Cour administrative d'appel de Nantes, 2e chambre, du 6 octobre 1999, 97NT00292, inédit au recueil Lebon
Cour administrative d'appel de Nantes, 2e chambre, du 6 octobre 1999, 97NT00292, inédit au recueil Lebon
Cour administrative d'appel de Nantes - 2E CHAMBRE
- N° 97NT00292
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
06 octobre 1999
- Rapporteur
- M. MARGUERON
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 février 1997, présentée pour M. Hervé X... du ROTOIS, demeurant ... (Yvelines), par la S.C.P. DRUAIS, DOUCET, MICHEL, LAHALLE, avocat ; M. Y... demande à la Cour : 1 ) d'annuler le jugement n 92-229 en date du 12 décembre 1996 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 octobre 1991 par lequel le préfet du Morbihan a approuvé des modifications et suspensions de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Belz et institué une servitude de passage des piétons transversale au rivage, en tant que ledit arrêté concerne sa propriété ; 2 ) d'annuler dans cette mesure ledit arrêté ; 3 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ainsi que de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant le coût des droits de timbre et de plaidoirie ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de l'urbanisme ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 septembre 1999 : - le rapport de M. MARGUERON, premier conseiller, - les observations de Me LAHALLE, avocat de M. Y..., - et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance : Considérant que l'arrêté attaqué du préfet du Morbihan, qui approuve des modifications et suspensions du tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur le territoire de la commune de Belz, concerne notamment la propriété de M. Y..., située au lieudit "Pointe de Kerio" ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le ministre de l'équipement, des transports et du logement, M. Y... justifie d'un intérêt à demander l'annulation de cet arrêté en tant qu'il concerne sa propriété ; Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Morbihan : Considérant qu'aux termes de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme : "Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exeptionnel-lement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; b) A titre exceptionnel, la suspendre. Sauf dans le cas où l'institution de la servitude est le seul moyen d'assurer la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, la servitude instituée aux alinéas 1 et 2 ci-dessus ne peut grever les terrains situés à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d'habitation édifiés avant le 1er janvier 1976, ni grever les terrains attenants à des maisons d'habitation et clos de murs au 1er janvier 1976" ; que cette dernière disposition doit s'entendre comme visant les bâtiments qui étaient à usage d'habitation au 1er janvier 1976 et avaient conservé cet usage à la date de la décision administrative contestée ; Considérant que l'arrêté attaqué du préfet du Morbihan modifie le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur une partie de la propriété de M. Y..., en raison du caractère accidenté du rivage par endroits, mais maintient ce tracé, tel qu'il résulte de l'application du premier alinéa de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme, sur le reste de la propriété, à proximité de la construction qui existe sur le terrain et à une distance de moins de quinze mètres de celle-ci ; que M. Y... soutient que, ce faisant, le préfet a méconnu les dispositions du dernier alinéa du même article L.160-6, en ce que cette construction est un bâtiment à usage d'habitation au nombre de ceux visés par ces dispositions ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des différentes attestations et déclarations de tiers qui ont été produites, que la construction dont s'agit, qui était un bâtiment à usage d'habitation, reliée au réseau électrique et disposait d'un système d'assainissement, a été constamment occupée jusque dans le courant des années 1970 ; que si, par la suite, à partir d'une date antérieure au 1er janvier 1976 et jusqu'à son achat par M. Y... en 1988, elle est demeurée inoccupée, il n'est établi ni qu'elle aurait été affectée à un autre usage durant ce laps de temps, ni que, au regard en particulier de l'état du gros oeuvre et de la toiture, elle serait devenue impropre à l'habitation ; que, dans ces conditions, alors même que, comme le soutient le ministre, sans d'ailleurs préciser quelle était la situation antérieure à cet égard, la parcelle d'assiette n'a pas fait l'objet d'une imposition au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties entre 1976 et 1990, cette construction, ainsi que le fait valoir M. Y..., devait être regardée comme un bâtiment à usage d'habitation édifié avant le 1er janvier 1976 au sens de la disposition précitée de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme et qui avait conservé cet usage après cette date ; qu'il n'est pas établi que la continuité du cheminement des piétons ne pourrait être assurée que par l'institution de la servitude le long du rivage au droit dudit bâtiment ; qu'il suit de là que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande et à demander l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 1991 du préfet du Morbihan en tant qu'il maintient le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur sa propriété à une distance de moins de quinze mètres du bâtiment qui y est édifié ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner l'Etat à payer à M. Y... une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 12 décembre 1996 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : L'arrêté en date du 29 octobre 1991 du préfet du Morbihan est annulé en tant qu'il maintient le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur la propriété de M. Y... à une distance de moins de 15 mètres du bâtiment qui y est édifié.
