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  • (LOI DE MODERNISATION DE LA JUSTICE DU XXIE SIÈCLE)


    Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi de modernisation de la justice du xxie siècle sous le n° 2016-739 DC, le 17 octobre 2016, par MM. Christian JACOB, Elie ABOUD, Olivier AUDIBERT-TROIN, Patrick BALKANY, Jean-Pierre BARBIER, Jacques-Alain BÉNISTI, Sylvain BERRIOS, Mmes Valérie BOYER, Marine BRENIER, MM. Philippe BRIAND, Guillaume CHEVROLLIER, Dino CINIERI, Eric CIOTTI, Jean-Michel COUVE, Bernard DEBRÉ, Patrick DEVEDJIAN, Jean-Pierre DOOR, David DOUILLET, Mme Virginie DUBY-MULLER, MM. Daniel FASQUELLE, Georges FENECH, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FOULON, Marc FRANCINA, Yves FROMION, Laurent FURST, Claude de GANAY, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Guy GEOFFROY, Alain GEST, Philippe GOSSELIN, Philippe GOUJON, Mme Arlette GROSSKOST, MM. Serge GROUARD, Jean-Claude GUIBAL, Jean-Jacques GUILLET, Michel HEINRICH, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Philippe HOUILLON, Sébastien HUYGHE, Jacques KOSSOWSKI, Mme Laure de LA RAUDIÈRE, M. Guillaume LARRIVÉ, Mme Isabelle LE CALLENNEC, MM. Vincent LEDOUX, Pierre LELLOUCHE, Céleste LETT, Lionnel LUCA, Olivier MARLEIX, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Claude MATHIS, Gérard MENUEL, Damien MESLOT, Jean-Claude MIGNON, Pierre MOREL-À-L'HUISSIER, Mmes Dominique NACHURY, Stéphanie PERNOD-BEAUDON, M. Bernard PERRUT, Mme Josette PONS, MM. Frédéric REISS, Franck RIESTER, Martial SADDIER, Paul SALEN, François SCELLIER, André SCHNEIDER, Fernand SIRÉ, Michel SORDI, Eric STRAUMANN, Michel TERROT, Jean-Marie TÉTART, Arnaud VIALA et Philippe VITEL, députés.
    Il a également été saisi le 17 octobre 2016, par MM. Bruno RETAILLEAU, Pascal ALLIZARD, Gérard BAILLY, Philippe BAS, Christophe BÉCHU, Jérôme BIGNON, François BONHOMME, Gilbert BOUCHET, François-Noël BUFFET, Jean-Pierre CANTEGRIT, Jean-Claude CARLE, Mme Anne CHAIN-LARCHÉ, MM. Patrick CHAIZE, Pierre CHARON, Daniel CHASSEING, Alain CHATILLON, Gérard CORNU, Philippe DALLIER, René DANESI, Mathieu DARNAUD, Serge DASSAULT, Mme Isabelle DEBRÉ, M. Francis DELATTRE, Mmes Catherine DEROCHE, Jacky DEROMEDI, Chantal DESEYNE, MM. Eric DOLIGÉ, Philippe DOMINATI, Mme Marie-Annick DUCHÊNE, M. Alain DUFAUT, Mme Nicole DURANTON, M. Louis DUVERNOIS, Mme Dominique ESTROSI-SASSONE, MM. Michel FORISSIER, Christophe FRASSA, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Jacques GAUTIER, Jacques GENEST, Bruno GILLES, Mme Colette GIUDICELLI, MM. Alain GOURNAC, Jean-Pierre GRAND, Daniel GREMILLET, Jacques GROSPERRIN, Mme Pascale GRUNY, MM. Charles GUENÉ, Michel HOUEL, Alain HOUPERT, Benoît HURÉ, Jean-François HUSSON, Alain JOYANDET, Mme Christiane KAMERMANN, MM. Guy-Dominique KENNEL, Marc LAMÉNIE, Mme Elisabeth LAMURE, MM. Robert LAUFOAULU, Daniel LAURENT, Antoine LEFÈVRE, Dominique de LEGGE, Jean-Pierre LELEUX, Jean-Baptiste LEMOYNE, Philippe LEROY, Mme Vivette LOPEZ, MM. Michel MAGRAS, Claude MALHURET, Didier MANDELLI, Alain MARC, Jean-François MAYET, Mmes Colette MÉLOT, Marie MERCIER, Brigitte MICOULEAU, MM. Alain MILON, Albéric de MONTGOLFIER, Mme Patricia MORHET-RICHAUD, MM. Philippe MOUILLER, Louis NÈGRE, Louis-Jean de NICOLAŸ, Claude NOUGEIN, Jean-Jacques PANUNZI, Jackie PIERRE, François PILLET, Rémy POINTEREAU, Ladislas PONIATOWSKI, Mmes Sophie PRIMAS, Catherine PROCACCIA, MM. Jean-Pierre RAFFARIN, Henri de RAINCOURT, Michel RAISON, Jean-François RAPIN, Bernard SAUGEY, Michel SAVIN, Bruno SIDO, Abdourahamane SOILIHI, André TRILLARD, Mme Catherine TROENDLÉ, MM. Michel VASPART, Alain VASSELLE, Hilarion VENDEGOU et Jean-Pierre VOGEL, sénateurs.
    Au vu des textes et pièces suivants :


