Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 09/04/2009, 08DA00989, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu, I, sous le n° 08DA00989, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 27 juin 2008 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 4 juillet 2008, présentée pour la SOCIETE SECE-CB, dont le siège est Les Trois Fontaines à Cergy Pontoise Cedex (95003), par la CGR Legal ; la SOCIETE SECE-CB demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 0502391 - 0502392 - 0601726 et 0601727 du 3 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs , les arrêtés en date du 15 mars 2005 du préfet de l'Oise portant permis de construire de deux sites de six éoliennes, d'une part sur le territoire de la commune de Francastel et, d'autre part, sur le territoire des communes de Crèvecoeur-le-Grand et Viefvillers et les arrêtés du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise modifiant lesdits permis de construire ;
2°) de rejeter les demandes présentées par l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs ;
3°) de mettre à la charge de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La SOCIETE SECE-CB soutient que le jugement est irrégulier du fait de l'absence dans les visas de la note en délibéré produite avant sa date de lecture ; que l'étude d'impact ne présentait pas un caractère lacunaire, celle-ci ayant été complétée, en ce qui concerne les relevés ornithologiques, par des études complémentaires qui ont suffi pour lever les réserves de la direction régionale de l'environnement ; que la présence à proximité des sites retenus d'un centre de soins pour oiseaux n'a pas d'influence sur la présence d'éoliennes, les retours à la vie sauvage des oiseaux ne se faisant pas sur place ; que les conclusions du commissaire-enquêteur sont suffisamment motivées, que ce dernier a bien pris en compte toutes les observations formulées et a exprimé un avis personnel sur les projets ; que les modifications apportées aux projets par le changement du type d'aérogénérateur choisi sont minimes et ne peuvent être assimilées à une modification substantielle des permis de construire ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2008, présenté pour l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs , dont le siège est situé 12 rue de l'église à Francastel (60480), par la Selarl Blery - Engueleguele, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE SECE CB une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs soutient que le visa de la note en délibéré doit être compris comme inclus dans le visa générique concernant les autres pièces du dossier ; que l'enquête publique est lacunaire, les observations initiales de la direction régionale de l'environnement préconisaient des relevés ornithologiques en période pré et post-nuptiales et que, seuls, les relevés prénuptiaux ont été réalisés ; que l'enquête publique ne pouvait taire la présence d'un centre de soins des oiseaux à proximité immédiate d'un site retenu pour l'implantation d'éoliennes ; que le commissaire-enquêteur n'a pas répondu aux questions posées sur la conformité des projets aux cadres réglementaires applicables ; que les modifications apportées aux projets par le pétitionnaire les ont modifiés de façon substantielle, le préfet ne pouvait, dans ces conditions, accorder de permis de construire modificatif sans consulter de nouveau le public ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2009, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui conclut à l'annulation du jugement du 3 juin 2008 du Tribunal administratif d'Amiens ; le ministre soutient que le jugement est irrégulier en l'absence de visa de la note en délibéré produite par la société requérante ; que l'étude d'impact était suffisante ; que les conclusions du commissaire-enquêteur dans le rapport d'enquête publique sont suffisamment motivées ; que les permis de construire modificatifs n'affectent pas l'économie générale du projet ; que l'avis d'ouverture d'enquête publique était parfaitement lisible ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 30 janvier 2009 et régularisé par la production de l'original le 3 février 2009, présenté pour la SOCIETE SECE-CB, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ; la SOCIETE SECE-CB soutient que la demande présentée devant le tribunal administratif était irrecevable faute pour l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs d'avoir été régulièrement constituée avant l'enregistrement de sa demande au greffe du Tribunal ; que les vices retenus à l'encontre des permis de construire sont régularisables ; qu'ainsi, et compte tenu de l'intérêt général du projet ainsi que du préjudice subi par l'appelante, la Cour devra surseoir à statuer dans l'attente de l'instruction par le préfet des nouveaux permis de construire déposés le 22 décembre 2008 ;
Vu l'ordonnance en date du 3 février 2009 portant clôture d'instruction au 3 mars 2009 ;
Vu, II, sous le n° 08DA01236, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 août 2008, présentée pour la SOCIETE SECE-CB, dont le siège est Les Trois Fontaines à Cergy Pontoise Cedex (95003), par la CGR Legal ; la SOCIETE SECE-CB demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement nos 0502391 - 0502392 - 0601726 et 0601727 du 3 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs , les arrêtés en date du 15 mars 2005 du préfet de l'Oise portant permis de construire de deux sites de six éoliennes, d'une part sur le territoire de la commune de Francastel et, d'autre part, sur le territoire des communes de Crèvecoeur-le-Grand et Viefvillers et les arrêtés du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise modifiant lesdits permis de construire ;
2°) de mettre à la charge de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La SOCIETE SECE-CB soutient qu'il y a urgence à suspendre le jugement attaqué en raison des préjudices financiers extrêmement graves qu'il entraîne pour elle ; qu'ainsi, les conditions nécessaires à l'octroi du sursis sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative sont satisfaites ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 août 2008, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui déclare ne présenter aucune observation dans cette affaire ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 26 septembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 30 septembre 2008, présenté pour l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs , représentée par sa présidente et dont le siège est situé 12 rue de l'Eglise à Francastel (60480), par la Selarl Blery - Engueleguele, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE SECE-CB une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les développements sur les pertes financières générées pour la SOCIETE SECE-CB par l'interruption des travaux suite à l'annulation des permis de construire par le Tribunal administratif d'Amiens sont sans influence pour surseoir à l'exécution du jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 janvier 2009 et régularisé par la production de l'original le 20 janvier 2009, présenté pour la SOCIETE SECE-CB, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ; la SOCIETE SECE-CB soutient qu'elle subit des préjudices financiers importants risquant d'entraîner des conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-15 du code de justice administrative ; que le projet a toujours présenté de manière globale les deux sites de six éoliennes comme faisant partie du même ensemble ; qu'ainsi est inopérant le moyen soulevé d'une erreur de droit sur l'application des textes en vigueur sur l'obligation de racheter l'électricité par EDF s'agissant d'un litige portant sur les autorisations d'urbanisme ; que le projet n'a pas été modifié substantiellement ;
