Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 16/05/2011, 336105, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er février et 3 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC, dont le siège est 3 place des Carmes à Aurillac (15000), et la COMMUNE D'AURILLAC, représentée par son maire ; la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et la COMMUNE D'AURILLAC demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 22 octobre 2009 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé à la SNC Atout 15 l'autorisation de créer un ensemble commercial d'une surface de vente de 32 664 m² à l'enseigne Carrefour à Aurillac (Cantal) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat ainsi que de l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération et autres une somme de 1 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2011, présentée par l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, la société Florinand, la société Esten, M. et Mme Jean-François Viars, M. et Mme Jacques Morlon, la chambre de commerce et d'industrie du Cantal et la chambre des métiers et de l'artisanat du Cantal ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 avril 2011, présentée par la Commission nationale d'aménagement commercial ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 avril 2011, présentée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et de la COMMUNE D'AURILLAC,

- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et de la COMMUNE D'AURILLAC,




Considérant que la requête de la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et de la COMMUNE D'AURILLAC est dirigée contre la décision du 22 octobre 2009 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé d'autoriser la SNC Atout 15 à créer un ensemble commercial à l'enseigne Carrefour à Aurillac ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, la société Florinand, la société Esten, M. et Mme B, M. et Mme A, la chambre de commerce et d'industrie du Cantal et la chambre des métiers et de l'artisanat du Cantal :

Considérant que la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et la COMMUNE D'AURILLAC justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre la décision susvisée de la Commission nationale d'aménagement commercial qui refuse l'autorisation de créer un centre commercial situé sur le territoire de la commune d'Aurillac, qui appartient à la communauté d'agglomération du bassin d'Aurillac ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs (...) ; qu'aux termes de l'article R. 752-16 du même code : (...) Pour les projets d'aménagement commercial, l'instruction des demandes est effectuée conjointement par les services territorialement compétents chargés du commerce ainsi que ceux chargés de l'urbanisme et de l'environnement (...). et qu'aux termes de l'article R. 752-51 du même code : (...) Le commissaire du gouvernement recueille les avis des ministres intéressés, qu'il présente à la commission. Il donne son avis sur les demandes examinées par la Commission nationale d'aménagement commercial au regard des auditions effectuées. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe au commissaire du gouvernement de recueillir et de présenter à la Commission nationale d'aménagement commercial les avis de l'ensemble des ministres intéressés avant d'exprimer son propre avis ; que le ministre chargé du commerce est au nombre des ministres intéressés au sens de l'article R. 752-51 du code de commerce ; que la circonstance que le commissaire du gouvernement appartienne, en vertu de l'article R. 751-10 du code de commerce, à ses services ne dispense pas ce dernier de recueillir et présenter l'avis de ce ministre avant de donner son propre avis sur les demandes examinées par la commission nationale ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient la Commission nationale d'aménagement commercial, il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès verbal de la réunion de la commission nationale du 22 octobre 2009, que le commissaire du gouvernement s'est borné, en l'espèce, à présenter aux membres de la commission l'avis qu'il avait recueilli auprès du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat ; que, dès lors, en statuant sur la demande de la SNC Atout 15 sans que le commissaire du gouvernement lui ait présenté l'avis du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, en charge du commerce, la Commission nationale d'aménagement commercial a entaché la procédure suivie d'une irrégularité de nature à entraîner l'illégalité de la décision litigieuse ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et la COMMUNE D'AURILLAC sont fondées à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et de la COMMUNE D'AURILLAC, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, la somme que demandent l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, la société Florinand, la société Esten, M. et Mme B, M. et Mme A, la chambre de commerce et d'industrie du Cantal et la chambre des métiers et de l'artisanat du Cantal au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de ces derniers ainsi que de l'Etat le versement à la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et à la COMMUNE D'AURILLAC des sommes de 500 euros chacun ;




D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 22 octobre 2009 est annulée.

Article 2 : L'Etat ainsi que l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, la société Florinand, la société Esten, M. et Mme B, M. et Mme A, la chambre de commerce et d'industrie du Cantal et la chambre des métiers et de l'artisanat du Cantal verseront à la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC et à la COMMUNE D'AURILLAC les sommes de 500 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, de l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, de la société Florinand, de la société Esten, de M. et Mme B, de M. et Mme A, de la chambre de commerce et d'industrie du Cantal et de la chambre des métiers et de l'artisanat du Cantal tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DU BASSIN D'AURILLAC, à la COMMUNE D'AURILLAC, à l'association de défense du commerce aurillacois et de son agglomération, à l'association des commerçants du centre commercial Géant les Près de Julien, à la société Florinand, à la société Esten, à M. et Mme Jean-François B, à M. et Mme Jacques A, à la chambre de commerce et d'industrie du Cantal, à la chambre de métiers et de l'artisanat du Cantal, à la Commission nationale d'aménagement commercial et à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée pour information à la société Atout 15 .

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