Arrêté du 23 juillet 2010 portant approbation de l'instruction générale interministérielle sur la protection du secret de la défense nationale

JORF n°0184 du 11 août 2010

Version en vigueur du 12 août 2010 au 03 décembre 2011

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Article Annexe (Titre III : 39 à 69) (abrogé)

Version en vigueur du 12 août 2010 au 03 décembre 2011

Abrogé par Arrêté du 30 novembre 2011 - art. 2


TITRE III


MESURES DE SÉCURITÉ RELATIVES AUX INFORMATIONS OU SUPPORTS CLASSIFIÉS

La décision de classifier une information ou un support au titre du secret de la défense nationale a pour objet de restreindre l'accès à cette information ou à ce support aux personnes préalablement habilitées et justifiant du besoin d'en connaître.

Elle est prise selon des critères définis par une instruction ministérielle.

Elle doit procéder d'une appréciation rigoureuse de son opportunité.

Elle place cette information ou ce support sous la protection de dispositions pénales spécifiques (56).

La classification est matérialisée par l'apposition d'une mention spécifique qui permet de caractériser l'infraction pénale en cas de compromission.

La compromission peut résulter d'un acte de malveillance comme d'une simple négligence.

(56) Articles 413-9 et suivants du code pénal.


Chapitre Ier

Principes généraux de la classification

Section 1

Les règles de classification

Article 39

Responsabilité de la décision de classification


Pour le niveau Très Secret Défense, les modalités de protection des informations ou supports classifiés sont déterminées par le Premier ministre dans des instructions particulières (57).

Pour les niveaux Secret Défense et Confidentiel Défense, chaque ministre détermine, dans les conditions fixées par le Premier ministre, les informations ou supports qu'il y a lieu de classifier à l'un ou l'autre de ces niveaux et les modalités d'organisation de leur protection.

Au sein de chaque ministère, la décision de classification est prise, sur proposition de l'auteur du document, au niveau hiérarchique le plus apte à évaluer les enjeux. Le responsable de cette décision, qui doit être en mesure de la justifier auprès de sa hiérarchie, est appelé autorité classificatrice ou autorité émettrice.

La décision de classifier résulte de l'analyse de l'importance de l'information au regard de son contexte, des textes applicables et des instructions du ministre compétent.L'autorité classificatrice veille à ce que le niveau de classification soit approprié à l'information ou au support concerné (e), c'est-à-dire à ce qu'il soit à la fois nécessaire et suffisant. Elle cherche ainsi à limiter la prolifération de documents classifiés et à éviter les classifications abusives, qui génèrent des coûts de gestion, des charges de travail importantes et altèrent la valeur du secret de la défense nationale. Cette évaluation comporte un risque d'erreur d'appréciation pouvant conduire, à l'inverse, à ce qu'une information justifiant une classification ne soit pas classifiée, ce qui constitue un manquement aux règles de protection du secret dont l'autorité émettrice est responsable (58).

En cas d'évolution, dans le temps ou en fonction des circonstances, de la sensibilité des informations classifiées, l'autorité classificatrice peut décider de procéder à leur déclassification, leur déclassement ou leur reclassement (59). Elle notifie sa décision de modification ou de suppression de classification aux destinataires de l'information ou du support.

Les cas manifestes de surclassification ou de sous-classification sont signalés par le (s) destinataire (s) à l'émetteur qui procédera, si nécessaire, à la modification appropriée, en informera l'ensemble des destinataires et prendra les mesures nécessaires pour éviter une compromission lorsque le document change de niveau.

(57) Article R. 2311-5 du code de la défense et directives d'application pratique n° 02 / SGDN / SSD / CD du 3 février 1986 sur l'organisation et le fonctionnement des classifications spéciales Très Secret Défense. La reproduction totale ou partielle de ces informations ou de ces supports, qui ne peut être effectuée que par l'antenne émettrice, est formellement interdite aux détenteurs. (58) Article 4 de la présente instruction. (59) Ce qui signifie respectivement supprimer la classification, en baisser ou en relever le niveau. Ces opérations sont effectuées dans les mêmes formes que la classification.



Article 40

Critères de classification


Les critères de classification et l'importance de ne classifier que ce qui est réellement nécessaire sont énoncés dans une instruction ministérielle (60).

Le niveau de classification est déterminé par la nature de l'information ou du support classifié. La source de l'information peut également être prise en considération lorsque sa sensibilité justifie une protection (61).

Lorsqu'un document comprend diverses parties, les unes nécessitant une classification, les autres non, il convient de s'efforcer de les présenter de manière distincte afin de ne pas entraver la diffusion des informations non classifiées. La diffusion de la partie non classifiée du document est rendue possible en plaçant en annexe classifiée l'information couverte par le secret de la défense nationale.

Tout ensemble (62) de documents contenant des informations classifiées à des niveaux différents doit être classifié lui-même au moins au niveau le plus élevé de ces documents.

Un ensemble d'informations ou de supports, dit parfois agrégat, est classifié si le regroupement des informations ou supports qui le composent le justifie, alors même qu'aucun de ses éléments, pris isolément, n'est classifié.

Un extrait d'information classifiée conserve le niveau de classification de l'information elle-même, à moins que l'autorité classificatrice en décide autrement (63).

(60) Voir guide de classification en annexe 2. Des guides complémentaires, correspondant aux besoins propres de chaque département, peuvent être déclinés. (61) Par source, il est ici entendu le (s) système (s) de renseignement ayant permis de produire une information. (62) Pages, paragraphes, annexes, appendices ou pièces jointes. (63) Pour le marquage des paragraphes, voir article 42 de la présente instruction.


Article 41

Identification de la classification


Une information ou un support, quel qu'il soit, acquiert juridiquement le caractère de secret de la défense nationale dès lors qu'il fait l'objet de mesures de classification destinées à restreindre sa diffusion, matérialisées par la mention de niveau de classification sur le support de l'information (64).

Les supports préparatoires ayant servi à l'élaboration de l'information classifiée (brouillons, impressions sur papier, matériels informatiques nomades [65]), qui ne sont pas identifiés, sont placés sous la responsabilité de celui qui les a élaborés. Ils doivent être détruits ou effacés le plus rapidement possible dès qu'ils sont devenus sans objet et, en tout état de cause, au plus tard lorsque le document classifié est émis.

(64) Articles 2311-4 du code de la défense et 413-9 du code pénal. (65) Clés USB, disquettes, CD, CD-ROM...

Section 2

Le marquage

Article 42

Principe général du marquage


Le marquage, par ses trois éléments constitutifs que sont le timbre, l'identification et la pagination, permet de vérifier l'authenticité et l'intégrité du support. Chaque exemplaire d'un document classifié porte la mention du niveau de classification des informations qu'il contient.

Les paragraphes, alinéas, annexes, traitant d'informations classifiées à un niveau inférieur ou non classifiées, sont mis en évidence, s'il y a lieu, par la mention, dans la marge, de leur propre niveau de classification et par une mise en page qui les détache sans ambiguïté du contexte général du document.

Jusqu'au niveau Secret Défense, les abréviations indiquant la classification peuvent être utilisées pour préciser le niveau de classification des paragraphes du texte. Les abréviations admises sont les suivantes :
-Confidentiel Défense : CD ;
-Secret Défense : SD.

Ces abréviations ne remplacent pas la mention de classification inscrite en toutes lettres sur le document papier, réalisée par le timbrage.

S'il est matériellement impossible d'apposer le marquage sur le support classifié ou contenant une information classifiée, il convient de mettre en œuvre des mesures de protection destinées à lever toute ambiguïté qui pourrait naître de l'absence de mention visible de classification.A cette fin, chaque ministère édicte, après avis du SGDSN, des directives particulières afin d'adapter aux caractéristiques des supports la réglementation relative au marquage, et de permettre leur identification au niveau de classification requis.

