Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 23/07/2010, 309993
Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 23/07/2010, 309993
Conseil d'État - 6ème et 1ère sous-sections réunies
- N° 309993
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
23 juillet 2010
- Président
- M. Arrighi de Casanova
- Rapporteur
- Mlle Aurélie Bretonneau
- Avocat(s)
- SCP PIWNICA, MOLINIE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 octobre 2007 et 10 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Patrick A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 juillet 2007 du Conseil national des barreaux portant adoption d'un règlement relatif aux procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 91/308/CEE du 10 juin 1991 du Conseil modifiée par la directive 2001/97/CE du 4 décembre 2001 ;
Vu la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 ;
Vu le code monétaire et financier, modifié notamment par la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et par le décret n° 2006-736 du 26 juin 2006 ;
Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Aurélie Bretonneau, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Ordre des avocats de Paris,
- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Ordre des avocats de Paris,
Considérant que, par la décision du 12 juillet 2007 dont A demande l'annulation pour excès de pouvoir, le Conseil national des barreaux a adopté un règlement relatif aux procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et d'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures ;
Sur les interventions :
Considérant que le Syndicat des avocats libres et l'Ordre des avocats au barreau de Paris ont intérêt à l'annulation de la décision litigieuse ; qu'ainsi leurs interventions sont recevables ;
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la décision que M. A attaque ne vise pas les dispositions des articles L. 562-1 et suivants du code monétaire et financier est, en tout état de cause, sans influence sur sa légalité ;
Considérant, en second lieu, qu'en vertu de l'article R. 563-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige, il appartient aux personnes mentionnées à l'article L. 562-1 du même code, au nombre desquelles figurent les avocats, d'adopter des procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ainsi qu'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect des procédures ; que, d'une part, si le deuxième alinéa de cet article prévoit que les procédures en question sont définies le cas échéant soit par arrêté du ministre compétent, soit par des règlements professionnels homologués par le ministre compétent (...) , ces dispositions n'ont eu pour objet et ne pouvaient avoir légalement pour effet que de soumettre l'adoption des procédures en cause aux règles définies par les dispositions législatives qui déterminent l'organisation générale de la profession concernée ; que le moyen tiré de ce qu'elles attribuent une compétence exclusive au ministre pour déterminer ou homologuer les procédures internes dont doivent se doter les avocats en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ne peut, par suite, qu'être écarté ; que, d'autre part, l'article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose que : Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, le Conseil national des barreaux unifie par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession d'avocat ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le Conseil national des barreaux a pu compétemment édicter, par la décision attaquée, des procédures internes destinées à mettre en oeuvre de façon unifiée, pour la profession d'avocat, les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures, ainsi que l'article R. 563-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction alors applicable, l'y habilitait, alors même qu'il ne s'agissait pas de codifier des règles figurant au nombre des traditions de la profession d'avocat ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence du Conseil national des barreaux pour adopter la décision litigieuse doit être écarté ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que si l'article 3 de la décision que M. A attaque dispose que : Les avocats réalisant l'une des activités visées à l'article 1 doivent faire preuve d'une vigilance constante et se doter de procédures internes propres à assurer le respect des prescriptions de la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et du décret n° 2006-736 du 26 juin 2006, notamment l'ensemble des prescriptions relatives : (...) à la déclaration de soupçon , la notion de déclaration de soupçon , qui renvoie aux dispositions de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige, ne saurait être regardée comme insuffisamment précise ; qu'il en va de même de la notion de consultation juridique , qui est mentionnée aux articles 2 et 4 de la décision litigieuse et à laquelle font d'ailleurs référence de nombreux textes législatifs et réglementaires relatifs à la profession d'avocat ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que l'imprécision de ces notions méconnaîtrait l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme et, en tout état de cause, le principe de sécurité juridique ne peut qu'être écarté ; qu'il en va de même du moyen tiré de ce que l'imprécision de la notion de déclaration de soupçon , qui fonde des obligations dont la méconnaissance par les avocats est susceptible d'être pénalement sanctionnée, méconnaîtrait le principe de légalité des délits ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant ne saurait utilement se prévaloir des recommandations du groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI), dès lors que ces actes, émanant d'un organisme de coordination intergouvernementale, n'ont pas le caractère de convention internationale et sont dépourvus d'effets juridiques dans l'ordre juridique interne ;
