Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 3 juin 1998, 157667, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 3 juin 1998, 157667, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat - 9 / 8 SSR
statuant
au contentieux
- N° 157667
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
03 juin 1998
- Rapporteur
- Mme Guilhemsans
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 avril et 11 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES, dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 9 février 1994, par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Caen du 3 mars 1992, rejetant sa demande en décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie, pour son établissement de Bretteville-sur-Odon, au titre des années 1981 à 1987 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES, - les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES ("APAVE Normande"), qui effectue au profit de ses membres des contrôles et vérifications techniques réglementaires, pour lesquels elle bénéficie, selon le cas, d'une délégation exclusive du service des Mines ou d'un agrément de l'administration, a été assujettie à la taxe professionnelle au titre des années 1981 à 1987, pour ses différents établissements ; qu'à la suite de dégrèvements prononcés par l'administration, restent seuls en litige les droits auxquels l'association a été assujettie pour son établissement de Bretteville-sur-Odon ; En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : Considérant que l'article L. 56 du livre des procédures fiscales dispose que : "La procédure de redressement contradictoire n'est pas applicable : 1°) en matière d'impositions directes perçues par les collectivités locales ..." ; qu'à la différence des autres impositions directes perçues au profit des collectivités locales, dont l'assiette est fixée annuellement pour chaque contribuable d'après des éléments ou tarifs fixés par l'administration elle-même, la taxe professionnelle instituée par la loi du 29 juillet 1975 est établie sur des bases qui, en vertu de l'article 1447 du code général des impôts, doivent être déclarées chaque année par les contribuables ; qu'il ne ressort toutefois, ni de la loi du 29 juillet 1975, ni d'aucun autre texte, que le législateur ait entendu déroger, pour la taxe professionnelle, à la règle énoncée, pour toutes les impositions directes locales, par le 1° précité de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, la procédure contradictoire prévue et définie par l'article L. 55 et les articles L. 57 et suivants du même livre ne s'applique pas aux décisions par lesquelles l'administration fixe le montant de la taxe professionnelle due par une personne jusque là non assujettie ; que ce motif, qui répond à un moyen invoqué devant les juges du fond et ne comporte l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif, juridiquement erroné, retenu dans l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nantes, dont il justifie légalement le dispositif ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : ...-imposent des sujétions ..." ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 8 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, ... les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ... ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter des observations écrites" ; qu'eu égard à l'obligation faite à l'administration d'établir les impôts dus par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, les décisions parlesquelles elle met une imposition à la charge d'une personne physique ou morale ne peuvent, en dépit de la "sujétion" qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles "défavorables", au sens de l'article 1er, précité, de la loi du 11 juillet 1979 ; que les dispositions précitées du 1er alinéa de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 ne leur sont donc pas applicables ; qu'ainsi l'"APAVE Normande" n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel de Nantes aurait commis une erreur de droit en jugeant que l'administration n'était pas tenue d'observer, à son égard, une procédure de redressement contradictoire, ni de la mettre en mesure de présenter ses observations ; En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : "La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée" ; qu'il résulte de ce texte que sont seules placées hors du champ d'application de la taxe professionnelle les personnes qui, d'une part, exercent leur activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, notamment quant à la couverture de besoins qui ne sont pas normalement ou suffisamment pris en compte par ces dernières, quant aux prix pratiqués et aux usagers servis, d'autre part, ont une gestion désintéressée ; Considérant que la cour administrative d'appel de Nantes a jugé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis et sans les dénaturer, que les modalités d'exercice par l'"APAVE Normande" des contrôles réglementaires représentant 80 % de son chiffre d'affaires, autres que ceux pour lesquels elle bénéfice d'une délégation du service des mines, ne peuvent être regardées comme plus favorables, pour les usagers, que celles des contrôles effectués par les établissements privés à caractère lucratif, également agréés par l'administration ; que la Cour a pu ainsi en conclure, sans erreur de droit, que l'association avait un caractère lucratif de nature, à lui seul, à entraîner son assujettissement à la taxe professionnelle ; que, par suite, la critique faite par l'association d'un autre motif surabondamment retenu par la Cour et tiré de ce que sa gestion ne serait pas désintéressée, est sans portée utile ;
Considérant qu'en jugeant que l'instruction 6 E-7-75 du 30 octobre 1975 de la direction générale des impôts ne comporte pas d'interprétation formelle de la loi fiscale et que la lettre du directeur général des impôts du 25 octobre 1956, qui n'a trait qu'à l'impôt sur les sociétés, ne pouvait être invoquée utilement par l'association sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la Cour n'a commis aucune erreur de droit ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : "La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal" ; que le premier alinéa de l'article L. 80 A prévoit que : "Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration" ; que pour estimer que l'"APAVE Normande" ne pouvait se prévaloir de l'interprétation de la loi fiscale et de l'appréciation de fait figurant dans les décisions de dégrèvement prises, pour ses autres établissements, par les directeurs des services fiscaux de la Seine-Maritime, de l'Orne et de la Manche, la Cour s'est fondée sur le fait que l'imposition contestée était une imposition primitive et non un rehaussement ; qu'elle a ainsi exactement qualifié cette imposition ; Considérant que le moyen tiré par l'association de ce que les services locaux de l'administration fiscale ne pouvaient apprécier de manière divergente l'activité de ses différents établissements est inopérant ; que, par suite, l'association n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel aurait entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation en ne répondant pas à ce moyen ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'"APAVE