Conseil d'État, Section du Contentieux, 08/06/2009, 322236, Publié au recueil Lebon
Conseil d'État, Section du Contentieux, 08/06/2009, 322236, Publié au recueil Lebon
Conseil d'État - Section du Contentieux
- N° 322236
- Publié au recueil Lebon
Lecture du
lundi
08 juin 2009
- Président
- M. Stirn
- Rapporteur
- Mme Laure Bédier
- Avocat(s)
- SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 322236, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 novembre et 8 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bruno A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation dirigée contre les opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Corbeil-Essonnes et sa demande de rejet du compte de campagne de M. Serge B ;
2°) d'annuler ces opérations électorales, de rejeter le compte de campagne de M. B et de le déclarer inéligible pour une durée d'un an ;
3°) de mettre à la charge de M. B la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 322237, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 novembre et 8 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bruno A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), d'une part, l'a déclaré inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d'un an et, d'autre part, a annulé son élection et proclamé élu M. C ;
2°) de rejeter la saisine de la CNCCFP et d'approuver son compte de campagne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers, notamment les courriers adressés au Conseil d'Etat par M. B, en dernier lieu le 6 juin 2009 ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 mai 2009, présentée pour M. B ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. B,
- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A et à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. B ;
Considérant qu'à l'issue du second tour des élections municipales qui s'est déroulé le 16 mars 2008 à Corbeil-Essonnes (Essonne), la liste menée par M. B a recueilli 6 621 voix et celle de M. A 6 451 voix ; que, par le jugement dont ce dernier demande l'annulation sous le n° 322236, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation dirigée contre ces élections ; que par le jugement attaqué par le même requérant sous le n° 322237, le tribunal, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller municipal pour un an, a annulé son élection au conseil municipal de Corbeil-Essonnes et proclamé élu M. Michel C, candidat figurant immédiatement après le dernier élu de la liste de M. A ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions relatives aux opérations électorales :
Considérant que les faits énoncés par quatre témoignages relatifs à la mise en place d'un système organisé de distribution d'argent par des membres de l'entourage de M. B à des électeurs de Corbeil-Essonnes peu avant ou pendant les deux tours des élections ne peuvent être tenus pour établis, dès lors que leurs auteurs ne se sont pas présentés, bien que dûment convoqués, à l'enquête à laquelle il a été procédé par la 1ère sous-section lors de l'audience d'instruction tenue le 29 avril 2009 ; que toutefois, d'une part, plusieurs habitants de Corbeil-Essonnes ont attesté avoir eu directement ou indirectement connaissance de dons d'argent effectués par M. B en faveur d'habitants de la commune, y compris dans la période précédant les opérations électorales ; que l'un d'entre eux, présent à l'enquête, a formellement réitéré son témoignage dans des conditions conduisant à tenir pour établis les faits ainsi relatés ; que, d'autre part, dans un document audiovisuel portant sur un échange entre les deux candidats pendant la campagne électorale et versé au dossier, M. B, interpellé sur l'existence de dons en argent aux habitants de la commune, ne conteste pas l'existence de telles pratiques mais en minimise la portée et nie qu'elles aient eu un caractère électoral ; que si M. B a porté plainte contre certains des témoins mentionnés ci-dessus et si, interrogé sur ce point lors de l'audience d'instruction, il a indiqué que la réponse qu'il donne dans le document audiovisuel correspond à un trait d'humour, ces arguments ne sauraient ôter leur caractère probant aux éléments qui établissent l'existence de pratiques de dons en argent d'une ampleur significative à destination des habitants de la commune ; que de tels faits, quelles qu'aient pu être les motivations de M. B, doivent être regardés, dès lors qu'ils traduisent une pratique persistante, y compris pendant la période électorale, comme intervenus en vue des élections et comme ayant pu affecter la libre détermination des électeurs ; que si l'ampleur de ces dons en argent ne peut être précisément déterminée, ces faits ont été, eu égard à l'écart de voix, de nature à altérer la sincérité du scrutin et à en vicier les résultats ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête et sans qu'il y ait lieu, pour le Conseil d'Etat, juge de l'élection, de surseoir à statuer jusqu'à ce que le juge pénal se soit prononcé sur les plaintes déposées par M. B, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé pour l'élection du conseil municipal de la commune de Corbeil-Essonnes ;
