CAA de NANTES, 5ème chambre, 28/02/2014, 12NT01411, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES, 5ème chambre, 28/02/2014, 12NT01411, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES - 5ème chambre
- N° 12NT01411
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
28 février 2014
- Président
- M. ISELIN
- Rapporteur
- M. Jean-Frédéric MILLET
- Avocat(s)
- COROLLER-BEQUET
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2012, présentée pour Mme C...E..., demeurant..., M. et Mme D...B..., demeurant..., par la société d'avocats Coroller-Bequet, avocats au barreau de Quimper ; Mme E... et M. et Mme B...demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0903020 en date du 30 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2009 par lequel le maire de la commune de Crozon a délivré un permis de construire à Mme F...pour la réalisation d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section RW n° 129, située au lieu-dit Kersiguénou ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Crozon la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
ils soutiennent que :
- s'agissant de la légalité externe, la décision contestée est insuffisamment motivée au regard de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme ; si l'arrêté du 15 avril 2009 est bien assorti des prescriptions émanant du service public de l'assainissement non collectif (SPANC) et de l' architecte des bâtiments de France (ABF), il ne contient aucune précision sur les circonstances de droit ou de fait qui ont fondé cette décision ; le simple fait d'avoir annexé une copie de l'avis de l'ABF ne saurait tenir lieu de motivation suffisante, compte tenu des réserves apportées ;
- l'avis du SPANC sur l'installation d'assainissement envisagée ne mentionne pas l'identité de son signataire, en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- la demande de permis de construire ne comportait pas l'ensemble des pièces prévues par les articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ; manquaient le plan en coupe des constructions à édifier, le plan des façades et des toitures et le document permettant de connaître l'impact visuel du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, ainsi que le traitement des accès ; aucune indication du dossier ne portait sur la végétation existante, les modifications envisagées ou sur le traitement des espaces libres ; le plan de masse, ne comportait ni l'indication de l'aménagement des parties non construites, ni l'indication des plantations maintenues, supprimées ou créées ; le paysage environnant, qu'il s'agisse de l'environnement bâti ou du paysage naturel, n'a pas été décrit ; l'organisation de l'accès aux places de stationnement n'a fait l'objet d'aucune explication ; le plan de masse n'est pas côté dans les trois dimensions ; aucune cote de hauteur ne renseigne réellement la hauteur de faîtage de la construction envisagée ; au surplus, en l'absence de plan de coupe de la construction à édifier, la pente du terrain naturel n'est reportée sur aucun document ; ainsi, ces omissions ne permettaient pas d'avoir une connaissance exacte des volumes envisagés et notamment des hauteurs de faîtages et des pentes des toitures ; l'aspect de la construction n'est en rien semblable à celui des constructions éparses avoisinantes ;
- s'agissant de la légalité interne, les I et II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme n'ont pas été respectés ; d'une part, en dépit de l'existence de quelques habitations situées plus au nord, le long d'une voie, le terrain d'assiette du projet, classé en zone UHb1, ne se situe pas en continuité d'une agglomération ou d'un village existant, mais dans une zone d'urbanisation diffuse, comme en atteste la photographie aérienne produite ; la projet ne s'insère pas dans une enveloppe bâtie, la densité des constructions n'étant pas significative ; il n'existe pas à Kersiguénou d'équipements publics ou privés de nature à créer une vie de village ; d'autre part, le terrain d'assiette du projet est situé dans un espace proche du village ; le tribunal ne s'est pas prononcé sur la méconnaissance du II de l'article L.146-4 ; le permis litigieux a été délivré en application d'un POS qui viole ces dispositions dès lors qu'il ne limite pas l'extension de l'urbanisation dans la zone UHb1, ni sa densification compte tenu du COS retenu de 0,50, et ne justifie pas cette extension au regard de la configuration des lieux ;
- par ailleurs, la décision du 15 avril 2009 mentionnait l'existence de prescriptions de l'ABF et du SPANC dont la nature et l'importance justifiaient le refus du permis en cause, dès lors qu'elles impliquaient des modifications substantielles au projet ; en ne refusant pas le permis litigieux, en dépit de l'ampleur des réserves émises, le maire de Crozon a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme conditionne la légalité de la délivrance d'un permis de construire à la conformité du projet de construction aux dispositions législatives et réglementaires concernant notamment son assainissement ; en accordant le permis, en dérogeant à la réglementation applicable, alors que la surface limitée du terrain n'était pas de nature à permettre la réalisation d'un assainissement non collectif présentant les garanties requises, compte tenu des activités sensibles situées à proximité, le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;
- le projet ne respecte pas les dispositions de l'article UH 12 du POS qui imposaient deux places de stationnement par logement ; celles-ci ne sont pas identifiées, ni établies ; en outre, les conditions de l'accès au parking, qui impliquent des manoeuvres, sont accidentogènes compte tenu de la haie située à proximité, de l'étroitesse du chemin d'accès ainsi que de la proximité d'un carrefour ;
