COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 5ème chambre - formation à 3, 28/06/2012, 11LY01874, Inédit au recueil Lebon
COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 5ème chambre - formation à 3, 28/06/2012, 11LY01874, Inédit au recueil Lebon
COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON - 5ème chambre - formation à 3
- N° 11LY01874
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
28 juin 2012
- Président
- M. DUCHON-DORIS
- Rapporteur
- M. Jean Christophe DUCHON-DORIS
- Avocat(s)
- GIBERT
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours, enregistré par télécopie le 16 août 2007 au greffe de la Cour, et régularisé par courrier le 20 août 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0500887 du 27 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé, en droits et pénalités, M. et Mme Christophe A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'année 1998, et mis une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rétablir les impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge ;
Il soutient que l'absence de taxation de la plus-value de 5 462 737 francs, réalisée par M. Christophe A lors de l'apport à la SARL Sofarfi de 627 actions de la SA Les Entreprises Christophe A, résulte du recours à un montage exclusivement destiné à éluder la charge fiscale qu'il aurait dû supporter ; que le report d'imposition d'une plus-value agit nécessairement sur la réalisation ou le transfert de bénéfices ou de revenus au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que les premiers juges ont considéré à tort que M. A avait apporté une caution morale et financière aux consorts Chaume en maintenant temporairement une participation au capital de la SA Gama ; que l'administration n'a pas entendu contester le caractère réel de l'activité de la SARL Sofarfi mais qu'elle a démontré que son interposition entre la SARL Les Entreprises Christophe A et la SA Gama a eu pour seul objectif de permettre à M. A de bénéficier d'un report d'imposition, cette société ayant ensuite eu une activité purement patrimoniale ; que la charge de la preuve incombe au contribuable ; que l'administration entend invoquer à titre subsidiaire la fraude à la loi et les pénalités pour manoeuvres frauduleuses prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que l'Etat ne pouvait pas être condamné au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que seule la partie perdante peut être condamnée à ce titre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 3 février 2009 fixant la clôture d'instruction au 27 mars 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 septembre 2009, présenté pour M. A ;
Vu l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon, n° 07LY01879, en date du 13 octobre 2009 ;
Vu l'arrêt du Conseil d'Etat, n° 334543, en date du 8 juillet 2011 annulant l'arrêt précité en date du 13 octobre 2009 et renvoyant l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon ;
Vu, enregistré le 2 février 2012, le mémoire présenté pour M. A par Me Gibert, concluant au rejet du recours, confirmant ses précédentes écritures ;
Vu, enregistré le 1er mars 2012, le nouveau mémoire présenté par le ministre confirmant ses précédentes écritures, et précisant qu'à défaut de reconnaissance de la réalisation d'un abus de droit, il entend, à titre subsidiaire, soutenir que les faits constituent en tout état de cause une fraude à la loi et que la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvre frauduleuse est applicable ; qu'il y a lieu, en toute hypothèse, de faire application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi ;
Vu, enregistré le 28 mars 2012, le nouveau mémoire présenté pour M. A, confirmant ses précédentes écritures et faisant, en outre, valoir qu'en 1999, la société holding a consenti un prêt participatif de 228 673,53 euros sur une durée de trois ans pour consolider son investissement dans la société Gama ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2012, présenté pour M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :
- le rapport de M. Duchon-Doris, président ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. A était le gérant et l'unique associé de la SARL Les Entreprises Christophe A qui détenait 2 494 des 2 500 actions de la SA Etablissements Jean Vidal ; que, le 5 janvier 1998, la SARL Les Entreprises Christophe A s'est transformée en société anonyme et a procédé à une augmentation de capital à la suite de laquelle M. A ne possédait plus que 627 des 800 actions de la SA Les Entreprises Christophe A (ECF) ; que, le 24 mars 1998, M. A a apporté ces 627 actions à la SARL Sofarfi qu'il a créée le même jour et dont il était le gérant et l'unique associé, laquelle les a revendues à la SA Gama dont elle a acquis 3 000 des 10 000 actions ; que, le 30 septembre 1999, la SA Gama a acheté les 3 000 actions que la SARL Sofarfi détenait dans son capital, qui a été réduit en conséquence, avant de procéder, au cours de l'année 2000, à une fusion absorption avec la SA ECF dont elle détenait la totalité du capital ; que le contrôle de la SA Etablissements Jean Vidal est ainsi passé de la SARL Les Entreprises Christophe A à la SA Gama sans que ne soit imposée la plus-value de 5 462 737 francs réalisée par M. A lors de l'apport à la SARL Sofarfi des 627 actions