Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 06/01/2006, 264449, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 06/01/2006, 264449, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 5ème et 4ème sous-sections réunies
- N° 264449
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
06 janvier 2006
- Président
- M. Martin
- Rapporteur
- M. Marc Lambron
- Avocat(s)
- SCP ROGER, SEVAUX
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°) sous le n° 264449, l'ordonnance en date du 30 janvier 2004, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 février 2004, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a renvoyé au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le jugement de la requête de M. Hubert YXY ;
Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 19 janvier 2004, présentée par M. Hubert YXY, demeurant à « ... ; M. YXY demande :
1°) l'annulation du décret du 5 novembre 2003 lui infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions de 18 mois dont 12 avec sursis ;
2°) que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, 2°) sous le n° 265218, l'ordonnance en date du 27 février 2004, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 4 mars 2004, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a renvoyé au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le jugement de la requête de M. YXY :
Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 16 février 2004, présentée par M. YXY, demeurant à « ... ; M. YXY demande :
1°) l'annulation du décret du 5 novembre 2003 lui infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions de 18 mois dont 12 avec sursis ;
2°) que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de un euro en réparation du préjudice moral subi du fait de la mesure disciplinaire injustifiée ;
3°) que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Lambron, Maître des Requêtes ;
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. MARTY ;
- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes de M. YXY, commissaire principal de la police nationale, enregistrées sous les n° s 264449 et 265218, sont dirigées contre le même décret, en date du 5 novembre 2003, lui infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions de 18 mois dont 12 avec sursis ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la légalité externe :
Considérant que la procédure disciplinaire dont M. YXY a fait l'objet n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de cet article est inopérant ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret du 25 octobre 1984 modifié, relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : « Le fonctionnaire poursuivi peut présenter devant le conseil de discipline des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix... » ; qu'en vertu des dispositions de l'article 4 du même décret : « Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception./ Ce conseil peut décider, à la majorité des membres présents, de renvoyer à la demande du fonctionnaire ou de son ou de ses défenseurs l'examen de l'affaire à une nouvelle réunion... » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant a été invité par lettre recommandée avec accusé de réception, le 6 août 2003, à comparaître devant le conseil de discipline le 12 septembre suivant ; qu'il lui était précisé qu'il avait la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs, de citer des témoins et de présenter sa défense sous la forme d'un mémoire écrit ; que, par lettre du 4 septembre 2003, le conseil du requérant a fait savoir que son client était souffrant et sollicité un report de la date de réunion du conseil de discipline ; que ce dernier, qui n'était pas tenu de renvoyer l'affaire à une séance ultérieure, a pu légalement écarter la demande formulée en ce sens par M. YXY et émettre un avis hors de la présence de l'intéressé, dès lors que ce dernier avait disposé d'un délai suffisant pour se faire représenter ou adresser au conseil de discipline des observations écrites ; qu'ainsi, M. YXY n'est fondé à soutenir ni que les droits de la défense n'auraient pas été respectés ni que le décret susvisé du 5 novembre 2003 aurait été pris sur une procédure irrégulière ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. YXY a sollicité le 13 novembre 2002 un gardien de la paix afin de consulter un fichier de l'administration et communiqué les informations ainsi recueillies à un journaliste de sa connaissance ; qu'au cours de la même année 2002, l'intéressé a utilisé le même procédé pour identifier les propriétaires de 14 véhicules et communiqué les informations ainsi recueillies à des tiers non habilités à les recevoir ; que s'il soutient avoir accompli ces actes dans le cadre du service, M. YXY n'apporte, à l'appui de cette allégation, aucun élément susceptible de la faire regarder comme établie ; que les faits sus-décrits sont de nature à justifier une sanction disciplinaire ; qu'eu égard à la gravité des fautes commises, la sanction, prise par le décret attaqué, de l'exclusion temporaire de fonctions de 18 mois dont 12 avec sursis n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'il s'ensuit, dès lors, que M. YXY n'est pas fondé à demander l'annulation dudit décret en date du 5 novembre 2003 ;
Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :
Considérant que M. YXY n'est pas fondé à réclamer le versement d'indemnités à raison du préjudice moral qu'il aurait subi du fait du décret attaqué dès lors que, comme il a été indiqué ci-dessus, celui-ci n'est pas entaché d'illégalité ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. YXY demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de M. Hubert YXY sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Hubert YXY et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.