Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 06/02/2013, 363532
Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 06/02/2013, 363532
Conseil d'État - 5ème et 4ème sous-sections réunies
- N° 363532
- ECLI:FR:CESSR:2013:363532.20130206
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
06 février 2013
- Rapporteur
- Mme Leïla Derouich
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le jugement n° 1001341 du 17 octobre 2012, enregistré le 24 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel le tribunal administratif de Poitiers, avant de statuer sur la demande de M. A...B...tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2010 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a ordonné la fermeture du bar "Le Seven" à La Rochelle pour une durée de soixante jours, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) Lorsque le préfet prononce une fermeture d'un débit de boissons sur le fondement du 1 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, prononce-t-il une sanction présentant le caractère d'une punition '
2°) En cas de réponse positive, cette sanction doit-elle être regardée comme une sanction professionnelle dont il appartient au juge administratif de connaître par la voie du recours pour excès de pouvoir et, dans ce cas, dans le cadre de quel contrôle, ou comme une sanction en raison de la méconnaissance d'une réglementation générale laquelle fait l'objet d'un recours de plein contentieux '
3°) Les dispositions du 1 et du 2 ou 3 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique peuvent-elles fonder conjointement une même fermeture d'un débit de boissons présentant simultanément le caractère d'une sanction et d'une mesure de police '
4°) Dans cette hypothèse, en cas de réponse en faveur d'un recours de plein contentieux à la deuxième question, le régime de plein contentieux doit-il être appliqué pour connaître de la décision attaquée dans son ensemble '
5°) Le juge de plein contentieux examine-t-il chaque motif au regard des dispositions pertinentes du 1 et du 2 ou 3 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique et peut-il, dans le cas où les motifs tirés d'infractions aux lois et règlements régissant les établissements de débit de boissons apparaissent non fondés, prononcer, après avoir neutralisé ces motifs, le cas échéant en modulant la durée, une mesure de fermeture fondée sur la prévention des troubles à l'ordre public '
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Leïla Derouich, Auditeur,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
REND L'AVIS SUIVANT
1. Aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi du 31 mars 2006 : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements (...) / 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois (...) / 3. Lorsque la fermeture est motivée par des actes criminels ou délictueux prévus par les dispositions pénales en vigueur, à l'exception des infractions visées au 1, la fermeture peut être prononcée pour six mois. Dans ce cas, la fermeture entraîne l'annulation du permis d'exploitation visé à l'article L. 3332-1. / 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation (...) ".
2. Les mesures de fermeture de débits de boissons ordonnées par le préfet sur le fondement de ces dispositions ont toujours pour objet de prévenir la continuation ou le retour de désordres liés au fonctionnement de l'établissement, indépendamment de toute responsabilité de l'exploitant. Qu'elles soient fondées sur les dispositions du 1, du 2 ou du 3 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, de telles mesures doivent être regardées non comme des sanctions présentant le caractère de punitions mais comme des mesures de police. Par suite, c'est toujours comme juge de l'excès de pouvoir et non comme juge de plein contentieux que le juge se prononce sur les demandes tendant à leur annulation.
3. Compte tenu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de répondre aux autres questions posées par le tribunal administratif.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Poitiers, à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.