Sur les conclusions relatives au compte de campagne de M. B :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. (...) Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs et indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 234 du même code : Peut être déclaré inéligible pendant un an celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que des dépenses correspondant à des dons d'argent, dont le montant ne peut être tenu pour négligeable, ont été exposées par M. B en vue de l'élection ; qu'ainsi, son compte ne retrace pas l'ensemble des dépenses engagées, contrairement à ce que prescrit l'article L. 52-12 du code électoral ; qu'en outre, la réintégration de ces dons d'argent, quel qu'en soit le montant exact, dans le compte qui avait été présenté à l'équilibre, conduit à un excédent des dépenses engagées sur les recettes qu'il retrace ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Versailles, il y donc lieu, compte tenu du caractère substantiel des irrégularités constatées, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres dépenses en litige, de rejeter le compte de campagne de M. B et de prononcer son inéligibilité pour un an aux fonctions de conseiller municipal ;
Sur les conclusions relatives au compte de campagne et à l'éligibilité de M. A :
Considérant que, s'il n'y a pas lieu d'inclure dans les comptes de campagne les sommes correspondant à l'utilisation de salles mises gratuitement à disposition par les collectivités territoriales, dès lors que l'ensemble des candidats a pu disposer de facilités analogues, il résulte de l'instruction que la salle du palais des sports, gérée par la Communauté d'agglomération Seine-Essonne et utilisée le 26 janvier 2008 par M. A dans le cadre de sa campagne électorale, n'était pas mise à sa disposition à titre gratuit, et n'avait d'ailleurs pas été mise gratuitement à la disposition des autres listes ; que, quand bien même M. A n'aurait eu connaissance du coût exact de cette location, à hauteur de 2 629 euros, que par un courrier du 17 juin 2008 de la Communauté d'agglomération, les frais correspondant à cette occupation constituent des dépenses de campagne qui devaient figurer dans son compte ; que c'est dès lors à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les a réintégrés dans le compte de campagne du candidat ; qu'en conséquence, et sans que puisse être utilement invoqué le versement effectué en juillet 2008 par la fédération de l'Essonne du parti communiste français à la Communauté d'agglomération aux fins de couvrir le coût de mise à disposition du palais des sports, le compte de campagne de M. A présentait, à la date à laquelle il a été déposé auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres dépenses en litige, un excédent de dépenses sur les recettes justifiées ; qu'ainsi, ce compte ne faisait pas apparaître l'ensemble des moyens par lesquels le candidat assurait le financement de ses dépenses de campagne ; qu'il a, par suite, été rejeté à bon droit ;
Considérant qu'il est constant que l'utilisation de la salle du palais des sports était payante depuis 2005 ; qu'en admettant même que le courrier du 17 juin 2008 déjà mentionné ait constitué la première demande écrite d'un paiement, il ne résulte pas de l'instruction que la Communauté d'agglomération aurait donné à M. A l'assurance que l'occupation de cette salle pour son importante manifestation du 21 janvier 2008 s'effectuerait à titre gratuit ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller municipal pendant un an et a annulé son élection en qualité de conseiller municipal de Corbeil-Essonnes ; que ses conclusions dirigées contre les articles 1er et 2 de ce jugement doivent, en conséquence, être rejetées ; qu'il résulte toutefois de la présente décision que les dispositions de l'article 3 du même jugement, qui proclament élu M. C en qualité de conseiller municipal de Corbeil-Essonnes, doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation des opérations électorales dans la commune de Corbeil-Essonnes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par M. A et M. B ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement n° 0802858 du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2008 est annulé.
Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes sont annulées.
Article 3 : M. B est déclaré inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d'un an.
Article 4 : Le jugement n° 0806994 du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2008 est annulé en tant qu'il proclame élu M. C.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M.A est rejeté.
