Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 29/12/2014, 375744
Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 29/12/2014, 375744
Conseil d'État - 1ère et 6ème sous-sections réunies
- N° 375744
- ECLI:FR:CESSR:2014:375744.20141229
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
lundi
29 décembre 2014
- Rapporteur
- M. Yannick Faure
- Avocat(s)
- SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Le préfet de l'Essonne a demandé au tribunal administratif de Versailles, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 6 septembre 2013 par lequel le maire de la commune de Vigneux-sur-Seine a accordé à la SCI Mica un permis de construire un bâtiment collectif à usage d'habitation, sur un terrain situé 34, rue Victor-Hugo. Par une ordonnance n° 1400036 du 27 janvier 2014, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles a suspendu l'exécution de cet arrêté jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par une ordonnance n° 14VE00464 du 24 février 2014, enregistrée le 24 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 12 février 2014 au greffe de cette cour, présenté par la SCI Mica. Par ce pourvoi, la SCI Mica demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles du 27 janvier 2014 ;
2°) statuant au titre de la procédure engagée, de rejeter la demande de suspension présentée par le préfet de l'Essonne devant le tribunal administratif de Versailles ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 ;
- le décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yannick Faure, auditeur,
- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SCI Mica.
Sur la compétence du Conseil d'Etat :
1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes (...) qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) / L'appel des jugements du tribunal administratif ainsi que des décisions relatives aux demandes de suspension prévues aux alinéas précédents, rendus sur recours du représentant de l'Etat, est présenté par celui-ci " ; que si ces dispositions ont confié au préfet, lorsque cette voie de recours est ouverte, le pouvoir de faire appel au nom de l'Etat d'une ordonnance rejetant la demande de suspension dont il a assorti son déféré, elles n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application de la règle énoncée à l'article R. 811-1-1 du code de justice administrative, introduit par le 3° de l'article 2 du décret du 1er octobre 2013 relatif au contentieux de l'urbanisme, selon laquelle le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les recours, introduits entre le 1er décembre 2013 et le 1er décembre 2018, contre " les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d'habitation (...) lorsque le bâtiment (...) est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une des communes mentionnées à l'article 232 du code général des impôts et son décret d'application " ;
2. Considérant, d'autre part, que la commune de Vigneux-sur-Seine figure sur la liste annexée au décret du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance du magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles du 27 janvier 2014 faisant droit à la demande de suspension assortissant le déféré enregistré le 6 janvier 2014 au greffe de ce tribunal et suspendant l'exécution d'un arrêté accordant un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation implanté sur le territoire de la commune de Vigneux-sur-Seine a été rendue en premier et dernier ressort ; que, par suite, le Conseil d'Etat est compétent pour connaître, en qualité de juge de cassation, du pourvoi de la SCI Mica dirigé contre cette ordonnance ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
4. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'ensemble des dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la vallée de la Seine dans le département de l'Essonne n'a pas été versé au dossier n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure au terme de laquelle l'ordonnance attaquée a été prise ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que l'article C.-A.8 du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la vallée de la Seine dans le département de l'Essonne, approuvé par un arrêté du préfet de ce département du 20 octobre 2003, autorise notamment, dans la zone ciel, les augmentations du nombre de logements dans un bâtiment existant par reconstruction sous réserve, en particulier, de ne pas augmenter l'emprise au sol ; que, pour juger que le moyen tiré de ce que le projet ne relevait pas des constructions autorisées par ces dispositions était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux, le magistrat désigné par le tribunal administratif, en relevant que le projet entraînerait une augmentation de l'emprise au sol, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte d'erreur de droit et de dénaturation ;
6. Considérant, en troisième lieu, que l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vigneux-sur-Seine limite à 7 mètres la hauteur des constructions dans la zone UD ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au magistrat du tribunal administratif de Versailles que le projet autorisé par l'arrêté litigieux est implanté dans cette zone ; qu'eu égard, en particulier, à la hauteur de la façade nord-ouest de la construction envisagée, le magistrat désigné par le tribunal administratif n'a pas dénaturé les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le moyen tiré de ce que le projet méconnaissait ces dispositions était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux ;
7. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, citées au point 1 et reproduites à l'article L. 554-1 du code de justice administrative, ne subordonnent pas la suspension de l'exécution des actes déférés au tribunal administratif par le représentant de l'Etat dans le département à la condition que l'urgence le justifie ; que le moyen tiré de ce que le magistrat désigné par le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en suspendant l'exécution de l'arrêté litigieux, alors que le préfet de l'Essonne n'alléguait pas l'existence d'une urgence, ne peut, par suite, qu'être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, le pourvoi de la SCI Mica doit être rejeté ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SCI Mica est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCI Mica et à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Copie en sera adressée pour information à la commune de Vigneux-sur-Seine.
