Conseil d'Etat, 8ème et 3ème sous-sections réunies, du 6 mars 2006, 259156, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat, 8ème et 3ème sous-sections réunies, du 6 mars 2006, 259156, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat - 8EME ET 3EME SOUS-SECTIONS REUNIES
statuant
au contentieux
- N° 259156
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
lundi
06 mars 2006
- Président
- M. Martin
- Rapporteur
- M. Thomas Andrieu
- Avocat(s)
- SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire, le mémoire complémentaire et le mémoire rectificatif, enregistrés les 4 août, 4 décembre et 17 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE GEODE FONCIERE, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ; la SOCIETE GEODE FONCIERE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 4 juin 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation des jugements des 3 mai 2001 et 26 décembre 2001 du tribunal administratif de Lille rejetant ses demandes tendant, respectivement, à la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1997, et à la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1998 et 1999 à raison d'une décharge de déchets industriels et ménagers qu'elle possède dans la commune de Hersin-Coupigny ;
2°) statuant au fond, de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré présentée le 10 février 2006 pour la SOCIETE GEODE FONCIERE ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Andrieu, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la SOCIETE GEODE FONCIERE,
- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE GEODE FONCIERE possède sur le territoire de la commune de Hersin-Coupigny (Pas-de-Calais) un terrain qu'elle loue à la société France Déchets, qui y exploite une installation classée pour la protection de l'environnement de décharge contrôlée de déchets ménagers et industriels ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, la SOCIETE GEODE FONCIERE a été assujettie à raison de ce terrain à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les années 1997, 1998 et 1999 ; que la SOCIETE GEODE FONCIERE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juin 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation des jugements des 3 mai 2001 et 26 décembre 2001 par lesquels le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions litigieuses pour l'année 1997 d'une part, pour les années 1998 et 1999 d'autre part ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ; Considérant qu'une interprétation formelle de la loi fiscale par l'administration est susceptible d'être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, quand bien même cette interprétation relative à un impôt serait exprimée dans un document concernant au premier chef un autre impôt ; que, par suite, en jugeant que la société requérante ne pouvait utilement se prévaloir des énonciations de la documentation administrative de base, au seul motif que ces documentations de base étaient relatives à la taxe foncière sur les propriétés non bâties ou au cadastre, et non à la taxe foncière sur les propriétés bâties, sans rechercher si ces documentations ne contenaient pas expressément une interprétation formelle de la loi fiscale relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties, la cour administrative d'appel de Douai a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que cet arrêt doit, par suite, être annulé ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant que les requêtes présentées devant la cour administrative d'appel de Douai sont relatives à la situation du même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; Sur l'assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties au regard de la loi fiscale : Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'exploitation d'une décharge contrôlée de déchets ménagers et industriels requiert l'utilisation ou la création de cavités dénommées caissons destinées à accueillir les déchets avant d'être recouvertes de terre et revégétalisées ; que quatre zones distinctes peuvent être identifiées sur le terrain en litige, la première étant constituée soit de caissons creusés lors de l'exploitation antérieure des lieux comme carrières, soit de terrains où des excavations sont constituées pour créer de nouveaux caissons, la deuxième, de caissons où l'enfouissement par tranches des déchets est opéré, la troisième comprenant les terrains où les caissons ont été remplis de déchets puis recouverts d'une couche de terre ainsi que de végétation, la quatrième ne pouvant accueillir, aux termes de l'arrêté du 26 juillet 1982 du préfet du Pas-de-Calais autorisant l'exploitation, que des terres de remblais non polluées et en aucun cas des déchets ; qu'ainsi, les surfaces respectives des trois premières zones ont vocation à évoluer au rythme du remplissage de la décharge, et ce jusqu'à ce que l'intégralité du périmètre dans lequel est autorisé le versement des déchets soit rempli de déchets et recouvert de terre et de végétation ; Considérant qu'aux termes de l'article 1381 du code général des