Considérant, en troisième lieu, que M. A ne saurait non plus mettre utilement en cause la validité de la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme au soutien de sa demande d'annulation de la décision du Conseil national des barreaux du 12 juillet 2007, qui n'est pas prise pour l'application des dispositions nationales transposant cette directive ;
Considérant, en quatrième lieu, que la décision attaquée a été prise, ainsi qu'il a été dit, pour l'application des dispositions réglementaires du code monétaire et financier issues du décret du 26 juin 2006, elles-mêmes prises en application de la loi du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, qui a transposé la directive 91/308/CEE du 10 juin 1991 du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux, dans sa rédaction issue de la directive 2001/97/CE du 4 décembre 2001 ; que si, selon le requérant, les dispositions de cette directive sont incompatibles avec les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui protègent notamment le droit fondamental au secret professionnel, cet article permet une ingérence de l'autorité publique dans l'exercice d'un tel droit, notamment lorsqu'une telle mesure est nécessaire à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales ; qu'eu égard, d'une part, à l'intérêt général qui s'attache à la lutte contre le blanchiment de capitaux et, d'autre part, à la garantie que représente l'exclusion de son champ d'application des informations reçues ou obtenues par les avocats à l'occasion de leurs activités juridictionnelles, ainsi que de celles reçues ou obtenues dans le cadre d'une consultation juridique, sous les seules réserves, pour ces dernières informations, des cas où le conseiller juridique prend part à des activités de blanchiment de capitaux, où la consultation juridique est fournie à des fins de blanchiment de capitaux et où l'avocat sait que son client souhaite obtenir des conseils juridiques aux fins de blanchiment de capitaux, la soumission des avocats à l'obligation de déclaration de soupçon, à laquelle procède la directive litigieuse, ne porte pas une atteinte excessive au secret professionnel ; qu'ainsi et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ;
Considérant, enfin, que par une décision du 10 avril 2008, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'introduction au sein du code monétaire et financier des dispositions du troisième alinéa de l'article R. 562-2, au motif qu'elles prévoyaient une relation directe entre les personnes mentionnées au 12 de l'article L. 562-1 du même code, au nombre desquelles figurent les avocats, et la cellule TRACFIN dans les cas où ces personnes répondent aux demandes de cette dernière ; que doivent, par voie de conséquence, être annulées les dispositions de la décision attaquée prises pour l'application des dispositions ainsi annulées et précisant les modalités de communication directe entre les avocats et la cellule TRACFIN dans les cas où ils répondent aux demandes de cette dernière ; que tel est le cas, d'une part de la seconde phrase du deuxième alinéa de son article 4 qui dispose que : Lorsque par la suite TRACFIN réclame les documents relatifs à la déclaration de soupçon prévus par l'article L. 563-4 du code monétaire et financier, l'avocat auteur de celle-ci doit transmettre sans délai les pièces requises et en adresser copie au bâtonnier et, d'autre part, du dernier alinéa du même article, aux termes duquel : Lorsque, en application du seul article L. 563-4 du code monétaire et financier, TRACFIN interroge un avocat dans le but de reconstituer l'ensemble des transactions faites par une personne physique ou morale liées à une opération suspecte, celui-ci ne doit transmettre à TRACFIN que les renseignements et documents conservés dans le cadre de l'exécution de son obligation de vigilance relatifs à l'identité de son client ainsi que la copie de l'acte établissant l'opération, sous la double condition que ces renseignements et ces documents aient été obtenus à l'occasion d'une des activités prévues à l'article 1er et qu'ils n'aient pas été obtenus dans le cadre d'une activité de consultation juridique ou se rattachant à une procédure juridictionnelle ; qu'il n'en va en revanche pas de même des autres dispositions de l'article 4, qui en sont divisibles et ne sont pas relatives aux modalités de communication directe entre les avocats et la cellule TRACFIN ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est fondé à demander l'annulation que de la seconde phrase du deuxième alinéa et du dernier alinéa de l'article 4 de la décision qu'il attaque ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les interventions du Syndicat des avocats libres et de l'Ordre des avocats au barreau de Paris sont admises.