Vu l'ordonnance en date du 3 février 2009 portant clôture d'instruction au 3 mars 2009 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, alors en vigueur ;
Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1983, alors en vigueur ;

Vu le décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Cassin, pour la SOCIETE SECE-CB et M. Canoye, président de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs ;
Considérant que les requêtes nos 08DA00989 et 08DA01236 présentées pour la SOCIETE SECE-CB présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que la SOCIETE SECE-CB relève appel du jugement en date du 3 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a annulé, à la demande de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs , les arrêtés en date du 15 mars 2005 du préfet de l'Oise portant permis de construire de deux sites de six éoliennes, d'une part sur le territoire de la commune de Francastel et, d'autre part, sur le territoire des communes de Crèvecoeur-le-Grand et Viefvillers et les arrêtés du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise modifiant lesdits permis de construire ;
Sur la requête n° 08DA00989 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que lorsqu'il est saisi, postérieurement à la clôture de l'instruction et au prononcé des conclusions du commissaire du gouvernement, d'une note en délibéré émanant d'une des parties à l'instance, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision ainsi, au demeurant, que de la viser sans l'analyser ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'après l'audience publique, qui a eu lieu le 20 mai 2008, la SOCIETE SECE CB a adressé au Tribunal administratif d'Amiens une note en délibéré en date du 2 juin 2008, soit avant la lecture du jugement qui a eu lieu le 4 juin 2008 ; que les visas du jugement attaqué ne font pas mention de cette note ; qu'en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, la SOCIETE SECE CB est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé les arrêtés en date du 15 mars 2005 du préfet de l'Oise portant permis de construire de deux sites de six éoliennes et les arrêtés du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise modifiant lesdits permis de construire ;
Considérant qu'il y a lieu, pour la Cour, de statuer par voie d'évocation sur les demandes d'annulation de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs présentées devant le Tribunal administratif d'Amiens en ce qui concerne les arrêtés en date du 15 mars 2005 et du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise ;
Sur la recevabilité des demandes présentées par l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs devant le Tribunal administratif d'Amiens le 7 septembre 2005 et tendant à l'annulation des permis de construire initiaux du 15 mars 2005 :
Considérant qu'une association ne peut agir en justice que si elle est légalement constituée à la date d'enregistrement de sa requête ; qu'il ressort des pièces du dossier que les statuts de l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs sont datés du 18 novembre 2005 et celle-ci n'établit pas qu'elle existait légalement le 7 septembre 2005, date à laquelle ses demandes tendant à l'annulation des permis de construire délivrés le 15 mars 2005 par le préfet de l'Oise à la SOCIETE SECE CB ont été enregistrées au greffe du Tribunal administratif d'Amiens ; qu'ainsi, la SOCIETE SECE CB est fondée à soutenir que ces demandes était irrecevables ;
Sur les demandes présentées par l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs devant le Tribunal administratif d'Amiens le 18 juillet 2006 et tendant à l'annulation des permis de construire modificatifs en date du 18 mai 2006 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les modifications apportées aux projets initiaux, faisant l'objet des permis délivrés le 18 mai 2006 et consistant en l'implantation d'un modèle distinct d'éoliennes, se traduisent par une élévation du moyeu des installations de cinq mètres mais également par une diminution de la hauteur générale des éoliennes de cinquante centimètres et une légère réduction du niveau sonore émis ; qu'en outre, les demandes de permis de construire modificatifs mentionnent une augmentation de la surface hors oeuvre brute de chaque site, correspondant à l'emprise au sol des fondations des éoliennes, de 148 m2 à 190,85 m2 maximum ; que de telles modifications mineures ne portaient pas atteinte à l'économie générale du projet ; que, par suite, contrairement à ce que soutient l'association demanderesse en première instance, les permis de construire modificatifs ne devaient pas être précédés d'une nouvelle enquête publique ; que, dès lors, les arrêtés contestés ne sont pas entachés d'irrégularité ;
Considérant enfin, que la circonstance que les deux permis modificatifs auraient été accordés suite à un avis partial des maires des communes concernées n'est pas à même d'établir le détournement de pouvoir allégué ;
Considérant que, par suite, l'association Bien vivre à Francastel et dans ces environs n'est pas fondée à demander l'annulation des arrêtés en date du 18 mai 2006 du préfet de l'Oise portant permis de construire modificatifs des deux sites d'éoliennes ;
Sur la requête n° 08DA01236 ;
Considérant, dès lors, que la Cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la SOCIETE SECE CB tendant à l'annulation du jugement du 3 juin 2008 du Tribunal administratif d'Amiens, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête présentée par cette dernière tendant au sursis à exécution dudit jugement ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SOCIETE SECE CB, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs à verser à la SOCIETE SECE-CB une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours n° 08DA01236.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif d'Amiens du 3 juin 2006 est annulé.
Article 3 : les demandes présentées par l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs devant le Tribunal administratif d'Amiens sont rejetées.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SECE-CB, à l'association Bien vivre à Francastel et dans ses environs et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet de l'Oise.
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Nos08DA00989,08DA01236



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