Conseil d'Etat, 7 / 8 SSR, du 9 octobre 1992, 86531, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat, 7 / 8 SSR, du 9 octobre 1992, 86531, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat - 7 / 8 SSR
statuant
au contentieux
- N° 86531
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
09 octobre 1992
- Président
- M. Rougevin-Baville
- Rapporteur
- M. Ménéménis
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours du MINISTRE CHARGE DU BUDGET enregistré le 9 avril 1987 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE CHARGE DU BUDGET demande que le Conseil d'Etat : 1°) réforme le jugement du 11 décembre 1986 en tant que par ledit jugement le tribunal administratif de Bordeaux a accordé à M. et Mme Y... décharge pour les années 1976 et 1977 et réduction pour l'année 1978 des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. Y... a été assujetti, 2°) remette dans cette mesure l'imposition contestée à la charge de M. Y... ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code général des impôts ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Après avoir entendu : - le rapport de M. Ménéménis, Maître des requêtes, - les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que la demande faite par un vérificateur à un contribuable qui fait l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble de lui communiquer les relevés de ses comptes bancaires aurait un caractère contraignant et que le vérificateur serait, en conséquence, tenu d'informer le contribuable de son caractère non contraignant ; Considérant, d'autre part, que si M. Y... soutenait en première instance que les modifications portées à la main par le vérificateur sur le formulaire d'avis de vérification fiscale d'ensemble aurait eu pour effet de conférer à celui-ci un caractère comminatoire, il ressort de l'examen de cet avis que ce moyen manque en fait ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur les motifs sus-exposés pour prononcer la décharge au titre des années 1976 et 1977 et la réduction au titre de l'année 1978, des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles M. Y... a été assujetti ; Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition : En ce qui concerne la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble : Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a, par un avis de vérification en date du 9 novembre 1979, averti le requérant de ce qu'il allait faire l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble et lui a demandé de lui communiquer les relevés de ses comptes bancaires ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne lui imposait d'avertir également l'épouse de M. Y... de cette vérificaton, ni de lui demander directement les relevés de ses comptes bancaires et de ceux de son épouse, dès lors que l'imposition des revenus du foyer fiscal étant établie au nom du chef de famille et le requérant n'alléguant pas que son épouse ne vivait pas avec lui, la procédure d'imposition devait être suivie directement entre l'administration et M. Y... ; Considérant, en second lieu, que si M. Y... soutient avoir été privé de débat contradictoire avec le vérificateur, il résulte de l'instruction que ce moyen manque en fait ; En ce qui concerne les sommes taxées d'office : Considérant qu'en vertu des dispositions du 2ème alinéa de l'article 179 du code général des impôts, est taxé d'office le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article 176 dudit code ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que le requérant n'a apporté aux quatre demandes de justifications qui lui ont été adressées que des réponses qui, en raison de leur imprécision et de leur caractère invérifiable, ont été, à juste titre, regardées par l'administation comme équivalant à une absence de réponse ; que c'est, par suite, à bon droit que le requérant a été taxé d'office à l'impôt sur le revenu à raison des sommes dont il n'avait pu justifier l'origine et la nature ;
En ce qui concerne les sommes imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers : Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête : Considérant qu'en se bornant à affirmer que les recherches qu'elle avait effectuées avaient permis de qualifier de revenus de capitaux mobiliers les sommes de 20 000 F, 6 500 F et 80 517 F respectivement perçues par le requérant au titre des années 1976, 1977 et 1978, l'administration a insuffisamment motivé les notifications de redressement qu'elle a adressées au requérant ainsi que les réponses qu'elle a faites aux observations formulées par celui-ci ; que M. X... est, par suite, fondé à soutenir que la procédure d'imposition suivie à son encontre en ce qui concerne les sommes susmentionnées est irrégulière ; Sur le bien-fondé de l'imposition des sommes taxées d'office : Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. Y... n'apporte aucune justification de la réalité des prêts qui lui auraient été, selon ses allégations, consentis en 1976 par Mme A... et Mme B... ; Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à affirmer que la somme de 30 000 F que l'administration a taxée d'office au titre de l'année 1978 proviendrait d'un prêt qui lui aurait été accordé par M. et Mme C... alors qu'il précise par ailleurs qu'il ne lui est pas possible de leur en demander une attestation, le requérant n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'origine de la somme litigieuse ; Considérant, enfin, que la somme de 100 000 F versée au compte courant de Mme Y... le 29 décembre 1978 et taxée d'office à l'impôt sur le revenu correspondrait, selon les allégations du requérant, au remboursement de bons anonymes qui lui auraient été prêtés par un client, M. Z... ; que, toutefois, le requérant n'apporte par la preuve qui lui incombe de l'origine de cette somme par les pièces qu'il produit ;
Sur les pénalités : Considérant qu'ainsi que le reconnaît l'administration, la lettre de motivation des pénalités méconnaît, en ce qui concerne l'année 1978, les prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ; qu'il y a lieu dès lors de procéder au dégrèvement qui résulterait de la substitution des intérêts de retard aux majorations appliquées aux droits en principal et dans la limite de ces majorations ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est seulement fondé à demander le rétablissement de M. Y... aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 1976, 1977 et 1978 à raison des sommes d'origine inexpliquée pour lesquelles il avait été taxé d'office et la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué ;
Article 1er : Les suppléments d'impôts sur le revenu auxquels M. Y... a été assujetti au titre des années 1976, 1977 et 1978 à raison des sommes d'origine inexpliquée pour lesquelles il avait été taxé d'office, assortis de seuls intérêts de retard, sont remis à sa charge.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 11 décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre chargé du budget est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à M. Y....
