Conseil d'Etat, 8 / 7 SSR, du 23 juin 1986, 48465, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 février 1983 et 3 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la Société "TEINTURERIE X...", société anonyme dont le siège est ... Seine-Maritime , représentée par son président-directeur général, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :

1- réforme un jugement en date du 3 décembre 1982 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Rouen n'a fait que partiellement droit à sa demande en réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés et de majoration exceptionnelle du même impôt auxquels elle est assujettie au titre des années 1971, 1972, 1973 et 1974 dans les rôles de la commune de Darnétal ;

2- lui accorde l'intégralité de la réduction sollicitée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs ;

Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Quandalle, Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Société Anonyme "Teinturerie X...",

- les conclusions de M. de Guillenchmidt, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne la prise en compte dans les charges de la société des "allocations forfaitaires pour frais d'emploi" versées à M. X... au cours des exercices clos en 1971, 1972, 1973 et 1974 :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts qui, en vertu de l'article 209 du même code est applicable à l'assiette de l'impôt sur les sociétés : "1- Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment : 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre... Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais" ; que quelle qu'ait été la procédure d'imposition suivie à l'encontre du contribuable, il lui appartient de justifier que les rémunérations déduites de son bénéfice imposable correspondent à un travail effectif ;

Considérant que la société requérante n'a produit aucun acte écrit définissant les missions qu'elle prétend avoir confiées pendant les exercices susmentionnés à M. X..., son fondateur et principal associé, qui avait abandonné en 1970 ses fonctions de président-directeur général ; que les attestations qu'elle a versées au dossier n'établissent pas, de façon suffisamment précise, la nature et l'importance des services que M. Y... aurait continué de lui rendre au cours de ces exercices ; qu'ainsi, la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les "allocations forfaitaires pour frais d'emploi" qui ont été versées à M. X... au cours desdites années correspondaient à un travail effectif ; qu'il suit de là qu'elle n'est pas fondée à en demander la déduction pour la détermination des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés dont elle était redevable ;

En ce qui concerne l'imputation sur le bénéfice de la Société Anonyme "TEINTURERIE X..." au titre de l'année 1974 d'une indemnité versée à la société propriétaire d'un local commercial pris à bail :

Considérant que la société requérante conteste la réintégration dans son bénéfice de l'année 1974 d'une somme de 9 000 F égale au neuvième de l'indemnité versée par elle, à la société centrale immobilière de la caisse des dépôts et consignations, lors de la conclusion d'un bail concernant un local commercial situé à Rouen-La Grand Mare ;

Considérant qu'il résulte clairement de la "clause particulière" insérée dans le contrat de bail susmentionné, conclu le 20 septembre 1972, que cette indemnité a été stipulée pour tenir compte à la bailleresse de la valeur des droits accordés aux locataires en application des lois sur la propriété commerciale ; que si, pour prétendre qu'elle était fondée à comprendre dans ses charges déductibles l'indemnité litigieuse, la société requérante soutient que celle-ci devait être regardée comme correspondant en réalité à un supplément de loyer, justifié par le niveau anormalement bas du montant annuel dudit loyer stipulé dans le bail, elle n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère anormal de ce loyer en se bornant à indiquer le montant de loyers commerciaux sensiblement supérieurs relevés à la même époque dans des villes du département de la Seine-Maritime autres que Rouen-La-Grand Mare, pour des locaux commerciaux dont la localisation dans ces villes et les caractéristiques ne sont, d'ailleurs, pas précisées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Société Anonyme "TEINTURERIE X..." n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Rouen lui a refusé la réduction des impositions contestées ;
Article ler : La requête de la Société Anonyme "TEINTURERIE X..." est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société Anonyme "TEINTURERIE X..." et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.
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