Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, du 31 octobre 1996, 95NC01233, inédit au recueil Lebon
Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, du 31 octobre 1996, 95NC01233, inédit au recueil Lebon
Cour administrative d'appel de Nancy - 1E CHAMBRE
- N° 95NC01233
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
31 octobre 1996
- Rapporteur
- M. MOUSTACHE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(Première chambre) VU la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 juillet 1995, présentée par Me Y..., pour la commune d'ESSEY-LES-NANCY, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 29 février 1996 ; Ladite commune demande à la Cour : 1 ) d'annuler le jugement en date du 20 juin 1995 du tribunal administratif de Nancy en tant qu'il la condamne à payer à M. Francis X... une somme de 30 000F en réparation du préjudice moral que ce dernier a subi à raison du blâme qui lui avait été infligé et qui a été réitéré par une décision postérieure ; 2 ) de rejeter la demande d'indemnité présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nancy ; VU le mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 1996, présenté pour M. Francis X..., représenté par Me COLLET ; Il demande à la Cour : 1 ) de rejeter la requête ; 2 ) de condamner la commune d'ESSEY-LES-NANCY à lui verser une indemnité de 80 000F en réparation de l'ensemble des préjudices causés par les agissements fautifs de cette dernière ; 3 ) de condamner ladite commune à lui payer une somme de 10 000F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; VU le mémoire en réplique, enregistré le 9 février 1996, présenté pour la commune d'ESSEY-LES-NANCY, qui conclut aux mêmes fins que la requête et demande, en outre, à la Cour de condamner M. X... à lui payer une somme de 5 000F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; VU le mémoire en réponse, enregistré le 15 mars 1996, présenté pour M. Francis X..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; VU le jugement attaqué ; VU les autres pièces du dossier ; VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 1996 : - le rapport de M. MOUSTACHE, Conseiller ; - les observations de M. Francis X... ; - et les conclusions de M. COMMENVILLE , Commissaire du Gouvernement ;
Sur la recevabilité de l'appel : Considérant qu'aux termes de l'article L.122-19 du code des communes : "Sous le contrôle du conseil municipal ... le maire est chargé d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier ... 8 De représenter la commune soit en demandant, soit en défendant" ; Considérant qu'il est constant que le maire d'ESSEY-LES-NANCY a interjeté appel dans le délai de deux mois à compter de la réception, le 10 juillet 1995, de la notification du jugement attaqué ; que, par délibération en date du 21 février 1996, le conseil municipal de ladite commune a donné à son maire l'habilitation nécessaire pour ester devant la Cour ; que cette délibération a eu pour effet de régulariser l'appel de la commune d'ESSEY-LES-NANCY, nonobstant la circonstance qu'à la date à laquelle l'autorisation d'agir a été conférée au maire le délai d'appel était expiré ; que, dès lors, l'appel introduit par la commune doit être regardé comme régulièrement formé et donc recevable ; Au fond : Considérant que M. X..., qui exerçait les fonctions de secrétaire général adjoint de la commune de CHAMPIGNEULLES mais avait travaillé jusqu'au 30 septembre 1993 dans les services de la commune d'ESSEY-LES-NANCY en qualité d'attaché territorial, a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du maire de cette dernière commune, en date du 15 juin 1994, lui infligeant un blâme en raison de fautes commises dans l'exercice de ses fonctions, et, d'autre part, à la condamnation de cette commune à lui payer une indemnité de 80 000F en réparation du préjudice moral et professionnel qu'il soutient avoir subi à raison de la sanction illégale dont il a été l'objet ; Considérant que la mairie d'ESSEY-LES-NANCY ayant retiré, par décision en date du 14 septembre 1994, l'arrêté litigieux, le tribunal administratif de Nancy a, par le jugement dont il est fait appel, d'une part prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation et, d'autre part, condamné la commune à payer à M. X... une indemnité de 30 000F en réparation du préjudice subi par ce dernier ; que la commune appelante conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il prononce une telle condamnation et M. X... demande, par la voie de l'appel incident, que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée de 30 000F à 80 000F ; Considérant que le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY n'était pas compétent pour infliger, par arrêté en date du 15 juin 1994, un blâme à M. X... qui avait fait l'objet d'une mutation dans les services de la commune de CHAMPIGNEULLES à compter du 1er octobre 1993 ; qu'en prenant ainsi une sanction à l'encontre d'un agent qui avait cessé de relever de son autorité, le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY a commis une faute de service susceptible d'engager la responsabilité de cette dernière à l'égard de l'intéressé ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a mis à profit les fonctions de secrétaire général qu'il exerçait par intérim pour rechercher et photocopier des documents manuscrits concernant l'appréciation de la manière de servir d'un autre agent communal que le titulaire de l'emploi de secrétaire général conservait sous clef dans son bureau ; que M. X... a communiqué les documents qu'il s'était ainsi indûment appropriés au Président du centre de gestion de la fonction publique territoriale à l'appui d'une intervention qu'il a faite pour soutenir ledit agent dans le cadre d'une procédure de contestation de sa notation ; Considérant que si la faute commise par le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY est de nature à ouvrir un droit à indemnité au profit de M. X... à raison du préjudice qu'il a subi, il sera fait une juste évaluation de celui-ci, eu égard à la nature et à la gravité des faits qui lui sont reprochés, en fixant le montant de cette indemnité à 10 000F ; qu'il y a lieu, dès lors, de réformer le jugement attaqué sur ce point et, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de M. X..., présentées par voie d'appel incident et tendant à ce que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée à 80 000F ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; Considérant que la commune d'ESSEY-LES-NANCY, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamnée sur le fondement des dispositions précitées du code des tribunaux administratifs et des cours adminsitratives d'appel ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée, en application du même texte, par la commune d'ESSEY-LES-NANCY et tendant à la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 5 000F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1 : L'indemnité que la commune d'ESSEY-LES-NANCY a été condamnée à verser à M. X..., par le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 20 juin 1995, est ramenée de 30 000F à 10 000F.
