Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 18/01/2006, 255091
Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 18/01/2006, 255091
Conseil d'État - 10ème et 9ème sous-sections réunies
- N° 255091
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
18 janvier 2006
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES (OFPRA), dont le siège est 201, rue Carnot à Fontenay-sous-bois Cedex (94136) ; L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 7 janvier 2003 par laquelle la Commission des recours des réfugiés a annulé sa décision du 6 mars 2001 et a reconnu la qualité de réfugié à M. Pierre X ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la Commission des recours des réfugiés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée ;
Vu le décret n° 53-377 du 2 mai 1953 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Garabiol, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de Me Foussard, avocat de L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat M. X,
- les conclusions de Mlle Célia Vérot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1 F de la convention de Genève du 28 juillet 1951 : « Les dispositions de cette convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser : a) qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes » ;
Considérant que la commission des recours des réfugiés a annulé par une décision en date du 7 janvier 2003 la décision du directeur de l'O.F.P.R.A. en date du 6 mars 2001 refusant d'accorder à M. X le statut de réfugié ; que l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES demande l'annulation de la décision de la commission des recours des réfugiés ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que la décision de la commission des recours des réfugiés relève que le nom de M.X était mentionné dans le rapport de 1993 d'une commission internationale d'enquête sur les violations des droits de l'Homme au Rwanda comme l'un des principaux organisateurs des massacres d'octobre 1990 à Kibilira et qu'il figurait sur une liste de participants au génocide établie en 1994 par le gouvernement rwandais ; qu'en jugeant que « ces imputations, à défaut de témoignages circonstanciés et directs sur les initiatives que M.X auraient prises ou sur sa participation effective dans les atrocités dont a été victime, tant en 1990 qu'en 1994, la communauté Tutsi, sont insuffisantes pour convaincre de ses responsabilités dans les exactions et les crimes alors commis », la commission subordonne l'exclusion prévue à l'article 1F de la convention de Genève non à des raisons sérieuses de penser que les personnes ont commis un crime, au sens des instruments internationaux, mais à la démonstration de leur implication dans ces crimes ; que la commission a ainsi entaché sa décision d'une erreur de droit ; que, dès lors, l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES est fondé à demander l'annulation de la décision de la commission en date du 7 janvier 2003 annulant son refus d'accorder le statut de réfugié à M. X ;
Sur les conclusions de M. X tendant à faire application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La décision de la commission des recours des réfugiés en date du 7 janvier 2003 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la Commission des recours des réfugiés.
Article 3 : La demande de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES et à M. Pierre X.