Cour Administrative d'Appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 08/07/2010, 08MA03251, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2008, présentée pour Mme Martine A élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Pellegrin-Soulier ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0630214 en date du 7 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à obtenir la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice consécutif à sa non titularisation ;

2°) d'annuler la décision rejetant sa demande gracieuse qui tendait à obtenir sa réintégration et d'enjoindre à la ville de Nîmes de réexaminer sa situation ;

3°) de condamner la ville de Nîmes à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Nîmes, outre les dépens, la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance ;

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Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2010 :

- le rapport de Mme Massé-Degois, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brossier, rapporteur public,

- et les observations de Me Constans-Schneider, du cabinet d'avocats Dumont, pour la ville de Nîmes ;


Considérant que Mme A a été employée par la ville de Nîmes successivement en contrat emploi solidarité, puis en contrat emploi consolidé et enfin en contrat à durée déterminée ; que la ville de Nîmes l'a informée par une lettre du 21 juillet 2003 de sa décision de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée arrivant à échéance le 31 août 2003 ; que Mme A relève appel du jugement du 7 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à obtenir la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice ;


Sur la recevabilité des conclusions de Mme A à fin à l'annulation de la décision portant refus d'intégration et à fin d'injonction :


Considérant que Mme A relève appel du jugement du 7 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande indemnitaire qui tendait à obtenir la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral consécutif à la faute alléguée commise par la ville de Nîmes en refusant de prononcer son intégration dans les effectifs municipaux ; qu'ainsi que le fait valoir la ville de Nîmes, les conclusions de Mme A présentées devant la Cour administrative d'appel tendant, d'une part, à l'annulation de la décision rejetant sa demande gracieuse qui tendait à obtenir son intégration et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la ville de Nîmes de réexaminer sa situation sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables ; que, dès lors, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de ces conclusions doit être accueillie ;

Sur les autres fins de non-recevoir opposées par la ville de Nîmes :

Considérant, en premier lieu, que la Cour de céans a dans l'arrêt n° 06MA02341 du 27 novembre 2007 confirmé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 31 mai 2006 et rejeté les conclusions de Mme A, d'une part, dirigées contre la décision du 3 septembre 2003 par laquelle la ville de Nîmes lui notifiait un refus de nomination en qualité de stagiaire et, d'autre part, tendant à obtenir une indemnité en réparation de son préjudice pour défaut de demande préalable ; que, dès lors, la présente requête de Mme A enregistrée sous le n° 08MA03251 et dirigée contre la décision rejetant sa demande indemnitaire gracieuse adressée le 1er août 2006 à la ville de Nîmes ne présente pas l'identité d'objet alléguée ;

Considérant, en second lieu, qu'en joignant la demande préalable qu'elle a adressée à la ville de Nîmes le 1er août 2006 à sa requête présentée en première instance et en demandant au juge de recevoir l'action en indemnisation et de condamner la ville de Nîmes à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral, Mme A doit être regardée comme demandant implicitement mais nécessairement l'annulation de la décision tacite rejetant sa demande indemnitaire ;

Considérant que, par suite, ces deux fins de non-recevoir opposées par la ville de Nîmes doivent être écartées ;


Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la ville de Nîmes s'est engagée, dans un courrier adressé le 21 mars 2000 à Mme A et produit par celle-ci à l'appui de sa requête d'appel, à la nommer stagiaire à l'issue de son contrat emploi consolidé le 15 juin 2003, sous réserve de l'avis favorable du chef de service, à condition que son aptitude physique soit reconnue par un examen médical, qu'elle obtienne un extrait de casier judiciaire n° 2 visant à vérifier l'absence d'incompatibilité des futures fonctions et qu'elle possède la nationalité française ou qu'elle soit ressortissante de la communauté européenne ; que la ville de Nîmes ne conteste pas que Mme A satisfaisait à la date voulue aux conditions énoncées dans ce courrier ; qu'il résulte, par ailleurs, des pièces du dossier et notamment des fiches bilan d'activité et bilan contrat emploi solidarité que le comportement général de l'intéressée était satisfaisant et que les chefs du service dans lequel elle exerçait ses fonctions avaient relevé le sérieux et l'assiduité de cet agent malgré sa très grande timidité ; que si la ville oppose la mise en place d'une politique nouvelle de maîtrise des dépenses de personnel de la commune pour justifier la décision de ne pas nommer stagiaire Mme A et soutient que les courriers des 21 juillet et 3 septembre 2003 attestent de l'analyse de la demande d'intégration de l'intéressée et de l'absence de postes entrant dans le champ de ses compétences, elle a cependant, en donnant cette dernière des assurances qu'elle n'a pas respectées, commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant que Mme A allègue avoir subi un préjudice moral consistant en la perte de chance d'accéder à un emploi au sein de la fonction publique ; que la ville de Nîmes, en reprochant à l'intéressée de ne pas démontrer qu'elle a été amenée à renoncer à des emplois qu'on lui aurait proposés à raison de la promesse alléguée invoque ainsi une faute qui ne serait susceptible d'avoir d'effet que sur le seul préjudice matériel dont l'appelante ne demande pas la réparation ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme A en condamnant la ville de Nîmes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes n'a pas condamné la ville de Nîmes à lui verser la somme de 5 000 euros ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aucun dépens n'ayant été exposé dans la présente instance, les conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :


Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la ville de Nîmes le versement à Mme A de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais d'instance ;


D E C I D E :
Article 1er : La ville de Nîmes est condamnée à payer à Mme A la somme de 5 000 (cinq mille) euros.
Article 2 : La ville de Nîmes versera la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A et les conclusions présentées par la ville de Nîmes sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le jugement n° 0630214 du 7 mai 2008 du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Martine A, à la ville de Nîmes et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.



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