Conseil d'Etat, 7 / 9 SSR, du 17 mai 1989, 95684, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 29 février 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Didier Y..., demeurant ..., par Me X... avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

1°) annule le jugement du 30 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, au titre des mois de février à juin 1983 ;

2°) lui accorde la décharge demandée,

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-935 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Zémor, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Roger, avocat de M. Didier Y...,

- les conclusions de M. Martin Laprade, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 44 bis du code général des impôts : "I. Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, les bénéfices réalisés au cours de l'année de leur création et des quatre années suivantes par les entreprises industrielles ne sont retenues que : ... pour la moitié de leur montant lorsqu'elles sont créées à partir du 1er janvier 1982 et jusqu'au 31 décembre 1983 ... III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes, ou pour la reprise de telles activités, ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas aux entreprises créées pour la reprise d'établissements en difficulté" ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de l'article 7 de la loi du 29 décembre 1983 : "Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues à l'article 44 bis-II, 2° et 3°, et III, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés, à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent au titre de l'année de leur création et des deux années suivantes. Les bénéfices réalisés au titre de la quatrième et de la cinquième année d'activité ne sont retenus dans les bases de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de leur montant." ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que peuvent entrer dans leur champ d'application les entreprises nouvelles créées par reprise d'activité préexistantes en difficulté, alors même qu'un certain délai se serait écoulé entre la fin de l'exploitation de l'entreprise et la reprise de celle-ci ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société à responsabilité limitée "Tedoldi Jean et Fils", exploitait un atelier de préfabrication d'éléments pour la construction à base de ferraille ; que cette activité de préfabrication a été maintenue par ladite société jusqu'à sa déclaration de liquidation le 5 mars 1982 ; que, par convention en date du 1er février 1983, ledit atelier de préfabrication ainsi que le matériel servant à l'exploitation de celui-ci ont été loués au requérant qui les a utilisés pour y reprendre, au cours de la période du 1er février au 30 juin 1983, une activité identique à celle correspondant à leur destination initiale ; que, dès lors, l'entreprise de M. Y... Didier doit être regardée comme créée pour reprendre une activité préexistante exercée par un établissement en difficulté ; que la double circonstance que cet établissement ait cessé pendant quelques mois toute activité et que le requérant ait été antérieurement salarié de la société mise en liquidation, ne peut faire obstacle au bénéfice des dispositions précitées ; qu'il en résulte que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices d'exploitation de son entreprise de février à juin 1983 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 3 décembre 1987 est annulé.
Article 2 : M. Didier Y... est déchargé de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices d'exploitation de son entreprise de février à juin 1983.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.


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