Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 20 novembre 1995, 138660, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu 1°), sous le n° 138 660, la requête, enregistrée le 24 juin 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la S.A. DU SALAMANDRIER, dont le siège est ... ; la S.A. DU SALAMANDRIER demande que le Conseil d'Etat :

1° annule le jugement du 23 avril 1992 par lequel le tribunal administratif de Nice a, sur la demande de l'association "Draguignan Ecologie", annulé l'arrêté du 2 décembre 1991 du maire de Draguignan, lui accordant un permis de construire en vue de la réalisation d'un centre commercial ;

2° rejette la demande présentée devant le tribunal administratif par l'Association "Draguignan Ecologie" ;

Vu 2°), sous le n° 138 862, la requête, enregistrée le 2 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE DRAGUIGNAN ; la COMMUNE DE DRAGUIGNAN demande que le Conseil d'Etat :

1° annule le jugement du 23 avril 1992 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de l'association "Draguignan Ecologie" annulé l'arrêté du 2 décembre 1991de son maire, accordant un permis de construire en vue de la réalisation d'un centre commercial ;

2° rejette la demande présentée par l'association "Draguignan Ecologie" devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Bardou, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes nos 138 660 et 138 862 sont dirigées contre le même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 31 octobre 1973, relatif à la protection contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public : "Pour l'application du présent chapitre, constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux ou enceintes, dans lesquels les personnes sont admises soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitations payantes ou non" ; que, selon l'article 22 du même décret : "Le permis de construire ne peut être délivré qu'après consultation de la commission de sécurité compétente" ;

Considérant que le centre commercial du Salamandrier, implanté sur 14 000 m2 et comportant, outre un hypermarché, 28 boutiques et un "centre auto", est un établissement recevant du public, au sens des dispositions précitées du décret du 31 octobre 1973 ; que la délivrance du permis de construire ce centre commercial devait donc être précédée de la consultation de l'une des commissions de la protection civile prévue par les articles 37 et 39 du même décret ; qu'il est constant qu'à la date du 2 décembre 1991 à laquelle le permis de construire a été délivré par le maire de Draguignan, cette formalité substantielle à laquelle ne peut se substituer l'avis émis par l'inspecteur des services de défense et de secours contre l'incendie, n'avait pas été accomplie ; que le fait que l'avis de la commission a été ultérieurement émis n'est pas de nature à rendre régulier le permis de construire contesté ; que l'arrêté précité du maire de Draguignan est donc entaché d'illégalité ; que, pour ce seul motif, le tribunal administratif de Nice était fondé à l'annuler ; que, par suite, les requêtes de la S.A. DU SALAMANDRIER et de la COMMUNE DE DRAGUIGNAN doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de l'association "Draguignan Ecologie" qui tendent àl'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la S.A. DU SALAMANDRIER et la COMMUNE DE DRAGUIGNAN à payer, chacune, une somme de 5 000 F à l'association "Draguignan Ecologie" au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de la S.A. DU SALAMANDRIER et de la COMMUNE DE DRAGUIGNAN sont rejetées.
Article 2 : La S.A. DU SALAMANDRIER et la COMMUNE DE DRAGUIGNAN paieront, chacune, à l'association "Draguignan Ecologie" une somme de 5 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.A. DU SALAMANDRIER, à la COMMUNE DE DRAGUIGNAN, à l'association "Draguignan Ecologie" et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.
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