Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 16/07/2010, 338829, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu le mémoire, enregistré le 21 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, dont le siège est Hôtel de Fontenoy 6, rue du Haut Bourgeois à Nancy Cedex (54035), en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS demande au Conseil d'Etat, à l'appui de son recours tendant à l'annulation du décret du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du premier alinéa de l'article L. 222-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que ces dispositions, applicables au litige, méconnaissent le principe d'égalité des citoyens devant la loi et la justice ainsi que les droits de la défense ;





Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le décret n°2010-164 du 22 février 2010 ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 222-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bethânia Gaschet, Auditeur,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;




Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 222-1 du code de justice administrative : Les jugements des tribunaux administratifs et les arrêts des cours administratives d'appel sont rendus par des formations collégiales, sous réserve des exceptions tenant à l'objet du litige ou à la nature des questions à juger. ; que ces dispositions sont applicables au présent litige, qui tend à l'annulation du décret du 22 février 2010 en tant que par son article 21 il insère dans le code de justice administrative, pour l'application du premier alinéa de l'article L. 222-1 de ce code, un article R 222-34 ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce que, faute pour le législateur d'avoir suffisamment encadré les dérogations possibles au principe du caractère collégial des décisions rendues par la juridiction administrative, ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au principe d'égalité des citoyens devant la loi, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;



D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution du premier alinéa de l'article L. 222-1 du code de justice administrative est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

Article 3: La présente décision sera notifiée à l'UNION SYNDICALE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, au Premier ministre et à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

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