Normande" n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nantes ; Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'"APAVE Normande" la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de l'"APAVE Normande" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de sa comptabilité, l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES ("APAVE Normande"), qui effectue au profit de ses membres des contrôles et vérifications techniques réglementaires, pour lesquels elle bénéficie, selon le cas, d'une délégation exclusive du service des Mines ou d'un agrément de l'administration, a été assujettie à la taxe professionnelle au titre des années 1981 à 1987, pour ses différents établissements ; qu'à la suite de dégrèvements prononcés par l'administration, restent seuls en litige les droits auxquels l'association a été assujettie pour son établissement de Bretteville-sur-Odon ; En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition : Considérant que l'article L. 56 du livre des procédures fiscales dispose que : "La procédure de redressement contradictoire n'est pas applicable : 1°) en matière d'impositions directes perçues par les collectivités locales ..." ; qu'à la différence des autres impositions directes perçues au profit des collectivités locales, dont l'assiette est fixée annuellement pour chaque contribuable d'après des éléments ou tarifs fixés par l'administration elle-même, la taxe professionnelle instituée par la loi du 29 juillet 1975 est établie sur des bases qui, en vertu de l'article 1447 du code général des impôts, doivent être déclarées chaque année par les contribuables ; qu'il ne ressort toutefois, ni de la loi du 29 juillet 1975, ni d'aucun autre texte, que le législateur ait entendu déroger, pour la taxe professionnelle, à la règle énoncée, pour toutes les impositions directes locales, par le 1° précité de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, la procédure contradictoire prévue et définie par l'article L. 55 et les articles L. 57 et suivants du même livre ne s'applique pas aux décisions par lesquelles l'administration fixe le montant de la taxe professionnelle due par une personne jusque là non assujettie ; que ce motif, qui répond à un moyen invoqué devant les juges du fond et ne comporte l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif, juridiquement erroné, retenu dans l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nantes, dont il justifie légalement le dispositif ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : ...-imposent des sujétions ..." ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 8 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, ... les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ... ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter des observations écrites" ; qu'eu égard à l'obligation faite à l'administration d'établir les impôts dus par tous les contribuables d'après leur situation au regard de la loi fiscale, les décisions parlesquelles elle met une imposition à la charge d'une personne physique ou morale ne peuvent, en dépit de la "sujétion" qui en résulte pour cette dernière, être regardées comme des décisions administratives individuelles "défavorables", au sens de l'article 1er, précité, de la loi du 11 juillet 1979 ; que les dispositions précitées du 1er alinéa de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 ne leur sont donc pas applicables ; qu'ainsi l'"APAVE Normande" n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel de Nantes aurait commis une erreur de droit en jugeant que l'administration n'était pas tenue d'observer, à son égard, une procédure de redressement contradictoire, ni de la mettre en mesure de présenter ses observations ; En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : "La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée" ; qu'il résulte de ce texte que sont seules placées hors du champ d'application de la taxe professionnelle les personnes qui, d'une part, exercent leur activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, notamment quant à la couverture de besoins qui ne sont pas normalement ou suffisamment pris en compte par ces dernières, quant aux prix pratiqués et aux usagers servis, d'autre part, ont une gestion désintéressée ; Considérant que la cour administrative d'appel de Nantes a jugé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis et sans les dénaturer, que les modalités d'exercice par l'"APAVE Normande" des contrôles réglementaires représentant 80 % de son chiffre d'affaires, autres que ceux pour lesquels elle bénéfice d'une délégation du service des mines, ne peuvent être regardées comme plus favorables, pour les usagers, que celles des contrôles effectués par les établissements privés à caractère lucratif, également agréés par l'administration ; que la Cour a pu ainsi en conclure, sans erreur de droit, que l'association avait un caractère lucratif de nature, à lui seul, à entraîner son assujettissement à la taxe professionnelle ; que, par suite, la critique faite par l'association d'un autre motif surabondamment retenu par la Cour et tiré de ce que sa gestion ne serait pas désintéressée, est sans portée utile ;
Considérant qu'en jugeant que l'instruction 6 E-7-75 du 30 octobre 1975 de la direction générale des impôts ne comporte pas d'interprétation formelle de la loi fiscale et que la lettre du directeur général des impôts du 25 octobre 1956, qui n'a trait qu'à l'impôt sur les sociétés, ne pouvait être invoquée utilement par l'association sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la Cour n'a commis aucune erreur de droit ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : "La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a pris formellement position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal" ; que le premier alinéa de l'article L. 80 A prévoit que : "Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration" ; que pour estimer que l'"APAVE Normande" ne pouvait se prévaloir de l'interprétation de la loi fiscale et de l'appréciation de fait figurant dans les décisions de dégrèvement prises, pour ses autres établissements, par les directeurs des services fiscaux de la Seine-Maritime, de l'Orne et de la Manche, la Cour s'est fondée sur le fait que l'imposition contestée était une imposition primitive et non un rehaussement ; qu'elle a ainsi exactement qualifié cette imposition ; Considérant que le moyen tiré par l'association de ce que les services locaux de l'administration fiscale ne pouvaient apprécier de manière divergente l'activité de ses différents établissements est inopérant ; que, par suite, l'association n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel aurait entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation en ne répondant pas à ce moyen ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'"APAVE Normande" n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nantes ; Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'"APAVE Normande" la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de l'"APAVE Normande" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION NORMANDE DES PROPRIETAIRES D'APPAREILS A VAPEUR ELECTRIQUES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.