Article 2 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nancy est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'ESSEY-LES-NANCY et de M. X... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'ESSEY-LES-NANCY, à M. Francis X..., au Syndicat National des Directeurs et Attachés Territoriaux et au ministre de l'Intérieur.
Sur la recevabilité de l'appel : Considérant qu'aux termes de l'article L.122-19 du code des communes : "Sous le contrôle du conseil municipal ... le maire est chargé d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier ... 8 De représenter la commune soit en demandant, soit en défendant" ; Considérant qu'il est constant que le maire d'ESSEY-LES-NANCY a interjeté appel dans le délai de deux mois à compter de la réception, le 10 juillet 1995, de la notification du jugement attaqué ; que, par délibération en date du 21 février 1996, le conseil municipal de ladite commune a donné à son maire l'habilitation nécessaire pour ester devant la Cour ; que cette délibération a eu pour effet de régulariser l'appel de la commune d'ESSEY-LES-NANCY, nonobstant la circonstance qu'à la date à laquelle l'autorisation d'agir a été conférée au maire le délai d'appel était expiré ; que, dès lors, l'appel introduit par la commune doit être regardé comme régulièrement formé et donc recevable ; Au fond : Considérant que M. X..., qui exerçait les fonctions de secrétaire général adjoint de la commune de CHAMPIGNEULLES mais avait travaillé jusqu'au 30 septembre 1993 dans les services de la commune d'ESSEY-LES-NANCY en qualité d'attaché territorial, a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du maire de cette dernière commune, en date du 15 juin 1994, lui infligeant un blâme en raison de fautes commises dans l'exercice de ses fonctions, et, d'autre part, à la condamnation de cette commune à lui payer une indemnité de 80 000F en réparation du préjudice moral et professionnel qu'il soutient avoir subi à raison de la sanction illégale dont il a été l'objet ; Considérant que la mairie d'ESSEY-LES-NANCY ayant retiré, par décision en date du 14 septembre 1994, l'arrêté litigieux, le tribunal administratif de Nancy a, par le jugement dont il est fait appel, d'une part prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation et, d'autre part, condamné la commune à payer à M. X... une indemnité de 30 000F en réparation du préjudice subi par ce dernier ; que la commune appelante conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il prononce une telle condamnation et M. X... demande, par la voie de l'appel incident, que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée de 30 000F à 80 000F ; Considérant que le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY n'était pas compétent pour infliger, par arrêté en date du 15 juin 1994, un blâme à M. X... qui avait fait l'objet d'une mutation dans les services de la commune de CHAMPIGNEULLES à compter du 1er octobre 1993 ; qu'en prenant ainsi une sanction à l'encontre d'un agent qui avait cessé de relever de son autorité, le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY a commis une faute de service susceptible d'engager la responsabilité de cette dernière à l'égard de l'intéressé ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a mis à profit les fonctions de secrétaire général qu'il exerçait par intérim pour rechercher et photocopier des documents manuscrits concernant l'appréciation de la manière de servir d'un autre agent communal que le titulaire de l'emploi de secrétaire général conservait sous clef dans son bureau ; que M. X... a communiqué les documents qu'il s'était ainsi indûment appropriés au Président du centre de gestion de la fonction publique territoriale à l'appui d'une intervention qu'il a faite pour soutenir ledit agent dans le cadre d'une procédure de contestation de sa notation ; Considérant que si la faute commise par le maire de la commune d'ESSEY-LES-NANCY est de nature à ouvrir un droit à indemnité au profit de M. X... à raison du préjudice qu'il a subi, il sera fait une juste évaluation de celui-ci, eu égard à la nature et à la gravité des faits qui lui sont reprochés, en fixant le montant de cette indemnité à 10 000F ; qu'il y a lieu, dès lors, de réformer le jugement attaqué sur ce point et, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de M. X..., présentées par voie d'appel incident et tendant à ce que l'indemnité qui lui a été allouée soit portée à 80 000F ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; Considérant que la commune d'ESSEY-LES-NANCY, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamnée sur le fondement des dispositions précitées du code des tribunaux administratifs et des cours adminsitratives d'appel ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée, en application du même texte, par la commune d'ESSEY-LES-NANCY et tendant à la condamnation de M. X... à lui payer la somme de 5 000F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1 : L'indemnité que la commune d'ESSEY-LES-NANCY a été condamnée à verser à M. X..., par le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 20 juin 1995, est ramenée de 30 000F à 10 000F.
Article 2 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nancy est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'ESSEY-LES-NANCY et de M. X... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'ESSEY-LES-NANCY, à M. Francis X..., au Syndicat National des Directeurs et Attachés Territoriaux et au ministre de l'Intérieur.