ECLI:FR:CESSR:2014:375744.20141229
Procédure contentieuse antérieure
Le préfet de l'Essonne a demandé au tribunal administratif de Versailles, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 6 septembre 2013 par lequel le maire de la commune de Vigneux-sur-Seine a accordé à la SCI Mica un permis de construire un bâtiment collectif à usage d'habitation, sur un terrain situé 34, rue Victor-Hugo. Par une ordonnance n° 1400036 du 27 janvier 2014, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles a suspendu l'exécution de cet arrêté jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par une ordonnance n° 14VE00464 du 24 février 2014, enregistrée le 24 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 12 février 2014 au greffe de cette cour, présenté par la SCI Mica. Par ce pourvoi, la SCI Mica demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles du 27 janvier 2014 ;
2°) statuant au titre de la procédure engagée, de rejeter la demande de suspension présentée par le préfet de l'Essonne devant le tribunal administratif de Versailles ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 ;
- le décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yannick Faure, auditeur,
- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SCI Mica.
Sur la compétence du Conseil d'Etat :
1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes (...) qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) / L'appel des jugements du tribunal administratif ainsi que des décisions relatives aux demandes de suspension prévues aux alinéas précédents, rendus sur recours du représentant de l'Etat, est présenté par celui-ci " ; que si ces dispositions ont confié au préfet, lorsque cette voie de recours est ouverte, le pouvoir de faire appel au nom de l'Etat d'une ordonnance rejetant la demande de suspension dont il a assorti son déféré, elles n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application de la règle énoncée à l'article R. 811-1-1 du code de justice administrative, introduit par le 3° de l'article 2 du décret du 1er octobre 2013 relatif au contentieux de l'urbanisme, selon laquelle le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les recours, introduits entre le 1er décembre 2013 et le 1er décembre 2018, contre " les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d'habitation (...) lorsque le bâtiment (...) est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une des communes mentionnées à l'article 232 du code général des impôts et son décret d'application " ;
2. Considérant, d'autre part, que la commune de Vigneux-sur-Seine figure sur la liste annexée au décret du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance du magistrat désigné par le tribunal administratif de Versailles du 27 janvier 2014 faisant droit à la demande de suspension assortissant le déféré enregistré le 6 janvier 2014 au greffe de ce tribunal et suspendant l'exécution d'un arrêté accordant un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation implanté sur le territoire de la commune de Vigneux-sur-Seine a été rendue en premier et dernier ressort ; que, par suite, le Conseil d'Etat est compétent pour connaître, en qualité de juge de cassation, du pourvoi de la SCI Mica dirigé contre cette ordonnance ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée :
4. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que l'ensemble des dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la vallée de la Seine dans le département de l'Essonne n'a pas été versé au dossier n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure au terme de laquelle l'ordonnance attaquée a été prise ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que l'article C.-A.8 du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la vallée de la Seine dans le département de l'Essonne, approuvé par un arrêté du préfet de ce département du 20 octobre 2003, autorise notamment, dans la zone ciel, les augmentations du nombre de logements dans un bâtiment existant par reconstruction sous réserve, en particulier, de ne pas augmenter l'emprise au sol ; que, pour juger que le moyen tiré de ce que le projet ne relevait pas des constructions autorisées par ces dispositions était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux, le magistrat désigné par le tribunal administratif, en relevant que le projet entraînerait une augmentation de l'emprise au sol, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte d'erreur de droit et de dénaturation ;
6. Considérant, en troisième lieu, que l'article UD 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vigneux-sur-Seine limite à 7 mètres la hauteur des constructions dans la zone UD ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au magistrat du tribunal administratif de Versailles que le projet autorisé par l'arrêté litigieux est implanté dans cette zone ; qu'eu égard, en particulier, à la hauteur de la façade nord-ouest de la construction envisagée, le magistrat désigné par le tribunal administratif n'a pas dénaturé les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le moyen tiré de ce que le projet méconnaissait ces dispositions était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux ;
7. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, citées au point 1 et reproduites à l'article L. 554-1 du code de justice administrative, ne subordonnent pas la suspension de l'exécution des actes déférés au tribunal administratif par le représentant de l'Etat dans le département à la condition que l'urgence le justifie ; que le moyen tiré de ce que le magistrat désigné par le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en suspendant l'exécution de l'arrêté litigieux, alors que le préfet de l'Essonne n'alléguait pas l'existence d'une urgence, ne peut, par suite, qu'être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, le pourvoi de la SCI Mica doit être rejeté ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SCI Mica est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SCI Mica et à la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.
Copie en sera adressée pour information à la commune de Vigneux-sur-Seine.