- l'autorité administrative n'a pas apprécié l'impact de la construction sur le paysage environnant, auquel il est porté atteinte, en méconnaissance de l'article UH 11 du règlement du POS qui régit l'aspect extérieur des constructions ; la construction dépasse la ligne d'horizon et ne s'insère pas dans le paysage naturel du site ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 et 18 juin 2012, présentés pour MmeE..., et M. et Mme B...qui tendent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;
ils soutiennent, en outre, que :
- ils ont notifié leur recours à la commune de Crozon et à Mme F...le 15 juin 2012 en vertu de l'article R. 411-7 du code de justice administrative ; toutefois, ne figuraient pas sur le panneau d'affichage du permis de construire du 15 avril 2009 les mentions selon lesquelles il appartenait au requérant de notifier le recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ;
- l'absence, sur l'affichage, de la mention de cette condition procédurale fait obstacle à ce que soit opposée au requérant l'irrecevabilité prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; leur requête est donc recevable ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2012, présenté pour la commune de Crozon, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du 4 avril 2008, par la SELARL Le Roy, Gourvennec, Prieur, avocats au barreau de Brest, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants une somme de 2 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- les motifs des prescriptions qui étaient annexées à l'arrêté contesté résultent directement de leur contenu même ; ainsi le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté ;
- les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ne visent que les décisions et ne concernent pas les auteurs des avis que doivent recueillir les autorités administratives ayant le pouvoir de décision ;
- le dossier de demande de permis de construire comprend toutes les pièces nécessaires, notamment un plan de coupe qui représente le terrain naturel et la hauteur de la construction, les plans des quatre façades où sont représentées les toitures, une notice paysagère qui justifie le parti architectural, une simulation de l'implantation, de nombreuses photographies du terrain et de ses abords proches et lointains, qui permettent d'apprécier la végétation qui le couvre ; en outre, s'agissant du plan de masse, le dossier comporte un plan de géomètre avec un relevé altimétrique ; deux plans permettent de connaître les dimensions de la construction ; un plan de coupe coté avec une représentation du terrain naturel figure parmi les pièces ; il en résulte que tant les cotes de la construction que les volumes et les pentes des toitures sont connus avec précisions ;
- les I et II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnus ; d'une part, le terrain d'assiette du projet se situe au coeur de Kersiguénou qui comporte une cinquantaine de constructions groupées, formant un habitat typique de village ; il n'y a pas d'extension de l'urbanisation, dès lors que le périmètre bâti n'est pas étendu ; en tout état de cause le village comporte une densité significative de constructions ; d'autre part, le POS n'autorise pas une extension non limitée de l'urbanisation ; la zone UHb1 concerne précisément les villages du Cap de la chèvre dont l'intérêt architectural et paysager justifie un zonage particulier ; dans cette zone, la hauteur des bâtiments est limitée à 7 mètres ; le COS est certes de 0,50 mais la taille des parcelles ne permet pas de construire de grandes maisons ;
- l'importance des prescriptions n'imposait pas au maire de prendre un arrêté refusant le permis de construire ; les réserves de l'ABF et du SPANC ne concernent que des points précis et limités qui n'entraînaient pas la nécessité de présenter un nouveau projet ; le sens de l'avis de la DDASS du 16 octobre 2007 est déformé ; l'attention de la commune est appelée sur la nécessité de ne pas généraliser ce type d'assainissement lorsqu'il existe des usages sensibles à proximité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
- le moyen tiré de la violation de l'article UH 12 du POS doit être écarté ; le plan masse au 1/100ème représente un espace " parking " affecté à deux véhicules ; l'accès aux places de stationnement ne pose pas de difficulté particulière ; le terrain est bordé par des voies communales sur ses côtés nord et est ; la visibilité est bonne ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UH 11 doit également être écarté ; la construction est traditionnelle avec des murs en pierre, en enduit et en bois naturel ; l'ABF a d'ailleurs demandé un revêtement en pierre complémentaire pou améliorer l'insertion de la construction ; la hauteur du bâtiment est comparable à celle des constructions avoisinantes ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 décembre 2012, présenté pour Mme E...et M. et Mme B...qui tendent au mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2013, présenté pour la commune de Crozon qui conclut au rejet de la requête, par les mêmes motifs, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 18 décembre 2013, présenté pour la commune de Crozon ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 janvier 2014, présenté pour la commune de Crozon et MmeF..., demeurant au..., par Me prieur, qui concluent au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2014;
- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
- les observations de MeA..., substituant Me Prieur, avocat de la commune de Crozon ;
