Conseil d'Etat, 8 / 9 SSR, du 26 février 1990, 84156, publié au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 31 décembre 1986 et 27 avril 1987, présentés pour la société SVA Brambi-Fruits, société à responsabilité limitée, représentée par son gérant en exercice et dont le siège est ..., venant aux droits de la société Brambi-Fruits, société à responsabilité limitée ; la société demande que le Conseil d'Etat :

1°) annule le jugement en date du 23 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande relative à des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société Brambi-Fruits dans les rôles de la commune de Paris au titre de 1978 et de 1979 et tendant à la réduction du premier et à la décharge du second ;

2°) alloue la décharge et la réduction sollicitées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le décret n° 68-659 du 10 juillet 1968 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Arrighi de Casanova, Maître des requêtes,

- les observations de la S.C.P. Delaporte, Briard, avocat de la société à responsabilité limitée SVA Brambi-Fruits,

- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 29 du décret susvisé du 10 juillet 1968, pris pour l'application de l'ordonnance du 22 septembre 1967 portant modification et codification des règles relatives aux marchés d'intérêt national : "Tout usager qui désire bénéficier d'une occupation privative doit obtenir du gestionnaire une concession d'emplacement et acquitter le droit de première accession, fixé par le conseil d'administration ou le conseil qui en tient lieu et approuvé par le préfet" et qu'aux termes de l'article 31 : "Le titulaire d'une autorisation d'occupation privative peut, dans les conditions fixées ci-après, présenter au gestionnaire un successeur qui sera subrogé dans ses droits. Le gestionnaire ne peut refuser à la personne présentée comme successeur l'autorisation de s'établir à titre privatif dans un emplacement du marché si cette personne a obtenu l'autorisation préfectorale portée au titre II ci-dessus et remplit les conditions prévues par le présent décret et le règlement intérieur pour exercer une activité conforme à la destination de cet emplacement" ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que bien que l'emprise des marchés d'intérêt national appartienne au domaine public de l'Etat, la concession d'un emplacement emporte l'attribution au concessionnaire d'un droit de présenter son successeur qui est opposable au concédant ;

Considérant que conformément à ces ispositions, la société "l'Auxiliaire des Halles", titulaire d'un emplacement dans l'enceinte du marché de Paris-Rungis, a présenté en janvier 1978 à la société d'économie mixte d'aménagement et de gestion du marché d'intérêt national de la région parisienne (SEMMARIS), la société Brambi-Fruits pour lui succéder dans la jouissance de cet emplacement ; que la SEMMARIS a agréé ce transfert ; qu'en application de la convention intervenue entre elles le 25 janvier 1978, la société Brambi-Fruits a versé à la société "l'Auxiliaire des Halles" une somme de 1 800 000 F correspondant au remboursement, d'une part, du droit de première accession versé par cette dernière, d'autre part, du coût des installations cédées par elle ; que la société Brambi-Fruits a regardé le remboursement du droit de première accession comme des frais d'établissement qu'elle a amortis à raison de 220 000 F au titre de l'exercice 1978 et 880 000 F au titre de l'exercice 1979 ; que la société SVA Brambi-Fruits venant aux droits de la société Brambi-Fruits conteste la réintégration à ses bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés au titre de 1978 et de 1979, des sommes en cause, que l'administration a regardées comme la contrepartie de l'acquisition d'un élément incorporel de l'actif immobilisé ;

Considérant que, bien que les emplacements compris dans l'enceinte du marché de Paris-Rungis fassent partie du domaine public et que les autorisations de les occuper présentent nécessairement un caractère précaire, les conditions dans lesquelles ces autorisations sont accordées et transmises, qui comportent notamment le droit de présenter un successeur, en font un élément du patrimoine de l'entreprise qui en est titulaire et entrent en conséquence dans son actif immobilisé ; qu'il suit de là que les versements en cause ont eu pour contrepartie un accroissement de l'actif immobilisé de la société Brambi-Fruits et n'étaient pas déductibles de ses résultats ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société SVA Brambi-Fruits n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge ou en réduction des impositions contestées ;
Article 1er : La requête de la société SVA Brambi-Fruits est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société SVA Brambi-Fruits et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.
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