Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 30/05/2007, 274477
Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 30/05/2007, 274477
Conseil d'État - 10ème et 9ème sous-sections réunies
- N° 274477
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
30 mai 2007
- Président
- M. Delarue
- Rapporteur
- M. Jean-Claude Hassan
- Avocat(s)
- BALAT
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2004 et 18 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gérard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 28 juin 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 2 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 et, d'autre part, à la décharge de l'imposition contestée ;
2°) statuant au fond, de prononcer la décharge de cette imposition ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Claude Hassan, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Balat, avocat de M. A,
- les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de la société civile immobilière d'Orléans, l'administration a constaté que la société qui s'était placée initialement sous le régime des sociétés de construction-vente n'exerçait qu'une activité de gestion immobilière et a en conséquence taxé dans la catégorie des revenus fonciers les recettes retirées, au cours des années 1991 à 1993, de la location des immeubles dont elle était propriétaire ; que M. A, qui est associé de la SCI à 99 %, a en conséquence été assujetti à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de 1993, seule année pour laquelle les redressements ont conduit à fixer une base imposable à la fois accrue et non déficitaire ; M. A a demandé la décharge de cette imposition en faisant valoir que devait être déduite des revenus fonciers de la SCI une partie au moins des dépenses de travaux qu'elle avait supportées ;
Considérant que, pour rejeter la requête de M. A, la cour administrative d'appel a considéré que le requérant ne justifiait ni du paiement effectif en 1993 des dépenses dont il demandait la déduction ni de leur lien avec l'immeuble en cause ; qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond et comme le reconnaît d'ailleurs le ministre, que l'administration n'avait jamais contesté ni que les factures produites devant elle avaient pour objet des travaux effectués sur les immeubles appartenant à la société ni qu'elles avaient donné lieu à des règlements au cours des années vérifiées ; qu'ainsi, en soulevant d'office les moyens susmentionnés, la cour a dénaturé les pièces du dossier et méconnu le principe du contradictoire ; que, par suite, l'arrêt attaqué doit être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts : « Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net [foncier] comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien (...) ; / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (... ) » ; que doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière d'Orléans a effectué des travaux de réhabilitation importants sur deux maisons mitoyennes, vétustes et inhabitées, comportant, l'une, deux étages, dont un seul était aménagé en chambres dotées de sanitaires, et un grenier, et l'autre, un seul étage et un grenier ; que ces travaux ont permis la transformation de ces deux maisons en un immeuble unique, divisé en six appartements et un studio ; qu'ils ont eu ainsi pour effet d'accroître la surface habitable des locaux existants et ont apporté des modifications importantes au gros oeuvre en raison, notamment, du déplacement ou du réaménagement d'ouvertures existant dans les murs séparatifs afin de permettre la communication des deux anciennes maisons et leur exploitation commune, et du percement de nouvelles ouvertures dans ces mêmes murs au sous-sol et au deuxième étage ; que ces travaux doivent, par suite, être regardés comme des travaux de reconstruction et d'agrandissement non déductibles au sens des dispositions précitées du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ; que les autres travaux, notamment de peinture et de ravalement, dont M. A demande la déduction et qui, pris isolément, pourraient être regardés comme des travaux d'amélioration ou de réparation étaient, en l'espèce, indissociables des travaux de reconstruction entrepris dans l'immeuble et sont par conséquent eux-mêmes non déductibles au sens des mêmes dispositions ;
Considérant que M. A invoque, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, le contenu d'une lettre du 20 juin 2000 par laquelle le directeur divisionnaire des services fiscaux des Côtes d'Armor a admis que certains travaux pourraient être reconnus, eu égard à leur nature, comme des dépenses déductibles ; que cependant, le signataire de cette lettre a ajouté qu'il n'était pas possible de « procéder à la ventilation nécessaire de ces deux catégories de dépenses » ; que, dans les termes où il est rédigé, ce document ne saurait par suite être considéré comme comportant une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation de la situation de fait au regard des dispositions du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 ; qu'il y a lieu dès lors de rejeter les conclusions de la requête tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 28 juin 2004 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard A et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