1. Considérant que Mme C...E..., et M. et Mme D...B...interjettent appel du jugement en date du 30 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2009 par lequel le maire de la commune de Crozon a délivré à Mme F...un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section RW n° 129 située au lieu-dit Kersiguénou ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme qu'une décision relative à une demande de permis de construire doit être motivée si, notamment, elle est assortie de prescriptions ; que, par son arrêté du 15 avril 2009, le maire de la commune de Crozon à délivré à Mme F...le permis de construire une maison d'habitation, sous réserve du respect de certaines prescriptions relatives à l'assainissement, reprises dans la décision elle-même, ou figurant dans l'avis de l'architecte des bâtiments de France (ABF) annexé à cette décision ; que les motifs de ces prescriptions résultaient directement de leur contenu même ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé doit être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; que si les requérants soutiennent que l'avis émis le 2 novembre 2007 sur le projet par le service public d'assainissement non collectif (SPANC) n'indiquait pas l'identité de son signataire, qui ne pouvait être le maire, cet avis ne revêtait pas le caractère d'une " décision " prise par cet organisme, et n'entrait, dès lors, pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...) e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ; qu'aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 431-10 dudit code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; (...) b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. (...) " ;
5. Considérant que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les articles R. 431-8 à R. 431-10 du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard desdites dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire, complétée le 25 novembre 2008, comprend, outre un plan de situation, deux plans de masse, un plan de coupe représentant l'implantation du projet par rapport au terrain naturel et sur lequel sont portées, contrairement à ce qui est soutenu, les hauteurs de la construction notamment au faîtage ainsi que les pentes de toitures et les plans des façades, ces documents permettant à l'administration de connaître les dimensions et le volume de la construction projetée ; que la notice paysagère également jointe contient des développements relatifs à l'état initial du terrain, une description du parti architectural retenu par référence aux constructions existantes dans le village de Kersiguénou et énonce les dispositions prises afin d'assurer l'insertion du projet dans l'environnement, s'agissant tant de son architecture que de son implantation ; qu'elle indique, en outre, que l'accès au terrain se fera par la partie sud, l'emplacement du parking, prévu pour deux véhicules, étant matérialisé sur le plan de masse, et que le terrain sera semé de gazon avec quelques arbustes ; que si la notice et le plan de masse ne contiennent pas d'indication sur la végétation existante et si la notice ne décrit pas le paysage environnant, plusieurs documents photographiques représentant le terrain et ses abords proches et lointains permettent de visualiser la végétation le couvrant et d'apprécier son insertion dans l'environnement ; qu'enfin, la notice mentionne que le terrain naturel présente une pente d'environ 18%, celle-ci étant matérialisée sur les plans de coupe comme sur les plans de façades, le plan de masse comportant par ailleurs un relevé altimétrique du terrain ; que, dès lors, l'ensemble de ces documents permettait à l'administration d'apprécier en toute connaissance de cause la nature du projet et sa conformité aux règles d'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de permis de construire doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement (...) / II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (....) " ;
8. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions du I de l'article L. 146-4 précité que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu'aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d'autres constructions, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe au coeur de Kersiguénou, qui se compose d'une cinquantaine de maisons d'habitation groupées desservies par des voies de circulation ; que le secteur, au sein duquel il s'intègre, est une zone déjà urbanisée, présentant une densité significative de constructions, et qui, eu égard à ses caractéristiques, constitue un village au sens du I de l'article L. 146-4 précité ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté contesté aurait été délivré en méconnaissance de ces dispositions ;
9. Considérant, d'autre part, qu'une opération de construction, dans un espace proche du rivage, ne peut être regardée comme une extension de l'urbanisation au sens des dispositions du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation d'un espace déjà urbanisé ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un tel espace, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions ; qu'ainsi, la seule réalisation dans un espace urbanisé de la construction en litige ne peut être regardée comme constituant une extension de l'urbanisation au sens de cette loi ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme doit être écarté ; que la seule circonstance que l'article UH 14 du plan d'occupation des sols fixe un coefficient maximal d'occupation des sols de 0,50 n'est pas de nature à établir qu'une densification des constructions serait autorisée en méconnaissance du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ; qu'en outre, le secteur UHB1 du plan d'occupation des sols, qui correspond aux villages typiques du Cap de la Chèvre, comporte des prescriptions particulières permettant de limiter l'extension de l'urbanisation en maintenant notamment une coupure d'urbanisation entre Kersiguénou et Kersuet ; que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité du plan d'occupation des sols en ce qu'il classe le terrain d'implantation du projet en zone UHB1 ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à leur caractère précis et limité, les prescriptions dont le permis de construire a été assorti relativement à l'architecture du projet et aux caractéristiques du système individuel d'assainissement remettraient en cause la conception générale