Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 23/12/2011, 351505, Publié au recueil Lebon
Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 23/12/2011, 351505, Publié au recueil Lebon
Conseil d'État - 7ème et 2ème sous-sections réunies
- N° 351505
- ECLI:FR:CESSR:2011:351505.20111223
- Publié au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
23 décembre 2011
- Rapporteur
- M. Fabrice Aubert
- Avocat(s)
- SCP PEIGNOT, GARREAU, BAUER-VIOLAS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 août et 17 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE, dont le siège est au 10 place de la Joliette à Marseille Cedex 2 (13567) ; l'établissement public demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1104562 du 19 juillet 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative et à la demande de la société Entreprise Générale d'Electricité Noël Béranger, a, d'une part, annulé la procédure de passation du marché de travaux publics lancée par l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE pour l'aménagement de l'avenue Camille Pelletan à Marseille et, d'autre part, enjoint à l'établissement public de reprendre la procédure de passation en allotissant le marché ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par la société EGE Noël Béranger ;
3°) de mettre à la charge de la société EGE Noël Béranger le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
Vu le décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995 ;
Vu le décret n° 95-1103 du 13 octobre 1995 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabrice Aubert, Auditeur,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative que le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut être saisi, avant la conclusion d'un contrat de commande publique ou de délégation de service public, d'un manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ; qu'aux termes de l'article L. 551-2 du même code : " Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. / Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 551-10 de ce code : " Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L. 551-1 et L. 551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué, ainsi que le représentant de l'Etat dans le cas où le contrat doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local. (...) " ;
Considérant que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 19 juillet 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, saisi sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative par la société EGE Nöel Béranger, a annulé la procédure adaptée lancée pour la passation d'un marché global de travaux portant sur l'aménagement de l'avenue Camille Pelletan à Marseille, au motif que le pouvoir adjudicateur avait méconnu ses obligations d'allotir le marché prévues à l'article 10 du code des marchés publics ;
Considérant que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE, créé par un décret du 13 octobre 1995, a pour objet, en vertu de l'article 2 de ce décret, de procéder à l'aménagement des espaces compris dans le périmètre de l'opération d'aménagement Euroméditerranée sur le territoire de la ville de Marseille ; que cette opération d'aménagement est inscrite, par un second décret du 13 octobre 1995, parmi les opérations d'intérêt national mentionnées à l'article R. 121-4-1 du code de l'urbanisme, et pour lesquelles l'Etat exerce, par exception, en vertu des dispositions du code de l'urbanisme, les principales compétences d'urbanisme dévolues aux collectivités territoriales ; que les missions d'aménagement confiées à l'établissement public dans le cadre de l'opération Euroméditerranée relèvent ainsi d'une collaboration entre l'ensemble des personnes publiques concernées par cette opération et représentées au conseil d'administration de l'établissement, c'est-à-dire l'Etat, la ville de Marseille, la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, le département des Bouches-du-Rhône, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et le port autonome de Marseille, et peuvent lui être dévolues sans formalités de publicité ni mise en concurrence, dès lors que ces dernières sont régulièrement mises en oeuvre par l'établissement pour les marchés qu'il passe en qualité de maître d'ouvrage ;
Considérant que l'article 2 du code des marchés publics dispose que : " Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : 1° L'Etat et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial " ; qu'il résulte ainsi de l'article 1er du décret du 13 octobre 1995 créant l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE sous la forme d'un établissement public industriel et commercial de l'Etat, que cet établissement n'est pas, lorsqu'il agit pour son compte en qualité de maître d'ouvrage, soumis aux dispositions du code des marchés publics ; qu'il n'est alors soumis qu'aux dispositions de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, dès lors qu'indépendamment de son mode de fonctionnement, la nature de sa mission de service public en matière d'aménagement de la ville de Marseille, qu'aucun autre organisme ne partage, conduit à le regarder comme un organisme de droit public créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial ; que, dès lors, en annulant la procédure de passation du marché litigieux sur le fondement d'une méconnaissance des dispositions de l'article 10 du code des marchés publics, qui n'étaient pas applicables à cette procédure lancée par l'établissement en qualité de maître d'ouvrage, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit ; que son ordonnance doit ainsi être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant, ainsi qu'il a été dit, que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE n'est pas soumis aux dispositions du code des marchés publics ; que si l'établissement a entendu, pour la passation du marché litigieux, recourir aux formes de la procédure adaptée prévue à l'article 28 de ce code, il n'était pas de ce seul fait tenu d'appliquer les dispositions de l'article 10 ; que la demande de la société EGE Béranger ne peut dès lors qu'être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par la société EGE Noël Béranger au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société EGE Noël Béranger, sur le fondement de ces même dispositions, le versement à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE d'une somme de 4 500 euros ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du 19 juillet 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société EGE Noël Béranger devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : La société EGE Noël Béranger versera à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE et à la société EGE Noël Beranger.