qu'il détenait dans le capital de la SA ECF, l'intéressé ayant placé cette plus-value sous le régime du report d'imposition prévu aux articles 160 et 92 B du code général des impôts ; que l'administration fiscale a, dans le cadre d'un contrôle sur pièces concernant M. et Mme A, mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales conformément à l'avis émis le 15 mars 2004 par le comité consultatif pour la répression des abus de droit ; que M. et Mme A ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 1998 à la suite de la remise en cause du report d'imposition dont avait bénéficié la plus-value mentionnée ci-dessus ; que, par les articles 1er et 2 du jugement n° 0500887 du 27 mars 2007, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé la décharge de ces impositions et mis une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, sur pourvoi en cassation présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 13 octobre 2009 par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 27 mars 2007 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et, d'autre part, au rétablissement des impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge ;
Sur le recours à la procédure prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du 4 du I ter de l'article 160 du code général des impôts, applicable aux impositions en litige : " L'imposition de la plus-value réalisée à compter du 1er janvier 1991 en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B " ; qu'aux termes du II de l'article 92 B du même code, alors en vigueur : " 1. A compter du 1er janvier 1992 ou du 1er janvier 1991 pour les apports de titres à une société passible de l'impôt sur les sociétés, l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres résultant d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, peut être reportée au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des titres reçus lors de l'échange. (...) " ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...) L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;
Considérant que le placement en report d'imposition d'une plus-value réalisée par un contribuable lors de l'apport de titres à une société qu'il contrôle et qui a été suivi de leur cession par cette société est constitutif d'un abus de droit s'il s'agit d'un montage ayant pour seule finalité de permettre au contribuable, en interposant une société, de disposer effectivement des liquidités obtenues lors de la cession de ces titres, tout en restant détenteur des titres de la société reçus en échange lors de l'apport ; qu'il n'a en revanche pas ce caractère s'il ressort de l'ensemble de l'opération que cette société a, conformément à son objet, effectivement réinvesti le produit de ces cessions dans une activité économique ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que, le 24 mars 1998, M. A a apporté 627 actions de la SA Les Entreprises Christophe A à la SARL Sofarfi qu'il a créée le même jour et dont il était le gérant et l'unique associé, laquelle les a revendues à la SA Gama dont elle a acquis 3 000 des 10 000 actions ; que, le 30 septembre 1999, la SA Gama a acheté les 3 000 actions que la SARL Sofarfi détenait dans son capital, qui a été réduit en conséquence, avant de procéder, au cours de l'année 2000, à une fusion absorption avec la SA ECF dont elle détenait la totalité du capital ; que le contrôle de la SA Etablissements Jean Vidal est ainsi passé de la SARL Les Entreprises Christophe A à la SA Gama sans que ne soit imposée la plus-value de 5 462 737 francs réalisée par M. A lors de l'apport à la SARL Sofarfi des 627 actions qu'il détenait dans le capital de la SA ECF, l'intéressé ayant placé cette plus-value sous le régime du report d'imposition prévu aux articles 160 et 92 B du code général des impôts ; que l'administration a remis en cause, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, comme procédant d'un abus de droit, le report de l'imposition de cette plus-value ;
Considérant que, saisi du litige par les requérants, le comité consultatif pour la répression des abus de droit a émis dans sa séance du 15 mars 2004 un avis favorable à la position de l'administration, en estimant qu'au vu des conditions de réemploi des sommes dégagées à l'occasion de l'apport des parts à la société Sofarfi, l'opération n'avait eu d'autre but que de permettre à M. A de bénéficier abusivement du mécanisme de report d'imposition ; que par suite, en application du dernier alinéa de l'article L. 64 précité du livre des procédures fiscales, les requérants supportent la charge de la preuve que cette opération ne poursuivait pas un but exclusivement fiscal et notamment que la société Sofarfi a, conformément à son objet, effectivement réinvesti le produit des cessions dans une activité économique ;