Article 6 : Les conclusions présentées par M. B sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Bruno A, à M. Serge B, à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation dirigée contre les opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 pour l'élection des conseillers municipaux dans la commune de Corbeil-Essonnes et sa demande de rejet du compte de campagne de M. Serge B ;
2°) d'annuler ces opérations électorales, de rejeter le compte de campagne de M. B et de le déclarer inéligible pour une durée d'un an ;
3°) de mettre à la charge de M. B la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 322237, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 novembre et 8 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bruno A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Versailles, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), d'une part, l'a déclaré inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d'un an et, d'autre part, a annulé son élection et proclamé élu M. C ;
2°) de rejeter la saisine de la CNCCFP et d'approuver son compte de campagne ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers, notamment les courriers adressés au Conseil d'Etat par M. B, en dernier lieu le 6 juin 2009 ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 mai 2009, présentée pour M. B ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. B,
- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A et à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. B ;
Considérant qu'à l'issue du second tour des élections municipales qui s'est déroulé le 16 mars 2008 à Corbeil-Essonnes (Essonne), la liste menée par M. B a recueilli 6 621 voix et celle de M. A 6 451 voix ; que, par le jugement dont ce dernier demande l'annulation sous le n° 322236, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa protestation dirigée contre ces élections ; que par le jugement attaqué par le même requérant sous le n° 322237, le tribunal, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller municipal pour un an, a annulé son élection au conseil municipal de Corbeil-Essonnes et proclamé élu M. Michel C, candidat figurant immédiatement après le dernier élu de la liste de M. A ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions relatives aux opérations électorales :
Considérant que les faits énoncés par quatre témoignages relatifs à la mise en place d'un système organisé de distribution d'argent par des membres de l'entourage de M. B à des électeurs de Corbeil-Essonnes peu avant ou pendant les deux tours des élections ne peuvent être tenus pour établis, dès lors que leurs auteurs ne se sont pas présentés, bien que dûment convoqués, à l'enquête à laquelle il a été procédé par la 1ère sous-section lors de l'audience d'instruction tenue le 29 avril 2009 ; que toutefois, d'une part, plusieurs habitants de Corbeil-Essonnes ont attesté avoir eu directement ou indirectement connaissance de dons d'argent effectués par M. B en faveur d'habitants de la commune, y compris dans la période précédant les opérations électorales ; que l'un d'entre eux, présent à l'enquête, a formellement réitéré son témoignage dans des conditions conduisant à tenir pour établis les faits ainsi relatés ; que, d'autre part, dans un document audiovisuel portant sur un échange entre les deux candidats pendant la campagne électorale et versé au dossier, M. B, interpellé sur l'existence de dons en argent aux habitants de la commune, ne conteste pas l'existence de telles pratiques mais en minimise la portée et nie qu'elles aient eu un caractère électoral ; que si M. B a porté plainte contre certains des témoins mentionnés ci-dessus et si, interrogé sur ce point lors de l'audience d'instruction, il a indiqué que la réponse qu'il donne dans le document audiovisuel correspond à un trait d'humour, ces arguments ne sauraient ôter leur caractère probant aux éléments qui établissent l'existence de pratiques de dons en argent d'une ampleur significative à destination des habitants de la commune ; que de tels faits, quelles qu'aient pu être les motivations de M. B, doivent être regardés, dès lors qu'ils traduisent une pratique persistante, y compris pendant la période électorale, comme intervenus en vue des élections et comme ayant pu affecter la libre détermination des électeurs ; que si l'ampleur de ces dons en argent ne peut être précisément déterminée, ces faits ont été, eu égard à l'écart de voix, de nature à altérer la sincérité du scrutin et à en vicier les résultats ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête et sans qu'il y ait lieu, pour le Conseil d'Etat, juge de l'élection, de surseoir à statuer jusqu'à ce que le juge pénal se soit prononcé sur les plaintes déposées par M. B, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé pour l'élection du conseil municipal de la commune de Corbeil-Essonnes ;