du projet litigieux ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en ne refusant pas le permis de construire sollicité, le maire de Crozon aurait entaché sa décision d'illégalité ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à (...) l'assainissement des constructions (...) " ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'à titre dérogatoire, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) du Finistère a émis le 16 octobre 2007, eu égard à la nature du terrain, un avis favorable à la demande de Mme F...de procéder à l'évacuation des eaux usées de l'habitation par un puits d'infiltration et a prescrit leur prétraitement par une fosse septique toutes eaux de 5 000 litres et leur traitement par un filtre à zéolite ; que si la DDASS mentionne dans cet avis : " qu'il y a lieu d'attirer l'attention de la commune " sur le fait que la faible superficie du terrain " implique la mise en place d'un filtre à zéolite qui est proscrit lorsque des usages sensibles existent à proximité du rejet dans la mesure où il présente de faibles performances sur le plan microbiologique. ", elle se borne, toutefois, à indiquer que cette filière, dans ces conditions, ne doit pas être généralisée par la commune ; que, dès lors, cet avis ne permettait pas, à lui seul, de caractériser un non respect par le projet de la règlementation en matière d'assainissement susceptible de porter atteinte à la salubrité publique ; qu'il n'est pas établi que la filière d'assainissement envisagée ne présenterait pas les garanties exigées par les dispositions de l'arrêté du 6 mai 1996 fixant les prescriptions techniques applicables aux systèmes d'assainissement non collectif alors en vigueur ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les préconisations émises le 7 novembre 2007 par le SPANC relativement à la mise en place d'un système de récupération de pluie avec un trop plein diffus seraient inadaptées à la superficie de la parcelle ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme et de l'arrêté du 6 mai 1996 doit, par suite, être écarté ;
13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article UH 11 du règlement du plan d'occupation des sols relatif à l'aspect extérieur des constructions : " (...) Les projets seront notamment étudiés pour être en accord avec l'environnement naturel et bâti et devront présenter une simplicité dans les proportions des volumes et des détails d'architecture, une harmonie de couleur, une unité et une vérité dans le choix des matériaux. " ;
14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet consiste en la construction d'une maison d'habitation de type traditionnel à deux volumes sur une parcelle de 194 m² au centre du village de Kersiguénou, sur laquelle existent les ruines d'une ancienne crèche devant être démolie ; qu'il ressort de la notice paysagère que les pierres seront conservés pour l'habillage du pignon est du projet, conformément à l'avis de l'ABF ; que si l'une des façade comporte un bardage en bois, l'arrêté contesté prescrit, conformément à cet avis, la réalisation d'un soubassement de pierres permettant l'intégration de la construction dans le village existant ; qu'en outre, le volume principal du nouveau bâtiment s'implantera au sud à l'emplacement de l'ancien bâtiment avec une avancée de taille limitée et deux autres petits bâtiments perpendiculaires à la façade nord s'inspirant des volumes existants dans le village ; que, par ailleurs, il n'est pas établi par les pièces du dossier, notamment par les vues d'implantation, que le projet se distinguerait par sa hauteur des maisons avoisinantes, en raison notamment de la déclivité du terrain, ni qu'il dépasserait " largement " la ligne d'horizon ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UH 11 du règlement de POS doit être écarté, la circonstance que la construction n'aurait pas été exécutée conformément au permis de construire étant sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;
15. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article UH 12 du règlement du plan d'occupation des sols : " 1° Le stationnement des véhicules doit correspondre aux besoins des constructions, installations et leur fréquentation. Il doit être réalisé en dehors des voies publiques. Les normes exigées sont indiquées aux paragraphes suivants. A) Pour les constructions nouvelles à usage d'habitation individuelle : 2 places par logement. (...) " ; qu'il ressort de la notice jointe au dossier de permis de construire que le projet prévoit l'aménagement de deux places de stationnement dont l'emplacement est identifié sur les plans de masse par la mention " Parking : 2U " ; que si l'accès à ces places de stationnement s'effectue par le sud du terrain, à proximité d'un carrefour entre la voie communale et le chemin piétonnier qui longe la parcelle à l'est, les dires des requérants selon lesquels la localisation de cet accès serait susceptible, par les manoeuvres qu'il induit, de compromettre la sécurité des usagers ne sont pas confirmés par les pièces du dossier ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UH 12 manque en fait ; que la circonstance que Mme F...ferait parfois stationner son véhicule sur la voie communale est sans incidence sur la légalité du permis de construire litigieux ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Crozon, que Mme E...et M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Crozon qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme E...et M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E...et de M. et Mme B...une somme globale de 2 000 euros au titre des frais de même nature que la commune de Crozon a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...et de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme E...et M. et Mme B...verseront à la commune de Crozon la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E..., à M. et Mme D...B..., à Mme G... F...et à la Commune de Crozon.