Article 2 : La seconde phrase du deuxième alinéa et le dernier alinéa de l'article 4 de la décision du Conseil national des barreaux du 12 juillet 2007 portant adoption d'un règlement relatif aux procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et d'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Patrick A, au Conseil national des barreaux, au Syndicat des avocats libres et à l'Ordre des avocats au barreau de Paris et à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 91/308/CEE du 10 juin 1991 du Conseil modifiée par la directive 2001/97/CE du 4 décembre 2001 ;
Vu la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 ;
Vu le code monétaire et financier, modifié notamment par la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et par le décret n° 2006-736 du 26 juin 2006 ;
Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Aurélie Bretonneau, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Ordre des avocats de Paris,
- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'Ordre des avocats de Paris,
Considérant que, par la décision du 12 juillet 2007 dont A demande l'annulation pour excès de pouvoir, le Conseil national des barreaux a adopté un règlement relatif aux procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et d'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures ;
Sur les interventions :
Considérant que le Syndicat des avocats libres et l'Ordre des avocats au barreau de Paris ont intérêt à l'annulation de la décision litigieuse ; qu'ainsi leurs interventions sont recevables ;
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que la décision que M. A attaque ne vise pas les dispositions des articles L. 562-1 et suivants du code monétaire et financier est, en tout état de cause, sans influence sur sa légalité ;
Considérant, en second lieu, qu'en vertu de l'article R. 563-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige, il appartient aux personnes mentionnées à l'article L. 562-1 du même code, au nombre desquelles figurent les avocats, d'adopter des procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, ainsi qu'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect des procédures ; que, d'une part, si le deuxième alinéa de cet article prévoit que les procédures en question sont définies le cas échéant soit par arrêté du ministre compétent, soit par des règlements professionnels homologués par le ministre compétent (...) , ces dispositions n'ont eu pour objet et ne pouvaient avoir légalement pour effet que de soumettre l'adoption des procédures en cause aux règles définies par les dispositions législatives qui déterminent l'organisation générale de la profession concernée ; que le moyen tiré de ce qu'elles attribuent une compétence exclusive au ministre pour déterminer ou homologuer les procédures internes dont doivent se doter les avocats en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ne peut, par suite, qu'être écarté ; que, d'autre part, l'article 21-1 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques dispose que : Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, le Conseil national des barreaux unifie par voie de dispositions générales les règles et usages de la profession d'avocat ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le Conseil national des barreaux a pu compétemment édicter, par la décision attaquée, des procédures internes destinées à mettre en oeuvre de façon unifiée, pour la profession d'avocat, les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures, ainsi que l'article R. 563-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction alors applicable, l'y habilitait, alors même qu'il ne s'agissait pas de codifier des règles figurant au nombre des traditions de la profession d'avocat ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence du Conseil national des barreaux pour adopter la décision litigieuse doit être écarté ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que si l'article 3 de la décision que M. A attaque dispose que : Les avocats réalisant l'une des activités visées à l'article 1 doivent faire preuve d'une vigilance constante et se doter de procédures internes propres à assurer le respect des prescriptions de la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et du décret n° 2006-736 du 26 juin 2006, notamment l'ensemble des prescriptions relatives : (...) à la déclaration de soupçon , la notion de déclaration de soupçon , qui renvoie aux dispositions de l'article L. 562-2 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige, ne saurait être regardée comme insuffisamment précise ; qu'il en va de même de la notion de consultation juridique , qui est mentionnée aux articles 2 et 4 de la décision litigieuse et à laquelle font d'ailleurs référence de nombreux textes législatifs et réglementaires relatifs à la profession d'avocat ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que l'imprécision de ces notions méconnaîtrait l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme et, en tout état de cause, le principe de sécurité juridique ne peut qu'être écarté ; qu'il en va de même du moyen tiré de ce que l'imprécision de la notion de déclaration de soupçon , qui fonde des obligations dont la méconnaissance par les avocats est susceptible d'être pénalement sanctionnée, méconnaîtrait le principe de légalité des délits ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant ne saurait utilement se prévaloir des recommandations du groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI), dès lors que ces actes, émanant d'un organisme de coordination intergouvernementale, n'ont pas le caractère de convention internationale et sont dépourvus d'effets juridiques dans l'ordre juridique interne ;
