Conseil d'Etat, 7 / 10 SSR, du 8 avril 1998, 146002, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat, 7 / 10 SSR, du 8 avril 1998, 146002, inédit au recueil Lebon
Conseil d'Etat - 7 / 10 SSR
statuant
au contentieux
- N° 146002
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
08 avril 1998
- Rapporteur
- Mlle Lagumina
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée le 12 mars 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SARTHE ; celui-ci demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté son déféré tendant à l'annulation des marchés passés par la commune de La Ferté-Bernard en vue de la construction d'un centre culturel ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces marchés ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des marchés publics ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mlle Lagumina, Auditeur, - les observations de Me Copper-Royer, avocat de la commune de la FertéBernard, - les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité du déféré du PREFET DE LA SARTHE devant le tribunal administratif de Nantes : Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 2 mars 1982, alors applicable, tel que modifié par la loi du 22 juillet 1982 : "I. Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement ... II. Sont soumis aux dispositions du paragraphe I du présent article : ...les conventions relatives aux marchés ..." ; que, l'article 3, premier alinéa, de la même loi dispose que "le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés au paragraphe II de l'article précédent qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois de leur transmission" ; que, lorsque cette transmission ne comporte pas le texte intégral de l'acte ou n'est pas, comme en l'espèce, accompagnée des documents annexes nécessaires pour mettre le représentant de l'Etat à même d'apprécier la portée et la légalité de l'acte, il appartient au représentant de l'Etat de demander à l'autorité communale, dans un délai de deux mois à compter de la réception de l'acte transmis, de compléter cette transmission ; que, dans ce cas, le délai de deux mois imparti au représentant de l'Etat par l'article 3 de la loi du 2 mars 1982 pour déférer l'acte au tribunal administratif court, soit de la réception du texte intégral de l'acte ou des documents annexes demandés, soit de la décision, explicite ou implicite, par laquelle l'autorité communale refuse de compléter la transmission initiale ; Considérant que la commune de La Ferté-Bernard a transmis, le 4 août 1992, au sous-préfet de Mamers le marché passé pour la construction d'un centre culturel ; que, par lettre du 11 septembre 1992, le sous-préfet a demandé au maire de compléter cette transmission par celle du cahier des clauses techniques particulières (C.C.T.P.), ainsi que du rapport "d'analyse" de la séance de la commission d'appel d'offres du 25 février 1992 concernant les lots n° 9, 10 et 12 ; que, eu égard aux dispositions de l'article 250 du code des marchés publics, selon lequel les cahiers des charges visés à l'article 318 du même code sont des éléments constitutifs des marchés, le cahier des clauses techniques particulières constituait un document annexe nécessaire pour mettre le représentant de l'Etat à même d'apprécier la portée et la légalité des actes précédemment transmis ; que le cahier des clauses techniques particulières demandé a été reçu le 12 octobre 1992 à la sous-préfecture de Mamers ; que, dans ces conditions, le déféré du PREFET DE LA SARTHE, enregistré le 5 novembre 1992 au greffe du tribunal administratif de Nantes, n'était pas tardif ;
Considérant qu'aux termes des dispositions, alors applicables, de l'article R.94 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "La requête doit être accompagnée de la décision attaquée ... - A défaut, le demandeur est averti par le greffier en chef que si la production n'en est pas faite dans le délai de quinze jours à partir de la réception de cet avertissement, la requête pourra être déclarée irrecevable" ; que le PREFET DE LA SARTHE dont, ainsi qu'il a été dit, le déféré a été enregistré le 5 novembre 1992, a transmis au tribunal administratif les marchés contestés les 7 et 10 décembre 1992 sans y avoir été invité dans les termes prévus à l'article R. 94 précité ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par la commune de La Ferté-Bernard au déféré du PREFET DE LA SARTHE doit être écartée ; Sur la légalité des marchés contestés : Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par le PREFET DE LA SARTHE : Considérant qu'aux termes des dispositions applicables en l'espèce de l'article 300 du code des marchés publics : " ... La commission