Conseil d'Etat, 1 / 4 SSR, du 3 octobre 1990, 94414, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 18 janvier 1988, présentés pour l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION, dont le siège est ... ; l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 1987, par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'état exécutoire émis par le directeur de l'office le 31 octobre 1985 à l'encontre de la société à responsabilité limitée "la Cigogne", pour le recouvrement de la somme de 26 340 F au titre de la contribution spéciale pour l'emploi d'étrangers en situation irrégulière prévue par l'article L.341-7 du code du travail ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et, notamment, ses articles 52 à 55 ;

Vu la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, signée le 11 septembre 1952 à New-York, ratifiée par la France en vertu de la loi n° 54-290 du 17 mars 1954 et publiée au Journal Officiel de la République française du 29 octobre 1954, en exécution du décret n° 54-1055 du 14 octobre 1954 ;

Vu le protocole relatif au statut des réfugiés, en date à New-York du 31 janvier 1967, auquel la France a adhéré en vertu de la loi n° 70-1076 du 25 novembre 1970 et publié au Journal Officiel de la République française du 18 avril 1971, en exécution du décret n° 71-289 du 9 avril 1971 ;

Vu la loi n° 52-803 du 25 juillet 1952 portant création d'un office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Vu le décret n° 53-377 du 2 mai 1953 relatif à l'office français de protection des réfugiés et apatrides

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986, et, notamment, son article 18 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de l'Office des migrations internationales anciennement OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION (O.N.I.) et de la SCP Desaché, Gatineau, avocat de la société à responsabilité limitée la Cigogne,

- les conclusions de M. Tuot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.341-6 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date où a été établi le procès-verbal sur la base duquel des poursuites ont été engagées à l'encontre de la société intimée : "Il est interdit à toute personne d'engager ou de conserver à son service un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariale en France, lorsque la possession de ce titre est exigée en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux" ; qu'aux termes de l'article L.341-7 du même code : "Sans préjudice de poursuites judiciaires qui pourront être intentées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L.341-6, premier alinéa, sera tenu d'acquitter une contribution spéciale au bénéfice de l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION ..." ;

Considérant que la décision par laquelle l'office français de protection des réfugiés et apatrides reconnaît à un étranger la qualité de réfugié, confère à cet étranger, en vertu des dispositions combinées de l'article 15 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 et des 1er, 2ème et 4ème alinéas de l'article L.341-4 du même code, le droit à obtenir la carte de résident en France, et, par suite, le droit d'exercer en France la profession de son choix, et que cette qualité vaut pour lui autorisation de travail ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a reconnu, le 24 janvier 1985, à Mme X..., ressortissante zaïroise, la qualité de réfugiée ; que, dès lors, au moment des contrôles litigieux opérés, les 28 février et 25 mars 1985, par l'inspection du travail de Paris dans la société "La Cigogne", Mme X... devait être regardée comme munie d'un titre l'autorisant à exercer une activité salariée sur le territoire français ; qu'ainsi, la société "La Cigogne" n'a pas méconnu les dispositions précitées du premier alinéa de l'article L.341-6 du code du travail en employant à ces dates cette salariée ; que, par suite, le directeur de l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'état exécutoire, émis le 31 octobre 1985 à l'encontre de la société "La Cigogne", pour le recouvrement d'une somme de 26 340 F ;
Article 1er : La requête du directeur de l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE NATIONAL D'IMMIGRATION, à la société "La Cigogne" et au ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères.
Retourner en haut de la page