COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 1ère chambre - formation à 3, 27/04/2010, 08LY00340, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2008, présentée pour M. Henri A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502314 du 5 décembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande, tendant à l'annulation de la délibération du 30 juin 2005, par laquelle le conseil municipal de Couternon (Côte d'Or) a approuvé la révision du plan local d'urbanisme ;

2°) d'annuler ladite délibération ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Couternon le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que le Tribunal a omis d'analyser des mémoires déposés par les parties ; que les modifications, apportées par la commune après l'enquête publique au règlement des zones UB et AU1, infléchissent le parti d'aménagement et affectent ainsi l'économie générale du plan local d'urbanisme ; que la commune n'a pas procédé au diagnostic des besoins en matière d'agriculture, exigé par l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ; que le document approuvé méconnaît le principe d'équilibre imposé par l'article L. 121-1 du même code ; que la commune disposait d'autres outils juridiques que l'interdiction de construire, lui permettant d'interdire les constructions autour du centre bourg ; que l'interdiction, en zone Aa, des constructions nécessaires à l'exploitation agricole méconnaît les dispositions de l'article R. 123-7 du même code ; que le classement de terrains en zones Aa et en N procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 septembre 2008, par lequel la commune de Couternon conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que le jugement n'est entaché d'aucune omission à statuer ; que la modification, après enquête, de dispositions du règlement n'a pas pour effet d'infléchir le parti d'aménagement retenu et ne porte donc pas atteinte à l'économie générale du document d'urbanisme ; que le plan local d'urbanisme procède à une juste appréciation des besoins de l'activité agricole ; que ses dispositions respectent le principe d'équilibre prévu par l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme et n'introduisent aucune discrimination contraire à cette disposition ; que l'interdiction des constructions agricoles en secteur Aa, prévue par l'article L. 123-1 du même code, répond aux objectifs exposés dans le projet d'aménagement et de développement durable ; que la répartition des zones A et N, qui résulte d'une analyse fine de la situation de la commune, de ses besoins et de ses objectifs de développement, n'est entachée d'aucune erreur d'appréciation ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 février 2010, présenté pour M. A qui confirme ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mars 2010 :

- le rapport de M. Fontbonne, président-assesseur ;

- les observations de Me Gillet, avocat de la commune de Courternon ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- la parole ayant à nouveau été donnée à la partie présente ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, s'il est vrai que le jugement attaqué ne mentionne pas dans ses visas les moyens développés par les parties, l'ensemble de ces moyens a été en revanche dûment analysé dans les motifs dudit jugement ; que le requérant n'est par suite pas fondé à soutenir que le jugement attaqué a été irrégulièrement rendu ;

Sur la légalité externe de la délibération attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'urbanisme : (...) Après l'enquête publique, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié, est approuvé par délibération du conseil municipal (...). ;

Considérant que ces dispositions permettent à l'autorité compétente de modifier le document soumis à l'enquête publique pour tenir compte de remarques formulées au cours de celle-ci, à condition que ces modifications n'affectent pas l'économie générale du projet ;

Considérant qu'à l'issue de l'enquête publique, et pour répondre aux résultats de celle-ci, le projet a été modifié en fixant pour la zone UB un coefficient d'occupation du sol unique de 0,35 au lieu des coefficients de 0,25 et 0,50 devant s'appliquer respectivement aux logements individuels et aux logements collectifs et sociaux ; qu'à l'issue de l'enquête, a été supprimée la disposition limitant à 25 % la construction de logements collectifs dans la zone UB ; que ces modifications qui ne portent pas sur la répartition des différentes zones et n'affectent pas substantiellement les possibilités de construction sur la sone UB, la disposition fixant à R+1 la hauteur des bâtiments demeurant inchangée, ne remettent pas en cause l'économie générale du projet qui a pu être régulièrement approuvé sans nouvelle enquête ;

