 2006 d'une tuméfaction au niveau du poignet droit signalée au service de santé en novembre 2006, il a été placé à de nombreuses reprises en arrêt maladie à compter du 23 novembre 2007. Suite à la déclaration médicale d'inaptitude à la spécialité " conducteur de chiens " le 6 février 2008, il a déposé, le 27 février suivant, une demande de réorientation professionnelle pour raisons médicales. Par un avis du 22 mai 2008, le conseil de santé régional des armées a rendu un avis favorable à sa réorientation professionnelle uniquement dans la spécialité " transit aérien ". Le 11 août 2008, le ministre a refusé d'agréer la demande de réorientation. Le 8 octobre 2008, le caporal-chef B...a contesté cette décision devant la commission de recours des militaires. Le ministre de la défense a rejeté le recours de M. B...par la décision du 11 février 2009. M. B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.


Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 4132-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Nul ne peut être militaire : (...) 3° S'il ne présente les aptitudes exigées pour l'exercice de la fonction ". Aux termes de l'article L. 4132-6 du code de la défense : " Le militaire servant en vertu d'un contrat est recruté pour une durée déterminée. Le contrat est renouvelable. Il est souscrit au titre d'une armée ou d'une formation rattachée. / Le service compte à partir de la date d'effet du contrat ou, s'il n'y a pas d'interruption du service, de la date d'expiration du contrat précédent. / Sous réserve des dispositions relatives aux militaires commissionnés, l'intéressé est admis à servir avec le grade qu'il a acquis. Toutefois, il peut être admis à servir avec un grade inférieur en cas d'interruption de service ou de changement d'armée ou de formation rattachée. ".


3. Il résulte du principe général du droit dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement. Ce principe est applicable en particulier aux agents contractuels de droit public, y compris militaire, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif de Toulouse, catégorie à laquelle appartient M.B.... Les obligations en matière de reclassement à la charge du ministre de la défense tiennent cependant compte des contraintes spécifiques liées à l'exercice de la fonction de militaire. Ainsi, le ministre de la défense était tenu d'examiner les possibilités de réorientation professionnelle de M.B..., y compris dans une autre base aérienne que celle au sein de laquelle il était affecté. En s'abstenant d'y procéder, le ministre de la défense a entaché sa décision d'une erreur de droit.


4. Il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande et à demander l'annulation de la décision contestée du 6 février 2009 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours administratif préalable obligatoire qu'il a formé devant la commission de recours des militaires contre la décision du 11 août 2008 portant rejet de sa demande de réorientation professionnelle pour raisons médicales.


Sur les autres conclusions :

5. Il résulte de l'instruction que M. B...a été rayé des cadres de l'armée à compter du 8 novembre 2012. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu d'enjoindre au ministre de la défense de procéder à son reclassement dans l'armée de l'air, à un poste compatible avec les préconisations des médecins du service de santé des armées.


6. M. B...demande la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros à verser à Me A..., son conseil, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction que le requérant bénéficie de l'aide juridictionnelle. Les dispositions précitées ne trouvant pas à s'appliquer, il n'y a pas lieu d'accorder à Me A...la somme demandée.




DECIDE :




Article 1er : Le jugement n° 0901956 du 23 janvier 2014 du tribunal administratif de Toulouse et la décision du 6 février 2009 du ministre de la défense sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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No 14BX00938



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