L'absence de mise en œuvre de ces consignes rend inopérante la protection pénale accordée au secret de la défense nationale. Le respect scrupuleux des consignes constitue par conséquent un enjeu majeur.


Article 43

Le marquage d'un support papier


Le marquage d'un support papier comprend à la fois le timbre, l'identification et la pagination :
-le timbre indique le niveau de classification et permet par sa position, sa taille et sa couleur d'attirer immédiatement l'attention sur le caractère secret de l'information ou du support ;
-l'identification est constituée par les références du support ;
-la pagination consiste en la numérotation de chaque page et la mention du nombre total de pages contenues dans le document.

1. Timbre :
Le timbre de la mention de classification est apposé, avec une encre de couleur rouge, ou, à titre exceptionnel, d'une couleur contrastant avec celle du support, au milieu du haut et du bas de chaque page. Pour les documents reliés, un timbre d'un modèle de dimension supérieure est placé au milieu du bas de la couverture et de la page de garde (66).
Lorsque des documents sont élaborés sur un poste de travail informatique, le marquage doit être ajouté par voie électronique à l'en-tête et au pied de page.

Le timbre, dont la dimension peut être adaptée à celle du support, est définitif et toujours visible.

2. Identification :
Tout document classifié est identifié dès sa première page. En plus des références ordinaires de toute pièce administrative, des mesures particulières sont prises. Ainsi, sur la première page du document, figurent les références du service émetteur, de la date d'émission, du numéro d'enregistrement, le timbre du niveau de classification et celui indiquant l'échéance de la classification (c'est-à-dire la date à laquelle la classification du document est réévaluée ou le document déclassifié). Le cas échéant, la mention de déclassement ou de déclassification est apposée sur cette même page.

Pour les documents classifiés au niveau Secret Défense, chaque exemplaire est individualisé et le nombre total d'exemplaires est porté sur le document. Le numéro d'enregistrement émane du bureau de protection du secret compétent.

3. Pagination :
Chaque page du document est numérotée. Au bas de la première page est mentionné le nombre total de pages, d'annexes ou de plans qui composent le document.

Les pages de chaque annexe sont numérotées indépendamment de la pagination du document lui-même, et portent mention du nombre total de pages de l'annexe.

Pour les documents classifiés au niveau Secret Défense, les pages vierges et les feuilles intercalaires sont également numérotées. Toute page vierge porte en son centre la mention PAS DE TEXTE.

(66) Modèle 15 / IGI 1300 en annexe.


Article 44

Le marquage d'un support non papier


Le marquage d'un support non papier d'information classifiée est adapté au type de support, définitif et toujours visible. Il consiste en un timbre et une identification.

1. Timbre :
Le timbre spécifiant le niveau de classification a une dimension adaptée à celle du support et comporte la mention de ce niveau en toutes lettres. En cas de difficultés pratiques, les abréviations précédemment évoquées peuvent y être substituées.

2. Identification :
L'identification des supports non papier d'informations classifiées est assurée par l'inscription des références et, le cas échéant, du volume de chacune des informations enregistrées. Lorsqu'il est impossible d'inscrire sur le support l'ensemble des références, l'identification est faite par le numéro d'enregistrement.

Pour le niveau Secret Défense, le numéro d'enregistrement est délivré par le bureau de protection du secret et est éventuellement assorti d'une fiche où sont inscrites les références réglementaires des informations contenues.

3. Pagination des documents électroniques :
Chaque page du document est numérotée. Au bas de la première page est mentionné le nombre total de pages, d'annexes ou de plans qui composent le document.

Les pages de chaque annexe sont numérotées indépendamment de la pagination du document lui-même, et portent mention du nombre total de pages de l'annexe.

Pour les documents classifiés au niveau Secret Défense, les pages vierges et les feuilles intercalaires sont également numérotées. Toute page vierge porte en son centre la mention PAS DE TEXTE.

4. Dispositions particulières :
En raison de la possibilité technique de faire réapparaître des informations en principe effacées, un support informatique d'informations classifiées conserve toujours le niveau de classification qui lui a été initialement attribué. Il ne peut être déclassé ou déclassifié qu'à la condition que les informations qu'il contient ou a contenues aient elles-mêmes préalablement fait l'objet d'une telle mesure.


Section 3

Enregistrement

Article 45

L'enregistrement des informations ou supports classifiés


Tout support contenant des informations classifiées est enregistré, dans l'ordre chronologique, par un système d'enregistrement manuel ou informatisé permettant l'identification des destinataires.

L'enregistrement établit sans ambiguïté l'attribution du support à un détenteur, personne physique, clairement identifiée. Ce détenteur assume alors la responsabilité de la protection du support. Cet enregistrement est la seule référence de cette attribution de responsabilité.

La mention de l'objet du document, si cet objet est lui-même classifié, ne doit pas figurer dans le système d'enregistrement, à moins que ce système ne soit classifié et dédié. Cette obligation de classifier et de dédier le système d'enregistrement lui-même s'impose au niveau Secret Défense.

Au niveau Confidentiel Défense, le système d'enregistrement peut être relié à une base de gestion du courrier sous réserve que l'accès à la base soit restreint et que celle-ci permette de tracer les documents jusqu'au détenteur final.

Au niveau Secret Défense, le système d'enregistrement est tenu à jour par le bureau de protection du secret. Les documents Secret Défense font obligatoirement l'objet d'une double numérotation, présentée sous forme de fraction : ils portent le numéro d'enregistrement de l'émetteur et le numéro d'enregistrement du bureau de protection du secret chargé de leur traitement.


Section 4

Durée de classification des informations ou supports classifiés

Article 46

La durée de vie des classifications


La sensibilité d'une information ou d'un support classifié pouvant évoluer en fonction du temps ou des circonstances, il revient à l'autorité émettrice d'en apprécier la durée utile de classification.L'autorité émettrice mentionne sur le document (67) la date à partir de laquelle le document sera automatiquement déclassifié. Lorsque cette date ne peut être déterminée, l'autorité émettrice mentionne la date ou le délai au terme duquel le niveau de classification devra être réexaminé. La réévaluation peut avoir pour résultat le maintien du niveau de classification, le déclassement ou la déclassification du document.L'autorité émettrice peut également fixer comme terme non pas une date mais un événement défini (par exemple, début de production d'un matériel, retrait de service d'un matériel, fin d'un exercice...), à la suite duquel le document sera automatiquement déclassé au niveau qu'elle aura précisé ou sera déclassifié. Elle conserve la possibilité de prolonger à tout moment le délai qu'elle a fixé.

En tout état de cause, la révision du besoin et du niveau de classification des informations ou supports doit être effectuée rigoureusement selon une périodicité inférieure ou égale à dix ans, précisément définie par chaque ministre pour le département dont il a la charge. Cette rigueur de gestion s'impose d'autant plus que, dès l'expiration d'un délai de cinquante ans à compter de la date d'émission d'un document classifié, se pose, dans les conditions énoncées à l'article 63 de la présente instruction, la question de la communicabilité du document et de sa déclassification préalable.

Pour les informations ou supports classifiés étrangers, seule l'autorité étrangère émettrice peut procéder à une déclassification ou à un déclassement.

(67) Voir modèle de timbre en annexe.

Chapitre II

Gestion des informations ou supports classifiés

Section 1

Conservation des informations ou supports classifiés

Article 47

Conditions matérielles de conservation


En dehors des périodes d'utilisation, les informations ou supports classifiés sont conservés dans des coffres-forts ou des armoires-fortes conformes aux dispositions relatives aux meubles de sécurité énoncées dans la présente instruction. Aucune indication relative à la nature des informations n'est visible à l'extérieur du coffre ou de l'armoire.

La combinaison des coffres-forts, suffisamment complexe pour être fiable, n'est connue que des seuls utilisateurs. Une copie de cette combinaison est conservée sous enveloppe opaque, fermée, dans le coffre-fort d'une autorité spécialement désignée, la clé du coffre-fort de cette autorité étant elle-même placée dans un coffre distinct.