Considérant, d'une part, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que la demande faite par un vérificateur à un contribuable qui fait l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble de lui communiquer les relevés de ses comptes bancaires aurait un caractère contraignant et que le vérificateur serait, en conséquence, tenu d'informer le contribuable de son caractère non contraignant ; Considérant, d'autre part, que si M. Y... soutenait en première instance que les modifications portées à la main par le vérificateur sur le formulaire d'avis de vérification fiscale d'ensemble aurait eu pour effet de conférer à celui-ci un caractère comminatoire, il ressort de l'examen de cet avis que ce moyen manque en fait ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur les motifs sus-exposés pour prononcer la décharge au titre des années 1976 et 1977 et la réduction au titre de l'année 1978, des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles M. Y... a été assujetti ; Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition : En ce qui concerne la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble : Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a, par un avis de vérification en date du 9 novembre 1979, averti le requérant de ce qu'il allait faire l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble et lui a demandé de lui communiquer les relevés de ses comptes bancaires ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne lui imposait d'avertir également l'épouse de M. Y... de cette vérificaton, ni de lui demander directement les relevés de ses comptes bancaires et de ceux de son épouse, dès lors que l'imposition des revenus du foyer fiscal étant établie au nom du chef de famille et le requérant n'alléguant pas que son épouse ne vivait pas avec lui, la procédure d'imposition devait être suivie directement entre l'administration et M. Y... ; Considérant, en second lieu, que si M. Y... soutient avoir été privé de débat contradictoire avec le vérificateur, il résulte de l'instruction que ce moyen manque en fait ; En ce qui concerne les sommes taxées d'office : Considérant qu'en vertu des dispositions du 2ème alinéa de l'article 179 du code général des impôts, est taxé d'office le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article 176 dudit code ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que le requérant n'a apporté aux quatre demandes de justifications qui lui ont été adressées que des réponses qui, en raison de leur imprécision et de leur caractère invérifiable, ont été, à juste titre, regardées par l'administation comme équivalant à une absence de réponse ; que c'est, par suite, à bon droit que le requérant a été taxé d'office à l'impôt sur le revenu à raison des sommes dont il n'avait pu justifier l'origine et la nature ;
En ce qui concerne les sommes imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers : Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête : Considérant qu'en se bornant à affirmer que les recherches qu'elle avait effectuées avaient permis de qualifier de revenus de capitaux mobiliers les sommes de 20 000 F, 6 500 F et 80 517 F respectivement perçues par le requérant au titre des années 1976, 1977 et 1978, l'administration a insuffisamment motivé les notifications de redressement qu'elle a adressées au requérant ainsi que les réponses qu'elle a faites aux observations formulées par celui-ci ; que M. X... est, par suite, fondé à soutenir que la procédure d'imposition suivie à son encontre en ce qui concerne les sommes susmentionnées est irrégulière ; Sur le bien-fondé de l'imposition des sommes taxées d'office : Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. Y... n'apporte aucune justification de la réalité des prêts qui lui auraient été, selon ses allégations, consentis en 1976 par Mme A... et Mme B... ; Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à affirmer que la somme de 30 000 F que l'administration a taxée d'office au titre de l'année 1978 proviendrait d'un prêt qui lui aurait été accordé par M. et Mme C... alors qu'il précise par ailleurs qu'il ne lui est pas possible de leur en demander une attestation, le requérant n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'origine de la somme litigieuse ; Considérant, enfin, que la somme de 100 000 F versée au compte courant de Mme Y... le 29 décembre 1978 et taxée d'office à l'impôt sur le revenu correspondrait, selon les allégations du requérant, au remboursement de bons anonymes qui lui auraient été prêtés par un client, M. Z... ; que, toutefois, le requérant n'apporte par la preuve qui lui incombe de l'origine de cette somme par les pièces qu'il produit ;
Sur les pénalités : Considérant qu'ainsi que le reconnaît l'administration, la lettre de motivation des pénalités méconnaît, en ce qui concerne l'année 1978, les prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ; qu'il y a lieu dès lors de procéder au dégrèvement qui résulterait de la substitution des intérêts de retard aux majorations appliquées aux droits en principal et dans la limite de ces majorations ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est seulement fondé à demander le rétablissement de M. Y... aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 1976, 1977 et 1978 à raison des sommes d'origine inexpliquée pour lesquelles il avait été taxé d'office et la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué ;
Article 1er : Les suppléments d'impôts sur le revenu auxquels M. Y... a été assujetti au titre des années 1976, 1977 et 1978 à raison des sommes d'origine inexpliquée pour lesquelles il avait été taxé d'office, assortis de seuls intérêts de retard, sont remis à sa charge.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 11 décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre chargé du budget est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à M. Y....