Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 11/07/2011, 331665, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 7 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES (SMACL), dont le siège est 141 avenue Salvador Allende à Niort (79031 Cedex) ; la SMACL demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09VE00182 du 25 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0712174 du 25 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 38 236 euros en réparation du préjudice résultant pour elle, en sa qualité d'assureur, subrogé dans les droits de la communauté d'agglomération de Clichy-sous-Bois-Montfermeil, des violences urbaines qui se sont déroulées dans la nuit du 28 au 29 octobre 2005 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 ;

Vu le décret n° 2005-1386 du 8 novembre 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anissia Morel, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES ;



Considérant que la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES (SMACL) se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 38 236 euros en réparation des préjudices résultant pour elle, en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de la communauté d'agglomération de Clichy-sous-Bois-Montfermeil, de la dégradation, dans la nuit du 28 au 29 octobre 2005, d'un immeuble appartenant à son assurée ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales : L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans la nuit du 28 au 29 octobre 2005, le rez-de-chaussée de la Maison des services publics abritant un poste de police, située à Montfermeil, a fait l'objet de jets de pierres et autres projectiles qui ont fracturé les façades de verre du bâtiment ; que si ces destructions ont eu lieu dans le contexte des violences urbaines qui se sont déclenchées, notamment sur le territoire de cette commune, à partir du 27 octobre 2005 à la suite du décès de deux adolescents de la commune voisine de Clichy-sous-Bois, la cour n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis en relevant que l'action à l'origine des dommages en cause, qui présentait un caractère prémédité et organisé, ne pouvait être regardée comme ayant été commise de manière spontanée ; qu'elle a pu légalement déduire de cette constatation que les dommages en cause n'avaient pas été commis par un attroupement ou un rassemblement au sens de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; que ce moyen étant de nature à justifier, à lui seul, l'arrêt attaqué en ce qu'il statue sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement de cet article, les moyens soulevés par la société requérante à l'encontre des autres motifs de l'arrêt relatifs à la responsabilité de l'Etat sur ce même fondement sont inopérants ;

Considérant, d'autre part, que la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits exempte de dénaturation en relevant que l'Etat avait pris des mesures pour tenter d'enrayer les violences avant le 8 novembre 2005, date à laquelle, compte tenu de l'ampleur croissante de ces violences, le Gouvernement a décidé de décréter l'état d'urgence ; que la cour n'a pas commis d'erreur de qualification juridique en estimant que le préfet du département de la Seine-Saint-Denis n'avait pas, dans l'exercice de ses pouvoirs de police, commis de faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SMACL n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCES DES COLLECTIVITES LOCALES et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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