Délibéré après l'audience du 7 février 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 février 2014.
Le rapporteur,
J-F. MILLET
Le président,
B. ISELIN
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'égalité des territoires et du logement en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1°) d'annuler le jugement n° 0903020 en date du 30 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2009 par lequel le maire de la commune de Crozon a délivré un permis de construire à Mme F...pour la réalisation d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section RW n° 129, située au lieu-dit Kersiguénou ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Crozon la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
ils soutiennent que :
- s'agissant de la légalité externe, la décision contestée est insuffisamment motivée au regard de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme ; si l'arrêté du 15 avril 2009 est bien assorti des prescriptions émanant du service public de l'assainissement non collectif (SPANC) et de l' architecte des bâtiments de France (ABF), il ne contient aucune précision sur les circonstances de droit ou de fait qui ont fondé cette décision ; le simple fait d'avoir annexé une copie de l'avis de l'ABF ne saurait tenir lieu de motivation suffisante, compte tenu des réserves apportées ;
- l'avis du SPANC sur l'installation d'assainissement envisagée ne mentionne pas l'identité de son signataire, en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- la demande de permis de construire ne comportait pas l'ensemble des pièces prévues par les articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ; manquaient le plan en coupe des constructions à édifier, le plan des façades et des toitures et le document permettant de connaître l'impact visuel du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, ainsi que le traitement des accès ; aucune indication du dossier ne portait sur la végétation existante, les modifications envisagées ou sur le traitement des espaces libres ; le plan de masse, ne comportait ni l'indication de l'aménagement des parties non construites, ni l'indication des plantations maintenues, supprimées ou créées ; le paysage environnant, qu'il s'agisse de l'environnement bâti ou du paysage naturel, n'a pas été décrit ; l'organisation de l'accès aux places de stationnement n'a fait l'objet d'aucune explication ; le plan de masse n'est pas côté dans les trois dimensions ; aucune cote de hauteur ne renseigne réellement la hauteur de faîtage de la construction envisagée ; au surplus, en l'absence de plan de coupe de la construction à édifier, la pente du terrain naturel n'est reportée sur aucun document ; ainsi, ces omissions ne permettaient pas d'avoir une connaissance exacte des volumes envisagés et notamment des hauteurs de faîtages et des pentes des toitures ; l'aspect de la construction n'est en rien semblable à celui des constructions éparses avoisinantes ;
- s'agissant de la légalité interne, les I et II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme n'ont pas été respectés ; d'une part, en dépit de l'existence de quelques habitations situées plus au nord, le long d'une voie, le terrain d'assiette du projet, classé en zone UHb1, ne se situe pas en continuité d'une agglomération ou d'un village existant, mais dans une zone d'urbanisation diffuse, comme en atteste la photographie aérienne produite ; la projet ne s'insère pas dans une enveloppe bâtie, la densité des constructions n'étant pas significative ; il n'existe pas à Kersiguénou d'équipements publics ou privés de nature à créer une vie de village ; d'autre part, le terrain d'assiette du projet est situé dans un espace proche du village ; le tribunal ne s'est pas prononcé sur la méconnaissance du II de l'article L.146-4 ; le permis litigieux a été délivré en application d'un POS qui viole ces dispositions dès lors qu'il ne limite pas l'extension de l'urbanisation dans la zone UHb1, ni sa densification compte tenu du COS retenu de 0,50, et ne justifie pas cette extension au regard de la configuration des lieux ;
- par ailleurs, la décision du 15 avril 2009 mentionnait l'existence de prescriptions de l'ABF et du SPANC dont la nature et l'importance justifiaient le refus du permis en cause, dès lors qu'elles impliquaient des modifications substantielles au projet ; en ne refusant pas le permis litigieux, en dépit de l'ampleur des réserves émises, le maire de Crozon a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme conditionne la légalité de la délivrance d'un permis de construire à la conformité du projet de construction aux dispositions législatives et réglementaires concernant notamment son assainissement ; en accordant le permis, en dérogeant à la réglementation applicable, alors que la surface limitée du terrain n'était pas de nature à permettre la réalisation d'un assainissement non collectif présentant les garanties requises, compte tenu des activités sensibles situées à proximité, le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;
- le projet ne respecte pas les dispositions de l'article UH 12 du POS qui imposaient deux places de stationnement par logement ; celles-ci ne sont pas identifiées, ni établies ; en outre, les conditions de l'accès au parking, qui impliquent des manoeuvres, sont accidentogènes compte tenu de la haie située à proximité, de l'étroitesse du chemin d'accès ainsi que de la proximité d'un carrefour ;
- l'autorité administrative n'a pas apprécié l'impact de la construction sur le paysage environnant, auquel il est porté atteinte, en méconnaissance de l'article UH 11 du règlement du POS qui régit l'aspect extérieur des constructions ; la construction dépasse la ligne d'horizon et ne s'insère pas dans le paysage naturel du site ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires complémentaires, enregistrés les 15 et 18 juin 2012, présentés pour MmeE..., et M. et Mme B...qui tendent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;