Article 3 : L'Etat versera à M. Y... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Sur la recevabilité de la demande de première instance : Considérant que l'arrêté attaqué du préfet du Morbihan, qui approuve des modifications et suspensions du tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur le territoire de la commune de Belz, concerne notamment la propriété de M. Y..., située au lieudit "Pointe de Kerio" ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient le ministre de l'équipement, des transports et du logement, M. Y... justifie d'un intérêt à demander l'annulation de cet arrêté en tant qu'il concerne sa propriété ; Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Morbihan : Considérant qu'aux termes de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme : "Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exeptionnel-lement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; b) A titre exceptionnel, la suspendre. Sauf dans le cas où l'institution de la servitude est le seul moyen d'assurer la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, la servitude instituée aux alinéas 1 et 2 ci-dessus ne peut grever les terrains situés à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d'habitation édifiés avant le 1er janvier 1976, ni grever les terrains attenants à des maisons d'habitation et clos de murs au 1er janvier 1976" ; que cette dernière disposition doit s'entendre comme visant les bâtiments qui étaient à usage d'habitation au 1er janvier 1976 et avaient conservé cet usage à la date de la décision administrative contestée ; Considérant que l'arrêté attaqué du préfet du Morbihan modifie le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur une partie de la propriété de M. Y..., en raison du caractère accidenté du rivage par endroits, mais maintient ce tracé, tel qu'il résulte de l'application du premier alinéa de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme, sur le reste de la propriété, à proximité de la construction qui existe sur le terrain et à une distance de moins de quinze mètres de celle-ci ; que M. Y... soutient que, ce faisant, le préfet a méconnu les dispositions du dernier alinéa du même article L.160-6, en ce que cette construction est un bâtiment à usage d'habitation au nombre de ceux visés par ces dispositions ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des différentes attestations et déclarations de tiers qui ont été produites, que la construction dont s'agit, qui était un bâtiment à usage d'habitation, reliée au réseau électrique et disposait d'un système d'assainissement, a été constamment occupée jusque dans le courant des années 1970 ; que si, par la suite, à partir d'une date antérieure au 1er janvier 1976 et jusqu'à son achat par M. Y... en 1988, elle est demeurée inoccupée, il n'est établi ni qu'elle aurait été affectée à un autre usage durant ce laps de temps, ni que, au regard en particulier de l'état du gros oeuvre et de la toiture, elle serait devenue impropre à l'habitation ; que, dans ces conditions, alors même que, comme le soutient le ministre, sans d'ailleurs préciser quelle était la situation antérieure à cet égard, la parcelle d'assiette n'a pas fait l'objet d'une imposition au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties entre 1976 et 1990, cette construction, ainsi que le fait valoir M. Y..., devait être regardée comme un bâtiment à usage d'habitation édifié avant le 1er janvier 1976 au sens de la disposition précitée de l'article L.160-6 du code de l'urbanisme et qui avait conservé cet usage après cette date ; qu'il n'est pas établi que la continuité du cheminement des piétons ne pourrait être assurée que par l'institution de la servitude le long du rivage au droit dudit bâtiment ; qu'il suit de là que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande et à demander l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 1991 du préfet du Morbihan en tant qu'il maintient le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur sa propriété à une distance de moins de quinze mètres du bâtiment qui y est édifié ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner l'Etat à payer à M. Y... une somme de 6 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 12 décembre 1996 du Tribunal administratif de Rennes est annulé.
Article 2 : L'arrêté en date du 29 octobre 1991 du préfet du Morbihan est annulé en tant qu'il maintient le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur la propriété de M. Y... à une distance de moins de 15 mètres du bâtiment qui y est édifié.
Article 3 : L'Etat versera à M. Y... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.