Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 27/09/2006, 284022
Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 27/09/2006, 284022
Conseil d'État - 5ème et 4ème sous-sections réunies
- N° 284022
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
27 septembre 2006
- Président
- M. Genevois
- Rapporteur
- M. Jean-Yves Rossi
- Avocat(s)
- DE NERVO ; SCP PEIGNOT, GARREAU
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août et 1er décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BAALON, représentée par son maire ; la COMMUNE DE BAALON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 24 mai 2005 par lequel le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à verser à M. Thierry A la somme de 4 149,41 euros en réparation des dégradations affectant le mur de sa propriété et la somme de 770 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) statuant au fond, de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nancy ;
3°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Yves Rossi, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me de Nervo, avocat de la COMMUNE DE BAALON et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMMUNE DE BAALON, dont la responsabilité était recherchée devant le tribunal administratif de Nancy par M. A à la suite de l'effondrement, le 7 janvier 2001, sur le mur de clôture de sa propriété, de l'immeuble voisin sis sur la parcelle cadastrée AB 308 et propriété de la succession Raguet-Moutande, avait fait valoir, pour s'exonérer de toute faute, que le dommage dont il était demandé réparation avait été provoqué ou à tout le moins été aggravé par la carence du demandeur à entretenir le mur dont il est lui-même propriétaire ; que le tribunal n'a pas répondu à ce moyen qui n'était pas inopérant ; qu'il y a lieu par suite d'annuler son jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maire de Baalon avait pris le 1er juillet 1996, en application des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, un arrêté afin d'enjoindre aux propriétaires de la parcelle AB 308 de réaliser dans un délai de 62 jours les mesures nécessaires « pour mettre fin aux périls et dangers présentés par ces bâtiments » ; que, selon le rapport du 13 septembre 1996 de l'expert désigné à la demande de la commune par le tribunal d'instance de Verdun, « l'immeuble cadastré AB 308 à l'état de ruine présente un péril grave et imminent pour le domaine public et les voisins et doit être démoli dans les meilleurs délais » ; que le caractère dangereux de l'immeuble était ainsi connu du maire ; que, par suite, en s'abstenant pendant plus de quatre ans de prendre, à la suite du rapport de l'expert, les mesures utiles pour éviter l'effondrement dudit immeuble et notamment en ne réitérant pas ses mises en demeure, voire en n'engageant pas la procédure aux fins de pouvoir procéder aux frais des propriétaires défaillants aux travaux nécessaires à la cessation du péril, le maire a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à raison des dommages causés à la propriété de M. A ;
Considérant toutefois, que l'état dégradé du mur de la maison de M. A a contribué à l'aggravation du dommage et à son étendue ; qu'il sera fait une juste appréciation de la responsabilité encourue par la COMMUNE DE BAALON en la fixant à la moitié du préjudice subi ; qu'il y a lieu par suite de la condamner à verser à M. A la somme de 2 075 euros correspondant à la moitié du coût des travaux de réfection du mur ;
Considérant que la propriété de M. A sise sur la parcelle AB309 était dans un état ne permettant pas un usage immédiat à titre d'habitation ; qu'il n'est par suite pas fondé à demander à ce que la COMMUNE DE BAALON soit condamnée à lui verser une somme de 770 euros pour privation de jouissance ; qu'il n'est pas davantage fondé à demander que la commune soit condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour « résistance abusive », laquelle n'est pas établie en l'espèce ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE DE BAALON à verser à M. A la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens en première instance et en cassation ; qu'il n'y a, en revanche, pas lieu de faire droit aux demandes présentées par la COMMUNE DE BAALON, en première instance puis en cassation, de mettre à la charge de M. A les sommes s'élevant respectivement à 770 euros et 2 000 euros, en remboursement des frais exposés pour assurer sa défense ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 24 mai 2005 est annulé.
Article 2 : La COMMUNE DE BAALON est condamnée à verser à M. A la somme de 2 075 euros.
Article 3 : La COMMUNE DE BAALON versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A et le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE BAALON sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BAALON, à M. Thierry A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
1°) d'annuler le jugement du 24 mai 2005 par lequel le tribunal administratif de Nancy l'a condamnée à verser à M. Thierry A la somme de 4 149,41 euros en réparation des dégradations affectant le mur de sa propriété et la somme de 770 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) statuant au fond, de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Nancy ;
3°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Yves Rossi, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me de Nervo, avocat de la COMMUNE DE BAALON et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMMUNE DE BAALON, dont la responsabilité était recherchée devant le tribunal administratif de Nancy par M. A à la suite de l'effondrement, le 7 janvier 2001, sur le mur de clôture de sa propriété, de l'immeuble voisin sis sur la parcelle cadastrée AB 308 et propriété de la succession Raguet-Moutande, avait fait valoir, pour s'exonérer de toute faute, que le dommage dont il était demandé réparation avait été provoqué ou à tout le moins été aggravé par la carence du demandeur à entretenir le mur dont il est lui-même propriétaire ; que le tribunal n'a pas répondu à ce moyen qui n'était pas inopérant ; qu'il y a lieu par suite d'annuler son jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le maire de Baalon avait pris le 1er juillet 1996, en application des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, un arrêté afin d'enjoindre aux propriétaires de la parcelle AB 308 de réaliser dans un délai de 62 jours les mesures nécessaires « pour mettre fin aux périls et dangers présentés par ces bâtiments » ; que, selon le rapport du 13 septembre 1996 de l'expert désigné à la demande de la commune par le tribunal d'instance de Verdun, « l'immeuble cadastré AB 308 à l'état de ruine présente un péril grave et imminent pour le domaine public et les voisins et doit être démoli dans les meilleurs délais » ; que le caractère dangereux de l'immeuble était ainsi connu du maire ; que, par suite, en s'abstenant pendant plus de quatre ans de prendre, à la suite du rapport de l'expert, les mesures utiles pour éviter l'effondrement dudit immeuble et notamment en ne réitérant pas ses mises en demeure, voire en n'engageant pas la procédure aux fins de pouvoir procéder aux frais des propriétaires défaillants aux travaux nécessaires à la cessation du péril, le maire a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à raison des dommages causés à la propriété de M. A ;
Considérant toutefois, que l'état dégradé du mur de la maison de M. A a contribué à l'aggravation du dommage et à son étendue ; qu'il sera fait une juste appréciation de la responsabilité encourue par la COMMUNE DE BAALON en la fixant à la moitié du préjudice subi ; qu'il y a lieu par suite de la condamner à verser à M. A la somme de 2 075 euros correspondant à la moitié du coût des travaux de réfection du mur ;
Considérant que la propriété de M. A sise sur la parcelle AB309 était dans un état ne permettant pas un usage immédiat à titre d'habitation ; qu'il n'est par suite pas fondé à demander à ce que la COMMUNE DE BAALON soit condamnée à lui verser une somme de 770 euros pour privation de jouissance ; qu'il n'est pas davantage fondé à demander que la commune soit condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour « résistance abusive », laquelle n'est pas établie en l'espèce ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE DE BAALON à verser à M. A la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens en première instance et en cassation ; qu'il n'y a, en revanche, pas lieu de faire droit aux demandes présentées par la COMMUNE DE BAALON, en première instance puis en cassation, de mettre à la charge de M. A les sommes s'élevant respectivement à 770 euros et 2 000 euros, en remboursement des frais exposés pour assurer sa défense ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 24 mai 2005 est annulé.
Article 2 : La COMMUNE DE BAALON est condamnée à verser à M. A la somme de 2 075 euros.
Article 3 : La COMMUNE DE BAALON versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A et le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE BAALON sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BAALON, à M. Thierry A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.