Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 03/07/2009, 322430

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Aminata B, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 organisées en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune de Montreuil-sous-Bois ;

2°) d'annuler ces opérations électorales, de rejeter le compte de campagne de Mme A et de déclarer celle-ci inéligible ;




Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christian Fournier, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, Rapporteur public ;




Considérant qu'à l'issue du premier tour des élections municipales du 9 mars 2008 à Montreuil-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), la liste conduite par Mme B a obtenu 2 591 voix, soit 9,62 % des suffrages exprimés ; que Mme B fait appel du jugement du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales des 9 et 16 mars 2008 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 34 du code électoral : La commission de propagande (...) est chargée (...) d'adresser, au plus tard le mercredi précédant le premier tour de scrutin (...) à tous les électeurs de la circonscription, dans une même enveloppe fermée, une circulaire et un bulletin de vote de chaque candidat ou de chaque liste (...) ;

Considérant que, pour contester les opérations électorales qui se sont déroulées le 9 mars 2008 dans la commune de Montreuil-sous-Bois, Mme B se fonde sur le fait qu'environ quatre cents enveloppes adressées avant le premier tour de scrutin par la commission de propagande aux électeurs de la commune ne contenaient pas la circulaire de la liste de l'Union pour un Mouvement Populaire (UMP) qu'elle conduisait ; qu'à la supposer établie, cette circonstance n'a pas été, eu égard au nombre limité des électeurs qui n'auraient pas reçu cette circulaire par rapport au nombre des électeurs inscrits, soit 51 225, de nature à altérer les résultats du scrutin ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 51 du code électoral : Pendant la durée de la période électorale, dans chaque commune, des emplacements spéciaux sont réservés par l'autorité municipale pour l'apposition des affiches électorales. / Dans chacun de ces emplacements, une surface égale est attribuée à chaque candidat ou à chaque liste de candidats. / Pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l'élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l'emplacement réservé aux autres candidats. ;

Considérant que, s'il est constant que des affiches électorales de la liste conduite par Mme A ont été apposées avant le scrutin hors des emplacements réservés à cet effet, en violation des dispositions précitées de l'article L. 51 du code électoral, cet abus de propagande ne saurait être regardé, en raison du nombre limité et du contenu de ces affiches, comme ayant été de nature à altérer la sincérité du scrutin ;

Considérant en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 52-8 du code électoral : (...) Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués. (...) ;

Considérant que Mme B soutient que la liste conduite par Mme A a bénéficié, pour mener sa campagne électorale, du soutien du journal local Le Poivron , en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 52-8 du code électoral ; que les organes de presse sont libres de prendre position en faveur de l'un ou l'autre des candidats dans le cadre des campagnes électorales sans que ces prises de position ne constituent des actes de propagande en faveur du candidat qui en bénéficie ; que, dès lors, les articles du journal Le Poivron favorables à la liste conduite par Mme A ne sauraient être regardés comme constitutifs d'un don fourni à cette liste par l'association éditrice dudit journal, en violation des dispositions précitées de l'article L. 52-8 précité ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales : Dans les communes de 3 500 habitants et plus, lorsque la commune diffuse, sous quelque forme que ce soit, un bulletin d'information générale sur les réalisations et la gestion du conseil municipal, un espace est réservé à l'expression des conseillers n'appartenant pas à la majorité municipale. Les modalités d'application de cette disposition sont définies par le règlement intérieur. ; qu'il ressort de l'instruction que la commune de Montreuil-sous-Bois a fait paraître, dans la rubrique libre expression de la revue municipale Montreuil Dépêche Hebdo , deux articles émanant du groupe politique au sein du conseil municipal Avec les Verts, Montreuil ville ouverte ; que le premier article paru en novembre 2007 invitait les habitants de la commune à se joindre à l'appel lancé par Mme A en vue des élections municipales de mars 2008, tandis que le second, paru en janvier 2008, dressait le bilan de l'action des membres du conseil municipal appartenant au groupe et faisait part de leur volonté de poursuivre leur travail après mars 2008 ; que seul le premier article doit être regardé comme un document de propagande en faveur de la liste conduite par Mme A qui, compte tenu de sa gratuité, est assimilable à un don provenant d'une personne morale, prohibé par l'article L. 52-8 du code électoral ; que toutefois, eu égard, à son contenu, à sa date de diffusion et à l'écart des voix entre les listes en présence, cette irrégularité n'a pas été de nature à altérer les résultats du scrutin, ni à entraîner, compte tenu de la valeur réduite de ce don, l'irrégularité du compte de campagne de M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa protestation ;




D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Aminata B, à Mme Dominique A, à M. Jean-Pierre C et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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