Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 11/12/2009, 312515

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu le pourvoi, enregistré le 24 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 16 octobre 2006, par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 19 août 1999, refusant à MM. Maurice et Henri A et à Mme Viane A, épouse B, le bénéfice de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit du château de Castillon situé à Arengosse (40610) ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit aux conclusions de son recours ;



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Prévost, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et autres,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et autres ;




Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MM. Maurice et Henri A et Mme Viane A ont hérité en mars 1996 d'un château ; qu'ils ont demandé, en novembre 1996, le bénéfice de l'exonération des droits de mutation à titre gratuit prévue par l'article 795 A du code général des impôts ; que, par une décision en date du 19 août 1999, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE a rejeté cette demande ; que la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt du 9 novembre 2007, contre lequel le ministre se pourvoit en cassation, a confirmé le jugement du tribunal administratif de Paris du 16 octobre 2006 qui a annulé la décision du 19 août 1999 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 795 A du code général des impôts : Sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit les biens immeubles par nature ou par destination qui sont, pour l'essentiel, classés ou inscrits sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, ainsi que les biens meubles qui en constituent le complément historique ou artistique, dès lors que les héritiers, les donataires ou les légataires ont souscrit avec les ministres chargés de la culture et des finances une convention à durée indéterminée prévoyant le maintien dans l'immeuble des meubles exonérés et leurs conditions de présentation, les modalités d'accès du public ainsi que les conditions d'entretien des biens exonérés, conformément à des dispositions types approuvées par décret. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que, d'une part, la circonstance que les seules parties extérieures d'un immeuble historique sont protégées ne fait pas obstacle à l'agrément de la convention mentionnée à l'article 795 A et que, d'autre part, dans cette hypothèse, la convention peut limiter la visite au parc dès lors que le public peut accéder aux parties inscrites ou classées ;

Considérant, en premier lieu, qu'après avoir relevé que seules les façades et les toitures du château étaient inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques et que les consorts A avaient soumis au ministre un projet de convention en novembre 1996 par lequel ils s'engageaient à ouvrir le parc dans les conditions prévues par les dispositions précitées, la cour a pu, sans erreur de droit, juger que le ministre ne pouvait refuser le bénéfice de l'exonération au motif que l'intérieur du château n'était pas ouvert au public et que le libre accès au parc n'était pas équivalent, dans la présente hypothèse, à l'ouverture au public du château lui-même ;

Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que la visibilité depuis la voie publique des éléments protégés du château rend sans objet la conclusion de la convention prévue par les dispositions de l'article 795 A du code général des impôts, et qu'en conséquence la décision du 19 août 1999 serait légalement motivée, est nouveau en cassation et, par suite, irrecevable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE doit être rejeté ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement aux consorts A de la somme de 3 000 euros ;




D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. Maurice A, à M. Henri A et à Mme Viane A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, à M. Maurice A, à M. Henri A et à Mme Viane A, épouse B.


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