Considérant que M. et Mme A soutiennent que, dans les trente-six mois qui ont suivi la cession, une somme globale de 3 943 131 francs, soit près de 72 % du produit de la vente des actions, a été réinvestie dans le projet professionnel de mise en place d'un groupe de sociétés ; que, même à supposer, comme le soutient l'administration en s'appuyant sur les constatations opérées sur ce point par le comité consultatif pour la répression des abus de droit, que le produit de la cession n'a été effectivement réinvesti dans des actifs professionnels qu'à hauteur de 1 670 000 francs, de mars 1998 à avril 2000, soit seulement à hauteur de 31 % deux ans et un mois après la cession, il résulte de l'instruction que les investissements dont s'agit, consistant en des prises de participation dans plusieurs entreprises du secteur textile, à hauteur, en mars 1998, de 100 % du capital de la SARL Clara Diffusion et de 30 % du capital de la SA Gama, en janvier 1999 de 52 % du capital de la SA Barange, en octobre 1999, de 52 % du capital de la SARL Convex, en décembre 1999, de 60 % du capital de la SARL CTL Nathan et, en avril 2000, de 50 % du capital de la TVESE SA et qui se sont, pour certaines d'entre elles, renforcées dans les années suivantes permettant ainsi la constitution d'un groupe industriel dans le secteur du textile et de l'habillement, représentent un réemploi significatif du produit de la cession dans une activité économique ; qu'au surplus, la société fait valoir, dans son mémoire en date du 28 mars 2012, qu'en 1999, la société holding a consenti un prêt participatif de 1 500 000 francs à la SA Gama, contractuellement bloqué trois ans, pour consolider son investissement dans cette société, prêt qui, s'il était pris en compte, porterait le réinvestissement total, sur une période de deux ans, à 58 % du montant de la cession ; que, dans ces conditions, M. et Mme A doivent être regardés comme établissant que la société Sofarfi a effectivement réinvesti une part significative du produit de la cession dans une activité économique et qu'en conséquence l'opération litigieuse ne poursuivait pas un but exclusivement fiscal ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à demander, sur le fondement de l'abus de droit, le rétablissement à la charge de M. et Mme A des cotisations supplémentaires dont la décharge a été prononcée ni l'application à leur encontre de la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;
Sur la substitution de base légale demandée par le ministre :
Considérant que l'administration est en droit d'invoquer à tout moment de la procédure, même pour la première fois en appel, tous moyens nouveaux à la condition que la substitution de base légale demandée au juge ne prive le contribuable d'aucune garantie de procédure ; que le ministre demande, à titre subsidiaire, le maintien des impositions en litige sur le fondement de la fraude à la loi ;
Considérant que si un acte de droit privé opposable aux tiers est, en principe, opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration à ne pas tenir compte d'actes de droit privé opposables aux tiers ; que ce principe s'applique également en matière fiscale, dès lors que le litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions particulières de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, qui, lorsqu'elles sont applicables, font obligation à l'administration fiscale de suivre la procédure qu'elles prévoient ; qu'ainsi, hors du champ de ces dispositions, l'administration fiscale, qui peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, peut également se fonder sur l'existence d'une fraude à la loi pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
Considérant que l'administration fait valoir que les faits en litige constituent, en tout état de cause, une fraude à la loi compte tenu de la recherche, par M. A, d'une application littérale des dispositions de l'article 160-I ter 4 du code général des impôts à l'encontre des objectifs du report d'imposition de la plus-value d'apport qui y est prévu ; que, toutefois, d'une part, ainsi que l'avait relevé la Cour dans son précédent arrêt, la création de la SARL Sofarfi a permis un transfert progressif du contrôle de la SA Ets Jean Vidal, M. A ayant conservé une participation indirecte dans l'entreprise à travers la participation de 30 % que détenait la SARL Sofarfi au capital de la SA Gama jusqu'en septembre 1999, tout en lui permettant de poursuivre à travers une nouvelle SARL l'activité de holding initialement exercée par la SARL Les entreprises Christophe A, d'autre part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. et Mme A doivent être regardés comme établissant que la société Sofarfi a effectivement réinvesti une part significative du produit de la cession dans une activité économique et qu'en conséquence le bénéfice du report d'imposition n'a pas été recherché à l'encontre de l'objectif poursuivi par l'auteur du texte ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est par suite pas fondé à invoquer une fraude à la loi pour réclamer le maintien des droits en litige ;
Considérant, pour les mêmes raisons et en conséquence, que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ne peut davantage demander, à titre subsidiaire, l'application de la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvre frauduleuse, ni la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé la décharge des impositions et pénalités en litige ;
Sur la demande tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. et Mme A une somme de 1 500 euros par application des dispositions précitées ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. et Mme Christophe A une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES et à M. et Mme Christophe A.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2012 à laquelle siégeaient :