Les combinaisons sont changées au moins tous les six mois, et à chaque fois qu'il y a mutation des utilisateurs, risque ou suspicion de compromission.

Les clés sont impérativement mises en sécurité, notamment hors des heures ouvrables, suivant une procédure clairement établie par chaque autorité responsable (dépôt dans un coffre mural, sans clé, à combinaisons et à commande unique ou avec ouverture par lecture de badge, garde permanente avec système d'alarme).

Il est formellement interdit d'emporter à l'extérieur des lieux de travail :
-des informations ou supports classifiés, sauf nécessités impérieuses de service ;
-les clés des coffres ou armoires où sont conservés de tels informations ou supports.

La responsabilité de la conservation des informations ou supports classifiés Secret Défense incombe à un détenteur responsable ou au chef du bureau de protection du secret.


Section 2

Reproduction

Article 48

Règles générales de la reproduction


La généralisation et la diversité des moyens de reproduction accroissent les risques de diffusion incontrôlée des informations ou supports classifiés.

Pour les niveaux Secret Défense et Confidentiel Défense, des consignes précises sont établies par chaque ministre ou par son représentant (HFDS) pour le département dont il a la charge afin de fixer :
-la désignation, par les directeurs ou chefs de service, des autorités habilitées à autoriser la reproduction ;
-les procédures de contrôle de la reproduction ;
-la nécessité de consigner sur un système d'enregistrement le nombre de pièces reproduites et leurs détenteurs.

Les matériels utilisés pour la reproduction d'informations classifiées (photocopieuses, télécopieurs, systèmes informatiques...) doivent être physiquement protégés afin d'en limiter l'emploi aux seules personnes autorisées. Les opérations de maintenance sur ces matériels sont effectuées dans des conditions permettant de garantir la sécurité des informations classifiées qui ont été reproduites, dans le respect des dispositions de la présente instruction. Il en est de même pour leur mise au rebut, qui doit garantir la destruction des mémoires de ces appareils.


Article 49

Reproduction totale


Au niveau Secret Défense, la reproduction totale d'informations ou supports classifiés n'est possible qu'avec l'autorisation préalable de l'autorité émettrice. Le dépositaire de l'information ou du support qui souhaite en effectuer une reproduction doit adresser une demande motivée à cette autorité. Si celle-ci consent à la reproduction (68), elle spécifie les numéros à attribuer aux exemplaires supplémentaires et porte mention de cette reproduction sur l'exemplaire en sa possession.

En cas d'urgence et à titre exceptionnel, le dépositaire peut s'affranchir de cette procédure à la condition de prendre les dispositions suivantes :
1. Limiter au minimum indispensable le nombre des reproductions ;

2. Procéder au marquage réglementaire en attribuant à chaque exemplaire un numéro individuel composé de deux nombres fractionnaires :
-le premier ayant en numérateur le numéro d'ordre de la copie dans la série des reproductions et en dénominateur le nombre total de reproductions ;
-le second étant le numéro individuel de l'exemplaire attribué par l'autorité émettrice du document ;

3. Porter si nécessaire, sur l'exemplaire reproduit, la destination qui en est faite ou établir une liste séparée des destinataires ;

4. Rendre compte sans délai à l'autorité émettrice du nombre de reproductions, des numéros de reproductions et de la destination des exemplaires.L'autorité émettrice porte mention de cette reproduction sur l'exemplaire en sa possession.

Au niveau Confidentiel Défense, la reproduction peut être effectuée par les autorités détentrices, sous leur responsabilité, à condition de conserver sur un système d'enregistrement la trace du nombre et des destinataires des exemplaires reproduits.

(68) Modèle 12 / IGI 1300 en annexe.


Article 50

Reproduction partielle


Les extraits de documents classifiés sont eux-mêmes classifiés au niveau approprié à leur contenu. Si un extrait de document classifié ne justifie pas lui-même une classification, son importance doit rester limitée de façon à ne pas compromettre, en cas de divulgation, l'information dont il a été extrait. La diffusion séquentielle d'extraits non classifiés par découpage de l'information classifiée est interdite.

Des extraits d'informations classifiées Confidentiel Défense ou Secret Défense peuvent être reproduits par leur dépositaire dans les conditions fixées par l'article 49 de la présente instruction.

Lorsque des extraits de documents contenant des informations classifiées sont transférés sur un autre support, si ces extraits sont eux-mêmes classifiés, la mention de classification est reportée sur le nouveau support conformément aux prescriptions de la présente instruction.


Section 3

Inventaire

Article 51

La procédure d'inventaire


Les documents classifiés font l'objet d'un suivi permanent afin d'assurer leur traçabilité et leur prise en compte par des détenteurs habilités.

A cet effet, chaque ministre préconise les modalités d'inventaire et de suivi des documents classifiés Confidentiel Défense et Secret Défense détenus dans l'ensemble des services et organismes relevant de son département.

Un inventaire est effectué sous forme contradictoire à chaque mutation de personnel, l'ancien détenteur et le nouveau apposant tous deux leur signature sur le procès-verbal.

La période d'inventaire est mise à profit pour alléger la gestion des documents classifiés. Les dates d'expiration de validité sont vérifiées aux fins de déclassement ou de déclassification : la réévaluation du niveau de protection des documents classifiés et, le cas échéant, leur destruction, doivent être réalisées.

Au niveau Confidentiel Défense, il est conseillé de procéder à un inventaire annuel. Cet inventaire est à effectuer sous la responsabilité de chaque détenteur ou par un bureau spécialisé. Un récolement annuel doit être effectué selon les modalités définies par les directives ministérielles afin de vérifier la présence physique des documents.

Au niveau Secret Défense, l'inventaire annuel, obligatoire, est effectué par les bureaux de protection du secret en liaison avec les détenteurs. Les HFDS collationnent les procès-verbaux d'inventaires et en transmettent un bilan au SGDSN, au plus tard le 31 mars de chaque année, dans le cadre du rapport annuel d'évaluation précédemment mentionné.

Le procès-verbal d'inventaire annuel, dressé par chaque bureau de protection du secret, mentionne les références et l'identification de chaque support classifié Secret Défense, et est accompagné, le cas échéant (69), de l'une ou l'autre des pièces administratives suivantes :
-un récépissé du nouveau détenteur ;
-un procès-verbal de destruction ;
-un procès-verbal de versement à un dépôt d'archives.

(69) Ces pièces ne seront jointes à l'inventaire que si elles concernent des mouvements de documents ayant eu lieu depuis la production du procès-verbal d'inventaire de l'année précédente.

Section 4

La protection des matériels classifiés

Article 52

Dispositions générales et classifications


La protection des matériels classifiés implique la mise en œuvre de mesures de sécurité à tous les stades de la réalisation (programme, étude, plan, fabrication ou construction, essai, etc.) de même que pour l'utilisation, l'entretien, la réparation et le transport jusqu'à leur mise hors service et à leur destruction.

L'autorité responsable (directeur de programme jusqu'à la livraison ou autorité détentrice lors de l'utilisation) détermine les matériels à protéger et le niveau de classification à retenir, qui peut être différent de celui couvrant les documents (notices, plans, etc.) qui les concernent.

Il importe d'éliminer toute possibilité de vue terrestre ou aérienne et l'utilisation de procédés techniques de détection et d'identification. Un moyen efficace d'assurer la protection des matériels classifiés au niveau Secret Défense consiste à les entreposer dans une zone répondant aux règles de protection définies par la présente instruction. La zone considérée devra être érigée en zone protégée afin de pouvoir sanctionner pénalement la violation de l'interdiction d'y pénétrer.

Lorsque les matériels sont en service ou exposés à la vue en dehors d'une zone protégée, les autorités responsables font prendre des mesures de protection adaptées pour les matériels classifiés et leurs éléments constitutifs.


