Conseil d'Etat, 10ème et 9ème sous-sections réunies, du 26 février 2003, 222163, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 juin et 19 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roger X, demeurant ... ; M. X demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 11 avril 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a 1°) rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 20 juin 1997 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 et 1989, 2°) réformé ledit jugement et rétabli M. X, à concurrence d'un montant en base de 47 396 F, à l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1988 dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, présentée le 4 février 2003, pour M. X ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de M. X,

- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juges du fond que M. X exerce d'une part l'activité libérale de conseil en immobilier et d'autre part est administrateur ou dirigeant de nombreuses sociétés ayant pour objet l'implantation de centres commerciaux ; qu'il est notamment le président directeur général de la société financière industrielle et commerciale (SOFIC), qui a pour objet la préétude pour l'implantation de tels centres, société qui détient 50 % des parts de la société financière TREMA SA, dont M. X est également administrateur et directeur général, et dont le capital est détenu à hauteur de 40 % par la MACIF et 10 % par la GMF ; que M. X et sa famille détenaient la totalité des parts de la SCI dite Du Passage, créée en 1980 et titulaire d'un contrat de crédit-bail immobilier relatif à l'acquisition en l'état de futur achèvement d'une galerie marchande de 35 commerces et services situés à côté d'un hypermarché à Ivry, locaux qu'elle sous-louait ; que la moitié des parts de la SCI avaient été cédées à la MACIF, puis avaient été rachetées à celle-ci en juin 1998, par la famille Flament qui les a revendues un mois plus tard avec une importante plus-value à une filiale de la GMF ; que M. X a fait l'objet, en 1991, d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1988 et 1989 à l'issue de laquelle il a été assujetti à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et notamment à l'imposition dans la catégorie des bénéfices non commerciaux de la plus-value réalisée lors de la cession des parts de la SCI Du Passage qu'il détenait ;

Sur la régularité de la procédure :

Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressement qui, selon l'article L. 48 du même livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version remise à M. X, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L. 16 du même livre ; que la cour administrative d'appel, qui a estimé que le dialogue contradictoire exigé par les dispositions susmentionnées a eu lieu, a porté sur les faits qui lui était soumis une appréciation souveraine non susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification ; qu'aux termes de l'article L. 50 du même livre : Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des redressements pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ;

Considérant qu'en jugeant que la notification de redressement du 20 décembre 1991 avait clos l'examen contradictoire commencé après l'avis du 4 mars de la même année et qu'aucune investigation supplémentaire débouchant sur des redressements supplémentaires n'avait été effectuée postérieurement, la cour administrative d'appel a porté sur les faits, sans les dénaturer une appréciation souveraine ; qu'en jugeant que la notification de redressement du 21 juillet 1994, qui se bornait à changer la base légale des redressements déjà notifiés, n'a pas constitué un nouvel examen de situation fiscale personnelle ni constitué une prolongation de l'examen clos en décembre 1991, la cour n'a ni méconnu les dispositions précitées des articles L. 12 et L. 50 du livre des procédures fiscales ni dénaturé les faits de l'espèce ;

Considérant que devant la cour administrative d'appel, M. X n'a pas soutenu qu'il y aurait eu désaccord sur les questions de fait retenues par le vérificateur au moment de la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'en relevant, dans ces conditions, que le différend opposant M. X à l'administration après la dernière notification de redressement portait exclusivement sur la qualification juridique de ses activités et des revenus qu'il en retirait, la cour administrative d'appel a suffisamment motivé son arrêt ; qu'elle a pu légalement en déduire que l'administration n'était pas tenue de saisir la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires malgré la demande en ce sens qu'avait présentée le contribuable ;

Sur le bien-fondé de l'imposition de la plus-value réalisée en 1988 :

Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : 1° Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profit ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ;

Considérant que la cour a relevé que M. X a constitué le 4 novembre 1980, avec les membres de sa famille, une société civile immobilière dite Du Passage ayant pour activité la prise en crédit-bail, en vue de sa sous-location, d'un galerie de centre commercial et qu'à partir de cette date, il a progressivement assumé des fonctions de dirigeant ou d'administrateur dans un nombre important de sociétés ayant pour objet l'implantation en France et en Europe de centres commerciaux et a participé à la constitution de sept autres sociétés civiles immobilières spécialisées, comme la SCI Du Passage, dans la sous-location de centres commerciaux pris en crédit-bail, et dont il a déclaré les revenus et les déficits à titre professionnel ; que de ces faits qu'elle a souverainement appréciés, la cour administrative d'appel a pu légalement déduire que la plus-value réalisée par le contribuable à l'occasion de la cession, le 11 octobre 1988, des parts de la SCI Du Passage n'a été rendue possible que grâce à l'activité d'ensemble déployée par lui depuis 1980 et que, dès lors c'était à bon droit que l'administration avait estimé que ce profit provenait d'une exploitation lucrative au sens de l'article 92 du code général des impôts et était un revenu imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;


D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Roger X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


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