Conseil d'Etat, 8 / 7 SSR, du 22 février 1984, 39535, publié au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Requête, de la S.A. Sosi tendant à :
1° l'annulation du jugement du 30 septembre 1981, du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution exceptionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1973 ;
2° la décharge des impositions contestées ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; le code général des impôts ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ; la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " ... 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt ... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ;
Cons. que, pour l'application des dispositions précitées de l'article 38 du code, le résultat d'études ou de recherches ou la maîtrise d'un procédé technique, lorsqu'il a été acquis par l'entreprise en vue d'être utilisé pour les besoins de son exploitation durant plusieurs exercices, doit être regardé, même s'il ne bénéficie d'aucune protection juridique particulière, comme un élément incorporel immobilisé ; qu'à ce titre, il doit être inscrit à l'actif pour son prix de revient hors droits et taxes et y être maintenu tant qu'il est utilisable, mais peut faire l'objet d'amortissements s'il est normalement prévisible qu'il cessera nécessairement d'être utilisable à une date déterminée ; que tel est le cas d'un programme informatique qu'une entreprise a acheté à un tiers et qu'elle met en oeuvre soit pour sa propre production ou sa gestion, soit en le mettant à la disposition de sa clientèle à titre de prestation de services ; qu'en pareil cas, la période d'amortissement doit être déterminée, dans le respect des règles gouvernant la charge de la preuve, d'après la date à laquelle, compte tenu de l'évolution prévisible des conceptions et des techniques, l'une ou l'autre des utilisations susmentionnées cessera nécessairement de répondre aux besoins de l'entreprise ou à ceux de sa clientèle ;
Cons. qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Sosi, dont l'activité principale est " la conception de systèmes informatiques ", a acquis en 1973, d'une autre société se livrant à une activité similaire, pour un prix de 250 000 F hors taxes, un programme informatique de " comptabilité de paie " qu'elle a utilisé en 1973 et 1974 pour la paie de son propre personnel et en tant que prestation de service fournie à deux clients ; qu'elle conteste les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle qui lui ont été assignées à raison de la réintégration, dans les résultats de l'exercice clos le 31 décembre 1973, de ladite somme de 250 000 F, qu'elle avait initialement portée en charge d'exploitation de cet exercice ;
Cons., d'une part, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, le programme informatique dont il s'agit ayant été acquis par la société requérante en vue d'être utilisé pour les besoins de son exploitation durant plusieurs exercices, la somme de 250 000 F litigieuse n'a pas le caractère de charge d'exploitation ou de frais de premier établissement, mais constitue le prix de revient d'un élément incorporel de l'actif immobilisé ; que, dès lors, le montant de ce prix pouvait seulement faire l'objet d'une dotation à un compte d'amortissement, fixée à un taux annuel tenant compte de la date à laquelle il était prévisible qu'il serait atteint d'obsolescence au regard des besoins de l'entreprise et de ceux de sa clientèle ; ainsi, à défaut de tout amortissement régulièrement inscrit en comptabilité, ainsi que l'exigent les dispositions de l'article 39-1-2° du code général des impôts, la réintégration litigieuse procède d'une exacte application des dispositions de l'article 38-2 du même code ;
Cons., d'autre part, que, contrairement à ce que soutient la société Sosi, la lettre du 4 décembre 1975 adressée par le directeur général des impôts au président de la chambre syndicale des sociétés d'études et de conseil n'exclut pas un programme informatique des éléments d'actif d'une entreprise, mais précise " qu'il peut être considéré comme une immobilisation amortissable " ; qu'il suit de là que cette société ne peut, en tout état de cause, se prévaloir utilement de ladite lettre sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, applicable en l'espèce ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que la société anonyme Sosi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions contestées ;

rejet .
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