Considérant, en troisième lieu, que M. A ne saurait non plus mettre utilement en cause la validité de la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme au soutien de sa demande d'annulation de la décision du Conseil national des barreaux du 12 juillet 2007, qui n'est pas prise pour l'application des dispositions nationales transposant cette directive ;
Considérant, en quatrième lieu, que la décision attaquée a été prise, ainsi qu'il a été dit, pour l'application des dispositions réglementaires du code monétaire et financier issues du décret du 26 juin 2006, elles-mêmes prises en application de la loi du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, qui a transposé la directive 91/308/CEE du 10 juin 1991 du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux, dans sa rédaction issue de la directive 2001/97/CE du 4 décembre 2001 ; que si, selon le requérant, les dispositions de cette directive sont incompatibles avec les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui protègent notamment le droit fondamental au secret professionnel, cet article permet une ingérence de l'autorité publique dans l'exercice d'un tel droit, notamment lorsqu'une telle mesure est nécessaire à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales ; qu'eu égard, d'une part, à l'intérêt général qui s'attache à la lutte contre le blanchiment de capitaux et, d'autre part, à la garantie que représente l'exclusion de son champ d'application des informations reçues ou obtenues par les avocats à l'occasion de leurs activités juridictionnelles, ainsi que de celles reçues ou obtenues dans le cadre d'une consultation juridique, sous les seules réserves, pour ces dernières informations, des cas où le conseiller juridique prend part à des activités de blanchiment de capitaux, où la consultation juridique est fournie à des fins de blanchiment de capitaux et où l'avocat sait que son client souhaite obtenir des conseils juridiques aux fins de blanchiment de capitaux, la soumission des avocats à l'obligation de déclaration de soupçon, à laquelle procède la directive litigieuse, ne porte pas une atteinte excessive au secret professionnel ; qu'ainsi et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ;
Considérant, enfin, que par une décision du 10 avril 2008, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'introduction au sein du code monétaire et financier des dispositions du troisième alinéa de l'article R. 562-2, au motif qu'elles prévoyaient une relation directe entre les personnes mentionnées au 12 de l'article L. 562-1 du même code, au nombre desquelles figurent les avocats, et la cellule TRACFIN dans les cas où ces personnes répondent aux demandes de cette dernière ; que doivent, par voie de conséquence, être annulées les dispositions de la décision attaquée prises pour l'application des dispositions ainsi annulées et précisant les modalités de communication directe entre les avocats et la cellule TRACFIN dans les cas où ils répondent aux demandes de cette dernière ; que tel est le cas, d'une part de la seconde phrase du deuxième alinéa de son article 4 qui dispose que : Lorsque par la suite TRACFIN réclame les documents relatifs à la déclaration de soupçon prévus par l'article L. 563-4 du code monétaire et financier, l'avocat auteur de celle-ci doit transmettre sans délai les pièces requises et en adresser copie au bâtonnier et, d'autre part, du dernier alinéa du même article, aux termes duquel : Lorsque, en application du seul article L. 563-4 du code monétaire et financier, TRACFIN interroge un avocat dans le but de reconstituer l'ensemble des transactions faites par une personne physique ou morale liées à une opération suspecte, celui-ci ne doit transmettre à TRACFIN que les renseignements et documents conservés dans le cadre de l'exécution de son obligation de vigilance relatifs à l'identité de son client ainsi que la copie de l'acte établissant l'opération, sous la double condition que ces renseignements et ces documents aient été obtenus à l'occasion d'une des activités prévues à l'article 1er et qu'ils n'aient pas été obtenus dans le cadre d'une activité de consultation juridique ou se rattachant à une procédure juridictionnelle ; qu'il n'en va en revanche pas de même des autres dispositions de l'article 4, qui en sont divisibles et ne sont pas relatives aux modalités de communication directe entre les avocats et la cellule TRACFIN ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est fondé à demander l'annulation que de la seconde phrase du deuxième alinéa et du dernier alinéa de l'article 4 de la décision qu'il attaque ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions du Syndicat des avocats libres et de l'Ordre des avocats au barreau de Paris sont admises.
Article 2 : La seconde phrase du deuxième alinéa et le dernier alinéa de l'article 4 de la décision du Conseil national des barreaux du 12 juillet 2007 portant adoption d'un règlement relatif aux procédures internes destinées à mettre en oeuvre les obligations de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme et d'un dispositif de contrôle interne destiné à assurer le respect de ces procédures sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Patrick A, au Conseil national des barreaux, au Syndicat des avocats libres et à l'Ordre des avocats au barreau de Paris et à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.