Article 53

La protection des matériels classifiés en cours de transport


La circulation et le transport des matériels classifiés nécessitent des mesures particulières de sécurité : protection contre les vues dans la mesure du possible et garde permanente pendant la durée de l'acheminement.

Les itinéraires sont choisis en fonction du degré de sécurité qu'ils présentent. Suivant le type de matériel à protéger et dès lors que le matériel transporté figure sur la liste tenue à jour par le ministère de la défense, il convient de se reporter aux dispositions particulières (70).

Pour les autres matériels ou équipements classifiés, l'autorité en ayant prescrit le mouvement assume la responsabilité des tâches suivantes :
-conditionnement des matériels ;
-choix de l'itinéraire et des lieux d'étape, en accord avec les autorités civiles ou militaires intéressées ;
-organisation du convoyage ou de l'escorte et des dispositions techniques en cas de panne ou d'accident.

Le transport des matériels classifiés est effectué, sauf impossibilité absolue ou opération conjointe, par des moyens nationaux.A défaut, il doit être convoyé et toutes dispositions sont prises pour que la sécurité soit assurée sans discontinuité pendant toute la durée du transport.

(70) Instruction interministérielle n° 3100 / SGDN / ACD / PS / DR du 25 juin 1980 sur la sécurité des transports de certains matériels sensibles effectués sous responsabilité civile et instruction interministérielle n° 312 / SGDN / ANS / DR du 21 août 1981 sur la sécurité nucléaire dans le domaine de la défense.

Chapitre III

Diffusion et acheminement des informations ou supports classifiés

Section 1

La diffusion et l'expédition des informations ou supports classifiés

Article 54

La diffusion


Lorsqu'elle diffuse des informations ou supports classifiés, l'autorité d'expédition établit la liste des destinataires et s'assure qu'ils sont habilités au niveau de classification requis.

Au niveau Secret Défense, le nombre et le numéro des supports attribués à chaque destinataire ainsi que le numéro des exemplaires conservés par le service émetteur sont précisés dans la liste de diffusion (deux exemplaires au moins, dont un original destiné, à terme, aux archives).

La liste des destinataires, lorsqu'elle constitue en elle-même un secret, n'est pas jointe à l'envoi de chacun des exemplaires du support.


Article 55

La diffusion, l'expédition et la réception d'informations ou supports classifiés par voie électronique


La diffusion, l'expédition et la réception d'informations classifiées par voie électronique sont régies par les dispositions du titre V.


Article 56

L'expédition et la réception d'informations ou supports classifiés


L'expédition d'informations ou supports classifiés est soumise à une procédure particulière qui permet d'assurer le suivi et de garantir l'intégrité physique du document grâce à un conditionnement spécial.

Les autorités d'expédition sont :
-au niveau Secret Défense, le bureau de protection du secret ;
-au niveau Confidentiel Défense, les personnels habilités, dans le respect du principe du besoin d'en connaître.
L'autorité émettrice procède, après marquage et enregistrement de chaque support, aux opérations suivantes :

1. Pour l'expédition :

Conditionnement :
L'envoi de supports d'informations ou de supports classifiés se fait sous double enveloppe présentant des garanties de solidité de nature à assurer au maximum l'intégrité physique des supports :
-l'enveloppe extérieure, plastifiée, porte l'indication du service expéditeur, l'adresse du destinataire (sans mention trop explicite de nature à attirer l'attention sur le caractère classifié du contenu) et la mention du suivi. Elle ne porte en aucun cas la mention du niveau de classification de l'information ou support qu'elle contient. Au niveau Secret Défense, chaque enveloppe est numérotée ;
-l'enveloppe intérieure de sécurité de bonne qualité, opaque, si possible du modèle toilé ou armé, doit interdire une ouverture ou une refermeture discrète. Elle porte le timbre du niveau de classification, la référence des supports transmis, le cachet de l'autorité expéditrice, le nom et la fonction du destinataire ainsi que l'indication du service ou de l'organisme dans lequel il est affecté.
Suivi de l'expédition :
Un bordereau d'envoi, sans timbre de classification ni indication de l'objet des informations envoyées, est placé dans l'enveloppe intérieure de sécurité dont il porte le numéro. Il comporte trois feuillets détachables A, B et B'(71) signés par le responsable de l'autorité expéditrice.

Les feuillets A et B sont adressés au destinataire, qui conserve le premier à titre d'élément de preuve et renvoie le second à titre d'accusé de réception. Le feuillet B', de couleur, est conservé par l'expéditeur jusqu'à réception du feuillet B, qui lui est alors substitué.

2. Pour la réception :

Les formalités de réception sont assurées par le bureau de protection du secret de l'organisme destinataire ou, au niveau Confidentiel Défense, par le destinataire de l'envoi.

Il convient :
-de vérifier l'intégrité de l'emballage afin de déceler une éventuelle compromission ;
-d'enregistrer ou de faire enregistrer l'information ou le support classifié conformément aux dispositions de l'article 45 ;
-de signer et de renvoyer le feuillet B du bordereau d'envoi à titre d'accusé de réception.

A la réception de documents classifiés Secret Défense, le bureau de protection du secret les transmet au destinataire.

(71) Respectivement modèles 14 / IGI 1300, 14 bis / IGI 1300 et 14 ter / IGI 1300 en annexe.

Section 2

Acheminement

Article 57

L'acheminement d'informations ou supports classifiés sur le territoire national


Les procédures de transmission des supports classifiés doivent permettre de respecter des délais compatibles avec le degré d'urgence et d'assurer la meilleure protection des supports transmis.

L'acheminement de supports classifiés sur le territoire national se fait de la façon suivante :
1.A l'intérieur d'un même immeuble :
Afin d'éviter leur observation, les informations ou supports classifiés sont acheminés sur place, sous enveloppe, soit :
-par le détenteur lui-même ;
-par une autre personne habilitée ;
-par un convoyeur ou par une personne du service de courrier interne autorisé (e).

La position des informations et supports classifiés doit être suivie sans discontinuité, notamment dans le système d'enregistrement des documents classifiés.
Au niveau Secret Défense, un compte rendu au bureau de protection du secret doit être effectué.

Cette règle peut parfois être assouplie pour une communication brève et temporaire d'informations ou de supports classifiés. Le détenteur des supports classifiés, responsable de leur acheminement, en rend compte. Il doit en contrôler la position et les faire réintégrer dès que les nécessités du service le permettent.

2. Avec changement d'immeuble ou de zone géographique :
L'acheminement peut s'opérer :
-par convoyeur autorisé ou par toute personne habilitée au niveau requis : les informations ou supports classifiés sont placés dans une sacoche ou une valise fermant à clef, dépourvue d'indication extérieure ; le porteur ne peut en aucun cas s'en dessaisir jusqu'à la remise au bureau de protection du secret destinataire, pour le niveau Secret Défense, ou au destinataire lui-même, pour le niveau Confidentiel Défense ;
-par voie militaire : dans les conditions fixées par les instructions du ministère de la défense.

En cas d'urgence et uniquement à défaut de convoyeur, l'acheminement d'informations ou supports classifiés au niveau Confidentiel Défense ou Secret Défense est autorisé, sur le territoire national, par la voie postale civile, à la condition impérative de recourir aux opérateurs postaux proposant des moyens de transport protégés, tels que l'envoi en pli chargé avec valeur déclarée.

Cruciale, la fiabilité des opérateurs postaux chargés d'acheminer des documents classifiés dépend notamment de leur capacité à répondre aux exigences imposées par la présente instruction.

L'opérateur postal peut confier l'accomplissement d'une tâche à un sous-traitant mais la responsabilité de l'exécution lui incombe entièrement.

