Conseil d'Etat, 7 / 8 SSR, du 30 septembre 1981, 17343, publié au recueil Lebon
Conseil d'Etat, 7 / 8 SSR, du 30 septembre 1981, 17343, publié au recueil Lebon
Conseil d'Etat - 7 / 8 SSR
statuant
au contentieux
- N° 17343
- Publié au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
30 septembre 1981
- Président
- M. Lasry
- Rapporteur
- M. Giuily
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 13 avril 1979, présentée par la société "Européenne de location et de services", société anonyme dont le siège social est à Chalet Maine et Loire , Centre PK 3 Cedex 022, représentée par son président directeur général, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'instruction du ministre du Budget en date du 15 février 1979 relative à l'application des articles 24 à 48 de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978, en tant qu'elle inclut dans la base d'imposition à la taxe à la valeur ajoutée les sommes perçues à titre de dépôt de garantie ; Vu le Code général des impôts ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du Code général des impôts, dans la rédaction issue de la loi du 29 décembre 1978 : "sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" ; qu'en vertu des articles 266-1-a et 267-I.2° du même code, la base d'imposition comprend, pour les livraisons de biens et prestations de services, "toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire, en contrepartie de la livraison ou de la prestation", notamment les sommes correspondant aux "frais accessoires ... tels que commissions, intérêts, frais d'emballage, de transport et d'assurance demandés aux clients" ;
Considérant que les "dépôts de garantie" qui sont exigés de leurs cocontractants par les loueurs de biens meubles en sus du prix de la location ne sont pas la contrepartie des prestations prévues au contrat et ne sont définitivement acquis par les loueurs que si et au moment où le preneur n'exécute pas les obligations auxquelles le contrat subordonne le remboursement du dépôt ; que si, eu égard à leur objet, qui est de prémunir le loueur contre les aléas normaux du contrat, ils peuvent être regardés comme des frais accessoires au sens des dispositions précitées et devenir de ce fait passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, c'est seulement lorsque survient la cause contractuelle de leur conservation par le loueur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, par les prescriptions contestées de son instruction du 15 février 1979 selon lesquelles les sommes perçues à titre de dépôts de garantie par les personnes "qui donnant les biens en location doivent être incluses dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que la location est imposable à titre obligatoire ou sur option", le ministre du Budget, n'ayant pas limité la prise en compte de ces dépôts de garantie aux seules sommes qui cessent d'être remboursables aux preneurs, ne s'est pas borné à expliciter la réglementation en vigueur, mais y a ajouté des dispositions nouvelles qu'aucun texte ne l'autorisait à prendre ; que, dès lors, la société anonyme "société Européenne de location et de service" est dans cette mesure recevable et fondée à demander l'annulation, comme prises par une autorité incompétente, des dispositions qu'elle conteste ;
DECIDE : Article 1er - Les dispositions contenues dans le a du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre 1 du titre II de l'instruction du ministre du Budget en date du 15 février 1979 sont annulées en tant qu'elles ont prévu la prise en compte, dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, de l'ensemble des sommes perçues à titre de dépôts de garantie par les personnes qui donnent des biens en location. Article 2 - Le surplus des conclusions de la requête est rejeté ; Article 3 - La présente décision sera notifiée à la société anonyme "société Européenne de location et de services" ainsi qu'au ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des Finances, chargé du Budget.
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du Code général des impôts, dans la rédaction issue de la loi du 29 décembre 1978 : "sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" ; qu'en vertu des articles 266-1-a et 267-I.2° du même code, la base d'imposition comprend, pour les livraisons de biens et prestations de services, "toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire, en contrepartie de la livraison ou de la prestation", notamment les sommes correspondant aux "frais accessoires ... tels que commissions, intérêts, frais d'emballage, de transport et d'assurance demandés aux clients" ;
Considérant que les "dépôts de garantie" qui sont exigés de leurs cocontractants par les loueurs de biens meubles en sus du prix de la location ne sont pas la contrepartie des prestations prévues au contrat et ne sont définitivement acquis par les loueurs que si et au moment où le preneur n'exécute pas les obligations auxquelles le contrat subordonne le remboursement du dépôt ; que si, eu égard à leur objet, qui est de prémunir le loueur contre les aléas normaux du contrat, ils peuvent être regardés comme des frais accessoires au sens des dispositions précitées et devenir de ce fait passibles de la taxe sur la valeur ajoutée, c'est seulement lorsque survient la cause contractuelle de leur conservation par le loueur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, par les prescriptions contestées de son instruction du 15 février 1979 selon lesquelles les sommes perçues à titre de dépôts de garantie par les personnes "qui donnant les biens en location doivent être incluses dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que la location est imposable à titre obligatoire ou sur option", le ministre du Budget, n'ayant pas limité la prise en compte de ces dépôts de garantie aux seules sommes qui cessent d'être remboursables aux preneurs, ne s'est pas borné à expliciter la réglementation en vigueur, mais y a ajouté des dispositions nouvelles qu'aucun texte ne l'autorisait à prendre ; que, dès lors, la société anonyme "société Européenne de location et de service" est dans cette mesure recevable et fondée à demander l'annulation, comme prises par une autorité incompétente, des dispositions qu'elle conteste ;
DECIDE : Article 1er - Les dispositions contenues dans le a du paragraphe 1 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre 1 du titre II de l'instruction du ministre du Budget en date du 15 février 1979 sont annulées en tant qu'elles ont prévu la prise en compte, dans la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, de l'ensemble des sommes perçues à titre de dépôts de garantie par les personnes qui donnent des biens en location. Article 2 - Le surplus des conclusions de la requête est rejeté ; Article 3 - La présente décision sera notifiée à la société anonyme "société Européenne de location et de services" ainsi qu'au ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des Finances, chargé du Budget.