ils soutiennent, en outre, que :
- ils ont notifié leur recours à la commune de Crozon et à Mme F...le 15 juin 2012 en vertu de l'article R. 411-7 du code de justice administrative ; toutefois, ne figuraient pas sur le panneau d'affichage du permis de construire du 15 avril 2009 les mentions selon lesquelles il appartenait au requérant de notifier le recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ;
- l'absence, sur l'affichage, de la mention de cette condition procédurale fait obstacle à ce que soit opposée au requérant l'irrecevabilité prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; leur requête est donc recevable ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 septembre 2012, présenté pour la commune de Crozon, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du 4 avril 2008, par la SELARL Le Roy, Gourvennec, Prieur, avocats au barreau de Brest, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants une somme de 2 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- les motifs des prescriptions qui étaient annexées à l'arrêté contesté résultent directement de leur contenu même ; ainsi le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté ;
- les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ne visent que les décisions et ne concernent pas les auteurs des avis que doivent recueillir les autorités administratives ayant le pouvoir de décision ;
- le dossier de demande de permis de construire comprend toutes les pièces nécessaires, notamment un plan de coupe qui représente le terrain naturel et la hauteur de la construction, les plans des quatre façades où sont représentées les toitures, une notice paysagère qui justifie le parti architectural, une simulation de l'implantation, de nombreuses photographies du terrain et de ses abords proches et lointains, qui permettent d'apprécier la végétation qui le couvre ; en outre, s'agissant du plan de masse, le dossier comporte un plan de géomètre avec un relevé altimétrique ; deux plans permettent de connaître les dimensions de la construction ; un plan de coupe coté avec une représentation du terrain naturel figure parmi les pièces ; il en résulte que tant les cotes de la construction que les volumes et les pentes des toitures sont connus avec précisions ;
- les I et II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnus ; d'une part, le terrain d'assiette du projet se situe au coeur de Kersiguénou qui comporte une cinquantaine de constructions groupées, formant un habitat typique de village ; il n'y a pas d'extension de l'urbanisation, dès lors que le périmètre bâti n'est pas étendu ; en tout état de cause le village comporte une densité significative de constructions ; d'autre part, le POS n'autorise pas une extension non limitée de l'urbanisation ; la zone UHb1 concerne précisément les villages du Cap de la chèvre dont l'intérêt architectural et paysager justifie un zonage particulier ; dans cette zone, la hauteur des bâtiments est limitée à 7 mètres ; le COS est certes de 0,50 mais la taille des parcelles ne permet pas de construire de grandes maisons ;
- l'importance des prescriptions n'imposait pas au maire de prendre un arrêté refusant le permis de construire ; les réserves de l'ABF et du SPANC ne concernent que des points précis et limités qui n'entraînaient pas la nécessité de présenter un nouveau projet ; le sens de l'avis de la DDASS du 16 octobre 2007 est déformé ; l'attention de la commune est appelée sur la nécessité de ne pas généraliser ce type d'assainissement lorsqu'il existe des usages sensibles à proximité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
- le moyen tiré de la violation de l'article UH 12 du POS doit être écarté ; le plan masse au 1/100ème représente un espace " parking " affecté à deux véhicules ; l'accès aux places de stationnement ne pose pas de difficulté particulière ; le terrain est bordé par des voies communales sur ses côtés nord et est ; la visibilité est bonne ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UH 11 doit également être écarté ; la construction est traditionnelle avec des murs en pierre, en enduit et en bois naturel ; l'ABF a d'ailleurs demandé un revêtement en pierre complémentaire pou améliorer l'insertion de la construction ; la hauteur du bâtiment est comparable à celle des constructions avoisinantes ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 décembre 2012, présenté pour Mme E...et M. et Mme B...qui tendent au mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2013, présenté pour la commune de Crozon qui conclut au rejet de la requête, par les mêmes motifs, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 18 décembre 2013, présenté pour la commune de Crozon ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 janvier 2014, présenté pour la commune de Crozon et MmeF..., demeurant au..., par Me prieur, qui concluent au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2014;
- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;
- les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;
- les observations de MeA..., substituant Me Prieur, avocat de la commune de Crozon ;
1. Considérant que Mme C...E..., et M. et Mme D...B...interjettent appel du jugement en date du 30 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 avril 2009 par lequel le maire de la commune de Crozon a délivré à Mme F...un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section RW n° 129 située au lieu-dit Kersiguénou ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme qu'une décision relative à une demande de permis de construire doit être motivée si, notamment, elle est assortie de prescriptions ; que, par son arrêté du 15 avril 2009, le maire de la commune de Crozon à délivré à Mme F...le permis de construire une maison d'habitation, sous réserve du respect de certaines prescriptions relatives à l'assainissement, reprises dans la décision elle-même, ou figurant dans l'avis de l'architecte des bâtiments de France (ABF) annexé à cette décision ; que les motifs de ces prescriptions résultaient directement de leur contenu même ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé doit être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; que si les requérants soutiennent que l'avis émis le 2 novembre 2007 sur le projet par le service public d'assainissement non collectif (SPANC) n'indiquait pas l'identité de son signataire, qui ne pouvait être le maire, cet avis ne revêtait pas le caractère d'une " décision " prise par cet organisme, et n'entrait, dès lors, pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...) e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ; qu'aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 431-10 dudit code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; (...) b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. (...) " ;
