Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 12 octobre 1994, 128402, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 6 août 1991, présentée pour M. Jean X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 27 juin 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit accordé le bénéfice de l'étalement prévu par l'article 163 du code général des impôts pour le calcul de l'impôt sur le revenu au titre de 1985 ;

2°) de lui accorder, en réglant l'affaire au fond, le bénéfice de l'étalement sollicité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Dulong, Conseiller d'Etat,- les observations de Me Roger, avocat de M. X...,

- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes des dispositions, alors applicables, de l'article 163 du code général des impôts : "Lorsque, au cours d'une année, un contribuable a réalisé un revenu exceptionnel, tel que la plus-value d'un fonds de commerce ou la distribution de réserves d'une société, et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut demander qu'il soit réparti, pour l'établissement de cet impôt, sur l'année de sa réalisation et les années antérieures non couvertes par la prescription" ; qu'il résulte de ces dispositions que les revenus exceptionnels sont ceux qui ne sont pas susceptibles d'être recueillis annuellement et n'ont pas été réalisés dans l'exercice normal de l'activité professionnelle ;

Considérant que, pour rejeter la requête de M. X..., médecin psychiatre, qui contestait le refus de l'administration de lui accorder le bénéfice de l'étalement prévu par l'article 163 du code général des impôts pour l'imposition d'une somme de 800 000 F, perçue, en 1985, sous forme d'honoraires en rémunération de consultations médicales données au siège d'une association, la cour administrative d'appel s'est bornée à relever que l'intéressé ne démontrait pas que les soins ainsi donnés par lui ne relevaient pas d'une pratique médicale normale et ne pouvaient être regardés, de par leur objet, comme de la compétence d'un médecin psychiatre ; qu'en statuant ainsi, sans se prononcer expressément sur le moyen tiré par M. X... pour justifier de ce que le revenu litigieux, avait été réalisé par lui en dehors de l'exercice normal de cette activité professionnelle, la cour administrative d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision ; qu'ainsi et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, l'arrêt de la cour doit être annulé ;

Considérant que, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les revenus faisant l'objet du litige ont été tirés par M. X... au cours de la seule année 1985 d'une activité exercée hors de son cabinet, qui avait pour objet le traitement de la stérilité masculine et impliquait la mise en oeuvre de méthodes, techniques et moyens débordant du cadre habituel de la profession de médecin psychiatre de l'intéressé ; que, pour cette activité particulière, M. X... a, en outre, bénéficié, de la part des organismes de sécurité sociale, d'un droit à dépassement d'honoraires ; que dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas contesté que les autres conditions exigées par l'article 163 du code général des impôts se trouvaient remplies, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande qui tendait à l'application de cette disposition au revenu exceptionnel de 800 000 F qu'il a perçu en 1985 ;
Article 1er : L'arrêt du 27 juin 1991 de la cour administrative d'appel de Paris et le jugement du 30 novembre 1989 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La somme de 800 000 F perçue en 1985 par M. X... sera imposée dans les conditions prévues par les dispositions, alors applicables, de l'article 163 du code général des impôts.
Article 3 : M. X... est déchargé de la fraction de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1985 par suite de la non application à une somme de 800 000 F perçue au cours de ladite année de la répartition prévue par les dispositions, alors applicables, de l'article 163 du code général des impôts.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean X... et au ministre du budget.
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