impôts : Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ( ) / 5° Les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, soit que le propriétaire les occupe, soit qu'il les fasse occuper par d'autres à titre gratuit ou onéreux ; que sont employés à un usage industriel, au sens de l'article 1381-5° du code général des impôts, les terrains non cultivés sur lesquels est réalisée une activité nécessitant d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des déclarations faites auprès de l'administration fiscale par la société gestionnaire de la décharge au titre de la taxe professionnelle, que les opérations d'enfouissement de déchets effectués sur le terrain appartenant à la SOCIETE GEODE FONCIERE requièrent d'importants moyens techniques, dont une station d'épuration, qui jouent un rôle prépondérant ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que les terrains en cours d'enfouissement avaient un usage industriel, au sens et pour l'application des dispositions du 5° de l'article 1381 du code général des impôts ; Considérant par ailleurs qu'en mentionnant, pour les assimiler à des propriétés bâties au regard de la taxe foncière, les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, l'article 1381-5° du code général des impôts doit être entendu comme visant les terrains qui ont été affectés à de tels usages, du moment qu'ils n'ont pas été rendus disponibles à d'autres usages ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des prescriptions de l'arrêté susmentionné du préfet du Pas-de-Calais autorisant l'exploitation de la décharge, que les terrains destinés à l'accueil des déchets ne sauraient se voir attribuer un autre usage ; que, dès lors, la circonstance que la partie du terrain où les déchets ont été déposés a été recouverte d'une couche de terre et, le cas échéant, de végétation ne saurait à elle seule lui faire perdre son usage industriel ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas allégué que les terrains sur lesquels l'enfouissement des déchets est interdit aient été affectés à un autre usage ; qu'enfin, si l'exploitation d'une décharge contrôlée de déchets industriels et ménagers peut nécessiter d'extraire des volumes significatifs de matériaux du sol, notamment dans le but de créer les caissons au format prescrit par la réglementation, cette activité d'extraction de matériaux n'est que l'accessoire de l'exploitation de cette décharge, dont la finalité demeure l'enfouissement des déchets en vue de limiter leur nocivité à l'égard des personnes et de l'environnement ; que, dès lors, la partie du terrain ayant donné ou donnant lieu à l'extraction des matériaux du sol afin de permettre de constituer les caissons conserve son usage industriel et ne saurait être regardée comme une carrière au sens de l'article 1393 du code général des impôts, aux termes duquel : La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés non bâties de toute nature sises en France, à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code. / Elle est notamment due pour les terrains occupés par ( ) les carrières ( ) ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des terrains litigieux ont un usage industriel au sens et pour l'application de l'article 1381-5° du code général des impôts ; que, par suite, la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que l'ensemble des parcelles en litige devaient être assujetties sur le fondement de la loi fiscale à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration : Considérant que la SOCIETE GEODE FONCIERE invoque, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations de la documentation de base 6 B-113, selon lesquelles les carrières sont imposées à la taxe foncière sur les propriétés non bâties à raison de la superficie du terrain occupée pour leur exploitation ; que la société invoque également les énonciations de la documentation de base 6 B-211, qui renvoient à celles de l'annexe 2 de l'instruction ministérielle du 31 décembre 1908 mentionnée à l'article 1509 du code général des impôts, selon laquelle les dépôts de décombres, scories, etc , doivent être rattachés à la catégorie des landes, pâtis, bruyères, marais, terre vaine et vague, elles-mêmes assujetties à la taxe foncière sur les propriétés non bâties ; qu'enfin, la société invoque les énonciations de l'annexe 23 de la documentation de base 11 CAD, selon lesquelles : même à défaut de matérialisation effective sur le terrain de bornes, piquets, clôtures, etc , ne doivent pas être réunies dans une même parcelle non seulement les fractions d'une même propriété destinées à être louées séparément, mais encore les fractions non louées faisant l'objet d'exploitations distinctes ; que, toutefois, ces énonciations ne contiennent expressément aucune interprétation formelle de la loi fiscale relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; que, dès lors, la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à s'en prévaloir ; Considérant qu'en ce qui concerne les terrains remplis de déchets et recouverts d'une couche de terre ainsi que de végétation, la société