M. Duchon-Doris, président de chambre,
M. Montsec, président-assesseur,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2012.
''
''
''
''
1
2
N° 11LY01874
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0500887 du 27 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé, en droits et pénalités, M. et Mme Christophe A des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'année 1998, et mis une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rétablir les impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge ;
Il soutient que l'absence de taxation de la plus-value de 5 462 737 francs, réalisée par M. Christophe A lors de l'apport à la SARL Sofarfi de 627 actions de la SA Les Entreprises Christophe A, résulte du recours à un montage exclusivement destiné à éluder la charge fiscale qu'il aurait dû supporter ; que le report d'imposition d'une plus-value agit nécessairement sur la réalisation ou le transfert de bénéfices ou de revenus au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que les premiers juges ont considéré à tort que M. A avait apporté une caution morale et financière aux consorts Chaume en maintenant temporairement une participation au capital de la SA Gama ; que l'administration n'a pas entendu contester le caractère réel de l'activité de la SARL Sofarfi mais qu'elle a démontré que son interposition entre la SARL Les Entreprises Christophe A et la SA Gama a eu pour seul objectif de permettre à M. A de bénéficier d'un report d'imposition, cette société ayant ensuite eu une activité purement patrimoniale ; que la charge de la preuve incombe au contribuable ; que l'administration entend invoquer à titre subsidiaire la fraude à la loi et les pénalités pour manoeuvres frauduleuses prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que l'Etat ne pouvait pas être condamné au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dès lors que seule la partie perdante peut être condamnée à ce titre ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 3 février 2009 fixant la clôture d'instruction au 27 mars 2009, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 septembre 2009, présenté pour M. A ;
Vu l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon, n° 07LY01879, en date du 13 octobre 2009 ;
Vu l'arrêt du Conseil d'Etat, n° 334543, en date du 8 juillet 2011 annulant l'arrêt précité en date du 13 octobre 2009 et renvoyant l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon ;
Vu, enregistré le 2 février 2012, le mémoire présenté pour M. A par Me Gibert, concluant au rejet du recours, confirmant ses précédentes écritures ;
Vu, enregistré le 1er mars 2012, le nouveau mémoire présenté par le ministre confirmant ses précédentes écritures, et précisant qu'à défaut de reconnaissance de la réalisation d'un abus de droit, il entend, à titre subsidiaire, soutenir que les faits constituent en tout état de cause une fraude à la loi et que la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvre frauduleuse est applicable ; qu'il y a lieu, en toute hypothèse, de faire application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi ;
Vu, enregistré le 28 mars 2012, le nouveau mémoire présenté pour M. A, confirmant ses précédentes écritures et faisant, en outre, valoir qu'en 1999, la société holding a consenti un prêt participatif de 228 673,53 euros sur une durée de trois ans pour consolider son investissement dans la société Gama ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 juin 2012, présenté pour M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juin 2012 :
- le rapport de M. Duchon-Doris, président ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. A était le gérant et l'unique associé de la SARL Les Entreprises Christophe A qui détenait 2 494 des 2 500 actions de la SA Etablissements Jean Vidal ; que, le 5 janvier 1998, la SARL Les Entreprises Christophe A s'est transformée en société anonyme et a procédé à une augmentation de capital à la suite de laquelle M. A ne possédait plus que 627 des 800 actions de la SA Les Entreprises Christophe A (ECF) ; que, le 24 mars 1998, M. A a apporté ces 627 actions à la SARL Sofarfi qu'il a créée le même jour et dont il était le gérant et l'unique associé, laquelle les a revendues à la SA Gama dont elle a acquis 3 000 des 10 000 actions ; que, le 30 septembre 1999, la SA Gama a acheté les 3 000 actions que la SARL Sofarfi détenait dans son capital, qui a été réduit en conséquence, avant de procéder, au cours de l'année 2000, à une fusion absorption avec la SA ECF dont elle détenait la totalité du capital ; que le contrôle de la SA Etablissements Jean Vidal est ainsi passé de la SARL Les Entreprises Christophe A à la SA Gama sans que ne soit imposée la plus-value de 5 462 737 francs réalisée par M. A lors de l'apport à la SARL Sofarfi des 627 actions qu'il détenait dans le capital de la SA ECF, l'intéressé ayant placé cette plus-value sous le régime du report d'imposition prévu aux articles 160 et 92 B du code général des impôts ; que l'administration fiscale a, dans le cadre d'un contrôle sur pièces concernant M. et Mme A, mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales conformément à l'avis émis le 15 mars 2004 par le comité consultatif pour la répression des abus de droit ; que M. et Mme A ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 1998 à la suite de la remise en cause du report d'imposition dont avait bénéficié la plus-value mentionnée ci-dessus ; que, par les articles 1er et 2 du jugement n° 0500887 du 27 mars 2007, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé la décharge de ces impositions et mis une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, sur pourvoi en cassation présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 13 octobre 2009 par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 27 mars 2007 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et, d'autre part, au rétablissement des impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge ;