ECLI:FR:CESSR:2011:351505.20111223
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1104562 du 19 juillet 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative et à la demande de la société Entreprise Générale d'Electricité Noël Béranger, a, d'une part, annulé la procédure de passation du marché de travaux publics lancée par l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE pour l'aménagement de l'avenue Camille Pelletan à Marseille et, d'autre part, enjoint à l'établissement public de reprendre la procédure de passation en allotissant le marché ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par la société EGE Noël Béranger ;
3°) de mettre à la charge de la société EGE Noël Béranger le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
Vu le décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995 ;
Vu le décret n° 95-1103 du 13 octobre 1995 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabrice Aubert, Auditeur,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative que le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut être saisi, avant la conclusion d'un contrat de commande publique ou de délégation de service public, d'un manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ; qu'aux termes de l'article L. 551-2 du même code : " Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. / Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 551-10 de ce code : " Les personnes habilitées à engager les recours prévus aux articles L. 551-1 et L. 551-5 sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué, ainsi que le représentant de l'Etat dans le cas où le contrat doit être conclu par une collectivité territoriale ou un établissement public local. (...) " ;
Considérant que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 19 juillet 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, saisi sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative par la société EGE Nöel Béranger, a annulé la procédure adaptée lancée pour la passation d'un marché global de travaux portant sur l'aménagement de l'avenue Camille Pelletan à Marseille, au motif que le pouvoir adjudicateur avait méconnu ses obligations d'allotir le marché prévues à l'article 10 du code des marchés publics ;
Considérant que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE, créé par un décret du 13 octobre 1995, a pour objet, en vertu de l'article 2 de ce décret, de procéder à l'aménagement des espaces compris dans le périmètre de l'opération d'aménagement Euroméditerranée sur le territoire de la ville de Marseille ; que cette opération d'aménagement est inscrite, par un second décret du 13 octobre 1995, parmi les opérations d'intérêt national mentionnées à l'article R. 121-4-1 du code de l'urbanisme, et pour lesquelles l'Etat exerce, par exception, en vertu des dispositions du code de l'urbanisme, les principales compétences d'urbanisme dévolues aux collectivités territoriales ; que les missions d'aménagement confiées à l'établissement public dans le cadre de l'opération Euroméditerranée relèvent ainsi d'une collaboration entre l'ensemble des personnes publiques concernées par cette opération et représentées au conseil d'administration de l'établissement, c'est-à-dire l'Etat, la ville de Marseille, la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, le département des Bouches-du-Rhône, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et le port autonome de Marseille, et peuvent lui être dévolues sans formalités de publicité ni mise en concurrence, dès lors que ces dernières sont régulièrement mises en oeuvre par l'établissement pour les marchés qu'il passe en qualité de maître d'ouvrage ;
Considérant que l'article 2 du code des marchés publics dispose que : " Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : 1° L'Etat et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial " ; qu'il résulte ainsi de l'article 1er du décret du 13 octobre 1995 créant l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE sous la forme d'un établissement public industriel et commercial de l'Etat, que cet établissement n'est pas, lorsqu'il agit pour son compte en qualité de maître d'ouvrage, soumis aux dispositions du code des marchés publics ; qu'il n'est alors soumis qu'aux dispositions de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, dès lors qu'indépendamment de son mode de fonctionnement, la nature de sa mission de service public en matière d'aménagement de la ville de Marseille, qu'aucun autre organisme ne partage, conduit à le regarder comme un organisme de droit public créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial ; que, dès lors, en annulant la procédure de passation du marché litigieux sur le fondement d'une méconnaissance des dispositions de l'article 10 du code des marchés publics, qui n'étaient pas applicables à cette procédure lancée par l'établissement en qualité de maître d'ouvrage, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit ; que son ordonnance doit ainsi être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant, ainsi qu'il a été dit, que l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE n'est pas soumis aux dispositions du code des marchés publics ; que si l'établissement a entendu, pour la passation du marché litigieux, recourir aux formes de la procédure adaptée prévue à l'article 28 de ce code, il n'était pas de ce seul fait tenu d'appliquer les dispositions de l'article 10 ; que la demande de la société EGE Béranger ne peut dès lors qu'être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par la société EGE Noël Béranger au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société EGE Noël Béranger, sur le fondement de ces même dispositions, le versement à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE d'une somme de 4 500 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 19 juillet 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société EGE Noël Béranger devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : La société EGE Noël Béranger versera à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMENAGEMENT EUROMEDITERRANEE et à la société EGE Noël Beranger.