requérante invoque les énonciations de la documentation de base 6 C-114 relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties, selon lesquelles les terrains en culture, alors même que cette culture serait purement accessoire, eu égard à l'usage industriel auquel ils sont affectés, ne peuvent être imposés comme chantiers (ex. prés utilisés par les blanchisseurs pour le séchage du linge). Il est nécessaire, en outre, qu'il y ait permanence, c'est-à-dire durée suffisamment prolongée de l'affectation, pour conférer effectivement au terrain en cause la qualité nouvelle de chantier, lieu de dépôt ou autre emplacement à caractère industriel ou commercial ; que, cependant, la circonstance que la couche de terre recouvrant les caissons remplis de déchets soit plantée d'arbres ne suffit pas à qualifier les surfaces ainsi boisées de terrain en culture ; que, par suite, la SOCIETE GEODE FONCIERE ne rentre pas dans les prévisions de la documentation de base 6 C-114 et n'est pas fondée à s'en prévaloir ; Sur l'évaluation de la valeur locative du terrain : Considérant qu'aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments ( ) des taux d'intérêts fixés par décret en Conseil d'Etat ; que, selon les dispositions de l'article 324 AE de l'annexe III au code général des impôts : Le prix de revient visé à l'article 1499 du code général des impôts s'entend de la valeur d'origine pour laquelle les immobilisations doivent être inscrites au bilan en conformité de l'article 38 quinquies de la présente annexe ; qu'aux termes de ce dernier article : Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien ; Considérant que revêtent un caractère industriel, au sens de l'article 1499 précité du code général des impôts, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit plus haut, que tel est le cas en l'espèce ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que les opérations effectuées par la société requérante présentaient un caractère industriel au sens et pour l'application de l'article 1499 précité du code général des impôts ; Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 38 quinquies et 324 AE de l'annexe III au code général des impôts que c'est à bon droit que l'administration fiscale s'est fondée, pour évaluer la valeur locative du terrain en litige, sur la valeur mentionnée dans l'acte notarié, publié à la conservation des hypothèques le 11 mars 1993, par lequel la société requérante a acquis le terrain en litige, sans qu'il y ait lieu de distinguer au sein du coût d'acquisition ce qui relevait, le cas échéant, d'un surcroît de valeur lié à l'exploitation du terrain en vue de l'enfouissement des déchets ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements des 3 mai et 26 décembre 2001, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que la SOCIETE GEODE FONCIERE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 4 juin 2003 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé. Article 2 : Les requêtes présentées par la SOCIETE GEODE FONCIERE devant la cour administrative d'appel de Douai sont rejetées. Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE GEODE FONCIERE devant le Conseil d'Etat est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE GEODE FONCIERE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE GEODE FONCIERE possède sur le territoire de la commune de Hersin-Coupigny (Pas-de-Calais) un terrain qu'elle loue à la société France Déchets, qui y exploite une installation classée pour la protection de l'environnement de décharge contrôlée de déchets ménagers et industriels ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, la SOCIETE GEODE FONCIERE a été assujettie à raison de ce terrain à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les années 1997, 1998 et 1999 ; que la SOCIETE GEODE FONCIERE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juin 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation des jugements des 3 mai 2001 et 26 décembre 2001 par lesquels le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions litigieuses pour l'année 1997 d'une part, pour les années 1998 et 1999 d'autre part ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ; Considérant qu'une interprétation formelle de la loi fiscale par l'administration est susceptible d'être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, quand bien même cette interprétation relative à un impôt serait exprimée dans un document concernant au premier chef un autre impôt ; que, par suite, en jugeant que la société requérante ne pouvait utilement se prévaloir des énonciations de la documentation administrative de base, au seul motif que ces documentations de base étaient relatives à la taxe foncière sur les propriétés non bâties ou au cadastre, et non à la taxe foncière sur les propriétés bâties, sans rechercher si ces documentations ne contenaient pas expressément une interprétation formelle de la loi fiscale relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties, la cour administrative d'appel de Douai a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que cet