Sur le recours à la procédure prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du 4 du I ter de l'article 160 du code général des impôts, applicable aux impositions en litige : " L'imposition de la plus-value réalisée à compter du 1er janvier 1991 en cas d'échange de droits sociaux résultant d'une opération de fusion, scission ou d'apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés peut être reportée dans les conditions prévues au II de l'article 92 B " ; qu'aux termes du II de l'article 92 B du même code, alors en vigueur : " 1. A compter du 1er janvier 1992 ou du 1er janvier 1991 pour les apports de titres à une société passible de l'impôt sur les sociétés, l'imposition de la plus-value réalisée en cas d'échange de titres résultant d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés, peut être reportée au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des titres reçus lors de l'échange. (...) " ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b) (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...) L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ;
Considérant que le placement en report d'imposition d'une plus-value réalisée par un contribuable lors de l'apport de titres à une société qu'il contrôle et qui a été suivi de leur cession par cette société est constitutif d'un abus de droit s'il s'agit d'un montage ayant pour seule finalité de permettre au contribuable, en interposant une société, de disposer effectivement des liquidités obtenues lors de la cession de ces titres, tout en restant détenteur des titres de la société reçus en échange lors de l'apport ; qu'il n'a en revanche pas ce caractère s'il ressort de l'ensemble de l'opération que cette société a, conformément à son objet, effectivement réinvesti le produit de ces cessions dans une activité économique ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que, le 24 mars 1998, M. A a apporté 627 actions de la SA Les Entreprises Christophe A à la SARL Sofarfi qu'il a créée le même jour et dont il était le gérant et l'unique associé, laquelle les a revendues à la SA Gama dont elle a acquis 3 000 des 10 000 actions ; que, le 30 septembre 1999, la SA Gama a acheté les 3 000 actions que la SARL Sofarfi détenait dans son capital, qui a été réduit en conséquence, avant de procéder, au cours de l'année 2000, à une fusion absorption avec la SA ECF dont elle détenait la totalité du capital ; que le contrôle de la SA Etablissements Jean Vidal est ainsi passé de la SARL Les Entreprises Christophe A à la SA Gama sans que ne soit imposée la plus-value de 5 462 737 francs réalisée par M. A lors de l'apport à la SARL Sofarfi des 627 actions qu'il détenait dans le capital de la SA ECF, l'intéressé ayant placé cette plus-value sous le régime du report d'imposition prévu aux articles 160 et 92 B du code général des impôts ; que l'administration a remis en cause, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, comme procédant d'un abus de droit, le report de l'imposition de cette plus-value ;
Considérant que, saisi du litige par les requérants, le comité consultatif pour la répression des abus de droit a émis dans sa séance du 15 mars 2004 un avis favorable à la position de l'administration, en estimant qu'au vu des conditions de réemploi des sommes dégagées à l'occasion de l'apport des parts à la société Sofarfi, l'opération n'avait eu d'autre but que de permettre à M. A de bénéficier abusivement du mécanisme de report d'imposition ; que par suite, en application du dernier alinéa de l'article L. 64 précité du livre des procédures fiscales, les requérants supportent la charge de la preuve que cette opération ne poursuivait pas un but exclusivement fiscal et notamment que la société Sofarfi a, conformément à son objet, effectivement réinvesti le produit des cessions dans une activité économique ;
Considérant que M. et Mme A soutiennent que, dans les trente-six mois qui ont suivi la cession, une somme globale de 3 943 131 francs, soit près de 72 % du produit de la vente des actions, a été réinvestie dans le projet professionnel de mise en place d'un groupe de sociétés ; que, même à supposer, comme le soutient l'administration en s'appuyant sur les constatations opérées sur ce point par le comité consultatif pour la répression des abus de droit, que le produit de la cession n'a été effectivement réinvesti dans des actifs professionnels qu'à hauteur de 1 670 000 francs, de mars 1998 à avril 2000, soit seulement à hauteur de 31 % deux ans et un mois après la cession, il résulte de l'instruction que les investissements dont s'agit, consistant en des prises de participation dans plusieurs entreprises du secteur