élimine les offres non conformes à l'objet du marché ; elle choisit librement l'offre qu'elle juge la plus intéressante ... Dès que la commission a fait son choix, l'autorité habilitée à passer le marché avise tous les autres candidats du rejet de leur offres ... Cette autorité se réserve la faculté de ne pas donner suite à un appel d'offres si elle n'a pas obtenu de proposition qui lui semble acceptables. Dans ce cas, l'appel d'offres est déclaré infructueux et ladite autorité en avise tous les candidats. Il est alors procédé, soit par nouvel appel d'offres, soit par marché de gré à gré en application du 6° de l'article 312. Le rapport de la commission est transmis au représentant de l'Etat en même temps que les pièces nécessaires à l'exercice de son contrôle" ; que la faculté de donner suite à l'appel d'offres qui appartient à l'autorité habilitée à passer le marché ne peut s'exercer que dans la limite des choix exprimés par la commission d'appel d'offres ; Considérant que la commission d'appel d'offres pour la construction d'un centre culturel à La Ferté-Bernard s'est réunie le 25 février 1992 en vue de procéder à l'ouverture des plis contenant les offres présentées en réponse à la consultation du 15 février 1992 ; qu'il ressort du procès-verbal de cette réunion, que la commission d'appel d'offres a, "sous réserve d'analyse", décidé de retenir "les lots n°s 2-5-6-7-8-11-13-14-17-18", mais sans préciser l'identité des entreprises effectivement retenues, ni le montant de leurs offres, et proposé de déclarer l'appel d'offres infructueux pour neuf lots ; que, dans trois rapports établis les 25, 26 mars et 7 avril 1992; le maître d'oeuvre a fait une analyse précise des offres ; qu'il est constant, toutefois, que la commission d'appel d'offres, régulièrement composée, ne s'est pas réunie à nouveau pour examiner ces analyses ; qu'en l'absence de procès-verbal retraçant les choix faits par la commission d'appel d'offres, le maire ne pouvait donner suite à la procédure ; que, dès lors, les marchés signés le 31 juillet 1992 par la commune de La Ferté-Bernard en vue de la construction d'un centre culturel ont été passés au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SARTHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté son déféré ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 décembre 1992 et les marchés passés le 31 juillet 1992 par la commune de La Ferté-Bernard en vue de la constructiond'un centre culturel sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SARTHE, à la commune de La Ferté-Bernard, aux entreprises Brule, Somare, Cosson, Sterec, Vibramenal, Dorison, Pichot, Boudet, Le Coq, Sene, SOGIBAT, JD Sols, Houalet-Benoist, Juret, SIFEC, TMS, Parquet du Loir, Samia-Cats, Luxal, Richard, Pouplard, Cineconfort et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Sur la recevabilité du déféré du PREFET DE LA SARTHE devant le tribunal administratif de Nantes : Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 2 mars 1982, alors applicable, tel que modifié par la loi du 22 juillet 1982 : "I. Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement ... II. Sont soumis aux dispositions du paragraphe I du présent article : ...les conventions relatives aux marchés ..." ; que, l'article 3, premier alinéa, de la même loi dispose que "le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés au paragraphe II de l'article précédent qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois de leur transmission" ; que, lorsque cette transmission ne comporte pas le texte intégral de l'acte ou n'est pas, comme en l'espèce, accompagnée des documents annexes nécessaires pour mettre le représentant de l'Etat à même d'apprécier la portée et la légalité de l'acte, il appartient au représentant de l'Etat de demander à l'autorité communale, dans un délai de deux mois à compter de la réception de l'acte transmis, de compléter cette transmission ; que, dans ce cas, le délai de deux mois imparti au représentant de l'Etat par l'article 3 de la loi du 2 mars 1982 pour déférer l'acte au tribunal administratif court, soit de la réception du texte intégral de l'acte ou des documents annexes demandés, soit de la décision, explicite ou implicite, par laquelle l'autorité communale refuse de compléter la transmission initiale ; Considérant que la commune de La Ferté-Bernard a transmis, le 4 août 1992, au sous-préfet de Mamers le marché passé pour la construction d'un centre culturel ; que, par lettre du 11 septembre 1992, le sous-préfet a demandé au maire de compléter cette transmission par celle du cahier des clauses techniques particulières (C.C.T.P.), ainsi que du rapport "d'analyse" de la séance