arrêt doit, par suite, être annulé ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Considérant que les requêtes présentées devant la cour administrative d'appel de Douai sont relatives à la situation du même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; Sur l'assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties au regard de la loi fiscale : Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'exploitation d'une décharge contrôlée de déchets ménagers et industriels requiert l'utilisation ou la création de cavités dénommées caissons destinées à accueillir les déchets avant d'être recouvertes de terre et revégétalisées ; que quatre zones distinctes peuvent être identifiées sur le terrain en litige, la première étant constituée soit de caissons creusés lors de l'exploitation antérieure des lieux comme carrières, soit de terrains où des excavations sont constituées pour créer de nouveaux caissons, la deuxième, de caissons où l'enfouissement par tranches des déchets est opéré, la troisième comprenant les terrains où les caissons ont été remplis de déchets puis recouverts d'une couche de terre ainsi que de végétation, la quatrième ne pouvant accueillir, aux termes de l'arrêté du 26 juillet 1982 du préfet du Pas-de-Calais autorisant l'exploitation, que des terres de remblais non polluées et en aucun cas des déchets ; qu'ainsi, les surfaces respectives des trois premières zones ont vocation à évoluer au rythme du remplissage de la décharge, et ce jusqu'à ce que l'intégralité du périmètre dans lequel est autorisé le versement des déchets soit rempli de déchets et recouvert de terre et de végétation ; Considérant qu'aux termes de l'article 1381 du code général des impôts : Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ( ) / 5° Les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, soit que le propriétaire les occupe, soit qu'il les fasse occuper par d'autres à titre gratuit ou onéreux ; que sont employés à un usage industriel, au sens de l'article 1381-5° du code général des impôts, les terrains non cultivés sur lesquels est réalisée une activité nécessitant d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des déclarations faites auprès de l'administration fiscale par la société gestionnaire de la décharge au titre de la taxe professionnelle, que les opérations d'enfouissement de déchets effectués sur le terrain appartenant à la SOCIETE GEODE FONCIERE requièrent d'importants moyens techniques, dont une station d'épuration, qui jouent un rôle prépondérant ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que les terrains en cours d'enfouissement avaient un usage industriel, au sens et pour l'application des dispositions du 5° de l'article 1381 du code général des impôts ; Considérant par ailleurs qu'en mentionnant, pour les assimiler à des propriétés bâties au regard de la taxe foncière, les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, l'article 1381-5° du code général des impôts doit être entendu comme visant les terrains qui ont été affectés à de tels usages, du moment qu'ils n'ont pas été rendus disponibles à d'autres usages ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des prescriptions de l'arrêté susmentionné du préfet du Pas-de-Calais autorisant l'exploitation de la décharge, que les terrains destinés à l'accueil des déchets ne sauraient se voir attribuer un autre usage ; que, dès lors, la circonstance que la partie du terrain où les déchets ont été déposés a été recouverte d'une couche de terre et, le cas échéant, de végétation ne saurait à elle seule lui faire perdre son usage industriel ; qu'il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas allégué que les terrains sur lesquels l'enfouissement des déchets est interdit aient été affectés à un autre usage ; qu'enfin, si l'exploitation d'une décharge contrôlée de déchets industriels et ménagers peut nécessiter d'extraire des volumes significatifs de matériaux du sol, notamment dans le but de créer les caissons au format prescrit par la réglementation, cette activité d'extraction de matériaux n'est que l'accessoire de l'exploitation de cette décharge, dont la finalité demeure l'enfouissement des déchets en vue de limiter leur nocivité à l'égard des personnes et de l'environnement ; que, dès lors, la partie du terrain ayant donné ou donnant lieu à l'extraction des matériaux du sol afin de permettre de constituer les caissons conserve son usage industriel et ne saurait être regardée comme une carrière au sens de l'article 1393 du code général des impôts, aux termes duquel : La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés non bâties de toute nature sises en France, à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code. / Elle est notamment due pour les terrains occupés par ( ) les carrières ( ) ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des terrains litigieux ont un usage industriel au sens et pour l'application de l'article 1381-5° du code général des impôts ; que, par suite, la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que l'ensemble des parcelles en litige