Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 28/12/2007, 303879
Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 28/12/2007, 303879
Conseil d'État - 3ème et 8ème sous-sections réunies
- N° 303879
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
28 décembre 2007
- Président
- M. Martin
- Rapporteur
- M. Laurent Cabrera
- Avocat(s)
- LE PRADO ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 mars et 3 avril 2007, présentés pour Mme Maryse A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 2 mars 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la suspension, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'arrêté du 3 octobre 2006 du président du conseil général du Gers refusant de lui délivrer un agrément d'accueillant familial et de la décision du 13 décembre 2006 confirmant ce refus ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré présentée le 28 novembre 2007 pour Mme A ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,
- les observations de Me Le Prado, avocat de Mme A et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat du département du Gers,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme Maryse A, qui souhaitait prendre à bail une maison Villa Family située dans la commune de Montestruc (Gers), a demandé au président du conseil général du Gers de lui accorder l'agrément aux fins d'accueillir à son domicile des personnes âgées prévu à l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles ; que, par un arrêté du 3 octobre 2006, le président du conseil général du Gers a refusé de lui délivrer cet agrément ; que, par une décision du 13 décembre 2006, le même président a rejeté le recours gracieux qu'elle avait formé contre la décision du 3 octobre 2006 ; que Mme A se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 2 mars 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à ce que soit suspendue l'exécution de l'arrêté du 3 octobre 2006 et de la décision du 13 décembre 2006 ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant, en premier lieu, que l'ordonnance attaquée a omis de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 13 décembre 2006 rejetant son recours gracieux ; que, contrairement à ce que soutient le département dans son mémoire en défense, le motif tiré de ce que la demande devant le juge des référés était irrecevable ne peut en tout état de cause remédier à cette irrégularité ; que la requérante est dès lors fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de cette ordonnance ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles : Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes n'appartenant pas à sa famille jusqu'au quatrième degré inclus (...), une personne ou un couple doit, au préalable, faire l'objet d'un agrément, renouvelable, par le président du conseil général de son département de résidence qui en instruit la demande ( ...). /La décision d'agrément fixe, dans la limite de trois, le nombre de personnes pouvant être accueillies. /L'agrément ne peut être accordé que si les conditions d'accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies, si les accueillants se sont engagés à suivre une formation initiale et continue organisée par le président du conseil général et si un suivi social et médico-social de celles-ci peut être assuré. Tout refus d'agrément est motivé (...) ; qu'aux termes de l'article R. 441-1 du même code : Pour obtenir l'agrément mentionné à l'article L. 441-1 du présent code, la personne ou le couple proposant un accueil à son domicile, à titre habituel et onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes doit : /1° Justifier de conditions d'accueil permettant d'assurer la santé, la sécurité, le bien-être physique et moral des personnes accueillies ; (...) /3° Disposer d'un logement dont l'état, les dimensions et l'environnement répondent aux normes fixées par l'article R. 831-13 et par le premier alinéa de l'article R. 831-13-1 du code de la sécurité sociale et soient compatibles avec les contraintes liées à l'âge ou au handicap de ces personnes (...) ;
Considérant que le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, dès lors que Mme A ne disposait pas à la date de l'arrêté du 3 octobre 2006 d'un logement totalement construit qui lui aurait permis d'accueillir des personnes âgées, aucun des moyens soulevés par cette dernière à l'encontre de cet arrêté et tirés des erreurs qui entacheraient ses autres motifs, n'était de nature à faire naître un doute sérieux quant à sa légalité ; que, par suite, l'unique moyen de cassation soulevé à l'encontre de l'ordonnance en tant qu'elle a rejeté les conclusions de Mme A tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif que dans la mesure où celle-ci a omis de statuer sur ses conclusions relatives à la décision du 13 décembre 2006 ;
Considérant qu'il y a lieu de se prononcer sur ces conclusions en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande par le département du Gers ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution de la décision de rejet de son recours gracieux, Mme A soutient qu'elle serait victime de discrimination, que la décision est entachée de détournement de pouvoir dès lors qu'elle a été prise pour des causes étrangères aux dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à l'agrément familial, que le président du conseil général du Gers a commis une erreur d'appréciation en estimant que les conditions personnelles d'exercice de l'activité d'hébergement justifiaient le refus qui lui a été opposé, et que la nature du bail locatif qu'elle a conclu pour les logements en cause ne fait pas obstacle à un hébergement des personnes dont elle se verrait confier la charge dans des conditions conformes aux exigences posées par le code de l'action sociale et des familles ;
Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à faire naître, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, la demande présentée par Mme A doit être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Gers la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle devant le tribunal administratif et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du 2 mars 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Pau est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Maryse A et au président du conseil général du Gers.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré présentée le 28 novembre 2007 pour Mme A ;
Vu le code de l'action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,
- les observations de Me Le Prado, avocat de Mme A et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat du département du Gers,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme Maryse A, qui souhaitait prendre à bail une maison Villa Family située dans la commune de Montestruc (Gers), a demandé au président du conseil général du Gers de lui accorder l'agrément aux fins d'accueillir à son domicile des personnes âgées prévu à l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles ; que, par un arrêté du 3 octobre 2006, le président du conseil général du Gers a refusé de lui délivrer cet agrément ; que, par une décision du 13 décembre 2006, le même président a rejeté le recours gracieux qu'elle avait formé contre la décision du 3 octobre 2006 ; que Mme A se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 2 mars 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à ce que soit suspendue l'exécution de l'arrêté du 3 octobre 2006 et de la décision du 13 décembre 2006 ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant, en premier lieu, que l'ordonnance attaquée a omis de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 13 décembre 2006 rejetant son recours gracieux ; que, contrairement à ce que soutient le département dans son mémoire en défense, le motif tiré de ce que la demande devant le juge des référés était irrecevable ne peut en tout état de cause remédier à cette irrégularité ; que la requérante est dès lors fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de cette ordonnance ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 441-1 du code de l'action sociale et des familles : Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes n'appartenant pas à sa famille jusqu'au quatrième degré inclus (...), une personne ou un couple doit, au préalable, faire l'objet d'un agrément, renouvelable, par le président du conseil général de son département de résidence qui en instruit la demande ( ...). /La décision d'agrément fixe, dans la limite de trois, le nombre de personnes pouvant être accueillies. /L'agrément ne peut être accordé que si les conditions d'accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies, si les accueillants se sont engagés à suivre une formation initiale et continue organisée par le président du conseil général et si un suivi social et médico-social de celles-ci peut être assuré. Tout refus d'agrément est motivé (...) ; qu'aux termes de l'article R. 441-1 du même code : Pour obtenir l'agrément mentionné à l'article L. 441-1 du présent code, la personne ou le couple proposant un accueil à son domicile, à titre habituel et onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes doit : /1° Justifier de conditions d'accueil permettant d'assurer la santé, la sécurité, le bien-être physique et moral des personnes accueillies ; (...) /3° Disposer d'un logement dont l'état, les dimensions et l'environnement répondent aux normes fixées par l'article R. 831-13 et par le premier alinéa de l'article R. 831-13-1 du code de la sécurité sociale et soient compatibles avec les contraintes liées à l'âge ou au handicap de ces personnes (...) ;
Considérant que le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, dès lors que Mme A ne disposait pas à la date de l'arrêté du 3 octobre 2006 d'un logement totalement construit qui lui aurait permis d'accueillir des personnes âgées, aucun des moyens soulevés par cette dernière à l'encontre de cet arrêté et tirés des erreurs qui entacheraient ses autres motifs, n'était de nature à faire naître un doute sérieux quant à sa légalité ; que, par suite, l'unique moyen de cassation soulevé à l'encontre de l'ordonnance en tant qu'elle a rejeté les conclusions de Mme A tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif que dans la mesure où celle-ci a omis de statuer sur ses conclusions relatives à la décision du 13 décembre 2006 ;
Considérant qu'il y a lieu de se prononcer sur ces conclusions en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande par le département du Gers ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution de la décision de rejet de son recours gracieux, Mme A soutient qu'elle serait victime de discrimination, que la décision est entachée de détournement de pouvoir dès lors qu'elle a été prise pour des causes étrangères aux dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à l'agrément familial, que le président du conseil général du Gers a commis une erreur d'appréciation en estimant que les conditions personnelles d'exercice de l'activité d'hébergement justifiaient le refus qui lui a été opposé, et que la nature du bail locatif qu'elle a conclu pour les logements en cause ne fait pas obstacle à un hébergement des personnes dont elle se verrait confier la charge dans des conditions conformes aux exigences posées par le code de l'action sociale et des familles ;
Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à faire naître, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; que, par suite, la demande présentée par Mme A doit être rejetée ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Gers la somme que Mme A demande au titre des frais exposés par elle devant le tribunal administratif et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 2 mars 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Pau est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Maryse A et au président du conseil général du Gers.