Conseil d'Etat, 2ème et 7ème sous-sections réunies, du 13 avril 2005, 259805, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat, 2ème et 7ème sous-sections réunies, du 13 avril 2005, 259805, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat - 2EME ET 7EME SOUS-SECTIONS REUNIES
statuant
au contentieux
- N° 259805
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
13 avril 2005
- Président
- M. Stirn
- Rapporteur
- Mme Anne-Marie Artaud-Macari
- Avocat(s)
- SCP GASCHIGNARD ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août et 29 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel Y, demeurant ... ; M. Y demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 10 juin 2003 de la cour administrative d'appel de Lyon en tant qu'il a annulé le jugement du 24 juin 1998 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 16 décembre 1994 par lequel le maire de la commune précitée a sursis à statuer sur la demande de permis de construire de l'exposant ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 1994 par lequel le maire de la commune de Montriond a sursis à statuer sur la demande de permis de construire qu'il a présentée ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montriond la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 7611 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 avril 2005, présentée pour M. LAVANCHY ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 avril 2005, présentée pour la commune de Montriond ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne-Marie Artaud-Macari, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. Y et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la commune de Montriond,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ; Considérant que, pour écarter le moyen présenté par M. Y, tiré de l'erreur d'appréciation entachant la décision de sursis à statuer sur sa demande de permis de construire, la cour administrative d'appel de Lyon a indiqué que cette décision n'était pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'il ressort ainsi des énonciations de l'arrêt attaqué, bien qu'il relève que l'édification de la construction projetée sur les deux parcelles en cause situées à un emplacement essentiel pour l'aménagement des voies de circulation au pied des remontées mécaniques aurait pour effet de rendre plus onéreuse l'exécution du plan d'occupation des sols, que le juge d'appel n'a pas soumis la décision litigieuse au plein contrôle qu'il lui appartenait d'exercer ; que l'arrêt attaqué est, par suite, entaché d'erreur de droit ; que, dès lors, M. Y est fondé à en demander l'annulation ; Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 8212 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Sur la fin de non-recevoir opposée par M. Y : Considérant que M. Y soutient que l'appel présenté par le maire de Montriond au nom de la commune ne serait pas recevable, faute de qualité de son signataire ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que le maire avait été dûment habilité par le conseil municipal pour agir en justice, dans ce litige, au nom de la commune ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le mandat donné au maire serait irrégulier faute d'information précise du conseil municipal sur la nature de l'action en justice qu'il l'autorisait à engager au nom de la commune ; que la fin de non-recevoir opposée par M. Y à la requête de la commune doit, par suite, être écartée ; Sur la légalité de la décision de sursis à statuer : Considérant qu'aux termes de l'article L. 1235 du code de l'urbanisme alors en vigueur : Lorsque l'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit... l'autorité administrative peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délais prévus à l'article L. 1118, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan... ; qu'en vertu de l'article L. 1118 du même code, le sursis à statuer doit être motivé ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les parcelles litigieuses, situées à la sortie du village de Montriond, classées antérieurement en zone UC, ont été classées en zone 8 NA lors de la révision du plan d'occupation des sols (POS) arrêtée par le conseil municipal le 2 septembre 1994 pour sa mise en conformité avec le projet d'unité touristique nouvelle pour l'urbanisation du secteur d'Ardent autorisée par le préfet de la région Rhône-Alpes par arrêté du 21 avril 1991 ; qu'en opposant un sursis à statuer sur la demande de permis de construire sur ces parcelles déposée par M. Y au motif que les travaux décrits dans la demande « ne sont pas conformes aux nouvelles prévisions du plan d'occupation des sols d'après lesquelles le terrain situé en zone 8 NA est réservé à l'urbanisation future où toute construction est interdite que l'exécution de ces travaux serait de nature à compromettre la réalisation de ce document d'urbanisme en cours de révision », le maire a répondu aux exigences de motivation prescrites par les dispositions de l'article L. 1118 du code de l'urbanisme, qui n'imposaient de préciser ni que la révision du P.O.S. intervenait en conséquence du projet d'unité touristique nouvelle ni que celui-ci impliquait de créer de nouvelles remontées mécaniques ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur l'absence de motivation de la décision attaquée pour en prononcer l'annulation ; Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. Y devant le tribunal administratif de Grenoble ; Considérant que les terrains d'assiette des constructions envisagées se trouvent situés sur l'emplacement de la future zone d'aménagement concerté (ZAC), réservé à la circulation, au pied des remontées mécaniques, par le plan d'occupation des sols relatif à l'urbanisation du secteur d'Ardent ; que l'édification à cet emplacement, d'un bâtiment même de dimension modeste, qui aurait dû être ultérieurement démoli pour l'exécution du plan d'occupation des sols, aurait rendu celle-ci plus onéreuse ; qu'ainsi, le maire de Montriond a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que le projet était de nature à compromettre l'exécution du plan en cours d'élaboration ; Considérant que la faculté, ouverte par les dispositions précitées à l'autorité compétente pour se prononcer sur la demande de permis de construire, de surseoir à statuer sur cette demande, est subordonnée à la seule condition que l'octroi du permis soit susceptible de compromettre l'exécution du projet du plan d'occupation des sols en cours de révision ; que, par suite, les moyens tirés de ce que les terrains sont raccordés aux réseaux de viabilisation, qu'ils ont été auparavant bâtis, que le plan d'occupation des sols, en réservant à la manoeuvre des cars une aire plus restreinte, aurait pu maintenir le classement des parcelles en cause en zone constructible, qui tendent à contester la légalité du classement des terrains en zone NA dans le futur plan d'occupation des sols, ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision opposant un sursis à statuer ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Montriond est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé la décision de surseoir à statuer sur la demande de permis de construire déposée par M. Y ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application de l'article L. 7611 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. Y, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Montriond et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la même commune la somme que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Lyon en date du 10 juin 2003 est annulé. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 24 juin 1998 est annulé. Article 3 : Les conclusions de la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif de Grenoble sont rejetées. Article 4 : Les conclusions de M. Y tendant à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : M. Y versera la somme de 1 000 euros à la commune de Montriond. Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Michel Y, à la commune de Montriond et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ; Considérant que, pour écarter le moyen présenté par M. Y, tiré de l'erreur d'appréciation entachant la décision de sursis à statuer sur sa demande de permis de construire, la cour administrative d'appel de Lyon a indiqué que cette décision n'était pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'il ressort ainsi des énonciations de l'arrêt attaqué, bien qu'il relève que l'édification de la construction projetée sur les deux parcelles en cause situées à un emplacement essentiel pour l'aménagement des voies de circulation au pied des remontées mécaniques aurait pour effet de rendre plus onéreuse l'exécution du plan d'occupation des sols, que le juge d'appel n'a pas soumis la décision litigieuse au plein contrôle qu'il lui appartenait d'exercer ; que l'arrêt attaqué est, par suite, entaché d'erreur de droit ; que, dès lors, M. Y est fondé à en demander l'annulation ; Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 8212 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ; Sur la fin de non-recevoir opposée par M. Y : Considérant que M. Y soutient que l'appel présenté par le maire de Montriond au nom de la commune ne serait pas recevable, faute de qualité de son signataire ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que le maire avait été dûment habilité par le conseil municipal pour agir en justice, dans ce litige, au nom de la commune ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le mandat donné au maire serait irrégulier faute d'information précise du conseil municipal sur la nature de l'action en justice qu'il l'autorisait à engager au nom de la commune ; que la fin de non-recevoir opposée par M. Y à la requête de la commune doit, par suite, être écartée ; Sur la légalité de la décision de sursis à statuer : Considérant qu'aux termes de l'article L. 1235 du code de l'urbanisme alors en vigueur : Lorsque l'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit... l'autorité administrative peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délais prévus à l'article L. 1118, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan... ; qu'en vertu de l'article L. 1118 du même code, le sursis à statuer doit être motivé ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les parcelles litigieuses, situées à la sortie du village de Montriond, classées antérieurement en zone UC, ont été classées en zone 8 NA lors de la révision du plan d'occupation des sols (POS) arrêtée par le conseil municipal le 2 septembre 1994 pour sa mise en conformité avec le projet d'unité touristique nouvelle pour l'urbanisation du secteur d'Ardent autorisée par le préfet de la région Rhône-Alpes par arrêté du 21 avril 1991 ; qu'en opposant un sursis à statuer sur la demande de permis de construire sur ces parcelles déposée par M. Y au motif que les travaux décrits dans la demande « ne sont pas conformes aux nouvelles prévisions du plan d'occupation des sols d'après lesquelles le terrain situé en zone 8 NA est réservé à l'urbanisation future où toute construction est interdite que l'exécution de ces travaux serait de nature à compromettre la réalisation de ce document d'urbanisme en cours de révision », le maire a répondu aux exigences de motivation prescrites par les dispositions de l'article L. 1118 du code de l'urbanisme, qui n'imposaient de préciser ni que la révision du P.O.S. intervenait en conséquence du projet d'unité touristique nouvelle ni que celui-ci impliquait de créer de nouvelles remontées mécaniques ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur l'absence de motivation de la décision attaquée pour en prononcer l'annulation ; Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. Y devant le tribunal administratif de Grenoble ; Considérant que les terrains d'assiette des constructions envisagées se trouvent situés sur l'emplacement de la future zone d'aménagement concerté (ZAC), réservé à la circulation, au pied des remontées mécaniques, par le plan d'occupation des sols relatif à l'urbanisation du secteur d'Ardent ; que l'édification à cet emplacement, d'un bâtiment même de dimension modeste, qui aurait dû être ultérieurement démoli pour l'exécution du plan d'occupation des sols, aurait rendu celle-ci plus onéreuse ; qu'ainsi, le maire de Montriond a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que le projet était de nature à compromettre l'exécution du plan en cours d'élaboration ; Considérant que la faculté, ouverte par les dispositions précitées à l'autorité compétente pour se prononcer sur la demande de permis de construire, de surseoir à statuer sur cette demande, est subordonnée à la seule condition que l'octroi du permis soit susceptible de compromettre l'exécution du projet du plan d'occupation des sols en cours de révision ; que, par suite, les moyens tirés de ce que les terrains sont raccordés aux réseaux de viabilisation, qu'ils ont été auparavant bâtis, que le plan d'occupation des sols, en réservant à la manoeuvre des cars une aire plus restreinte, aurait pu maintenir le classement des parcelles en cause en zone constructible, qui tendent à contester la légalité du classement des terrains en zone NA dans le futur plan d'occupation des sols, ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de la décision opposant un sursis à statuer ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Montriond est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé la décision de surseoir à statuer sur la demande de permis de construire déposée par M. Y ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application de l'article L. 7611 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. Y, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Montriond et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la même commune la somme que M. Y demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Lyon en date du 10 juin 2003 est annulé. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 24 juin 1998 est annulé. Article 3 : Les conclusions de la demande présentée par M. Y devant le tribunal administratif de Grenoble sont rejetées. Article 4 : Les conclusions de M. Y tendant à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : M. Y versera la somme de 1 000 euros à la commune de Montriond. Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Michel Y, à la commune de Montriond et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.