5. Considérant que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les articles R. 431-8 à R. 431-10 du code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard desdites dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire, complétée le 25 novembre 2008, comprend, outre un plan de situation, deux plans de masse, un plan de coupe représentant l'implantation du projet par rapport au terrain naturel et sur lequel sont portées, contrairement à ce qui est soutenu, les hauteurs de la construction notamment au faîtage ainsi que les pentes de toitures et les plans des façades, ces documents permettant à l'administration de connaître les dimensions et le volume de la construction projetée ; que la notice paysagère également jointe contient des développements relatifs à l'état initial du terrain, une description du parti architectural retenu par référence aux constructions existantes dans le village de Kersiguénou et énonce les dispositions prises afin d'assurer l'insertion du projet dans l'environnement, s'agissant tant de son architecture que de son implantation ; qu'elle indique, en outre, que l'accès au terrain se fera par la partie sud, l'emplacement du parking, prévu pour deux véhicules, étant matérialisé sur le plan de masse, et que le terrain sera semé de gazon avec quelques arbustes ; que si la notice et le plan de masse ne contiennent pas d'indication sur la végétation existante et si la notice ne décrit pas le paysage environnant, plusieurs documents photographiques représentant le terrain et ses abords proches et lointains permettent de visualiser la végétation le couvrant et d'apprécier son insertion dans l'environnement ; qu'enfin, la notice mentionne que le terrain naturel présente une pente d'environ 18%, celle-ci étant matérialisée sur les plans de coupe comme sur les plans de façades, le plan de masse comportant par ailleurs un relevé altimétrique du terrain ; que, dès lors, l'ensemble de ces documents permettait à l'administration d'apprécier en toute connaissance de cause la nature du projet et sa conformité aux règles d'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de permis de construire doit être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement (...) / II - L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (....) " ;
8. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions du I de l'article L. 146-4 précité que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu'aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité avec d'autres constructions, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe au coeur de Kersiguénou, qui se compose d'une cinquantaine de maisons d'habitation groupées desservies par des voies de circulation ; que le secteur, au sein duquel il s'intègre, est une zone déjà urbanisée, présentant une densité significative de constructions, et qui, eu égard à ses caractéristiques, constitue un village au sens du I de l'article L. 146-4 précité ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté contesté aurait été délivré en méconnaissance de ces dispositions ;
9. Considérant, d'autre part, qu'une opération de construction, dans un espace proche du rivage, ne peut être regardée comme une extension de l'urbanisation au sens des dispositions du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation d'un espace déjà urbanisé ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un tel espace, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions ; qu'ainsi, la seule réalisation dans un espace urbanisé de la construction en litige ne peut être regardée comme constituant une extension de l'urbanisation au sens de cette loi ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme doit être écarté ; que la seule circonstance que l'article UH 14 du plan d'occupation des sols fixe un coefficient maximal d'occupation des sols de 0,50 n'est pas de nature à établir qu'une densification des constructions serait autorisée en méconnaissance du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ; qu'en outre, le secteur UHB1 du plan d'occupation des sols, qui correspond aux villages typiques du Cap de la Chèvre, comporte des prescriptions particulières permettant de limiter l'extension de l'urbanisation en maintenant notamment une coupure d'urbanisation entre Kersiguénou et Kersuet ; que les requérants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité du plan d'occupation des sols en ce qu'il classe le terrain d'implantation du projet en zone UHB1 ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à leur caractère précis et limité, les prescriptions dont le permis de construire a été assorti relativement à l'architecture du projet et aux caractéristiques du système individuel d'assainissement remettraient en cause la conception générale du projet litigieux ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en ne refusant pas le permis de construire sollicité, le maire de Crozon aurait entaché sa décision d'illégalité ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à (...) l'assainissement des constructions (...) " ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'à titre