Considérant, en second lieu, que le rapport de présentation analyse la situation de l'agriculture et des exploitations en activité et conclut à la nécessité de préserver l'agriculture intensive de la plaine de Couternon ; qu'il ne peut être regardé comme ne comportant pas, en ce qui concerne l'agriculture, le diagnostic de l'état des différentes activités prévu par l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ;

Sur la légalité interne de la délibération litigieuse :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme : Les zones agricoles sont dites zones A. Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées en zone A. Est également autorisé, en application du 2° de l'article R. 123-12, le changement de destination des bâtiments agricoles identifiés dans les documents graphiques du règlement. ; qu'aux termes de l'article R. 123-4 du même code : Le règlement (...) fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues à l'article R. 123-9. ; que cet article prévoit que : Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes : 1° Les occupations et utilisations du sol interdites ; (...). ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces articles que si, hormis les installations nécessaires aux services publics, la possibilité de construire en zone A est réservée aux seules installations agricoles, aucune disposition ne fait obstacle à la délimitation à l'intérieur d'une zone A de sous-secteurs où les constructions liées à l'agriculture sont soit soumises à des conditions restrictives, soit interdites ; que, par suite, en délimitant un sous-secteur Aa où les constructions agricoles sont prohibées les auteurs du PLU de Couternon n'ont pas commis d'erreur de droit ;



Considérant, en deuxième lieu, que les auteurs du PLU ont délimité à l'ouest de la partie agglomérée de la commune une zone A de 200 hectares correspondant à un secteur d'agriculture intensive ; que la partie de cette zone jouxtant la zone urbanisée ou appelée à l'être, a été placée dans un sous-secteur Aa de 95 hectares où les constructions agricoles sont interdites ; que ce sous-secteur Aa ne comprend pas de sièges d'exploitation ; qu'il n'est pas démontré que le mode d'agriculture qui y est pratiqué nécessiterait l'édification d'installations particulières ; que, par suite, ce parti d'urbanisme qui permet de maintenir libre de toute construction l'espace à l'ouest du bourg au-delà d'une voie à créer qui doit marquer la limite de l'extension de l'urbanisation, et qui assure corrélativement la préservation totale du potentiel agronomique des terres comprises dans ce sous secteur, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme : Les zones naturelles et forestières sont dites zones N. Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels. (...). ;

Considérant que les auteurs du PLU ont délimité à l'est de la commune une zone N de 150 hectares environ qui correspond à d'anciennes gravières constituant après réhabilitation des zones humides, à des espaces boisés et à une zone cultivée ; qu'alors qu'une zone A a été délimitée autour du siège d'une exploitation il n'est pas établi que ce classement, qui n'emporte pour la zone cultivée aucune restriction à la mise en valeur des terres, constituerait un obstacle à la pérennité d'exploitations agricoles ; que, par suite, ce parti d'urbanisme n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer : 1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable ; (...)3° Une utilisation économe et équilibrée des espaces naturels, urbains, périurbains et ruraux (...). ; que si ces dispositions ne sauraient être regardées comme interdisant, lors de la révision d'un plan local d'urbanisme, des modifications répondant aux besoins de développement d'une agglomération, elles impliquent le respect d'un principe d'équilibre entre le développement de l'urbanisation et la préservation des activités agricoles ;

Considérant que le plan local d'urbanisme révisé de Courtenon qui, sur un territoire communal d'environ 680 hectares, place en zone N, A et Aa environ 350 hectares en deux entités homogènes, assure une préservation suffisante des espaces affectés aux activités agricoles compatible avec les dispositions précitées de l'article L. 121-10 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;


Sur les frais irrépétibles :

Considérant que les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, dès lors qu'il est partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge sur le fondement des mêmes dispositions le versement à la commune d'une somme de 1 200 euros ;
DECIDE :


Article 1er : La requête de M. Henri A est rejetée.
Article 2 : Sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, M. A versera à la commune de Couternon une somme de 1 200 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Henri A et à la commune de Couternon.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2010 à laquelle siégeaient :
M. Bézard, président de chambre,
M. Fontbonne, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 avril 2010.
''
''
''
''
1
2
N° 08LY00340
id



Retourner en haut de la page