Conseil d'Etat, 9ème et 10ème sous-sections réunies, du 26 février 2003, 223092, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat, 9ème et 10ème sous-sections réunies, du 26 février 2003, 223092, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat - 9EME ET 10EME SOUS-SECTIONS REUNIES
statuant
au contentieux
- N° 223092
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
26 février 2003
- Président
- M. Robineau
- Rapporteur
- Mme Marie-Françoise Guilhemsans
- Avocat(s)
- SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 juillet et 15 novembre 2000, présentés pour la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE, dont le siège est ... ; la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 17 avril 2000 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, en tant que, par cet arrêt, la cour a rejeté le surplus de sa requête tendant à la réformation du jugement du 11 juin 1996 du tribunal administratif de Fort-de-France lui accordant la décharge partielle des suppléments d'impôts sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1981 à 1984 ;
2°) statuant au fond, de lui accorder la décharge de la totalité de ces impositions ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 25 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET COMPAGNIE,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société en commandite simple PIERRE DE X... ET CIE, qui assurait les fonctions de bureau d'exportation de la production de plantations de bananes de la Martinique, ainsi que la vente à celles-ci de fournitures nécessaires à leur exploitation, a consenti en 1982, 1983 et 1984, des avances sans intérêt à une partie de ces exploitations ; qu'elle a également procédé en 1984 à un abandon partiel des créances qu'elle détenait sur certaines d'entre elles, en contrepartie de l'engagement souscrit par celles-ci de procéder au règlement du solde de leurs dettes dans de brefs délais ; que l'administration a réintégré dans le bénéfice imposable de la société le montant des intérêts que la société requérante n'avait pas prélevés sur lesdites avances, ainsi que, au titre de 1984, le montant des abandons de créances consentis ; que la société requérante demande l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions relatives à ces chefs de redressement ; Considérant, en premier lieu, que les prêts sans intérêt ou l'abandon de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ; qu'ainsi, en jugeant que la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE n'établissait pas l'existence de telles contreparties et que, par suite, la preuve n'était pas apportée que les décisions litigieuses aient procédé d'une gestion normale de l'entreprise, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas inversé la charge de la preuve ; Considérant, en deuxième lieu, que la cour administrative d'appel a estimé que les avances sans intérêt consenties par la société requérante ne pouvaient être justifiées ni par l'existence pour celle-ci d'un intérêt commercial dès lors qu'elle n'entretenait avec les exploitations concernées qu'un faible volume de relations commerciales ni par l'existence d'excédents de trésorerie laissés sur ses comptes par lesdites exploitations en l'absence d'éléments probants sur la réalité de ces dépôts ; que la cour a, ce faisant, d'une part suffisamment motivé sa décision et, d'autre part, eu égard au caractère très général des explications fournies par la société, souverainement apprécié sans les dénaturer les faits qui lui étaient soumis ; Considérant, en troisième lieu, que s'agissant des abandons de créances consentis par la société requérante, la cour a constaté que celle-ci avait justifié cette décision par l'intérêt financier qu'elle avait à obtenir un remboursement partiel de ces créances dans les meilleurs délais et par son souci d'assurer la pérennité de l'activité de ses fournisseurs de bananes, grâce à l'aide de l'importateur en métropole de ces denrées qui aurait pris en charge une partie des pertes résultant de l'abandon des créances en lui consentant une ristourne sur les commissions perçues ; que la cour a, cependant, relevé que le montant total des créances abandonnées était sans commune mesure avec le faible chiffre d'affaires réalisé avec chacun des débiteurs et qu'il n'était pas démontré que l'abandon de créances litigieux ait pu participer au développement ou, tout au moins, au maintien de la production agricole des exploitations en cause ; que, par ailleurs, il n'a pas été soutenu devant la cour qu'en contrepartie des abandons de créances consentis par la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE celle-ci ait effectivement obtenu de ses débiteurs un remboursement anticipé de leurs dettes ; que, par suite, la cour a pu, sans dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis et par des motifs suffisants, déduire des constatations auxquelles elle a souverainement procédé qu'il n'était pas établi que les abandons de créances litigieux aient été effectués dans l'intérêt de la société requérante ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE doit être rejetée ; Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société en commandite simple PIERRE DE X... ET CIE, qui assurait les fonctions de bureau d'exportation de la production de plantations de bananes de la Martinique, ainsi que la vente à celles-ci de fournitures nécessaires à leur exploitation, a consenti en 1982, 1983 et 1984, des avances sans intérêt à une partie de ces exploitations ; qu'elle a également procédé en 1984 à un abandon partiel des créances qu'elle détenait sur certaines d'entre elles, en contrepartie de l'engagement souscrit par celles-ci de procéder au règlement du solde de leurs dettes dans de brefs délais ; que l'administration a réintégré dans le bénéfice imposable de la société le montant des intérêts que la société requérante n'avait pas prélevés sur lesdites avances, ainsi que, au titre de 1984, le montant des abandons de créances consentis ; que la société requérante demande l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions relatives à ces chefs de redressement ; Considérant, en premier lieu, que les prêts sans intérêt ou l'abandon de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances ou d'intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ; qu'ainsi, en jugeant que la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE n'établissait pas l'existence de telles contreparties et que, par suite, la preuve n'était pas apportée que les décisions litigieuses aient procédé d'une gestion normale de l'entreprise, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas inversé la charge de la preuve ; Considérant, en deuxième lieu, que la cour administrative d'appel a estimé que les avances sans intérêt consenties par la société requérante ne pouvaient être justifiées ni par l'existence pour celle-ci d'un intérêt commercial dès lors qu'elle n'entretenait avec les exploitations concernées qu'un faible volume de relations commerciales ni par l'existence d'excédents de trésorerie laissés sur ses comptes par lesdites exploitations en l'absence d'éléments probants sur la réalité de ces dépôts ; que la cour a, ce faisant, d'une part suffisamment motivé sa décision et, d'autre part, eu égard au caractère très général des explications fournies par la société, souverainement apprécié sans les dénaturer les faits qui lui étaient soumis ; Considérant, en troisième lieu, que s'agissant des abandons de créances consentis par la société requérante, la cour a constaté que celle-ci avait justifié cette décision par l'intérêt financier qu'elle avait à obtenir un remboursement partiel de ces créances dans les meilleurs délais et par son souci d'assurer la pérennité de l'activité de ses fournisseurs de bananes, grâce à l'aide de l'importateur en métropole de ces denrées qui aurait pris en charge une partie des pertes résultant de l'abandon des créances en lui consentant une ristourne sur les commissions perçues ; que la cour a, cependant, relevé que le montant total des créances abandonnées était sans commune mesure avec le faible chiffre d'affaires réalisé avec chacun des débiteurs et qu'il n'était pas démontré que l'abandon de créances litigieux ait pu participer au développement ou, tout au moins, au maintien de la production agricole des exploitations en cause ; que, par ailleurs, il n'a pas été soutenu devant la cour qu'en contrepartie des abandons de créances consentis par la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE celle-ci ait effectivement obtenu de ses débiteurs un remboursement anticipé de leurs dettes ; que, par suite, la cour a pu, sans dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis et par des motifs suffisants, déduire des constatations auxquelles elle a souverainement procédé qu'il n'était pas établi que les abandons de créances litigieux aient été effectués dans l'intérêt de la société requérante ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE doit être rejetée ; Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE PIERRE DE REYNAL ET CIE et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.