dérogatoire, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) du Finistère a émis le 16 octobre 2007, eu égard à la nature du terrain, un avis favorable à la demande de Mme F...de procéder à l'évacuation des eaux usées de l'habitation par un puits d'infiltration et a prescrit leur prétraitement par une fosse septique toutes eaux de 5 000 litres et leur traitement par un filtre à zéolite ; que si la DDASS mentionne dans cet avis : " qu'il y a lieu d'attirer l'attention de la commune " sur le fait que la faible superficie du terrain " implique la mise en place d'un filtre à zéolite qui est proscrit lorsque des usages sensibles existent à proximité du rejet dans la mesure où il présente de faibles performances sur le plan microbiologique. ", elle se borne, toutefois, à indiquer que cette filière, dans ces conditions, ne doit pas être généralisée par la commune ; que, dès lors, cet avis ne permettait pas, à lui seul, de caractériser un non respect par le projet de la règlementation en matière d'assainissement susceptible de porter atteinte à la salubrité publique ; qu'il n'est pas établi que la filière d'assainissement envisagée ne présenterait pas les garanties exigées par les dispositions de l'arrêté du 6 mai 1996 fixant les prescriptions techniques applicables aux systèmes d'assainissement non collectif alors en vigueur ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que les préconisations émises le 7 novembre 2007 par le SPANC relativement à la mise en place d'un système de récupération de pluie avec un trop plein diffus seraient inadaptées à la superficie de la parcelle ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme et de l'arrêté du 6 mai 1996 doit, par suite, être écarté ;
13. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article UH 11 du règlement du plan d'occupation des sols relatif à l'aspect extérieur des constructions : " (...) Les projets seront notamment étudiés pour être en accord avec l'environnement naturel et bâti et devront présenter une simplicité dans les proportions des volumes et des détails d'architecture, une harmonie de couleur, une unité et une vérité dans le choix des matériaux. " ;
14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet consiste en la construction d'une maison d'habitation de type traditionnel à deux volumes sur une parcelle de 194 m² au centre du village de Kersiguénou, sur laquelle existent les ruines d'une ancienne crèche devant être démolie ; qu'il ressort de la notice paysagère que les pierres seront conservés pour l'habillage du pignon est du projet, conformément à l'avis de l'ABF ; que si l'une des façade comporte un bardage en bois, l'arrêté contesté prescrit, conformément à cet avis, la réalisation d'un soubassement de pierres permettant l'intégration de la construction dans le village existant ; qu'en outre, le volume principal du nouveau bâtiment s'implantera au sud à l'emplacement de l'ancien bâtiment avec une avancée de taille limitée et deux autres petits bâtiments perpendiculaires à la façade nord s'inspirant des volumes existants dans le village ; que, par ailleurs, il n'est pas établi par les pièces du dossier, notamment par les vues d'implantation, que le projet se distinguerait par sa hauteur des maisons avoisinantes, en raison notamment de la déclivité du terrain, ni qu'il dépasserait " largement " la ligne d'horizon ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UH 11 du règlement de POS doit être écarté, la circonstance que la construction n'aurait pas été exécutée conformément au permis de construire étant sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;
15. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article UH 12 du règlement du plan d'occupation des sols : " 1° Le stationnement des véhicules doit correspondre aux besoins des constructions, installations et leur fréquentation. Il doit être réalisé en dehors des voies publiques. Les normes exigées sont indiquées aux paragraphes suivants. A) Pour les constructions nouvelles à usage d'habitation individuelle : 2 places par logement. (...) " ; qu'il ressort de la notice jointe au dossier de permis de construire que le projet prévoit l'aménagement de deux places de stationnement dont l'emplacement est identifié sur les plans de masse par la mention " Parking : 2U " ; que si l'accès à ces places de stationnement s'effectue par le sud du terrain, à proximité d'un carrefour entre la voie communale et le chemin piétonnier qui longe la parcelle à l'est, les dires des requérants selon lesquels la localisation de cet accès serait susceptible, par les manoeuvres qu'il induit, de compromettre la sécurité des usagers ne sont pas confirmés par les pièces du dossier ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UH 12 manque en fait ; que la circonstance que Mme F...ferait parfois stationner son véhicule sur la voie communale est sans incidence sur la légalité du permis de construire litigieux ;
16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Crozon, que Mme E...et M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Crozon qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme E...et M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E...et de M. et Mme B...une somme globale de 2 000 euros au titre des frais de même nature que la commune de Crozon a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...et de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme E...et M. et Mme B...verseront à la commune de Crozon la somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E..., à M. et Mme D...B..., à Mme G... F...et à la Commune de Crozon.
Délibéré après l'audience du 7 février 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Iselin, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. Durup de Baleine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 février 2014.
Le rapporteur,
J-F. MILLET
Le président,
B. ISELIN
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'égalité des territoires et du logement en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.