Conseil d'Etat, 8 / 3 SSR, du 23 juin 2000, 185477, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 février et 11 juin 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Claude X..., demeurant Le Bâti, Montagne (33570) Lussac ; M. X... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 14 octobre 1993 du tribunal administratif de Bordeaux rejetant sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 à 1983 dans les rôles de la commune de Montagne, département de la Gironde ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 500 F au titre des frais irrépétibles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des impôts et le live des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Vallée, Auditeur,

- les observations de la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. Jean-Claude X...,

- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : "L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur sa réclamation ..." ; qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l'action introduite devant un tribunal administratif, d'établir que le contribuable a reçu notification régulière de la décision prise sur sa réclamation ; qu'en cas de retour à l'administration du pli contenant la notification, cette preuve peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le préposé du service postal, conformément à la réglementation en vigueur, d'un avis d'instance prévenant le destinataire de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que pour établir que la notification à M. X... du rejet de sa réclamation a été régulièrement effectuée le 10 décembre 1990 et a donc fait courir à compter de cette date le délai de recours contentieux de deux mois, l'administration a produit une copie de l'enveloppe de réexpédition du pli contenant cette décision ; qu'en relevant qu'il ressort des mentions "claires et précises" portées sur cette enveloppe, envoyée à l'adresse exacte du destinataire, que celui-ci avait été avisé, par le dépôt à son domicile d'un avis de passage, de la mise en instance du pli recommandé avant le renvoi de ce dernier au service des impôts expéditeur, la cour administrative d'appel ne s'est pas fondée sur des faits matériellement inexacts et a porté sur la valeur probante des mentions figurant sur la pièce soumise à son examen et qu'elle n'a pas dénaturée, une appréciation qui n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ; qu'en déduisant des constatations qu'elle a ainsi souverainement opérées que la notification effectuée le 10 décembre 1990, dans les conditions susindiquées, devait être regardée comme ayant fait courir le délai de recours contentieux, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, d'autre part, que si le requérant fait valoir que l'administration, ayant conclu en appel à la recevabilité de la demande de première instance de M. X..., avait ainsi acquiescé au fait allégué par lui d'un défaut de dépôt à son domicile de tout avis de mise en instance du pli litigieux, il n'en appartenait pas moins à la cour administrative d'appel, saisie de la question d'ordre public de la recevabilité de la demande de première instance au regard des délais de recours contentieux, de se prononcer en droit, au vu des mentions figurant sur la pièce précédemment versée au dossier par l'administration, sur l'effectivité de la notification opérée le 10 décembre 1990 ; que le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant que M. X... devait être réputé avoir reçu la notification opérée le 10 décembre 1990 alors que l'administration avait renoncé à s'en prévaloir, doit, par suite, être écarté ;

Considérant, enfin, que si le requérant reproche à la cour d'avoir, en confirmant le jugement du tribunal administratif de Bordeaux rejetant sa demande comme tardive du seul fait qu'il n'aurait pas retiré à temps la lettre recommandée rejetant sa réclamation plus de trois ans après l'envoi de celle-ci, porté une atteinte excessive à ses droits patrimoniaux garantis par l'article 1 du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales et méconnu son droit, garanti par l'article 6 de la même convention, à faire juger par un tribunal sa contestation portant notamment sur de lourdes pénalités, ces moyens sont présentés pour la première fois en cassation ; que, n'étant pas d'ordre public, ils sont, par suite, irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 19 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 14 octobre 1993 du tribunal administratif de Bordeaux rejetant sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 à 1983 ;

Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Claude X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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