Sur les conclusions relatives au compte de campagne de M. B :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. (...) Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs et indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 234 du même code : Peut être déclaré inéligible pendant un an celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que des dépenses correspondant à des dons d'argent, dont le montant ne peut être tenu pour négligeable, ont été exposées par M. B en vue de l'élection ; qu'ainsi, son compte ne retrace pas l'ensemble des dépenses engagées, contrairement à ce que prescrit l'article L. 52-12 du code électoral ; qu'en outre, la réintégration de ces dons d'argent, quel qu'en soit le montant exact, dans le compte qui avait été présenté à l'équilibre, conduit à un excédent des dépenses engagées sur les recettes qu'il retrace ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Versailles, il y donc lieu, compte tenu du caractère substantiel des irrégularités constatées, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres dépenses en litige, de rejeter le compte de campagne de M. B et de prononcer son inéligibilité pour un an aux fonctions de conseiller municipal ;
Sur les conclusions relatives au compte de campagne et à l'éligibilité de M. A :
Considérant que, s'il n'y a pas lieu d'inclure dans les comptes de campagne les sommes correspondant à l'utilisation de salles mises gratuitement à disposition par les collectivités territoriales, dès lors que l'ensemble des candidats a pu disposer de facilités analogues, il résulte de l'instruction que la salle du palais des sports, gérée par la Communauté d'agglomération Seine-Essonne et utilisée le 26 janvier 2008 par M. A dans le cadre de sa campagne électorale, n'était pas mise à sa disposition à titre gratuit, et n'avait d'ailleurs pas été mise gratuitement à la disposition des autres listes ; que, quand bien même M. A n'aurait eu connaissance du coût exact de cette location, à hauteur de 2 629 euros, que par un courrier du 17 juin 2008 de la Communauté d'agglomération, les frais correspondant à cette occupation constituent des dépenses de campagne qui devaient figurer dans son compte ; que c'est dès lors à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les a réintégrés dans le compte de campagne du candidat ; qu'en conséquence, et sans que puisse être utilement invoqué le versement effectué en juillet 2008 par la fédération de l'Essonne du parti communiste français à la Communauté d'agglomération aux fins de couvrir le coût de mise à disposition du palais des sports, le compte de campagne de M. A présentait, à la date à laquelle il a été déposé auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres dépenses en litige, un excédent de dépenses sur les recettes justifiées ; qu'ainsi, ce compte ne faisait pas apparaître l'ensemble des moyens par lesquels le candidat assurait le financement de ses dépenses de campagne ; qu'il a, par suite, été rejeté à bon droit ;
Considérant qu'il est constant que l'utilisation de la salle du palais des sports était payante depuis 2005 ; qu'en admettant même que le courrier du 17 juin 2008 déjà mentionné ait constitué la première demande écrite d'un paiement, il ne résulte pas de l'instruction que la Communauté d'agglomération aurait donné à M. A l'assurance que l'occupation de cette salle pour son importante manifestation du 21 janvier 2008 s'effectuerait à titre gratuit ; que, dans ces conditions, M. A n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller municipal pendant un an et a annulé son élection en qualité de conseiller municipal de Corbeil-Essonnes ; que ses conclusions dirigées contre les articles 1er et 2 de ce jugement doivent, en conséquence, être rejetées ; qu'il résulte toutefois de la présente décision que les dispositions de l'article 3 du même jugement, qui proclament élu M. C en qualité de conseiller municipal de Corbeil-Essonnes, doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation des opérations électorales dans la commune de Corbeil-Essonnes ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par M. A et M. B ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement n° 0802858 du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2008 est annulé.
Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 dans la commune de Corbeil-Essonnes sont annulées.
Article 3 : M. B est déclaré inéligible en qualité de conseiller municipal pour une durée d'un an.
Article 4 : Le jugement n° 0806994 du tribunal administratif de Versailles en date du 6 octobre 2008 est annulé en tant qu'il proclame élu M. C.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M.A est rejeté.
Article 6 : Les conclusions présentées par M. B sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Bruno A, à M. Serge B, à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.