Seuls pourront être sollicités les opérateurs postaux :
-ayant un établissement sur le territoire national ;
-habilités ;
-disposant d'un programme de sécurité pour la prise en charge d'articles de valeur au moyen d'un service de signature comportant notamment une surveillance et un enregistrement permanents permettant d'identifier à tout moment le responsable de la garde des articles concernés soit par un registre de signature et de pointage, soit par un système électronique de suivi et d'enregistrement ;
-fournissant à l'expéditeur un justificatif de livraison sur le registre de signature et de pointage ou un reçu portant les numéros de colis ;
-garantissant que la livraison sera effectuée dans un délai maximal de 24 heures, ou avant une date et une heure données.

L'expéditeur s'assure de la date et de l'heure prévues de livraison et en avise aussitôt le service destinataire par télécopie banalisée ou par courrier électronique, en indiquant le bureau de dépôt du courrier et les références du support, à l'exclusion de leur objet et de leur caractère secret.A la réception du courrier, le bureau de protection du secret ou le destinataire en accuse réception. En cas de retard anormal, il y a suspicion de compromission et le bureau de protection du secret ou le service destinataire met en œuvre les dispositions de l'article 67.

Des contrôles (72) sont effectués auprès des opérateurs postaux en liaison avec les services spécialisés pour s'assurer que les conditions de conservation et d'acheminement des informations ou supports classifiés sont respectées.

(72) Conformément aux dispositions du titre VI.


Article 58

L'acheminement d'informations ou supports classifiés vers l'étranger


Les informations ou supports classifiés envoyés à l'étranger ou transitant par des pays étrangers doivent être protégés en permanence pour interdire leur compromission pendant le transport, et notamment lors des escales.

Seuls les moyens suivants sont autorisés :
-courrier militaire spécialisé ;
-valise diplomatique et lettre de courrier ;
-certificat de courrier.

La voie postale peut être autorisée, pour les supports de niveau Confidentiel Défense, dans les conditions mentionnées à l'article 57 en ayant recours au service prioritaire recommandé international pour un envoi vers les pays de l'Union européenne ou de l'OTAN.
Pour les informations échangées dans le cadre d'un accord ou d'un programme international, il convient de se référer aux dispositions prévues par les réglementations applicables.

1. Courrier militaire spécialisé :
Les informations ou supports classifiés au niveau Secret Défense sont normalement acheminés par valise diplomatique ou éventuellement par courrier militaire spécialisé.

Pour les organismes militaires, le service convoyeur est le bureau de courrier de l'administration centrale (BCAC). En cas d'urgence exceptionnelle, il est possible sous certaines conditions de bénéficier, en dehors de la valise diplomatique, d'une lettre de courrier délivrée par le ministère des affaires étrangères (73).

2. Valise diplomatique et lettre de courrier :
Lors de la remise des envois, au plus tard la veille du départ de la valise, à la division de la valise diplomatique du ministère des affaires étrangères, un cachet apparent doit être apposé sur l'enveloppe extérieure ou sur une étiquette fixée au colis et comportant obligatoirement la mention Par valise accompagnée-sacoche.

Le transport est obligatoirement assuré par un convoyeur autorisé ou par une personne habilitée sous réserve que la sacoche ne dépasse pas 20 kilogrammes.A défaut, il y a lieu de prévoir des mesures particulières en fonction des instructions du ministère des affaires étrangères. Une lettre de courrier accrédite la qualité du porteur afin d'éviter l'examen du courrier par la douane ou le service de police compétent.

La convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques interdit toute mise en demeure par les autorités étrangères de leur soumettre le courrier et stipule que la valise diplomatique ne doit ni être ouverte, ni retenue. Le convoyeur doit seulement présenter sa lettre de courrier et faire appel, en cas de besoin, à l'assistance de l'agent diplomatique ou consulaire le plus proche. Si toutefois les autorités compétentes de l'Etat d'accueil demandent que la valise soit ouverte en leur présence, le convoyeur est en droit d'opposer un refus et de repartir avec la valise vers l'Etat d'origine.

3. Certificat de courrier :
Lorsqu'un accord ou un règlement international de sécurité le prévoit, l'acheminement est possible par convoyeur autorisé, dans les conditions déterminées à l'article 57. Le convoyeur est alors muni d'un certificat de courrier pour un seul ou plusieurs voyages (74) délivré par l'ANS ou les autorités de sécurité déléguées. Il est rappelé au convoyeur qu'il s'engage, tout au long du voyage, à garder en sa possession ou sous sa surveillance directe le colis contenant les documents, équipements ou composants classifiés (75).

(73) Division de la valise diplomatique. (74) Modèles 09 / IGI 1300 (un seul voyage) et 09 bis / IGI 1300 (multivoyage) en annexe. (75) Ce type d'acheminement ne bénéficiant pas de la protection accordée à la valise diplomatique selon la convention de Vienne du 18 avril 1961 (article 27), le colis acheminé peut être ouvert par les autorités étrangères.

Chapitre IV

Destruction et archivage des informations ou supports classifiés

Section 1

Destruction des informations ou supports classifiés

Article 59

La procédure ordinaire


Lorsque des informations ou supports classifiés sont périmés ou devenus inutiles, il peut être procédé à leur destruction avec, pour le document original, l'accord de l'administration des archives (76). La destruction ne peut être réalisée que par des personnes habilitées. Les supports préparatoires devenus sans objet sont détruits sans formalité particulière.

La destruction de tels documents est effectuée de façon à rendre impossible toute reconstitution même partielle des informations contenues sur les supports.

Les techniques de destruction sont adaptées au nombre et au type de supports à détruire. Les principales formes de destruction sont le brûlage, l'incinération, le broyage, le déchiquetage et la surtension électrique (77). Lorsque des documents classifiés doivent être transportés afin d'être incinérés, ils doivent impérativement avoir été préalablement déchiquetés et mélangés.

Après l'opération, un procès-verbal de destruction (78) est dressé. Les procès-verbaux de destruction portent la signature de l'autorité détentrice et, pour les documents Secret Défense, celle d'un témoin habilité au niveau Secret Défense.

Au niveau Secret Défense, l'autorité détentrice du document informe par écrit l'autorité classificatrice que, sauf avis contraire de sa part, elle va procéder à la destruction du support. Sans réponse dans un délai de deux mois, l'autorité détentrice procède à la destruction du support et en rend compte à l'autorité classificatrice en lui adressant une copie du procès-verbal (79). Une copie de ce procès-verbal est également transmise au bureau de protection du secret.

(76) Article L. 212-2 du code du patrimoine. (77) Le brûlage consiste à exposer l'ensemble du support ou la surface utile à une température de plus de 1 000° C avec un chalumeau ; l'incinération est une combustion complète réduisant le support à l'état de cendres, destinée à empêcher toute dispersion de fragments ; le broyage consiste à réduire le support en pulpe afin que les morceaux résiduels n'excèdent pas 2 mm de diamètre ; le déchiquetage est une opération qui réduit le support en lambeaux de moins de 0, 8 mm de large et 13 mm de long ; la surtension électrique consiste à détruire les circuits d'alimentation du support par une surtension positive immédiatement suivie d'une surtension négative (ce qui ne détruit toutefois pas les circuits eux-mêmes, qui contiennent l'information). (78) Modèle 13 / IGI 1300 en annexe. (79) En cas de dissolution du service dont relevait l'autorité ayant procédé à la classification, la copie du procès-verbal de destruction est adressée au HFDS du ministère compétent.


Article 60

Evacuation et destruction d'urgence


Pour faire face à des circonstances exceptionnelles et en cas de menace immédiate nécessitant l'évacuation des bâtiments par le personnel ou la destruction des informations ou supports classifiés, des plans d'évacuation et de destruction d'urgence sont établis par chaque service ou organisme détenteur d'informations ou supports classifiés. Ces plans prévoient notamment les procédures d'accès, en toute circonstance, aux locaux et aux informations ou supports classifiés.