textile, à hauteur, en mars 1998, de 100 % du capital de la SARL Clara Diffusion et de 30 % du capital de la SA Gama, en janvier 1999 de 52 % du capital de la SA Barange, en octobre 1999, de 52 % du capital de la SARL Convex, en décembre 1999, de 60 % du capital de la SARL CTL Nathan et, en avril 2000, de 50 % du capital de la TVESE SA et qui se sont, pour certaines d'entre elles, renforcées dans les années suivantes permettant ainsi la constitution d'un groupe industriel dans le secteur du textile et de l'habillement, représentent un réemploi significatif du produit de la cession dans une activité économique ; qu'au surplus, la société fait valoir, dans son mémoire en date du 28 mars 2012, qu'en 1999, la société holding a consenti un prêt participatif de 1 500 000 francs à la SA Gama, contractuellement bloqué trois ans, pour consolider son investissement dans cette société, prêt qui, s'il était pris en compte, porterait le réinvestissement total, sur une période de deux ans, à 58 % du montant de la cession ; que, dans ces conditions, M. et Mme A doivent être regardés comme établissant que la société Sofarfi a effectivement réinvesti une part significative du produit de la cession dans une activité économique et qu'en conséquence l'opération litigieuse ne poursuivait pas un but exclusivement fiscal ; que, par suite, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à demander, sur le fondement de l'abus de droit, le rétablissement à la charge de M. et Mme A des cotisations supplémentaires dont la décharge a été prononcée ni l'application à leur encontre de la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;
Sur la substitution de base légale demandée par le ministre :
Considérant que l'administration est en droit d'invoquer à tout moment de la procédure, même pour la première fois en appel, tous moyens nouveaux à la condition que la substitution de base légale demandée au juge ne prive le contribuable d'aucune garantie de procédure ; que le ministre demande, à titre subsidiaire, le maintien des impositions en litige sur le fondement de la fraude à la loi ;
Considérant que si un acte de droit privé opposable aux tiers est, en principe, opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ; que ce principe peut conduire l'administration à ne pas tenir compte d'actes de droit privé opposables aux tiers ; que ce principe s'applique également en matière fiscale, dès lors que le litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions particulières de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, qui, lorsqu'elles sont applicables, font obligation à l'administration fiscale de suivre la procédure qu'elles prévoient ; qu'ainsi, hors du champ de ces dispositions, l'administration fiscale, qui peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, peut également se fonder sur l'existence d'une fraude à la loi pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
Considérant que l'administration fait valoir que les faits en litige constituent, en tout état de cause, une fraude à la loi compte tenu de la recherche, par M. A, d'une application littérale des dispositions de l'article 160-I ter 4 du code général des impôts à l'encontre des objectifs du report d'imposition de la plus-value d'apport qui y est prévu ; que, toutefois, d'une part, ainsi que l'avait relevé la Cour dans son précédent arrêt, la création de la SARL Sofarfi a permis un transfert progressif du contrôle de la SA Ets Jean Vidal, M. A ayant conservé une participation indirecte dans l'entreprise à travers la participation de 30 % que détenait la SARL Sofarfi au capital de la SA Gama jusqu'en septembre 1999, tout en lui permettant de poursuivre à travers une nouvelle SARL l'activité de holding initialement exercée par la SARL Les entreprises Christophe A, d'autre part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. et Mme A doivent être regardés comme établissant que la société Sofarfi a effectivement réinvesti une part significative du produit de la cession dans une activité économique et qu'en conséquence le bénéfice du report d'imposition n'a pas été recherché à l'encontre de l'objectif poursuivi par l'auteur du texte ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est par suite pas fondé à invoquer une fraude à la loi pour réclamer le maintien des droits en litige ;
Considérant, pour les mêmes raisons et en conséquence, que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ne peut davantage demander, à titre subsidiaire, l'application de la majoration de 80 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvre frauduleuse, ni la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de mauvaise foi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a prononcé la décharge des impositions et pénalités en litige ;
Sur la demande tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. et Mme A une somme de 1 500 euros par application des dispositions précitées ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. et Mme Christophe A une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES et à M. et Mme Christophe A.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2012 à laquelle siégeaient :
M. Duchon-Doris, président de chambre,
M. Montsec, président-assesseur,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2012.
''
''
''
''
1
2
N° 11LY01874