devaient être assujetties sur le fondement de la loi fiscale à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration : Considérant que la SOCIETE GEODE FONCIERE invoque, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations de la documentation de base 6 B-113, selon lesquelles les carrières sont imposées à la taxe foncière sur les propriétés non bâties à raison de la superficie du terrain occupée pour leur exploitation ; que la société invoque également les énonciations de la documentation de base 6 B-211, qui renvoient à celles de l'annexe 2 de l'instruction ministérielle du 31 décembre 1908 mentionnée à l'article 1509 du code général des impôts, selon laquelle les dépôts de décombres, scories, etc , doivent être rattachés à la catégorie des landes, pâtis, bruyères, marais, terre vaine et vague, elles-mêmes assujetties à la taxe foncière sur les propriétés non bâties ; qu'enfin, la société invoque les énonciations de l'annexe 23 de la documentation de base 11 CAD, selon lesquelles : même à défaut de matérialisation effective sur le terrain de bornes, piquets, clôtures, etc , ne doivent pas être réunies dans une même parcelle non seulement les fractions d'une même propriété destinées à être louées séparément, mais encore les fractions non louées faisant l'objet d'exploitations distinctes ; que, toutefois, ces énonciations ne contiennent expressément aucune interprétation formelle de la loi fiscale relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; que, dès lors, la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à s'en prévaloir ; Considérant qu'en ce qui concerne les terrains remplis de déchets et recouverts d'une couche de terre ainsi que de végétation, la société requérante invoque les énonciations de la documentation de base 6 C-114 relative à la taxe foncière sur les propriétés bâties, selon lesquelles les terrains en culture, alors même que cette culture serait purement accessoire, eu égard à l'usage industriel auquel ils sont affectés, ne peuvent être imposés comme chantiers (ex. prés utilisés par les blanchisseurs pour le séchage du linge). Il est nécessaire, en outre, qu'il y ait permanence, c'est-à-dire durée suffisamment prolongée de l'affectation, pour conférer effectivement au terrain en cause la qualité nouvelle de chantier, lieu de dépôt ou autre emplacement à caractère industriel ou commercial ; que, cependant, la circonstance que la couche de terre recouvrant les caissons remplis de déchets soit plantée d'arbres ne suffit pas à qualifier les surfaces ainsi boisées de terrain en culture ; que, par suite, la SOCIETE GEODE FONCIERE ne rentre pas dans les prévisions de la documentation de base 6 C-114 et n'est pas fondée à s'en prévaloir ; Sur l'évaluation de la valeur locative du terrain : Considérant qu'aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments ( ) des taux d'intérêts fixés par décret en Conseil d'Etat ; que, selon les dispositions de l'article 324 AE de l'annexe III au code général des impôts : Le prix de revient visé à l'article 1499 du code général des impôts s'entend de la valeur d'origine pour laquelle les immobilisations doivent être inscrites au bilan en conformité de l'article 38 quinquies de la présente annexe ; qu'aux termes de ce dernier article : Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien ; Considérant que revêtent un caractère industriel, au sens de l'article 1499 précité du code général des impôts, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit plus haut, que tel est le cas en l'espèce ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a considéré que les opérations effectuées par la société requérante présentaient un caractère industriel au sens et pour l'application de l'article 1499 précité du code général des impôts ; Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 38 quinquies et 324 AE de l'annexe III au code général des impôts que c'est à bon droit que l'administration fiscale s'est fondée, pour évaluer la valeur locative du terrain en litige, sur la valeur mentionnée dans l'acte notarié, publié à la conservation des hypothèques le 11 mars 1993, par lequel la société requérante a acquis le terrain en litige, sans qu'il y ait lieu de distinguer au sein du coût d'acquisition ce qui relevait, le cas échéant, d'un surcroît de valeur lié à l'exploitation du terrain en vue de l'enfouissement des déchets ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE GEODE FONCIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements des 3 mai et 26 décembre 2001, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que la SOCIETE GEODE FONCIERE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 4 juin 2003 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé. Article 2 : Les requêtes présentées par la SOCIETE GEODE FONCIERE devant la cour administrative d'appel de Douai sont rejetées. Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la SOCIETE GEODE FONCIERE devant le Conseil d'Etat est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE GEODE FONCIERE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.