Les modalités d'exécution pratique de ces plans figurent sur des fiches disponibles en permanence, pour les personnes concernées, dans chaque service ou organisme détenteur. Elles précisent :
-la liste et la localisation des informations ou supports classifiés à détruire ou à évacuer ;
-les mesures applicables aux systèmes d'information ;
-la liste et la localisation des moyens de destruction et d'évacuation à utiliser ;
-les autorités qualifiées pour donner l'ordre de destruction ou d'évacuation.

Le dispositif ainsi établi doit être contrôlé par une simulation, selon une périodicité définie par chaque ministère pour les niveaux Secret Défense et Confidentiel Défense, qui ne peut excéder trois ans.


Section 2

Archivage

Article 61

Les principes généraux de l'archivage d'informations ou de supports classifiés


Toute autorité détenant une information ou support classifié, produit ou reçu, a pour obligation de faire assurer sa conservation et sa protection conformément aux dispositions législatives ou réglementaires et aux règles de fonctionnement du service d'archives auquel il est rattaché.

Le code du patrimoine définit les archives comme l'ensemble des documents, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, produits ou reçus par toute personne physique ou morale et par tout service ou organisme public ou privé, dans l'exercice de leur activité (80). Il institue un régime de conservation et de consultation des archives applicable à toutes les archives, publiques ou privées.

(80) Article L. 211-1 du code du patrimoine.


Article 62

Le versement des informations ou supports classifiés aux archives


Les informations ou supports classifiés sont soumis aux dispositions générales du code du patrimoine relatives aux archives.A l'expiration de leur période d'utilisation courante, ils font l'objet d'un tri pour séparer les documents destinés à être conservés des documents dépourvus d'utilité administrative ou d'intérêt historique ou scientifique, destinés à l'élimination (81).A cette occasion, il est procédé, chaque fois que nécessaire, à la révision de leur niveau de classification.

Les dispositions suivantes s'appliquent aux documents qui, à l'expiration de leur période d'utilisation courante, restent classifiés :
1. La destruction :
La destruction d'informations ou supports classifiés s'opère dans les conditions décrites à l'article 59 de la présente instruction et conformément aux dispositions du code du patrimoine.

2. Le versement aux dépôts d'archives :
Dès qu'ils ne sont plus utilisés habituellement, les informations ou supports classifiés présentant un intérêt administratif et historique sont versés, selon la périodicité prévue par chaque ministre, aux dépôts d'archives suivants :
-le service historique de défense, pour le ministère de la défense et les services qui lui sont rattachés tant administrativement que pour la gestion des archives ;
-les archives du ministère des affaires étrangères et européennes, pour ce qui le concerne ;
-la direction générale des patrimoines de France, les archives nationales et services publics d'archives des collectivités territoriales, pour toutes les administrations et organismes civils gérant des archives publiques (par exemple la préfecture de police).

Ces services sont seuls équipés et habilités pour recevoir des informations ou supports classifiés jusqu'au niveau Secret Défense inclus. Ils ne peuvent pas accueillir d'informations ou de supports classifiés au niveau Très Secret Défense dont le versement aux archives n'est possible qu'après une procédure, obligatoire et préalable, de déclassement ou de déclassification.

(81) Article L. 212-2 du code du patrimoine.


Article 63

La communication au public des informations ou supports classifiés versés aux archives


La communication au public d'informations ou de supports classifiés versés aux services d'archives relève des dispositions combinées du code pénal (82), du code du patrimoine (83), de la loi du 17 juillet 1978 précitée relative à l'amélioration des relations entre l'administration et le public (84), du décret du 3 décembre 1979 relatif aux archives de défense (85) et enfin du décret (86) du 1er décembre 1980 relatif au régime des archives du ministère des affaires étrangères.

Un document classifié versé aux archives publiques est en principe, à la condition expresse d'avoir été préalablement déclassifié, communicable de plein droit à l'expiration du délai de cinquante ans à compter de sa date d'émission ou de celle du document classifié le plus récent inclus dans le dossier. Ce délai est, en certaines circonstances, porté à soixante-quinze ans ou à cent ans (87). Un document peut être incommunicable quel que soit le délai écoulé. Ainsi ne peut en aucun cas être consultée une archive dont la communication présente le risque de diffuser des informations relatives aux armes de destruction massive (88).

Quelle que soit la durée d'incommunicabilité affectée au document classifié, sa communication n'est possible qu'après déclassification du document. Lorsque le service détenteur des archives est saisi d'une demande de communication d'un document couvert par le secret de la défense nationale, il doit transmettre cette demande à l'autorité émettrice du document concerné. Cette autorité vérifie la durée d'incommunicabilité affectée au document. Si tous les délais applicables sont expirés, l'autorité émettrice procède à la déclassification. Le document ne peut être communiqué qu'à l'issue de cette procédure.

Une personne souhaitant consulter une archive classifiée avant l'expiration des délais de communicabilité applicables doit solliciter une dérogation (89). Le service d'archives détenteur saisi de la demande de dérogation transmet cette demande à l'autorité émettrice. Cette autorité doit toujours s'interroger sur l'opportunité de la déclassification du document. Si la classification reste justifiée, la communication est impossible et la dérogation est refusée.

(82) Articles 413-10 et suivants du code pénal relatifs à la compromission. (83) Articles L. 213-1 et L. 213-3 du code du patrimoine. (84) Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée. (85) Décret n° 79-1035. (86) Décret n° 80-975. (87) Article L. 213-2 (3°, 4° et 5°) du code du patrimoine (annexe 1). (88) Article L. 231-2 (II) du code du patrimoine. (89) Dérogation aux règles de communicabilité des documents d'archives, prévue à l'article L. 213-3 du code du patrimoine et décret n° 79-1035 du 3 décembre 1979 (article 7).

Chapitre V

Les mentions additionnelles de limitation du champ de diffusion

Article 64

Principe général


Les informations et les supports classifiés devant faire l'objet de restrictions spécifiques de diffusion en raison de leur contenu portent, en plus de la mention éventuelle de leur niveau de classification, une mention particulière précisant les services, les Etats ou les organisations internationales pouvant y avoir accès (90). Cette mention, apposée par l'émetteur, a pour effet de circonscrire expressément le périmètre de circulation de ces informations et d'attirer l'attention sur le strict besoin d'en connaître. Les mesures de sécurité du niveau de classification qu'elles portent éventuellement sont appliquées et l'acheminement des informations ou des supports est réalisé de façon à garantir le respect du périmètre de diffusion ainsi délimité.

(90) Article R. 2311-4 du code de la défense.


Article 65

Détermination et champ d'application Spécial France


La mention Spécial France n'est pas une mention de classification. Elle est employée pour les informations ou supports, classifiés ou non, que l'autorité émettrice estime devoir être divulgués aux seuls ressortissants français et qui ne sauraient, en aucune circonstance, être communiqués, en tout ou partie, à un Etat étranger ou à l'un de ses ressortissants, à une organisation internationale ni à une entreprise de droit étranger, même s'il existe avec cet Etat ou cette organisation un accord de sécurité. La mention Spécial France peut ne concerner que certaines parties d'un document.

Lorsque des informations marquées Spécial France sont classifiées, elles doivent, outre satisfaire aux mesures de sécurité appropriées à leur degré de protection, n'être transmises qu'à des personnes physiques ou morales françaises dûment habilitées et ayant le besoin d'en connaître.

Le timbre Spécial France, de couleur bleue, est apposé en haut de page, immédiatement à droite ou au-dessous du timbre de classification de l'information et, pour les supports non papier, conformément aux dispositions de l'article 44 de la présente instruction.
L'acheminement des informations ou supports classifiés est réalisé par des bureaux courriers nationaux et par des voies nationales. Si nécessaire, la mention Spécial France est indiquée sur l'enveloppe intérieure de sécurité.

Les informations Spécial France ne sont jamais mentionnées sur les inventaires ou répertoires prescrits par les accords de sécurité ou les règlements de sécurité.

