Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, du 11 mars 1999, 97NT00831, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 mai 1997, présentée pour M. Guy X..., demeurant ..., par Me RAIMBOURG, avocat au barreau de Nantes ;

M. X... demande que la Cour :

1 ) annule le jugement n 95-1542 du 19 mars 1997 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 1995 de l'inspecteur du travail de la 4ème section à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Calvados autorisant la société Fermière du Casino de Riva Bella à le licencier pour faute ;

2 ) annule pour excès de pouvoir la décision susvisée du 31 mai 1995 ;

3 ) condamne solidairement l'Etat et la société Fermière du Casino de Riva Bella à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 1999 :

- le rapport de M. LEMAI, président,

- les observations de Me GEFFROY, substituant Me RAIMBOURG, avocat de M. X..., requérant,

- et les conclusions de Mme JACQUIER, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article L.425-1 du code du travail, les salariés candidats aux fonctions de délégué du personnel ne peuvent être licenciés, pendant les six mois qui suivent l'envoi à l'employeur des listes de candidatures, qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail ; qu'ils bénéficient ainsi, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que la société Fermière du Casino de Riva Bella a demandé l'autorisation de licencier pour faute M. X..., adjoint au responsable du service d'entretien et ancien candidat à l'élection des représentants du personnel à la délégation unique, qui avait fait l'objet le 10 mai 1995 d'une mise à pied ; que cette autorisation a été accordée par une décision du 31 mai 1995 de l'inspecteur du travail de la 4ème section à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle du Calvados ;

Considérant que si, en vertu des dispositions combinées des articles R.436-3 et R.436-8 du code du travail, la demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspecteur du travail doit être présentée au plus tard dans les quarante huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise en cas de mise à pied du salarié, cette durée n'est pas prescrite à peine de nullité sous réserve que le délai soit aussi court que possible ; qu'il ressort des pièces du dossier que le comité d'entreprise a été consulté le 18 mai 1995 sur le projet de licenciement de M. X... et que la demande d'autorisation a été présentée à l'inspecteur du travail au plus tard le 22 mai 1995 ; qu'ainsi, en l'espèce, le délai de saisine de l'inspecteur du travail ne saurait constituer une cause d'irrégularité de la procédure d'autorisation de licenciement ; que, de même, si, en vertu de l'article R.436-4 du code du travail, l'inspecteur du travail statue, en cas de mise à pied, dans un délai réduit à huit jours qui ne peut être prolongé, après avis adressé aux intéressés, que si les nécessités de l'enquête le justifient, la circonstance que l'inspecteur du travail, saisi de la demande le 22 mai 1995 comme il vient d'être dit, n'ait statué que le 31 mai 1995 est sans influence sur la légalité de la décision litigieuse ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que deux employées du service d'entretien ont démissionné de leur emploi en invoquant des mesures discriminatoires prises à leur encontre par M. X... dans l'organisation du travail ; que l'une d'entre elles, dont les accusations sont confirmées par le témoignage de sa collègue, a déclaré avoir été victime de la part de M. X... d'agissements constitutifs de harcèlement sexuel pour lesquels elle a porté plainte ; que les deux employées ont formellement maintenu leurs déclarations ; que les attestations de salariés produites à la demande de M. X... n'apportent pas d'éléments sur le comportement de celui-ci permettant de mettre en doute la véracité des faits qui lui sont reprochés ; que, dans ces conditions, si la plainte pénale a été ultérieurement classée sans suite, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que les faits de harcèlement sexuel étaient établis l'inspecteur du travail ait entaché sa décision d'inexactitude matérielle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision susvisée de l'inspecteur du travail ;

Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat et la société Fermière du Casino de Riva Bella qui ne sont pas, dans la présente instance, des parties perdantes, soient condamnés à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Guy X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy X..., à la société Fermière du Casino de Riva Bella et au ministre de l'emploi et de la solidarité.
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