1°) d'annuler l'arrêt du 28 juin 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 2 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 et, d'autre part, à la décharge de l'imposition contestée ;
2°) statuant au fond, de prononcer la décharge de cette imposition ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Claude Hassan, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Balat, avocat de M. A,
- les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de la société civile immobilière d'Orléans, l'administration a constaté que la société qui s'était placée initialement sous le régime des sociétés de construction-vente n'exerçait qu'une activité de gestion immobilière et a en conséquence taxé dans la catégorie des revenus fonciers les recettes retirées, au cours des années 1991 à 1993, de la location des immeubles dont elle était propriétaire ; que M. A, qui est associé de la SCI à 99 %, a en conséquence été assujetti à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de 1993, seule année pour laquelle les redressements ont conduit à fixer une base imposable à la fois accrue et non déficitaire ; M. A a demandé la décharge de cette imposition en faisant valoir que devait être déduite des revenus fonciers de la SCI une partie au moins des dépenses de travaux qu'elle avait supportées ;
Considérant que, pour rejeter la requête de M. A, la cour administrative d'appel a considéré que le requérant ne justifiait ni du paiement effectif en 1993 des dépenses dont il demandait la déduction ni de leur lien avec l'immeuble en cause ; qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond et comme le reconnaît d'ailleurs le ministre, que l'administration n'avait jamais contesté ni que les factures produites devant elle avaient pour objet des travaux effectués sur les immeubles appartenant à la société ni qu'elles avaient donné lieu à des règlements au cours des années vérifiées ; qu'ainsi, en soulevant d'office les moyens susmentionnés, la cour a dénaturé les pièces du dossier et méconnu le principe du contradictoire ; que, par suite, l'arrêt attaqué doit être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts : « Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net [foncier] comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien (...) ; / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (... ) » ; que doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société civile immobilière d'Orléans a effectué des travaux de réhabilitation importants sur deux maisons mitoyennes, vétustes et inhabitées, comportant, l'une, deux étages, dont un seul était aménagé en chambres dotées de sanitaires, et un grenier, et l'autre, un seul étage et un grenier ; que ces travaux ont permis la transformation de ces deux maisons en un immeuble unique, divisé en six appartements et un studio ; qu'ils ont eu ainsi pour effet d'accroître la surface habitable des locaux existants et ont apporté des modifications importantes au gros oeuvre en raison, notamment, du déplacement ou du réaménagement d'ouvertures existant dans les murs séparatifs afin de permettre la communication des deux anciennes maisons et leur exploitation commune, et du percement de nouvelles ouvertures dans ces mêmes murs au sous-sol et au deuxième étage ; que ces travaux doivent, par suite, être regardés comme des travaux de reconstruction et d'agrandissement non déductibles au sens des dispositions précitées du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ; que les autres travaux, notamment de peinture et de ravalement, dont M. A demande la déduction et qui, pris isolément, pourraient être regardés comme des travaux d'amélioration ou de réparation étaient, en l'espèce, indissociables des travaux de reconstruction entrepris dans l'immeuble et sont par conséquent eux-mêmes non déductibles au sens des mêmes dispositions ;
Considérant que M. A invoque, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, le contenu d'une lettre du 20 juin 2000 par laquelle le directeur divisionnaire des services fiscaux des Côtes d'Armor a admis que certains travaux pourraient être reconnus, eu égard à leur nature, comme des dépenses déductibles ; que cependant, le signataire de cette lettre a ajouté qu'il n'était pas possible de « procéder à la ventilation nécessaire de ces deux catégories de dépenses » ; que, dans les termes où il est rédigé, ce document ne saurait par suite être considéré comme comportant une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation de la situation de fait au regard des dispositions du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 ; qu'il y a lieu dès lors de rejeter les conclusions de la requête tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 28 juin 2004 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard A et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.