Ces documents peuvent sortir des frontières du territoire par la valise diplomatique (91), qui constitue un circuit national protégé, garantissant la protection et le cloisonnement des informations transmises et impliquant la mise en œuvre, à tous les stades de l'acheminement, des mesures de sécurité appropriées au degré de classification éventuellement apposé. Il en est de même de la transmission par courrier militaire spécialisé ou, en cas d'urgence, de la lettre de courrier délivrée par le ministère des affaires étrangères (92).

Les règles applicables aux informations et supports matériels valent également pour les documents informatiques, qui ne peuvent être acheminés, par voie électronique, que par un canal national spécifique de transmission offrant toutes les garanties précitées de sécurité et de cloisonnement.

(91) Article 27 de la convention de Vienne de 1961. (92) Article 58 de la présente instruction.

Chapitre VI

La compromission du secret de la défense nationale


Compromettre un secret de la défense nationale consiste à le révéler, en tout ou partie, à quelqu'un qui n'a pas à en connaître. Si la compromission délibérée est rare, les compromissions par négligence du détenteur ou par accès illicite sont fréquentes. La rivalité entre les Etats et la concurrence économique entre les entreprises nourrissent la recherche active d'informations classifiées ou stratégiques et exigent que la protection des informations ou supports classifiés demeure une préoccupation essentielle de toute personne ou tout service détenteur.


Article 66

Domaine d'application de la compromission


L'appropriation, la livraison ou la divulgation, à des personnes non habilitées ou n'ayant pas le besoin d'en connaître, de tout élément constituant un secret de la défense nationale constituent des agissements contre les intérêts de la nation, considérés comme particulièrement dangereux. Le code pénal consacre aux atteintes au secret de la défense nationale les articles 413-9 à 413-12 (93).
Constitue le délit de compromission le fait de divulguer ou de rendre possible la divulgation d'un secret de la défense nationale, c'est-à-dire de le rendre accessible à une ou plusieurs personnes n'étant pas qualifiée (s) pour y accéder.

Toute personne dépositaire d'éléments couverts par le secret de la défense nationale en est responsable. Elle a le devoir de s'opposer à la communication de ces éléments à une personne non qualifiée pour y accéder, sous peine d'être elle-même poursuivie du chef de compromission.

Pour un lieu classifié, constitue cette atteinte le fait, pour une personne non qualifiée, d'y pénétrer elle-même ou de porter à la connaissance d'un tiers ou du public un élément relatif à la nature des installations ou des activités qu'abrite un tel lieu (94).
Caractérise également cette atteinte, réprimée plus sévèrement encore, le fait, pour une personne qualifiée, de permettre à un tiers d'accéder à un lieu classifié ou de divulguer un élément relatif à la nature des installations ou des activités qu'il abrite (95).

Pour une information classifiée, les agissements matériels par lesquels se traduit l'atteinte au secret de la défense nationale peuvent revêtir trois formes (96) :
-un acte positif, consistant à détruire, à soustraire ou à reproduire un secret que l'on détient ;
-une attitude passive, consistant à laisser détruire, détourner, reproduire ou divulguer un secret, soit par un autre dépositaire, soit par un tiers ;
-une attitude négligente ou imprudente, consistant à méconnaître les instructions et consignes administratives et portant de ce fait atteinte à la protection d'une information classifiée en l'exposant au risque d'être dévoilée.

L'auteur de l'infraction peut être une personne qualifiée (97) ou un tiers (98). Est qualifiée la personne qui, par son état, sa profession, sa fonction ou sa mission, temporaire ou permanente, est habilitée à avoir accès à une information classifiée et a le besoin d'en connaître. En matière d'accès aux lieux, les conditions de qualification d'une personne sont décrites à l'article 75. Est considérée comme tiers toute personne à laquelle l'accès au secret est interdit.A la différence de la personne qualifiée, le simple tiers ne peut se voir reprocher pénalement une attitude passive ou négligente.

La protection pénale est limitée aux informations ou supports faisant l'objet d'une mesure de classification. Tant que cette classification perdure, quelle qu'en soit l'ancienneté ou la pertinence, le délit de compromission conserve sa pleine application. Une personne habilitée n'est pas déliée de ses obligations lorsque cesse son habilitation (99).

Ces dispositions sont étendues aux actes commis au préjudice (100) :
-des puissances signataires du traité de l'Atlantique Nord ;
-de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord.
Elles s'appliquent également aux informations échangées (101) :
-en vertu d'un accord de sécurité régulièrement approuvé et ratifié, conclu entre la France et un ou plusieurs autres Etats étrangers ou une organisation internationale ;
-entre la France et une institution ou un organe de l'Union européenne et classifiées en vertu des règlements de sécurité de ces derniers, publiés au Journal officiel de l'Union européenne.

La qualité de secret est indépendante du nombre, parfois élevé, de personnes qui en connaissent la teneur.

L'infraction de compromission est constituée même si la divulgation n'est pas réalisée mais seulement rendue possible.

La tentative de compromission est sanctionnée comme le délit consommé (102).

La compromission est un délit. La nature singulière de l'infraction engendre des particularités procédurales importantes en matière d'ouverture des poursuites, de compétence juridictionnelle et de sanction applicable.

Outre les sanctions pénales, l'auteur d'un acte, commis délibérément ou non, qui compromet un secret de la défense nationale encourt le retrait de son habilitation et des sanctions disciplinaires, ce qui peut affecter gravement le déroulement de sa carrière.
Les personnes morales sont pénalement responsables des faits de compromission qui leur sont imputables et encourent, outre une peine d'amende, l'interdiction d'exercer l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise (103).

(93) Ces dispositions ne sont pas les seules à protéger le secret, les articles consacrés à la trahison et à l'espionnage y faisant également référence, de manière indirecte (articles 411-6 pour la livraison d'un secret à une puissance étrangère, 411-7 pour la collecte de renseignements à fin de transmission à une puissance étrangère, 411-8 pour l'exercice d'une activité ayant pour but la livraison de renseignements à une puissance étrangère). (94) Article 413-11-1 du code pénal. (95) Article 413-10-1 du code pénal. (96) Articles 413-10 et 413-11 du code pénal. (97) Articles 413-10 et 413-10-1 du code pénal. (98) Articles 413-11 et 413-11-1 du code pénal. (99) Ainsi par exemple une personne ne peut déposer devant une juridiction en révélant des éléments classifiés, à moins que ceux-ci n'aient été préalablement déclassifiés. (100) Article 414-8 du code pénal. (101) Article 414-9 du code pénal. (102) Article 413-12 du code pénal. (103) Articles 121-2 et 414-7 du code pénal.


Article 67

Procédure à suivre en cas de compromission


La rapidité et la discrétion de l'intervention revêtent une importance primordiale pour limiter les conséquences de la divulgation des informations ou supports classifiés compromis.

Il est rendu compte immédiatement de toute découverte de compromission possible à l'autorité hiérarchique et au responsable de la sécurité de l'organisme concerné. Qu'il y ait une compromission avérée ou une simple suspicion, doivent être directement et dans les plus brefs délais informés :
-le service compétent du ministère de l'intérieur (104) chargé de centraliser les cas et de procéder à l'enquête sous le contrôle de l'autorité judiciaire ;
-le service compétent du ministère de la défense (105), qui avise lui-même celui du ministère de l'intérieur ;
-le HFDS du ministère intéressé ;
-le SGDSN.

En matière informatique, les disparitions, vols, pertes accidentelles de supports matériels classifiés ou les agressions contre les systèmes d'information font l'objet d'un procès-verbal de perte ou d'agression informatique, adressé sans délai :
-directement au HFDS du ministère concerné ;
-par la voie hiérarchique du ministère concerné, à l'autorité émettrice de l'information classifiée et au SGDSN, pour les informer des conséquences éventuelles de la compromission ;
-au service enquêteur concerné, s'il n'est pas lui-même l'émetteur du procès-verbal.