de la commission d'appel d'offres du 25 février 1992 concernant les lots n° 9, 10 et 12 ; que, eu égard aux dispositions de l'article 250 du code des marchés publics, selon lequel les cahiers des charges visés à l'article 318 du même code sont des éléments constitutifs des marchés, le cahier des clauses techniques particulières constituait un document annexe nécessaire pour mettre le représentant de l'Etat à même d'apprécier la portée et la légalité des actes précédemment transmis ; que le cahier des clauses techniques particulières demandé a été reçu le 12 octobre 1992 à la sous-préfecture de Mamers ; que, dans ces conditions, le déféré du PREFET DE LA SARTHE, enregistré le 5 novembre 1992 au greffe du tribunal administratif de Nantes, n'était pas tardif ;
Considérant qu'aux termes des dispositions, alors applicables, de l'article R.94 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "La requête doit être accompagnée de la décision attaquée ... - A défaut, le demandeur est averti par le greffier en chef que si la production n'en est pas faite dans le délai de quinze jours à partir de la réception de cet avertissement, la requête pourra être déclarée irrecevable" ; que le PREFET DE LA SARTHE dont, ainsi qu'il a été dit, le déféré a été enregistré le 5 novembre 1992, a transmis au tribunal administratif les marchés contestés les 7 et 10 décembre 1992 sans y avoir été invité dans les termes prévus à l'article R. 94 précité ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par la commune de La Ferté-Bernard au déféré du PREFET DE LA SARTHE doit être écartée ; Sur la légalité des marchés contestés : Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par le PREFET DE LA SARTHE : Considérant qu'aux termes des dispositions applicables en l'espèce de l'article 300 du code des marchés publics : " ... La commission élimine les offres non conformes à l'objet du marché ; elle choisit librement l'offre qu'elle juge la plus intéressante ... Dès que la commission a fait son choix, l'autorité habilitée à passer le marché avise tous les autres candidats du rejet de leur offres ... Cette autorité se réserve la faculté de ne pas donner suite à un appel d'offres si elle n'a pas obtenu de proposition qui lui semble acceptables. Dans ce cas, l'appel d'offres est déclaré infructueux et ladite autorité en avise tous les candidats. Il est alors procédé, soit par nouvel appel d'offres, soit par marché de gré à gré en application du 6° de l'article 312. Le rapport de la commission est transmis au représentant de l'Etat en même temps que les pièces nécessaires à l'exercice de son contrôle" ; que la faculté de donner suite à l'appel d'offres qui appartient à l'autorité habilitée à passer le marché ne peut s'exercer que dans la limite des choix exprimés par la commission d'appel d'offres ; Considérant que la commission d'appel d'offres pour la construction d'un centre culturel à La Ferté-Bernard s'est réunie le 25 février 1992 en vue de procéder à l'ouverture des plis contenant les offres présentées en réponse à la consultation du 15 février 1992 ; qu'il ressort du procès-verbal de cette réunion, que la commission d'appel d'offres a, "sous réserve d'analyse", décidé de retenir "les lots n°s 2-5-6-7-8-11-13-14-17-18", mais sans préciser l'identité des entreprises effectivement retenues, ni le montant de leurs offres, et proposé de déclarer l'appel d'offres infructueux pour neuf lots ; que, dans trois rapports établis les 25, 26 mars et 7 avril 1992; le maître d'oeuvre a fait une analyse précise des offres ; qu'il est constant, toutefois, que la commission d'appel d'offres, régulièrement composée, ne s'est pas réunie à nouveau pour examiner ces analyses ; qu'en l'absence de procès-verbal retraçant les choix faits par la commission d'appel d'offres, le maire ne pouvait donner suite à la procédure ; que, dès lors, les marchés signés le 31 juillet 1992 par la commune de La Ferté-Bernard en vue de la construction d'un centre culturel ont été passés au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SARTHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté son déféré ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 décembre 1992 et les marchés passés le 31 juillet 1992 par la commune de La Ferté-Bernard en vue de la constructiond'un centre culturel sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SARTHE, à la commune de La Ferté-Bernard, aux entreprises Brule, Somare, Cosson, Sterec, Vibramenal, Dorison, Pichot, Boudet, Le Coq, Sene, SOGIBAT, JD Sols, Houalet-Benoist, Juret, SIFEC, TMS, Parquet du Loir, Samia-Cats, Luxal, Richard, Pouplard, Cineconfort et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.