Le chef de service prend immédiatement, en liaison avec l'officier de sécurité, les mesures adéquates pour prévenir la réitération de tels faits.

Le fait de ne pas signaler de tels actes, favorisant la divulgation d'une information classifiée, fait encourir des sanctions administratives ou professionnelles.

Le ministère de l'intérieur, outre l'information obligatoirement donnée au cas par cas, fournit au SGDSN un bilan annuel des cas constatés et de l'état d'avancement des procédures ou des suites réservées à chacune d'elles.

Le rapport annuel d'évaluation de la protection du secret établi annuellement par les HFDS (106) indique le nombre de cas de compromission constatés ou soupçonnés ainsi que les suites données.

Lorsque la compromission porte sur des informations classifiées étrangères, l'ANS française informe dans les plus brefs délais l'ANS étrangère. Lorsqu'une ASD est concernée, elle informe dans les plus brefs délais l'ANS étrangère ainsi que l'ANS française. Lorsque ce sont des informations de niveau Secret Défense qui sont compromises, l'ASD rend compte à l'ANS française, qui transmettra elle-même l'information à son homologue étrangère.

(104) Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). (105) Direction de la protection et de la sécurité de défense (DPSD), direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). (106) Article 12 de la présente instruction.

Chapitre VII

L'accès des magistrats aux informations classifiées


Le premier rôle du juge judiciaire à l'égard du secret de la défense nationale est de sanctionner les manquements constatés à sa protection. Il arrive toutefois que le juge se voie lui-même opposer ce secret, au cours de ses investigations, par l'autorité responsable d'un document classifié dont elle lui refuse la communication. En effet, ni les magistrats ni les officiers de police judiciaire n'ont qualité pour connaître les éléments que couvre ce secret.

Or si refuser l'accès au magistrat constitue le délit d'entrave à la justice (107), le lui accorder fait encourir les sanctions pénales applicables à la compromission. Afin de dénouer ce paradoxe, de garantir la préservation du secret de la défense nationale tout en favorisant l'action de la justice et en évitant qu'il ne soit fait obstacle au bon déroulement d'une procédure judiciaire, les conditions dans lesquelles les magistrats peuvent accéder à une information classifiée utile à la manifestation de la vérité sont clairement définies.

(107) Article 434-4 du code pénal.


Article 68

Moyens d'accès des magistrats aux informations classifiées


Pour obtenir communication d'éléments classifiés intéressant la procédure qu'il diligente, le magistrat dispose de trois possibilités : la perquisition, l'audition et la réquisition.

1. La perquisition :
La perquisition aux fins de saisie d'éléments classifiés suppose, dans la grande majorité des cas, que le magistrat pénètre dans des locaux où sont conservés de tels documents. Aussi la perquisition est-elle traitée dans les dispositions encadrant l'accès aux lieux abritant des éléments classifiés des secrets de la défense nationale ou aux lieux classifiés (108).

2.L'audition :
Aucune autorité administrative ne peut autoriser l'un de ses agents à s'exprimer au sujet d'une information classifiée à moins que celle-ci n'ait été préalablement déclassifiée. Une personne habilitée, ne pouvant être déliée de ses obligations de protection du secret, ne peut en aucun cas être entendue par une juridiction sur des éléments restant classifiés sous peine d'encourir les sanctions applicables au délit de compromission.

3. La réquisition judiciaire :
La réquisition est le moyen le plus fréquemment utilisé par les juridictions en matière d'informations classifiées. Le magistrat adresse à l'autorité administrative dont relève la classification, c'est-à-dire au ministre compétent, une réquisition aux fins de transmission des éléments utiles à la manifestation de la vérité.
Deux situations peuvent se présenter :
-soit le magistrat a identifié le ou les éléments classifiés dont il requiert la communication et il adresse directement une demande de déclassification à l'autorité classificatrice ;
-soit le magistrat souhaite se voir communiquer un certain nombre d'éléments qu'il ne peut identifier avec précision ; il requiert alors de l'administration concernée qu'elle procède elle-même à la recherche de ces éléments, les trie et communique les éléments qui ne sont pas classifiés, les éléments classifiés devant faire préalablement l'objet d'une demande de déclassification.

(108) Articles 82 et 83 de la présente instruction.


Article 69

Procédure de déclassification d'une information classifiée


La déclassification d'une information classifiée, sollicitée par requête, peut être décidée après avis de la Commission consultative du secret de la défense nationale.

1. Requête en déclassification d'une information :
Une juridiction française peut demander, dans le cadre d'une procédure engagée devant elle, la déclassification d'éléments protégés par le secret de la défense nationale (109). Cette demande, motivée, est adressée à l'autorité administrative qui a procédé à la classification du document, qui saisit elle-même sans délai la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN).
La CCSDN, autorité administrative indépendante (110), rend un avis destiné à éclairer l'autorité classificatrice sur l'opportunité de déclassifier et de communiquer des informations désignées par la juridiction, à l'exclusion des informations classifiées ne relevant pas des seules autorités françaises (111).

La motivation énoncée par le magistrat requérant permet à la commission d'une part de contrôler la validité de sa saisine en s'assurant que les éléments dont la déclassification est demandée intéressent effectivement la procédure, d'autre part de procéder au tri des pièces classifiées soumises à son appréciation afin de déterminer celles qui peuvent être utiles à la manifestation de la vérité.
2.L'avis de la Commission consultative du secret de la défense nationale :
La commission a accès à l'ensemble des éléments classifiés. Pour l'accomplissement de sa mission, elle est habilitée à procéder, le cas échéant, à l'ouverture des scellés des éléments classifiés qui lui sont remis. Elle en fait mention dans son procès-verbal de séance (112).

La CCSDN émet un avis dans le délai de deux mois à compter de sa saisine. Cet avis prend en considération les missions de service public de la justice, le respect de la présomption d'innocence et des droits de la défense, le respect des engagements internationaux de la France ainsi que la nécessité de préserver les capacités de défense et la sécurité des personnels. Le sens de l'avis peut être favorable, favorable partiellement ou défavorable à la déclassification.L'avis est transmis par la CCSDN au ministre concerné en sa qualité d'autorité classificatrice (113).

3. La décision de l'autorité classificatrice :
L'avis de la commission est consultatif. Le ministre a donc toute latitude pour ordonner une déclassification malgré un avis défavorable ou pour refuser la déclassification en dépit d'un avis favorable. Dans le délai de quinze jours francs à compter de la réception de l'avis de la CCSDN (114), le ministre compétent notifie sa décision, qui n'a pas à être motivée, assortie du sens de l'avis, à la juridiction concernée. Le sens de l'avis rendu par la CCSDN est publié au Journal officiel de la République française (115).

Chaque élément déclassifié est revêtu d'une mention expresse de déclassification précisant la date de la décision du ministre.L'élément peut ensuite être versé au dossier de la procédure afin d'y être examiné par le magistrat et soumis aux parties qui pourront en débattre contradictoirement. Le versement par erreur à un dossier judiciaire d'une pièce classifiée fait encourir des sanctions pénales.

(109) Article L. 2312-4 du code de la défense. (110) Créé par une loi du 8 juillet 1998, cet organisme consultatif indépendant fait l'objet des articles LL. 2311-1 à 2311-8 du code de la défense. (111) L'autorité administrative ne peut déclassifier que des documents classifiés par ses propres services. Pour les éléments classifiés par des autorités étrangères ou des organismes internationaux comme l'OTAN ou l'Union européenne, il appartient au magistrat de s'adresser à l'organisme concerné. (112) Article L. 2312-5 du code de la défense. (113) Article L. 2312-7 du code de la défense. (114) Ou à l'expiration du délai de deux mois imparti à la CCSDN pour formuler son avis. (115) Article L. 2312-8 du code de la défense.

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