    - la Constitution ;
    - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
    - la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ;
    - le règlement (UE) n° 2015/848 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relatif aux procédures d'insolvabilité ;
    - la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
    - le code civil ;
    - le code de la consommation ;
    - le code de l'environnement ;
    - le code général des impôts ;
    - le code de justice administrative ;
    - le code pénal ;
    - le code des procédures civiles d'exécution ;
    - le code de procédure pénale ;
    - le code de la route ;
    - le code de la sécurité sociale ;
    - la loi n° 75-618 du 11 juillet 1975 relative au recouvrement public des pensions alimentaires ;
    - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
    - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
    - l'ordonnance n° 2000-218 du 8 mars 2000 fixant les règles de détermination des nom et prénoms des personnes de statut civil de droit local applicable à Mayotte ;
    - la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles ;
    - la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale ;
    - les observations du Gouvernement, enregistrées le 7 novembre 2016 ;


    Et après avoir entendu le rapporteur ;
    Le Conseil constitutionnel s'est fondé sur ce qui suit :
    1. Les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi de modernisation de la justice du xxie siècle. Les députés et les sénateurs requérants contestent la procédure d'adoption de la loi ainsi que ses articles 50, 56, 62, 63 et 109. Les députés requérants contestent également son article 48, certaines dispositions de son article 57 et ses articles 93 et 110. Les sénateurs requérants contestent également certaines dispositions de ses articles 3 et 5, son article 6, certaines dispositions de ses articles 7, 51 et 58 et son article 89.


    - Sur la procédure d'adoption de l'ensemble de la loi :


    2. Les sénateurs requérants contestent le bien-fondé de l'utilisation de la procédure accélérée, engagée le 31 juillet 2015, alors que l'examen du projet de loi en première lecture par l'Assemblée nationale n'a débuté que six mois après son adoption par le Sénat le 5 novembre 2015. Ils critiquent également l'introduction à l'Assemblée nationale de nombreuses dispositions nouvelles par voie d'amendement du Gouvernement, permettant à ce dernier de contourner les exigences d'une étude d'impact, d'un examen par le Conseil d'Etat et d'une délibération en conseil des ministres. Il en résulterait « un usage dénaturé » du droit d'amendement du Gouvernement et une atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, ainsi qu'à « l'équilibre de la navette parlementaire tel qu'il résulte de l'article 45 de la Constitution ».
    3. Les députés requérants contestent, eux aussi, l'introduction de nombreuses dispositions nouvelles par amendement du Gouvernement en première lecture à l'Assemblée nationale, ainsi qu'un « usage détourné » de la procédure accélérée. Première assemblée saisie, le Sénat aurait été privé de la possibilité de délibérer sur des dispositions substantielles introduites à l'Assemblée nationale, du fait de la convocation d'une commission mixte paritaire à l'issue de la première lecture. Les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire auraient ainsi été méconnues.


    - En ce qui concerne le droit d'amendement du Gouvernement :


    4. Il résulte de la combinaison de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, du premier alinéa des articles 34 et 39 de la Constitution, ainsi que de ses articles 40, 41, 44, 45, 47 et 47-1, que le droit d'amendement qui appartient aux membres du Parlement et au Gouvernement doit pouvoir s'exercer pleinement au cours de la première lecture des projets et des propositions de loi par chacune des deux assemblées. Il ne saurait être limité, à ce stade de la procédure et sous réserve du respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, que par les règles de recevabilité, notamment par la nécessité, pour un amendement, de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis.
    5. D'une part, ni ces dispositions constitutionnelles ni aucune autre ne font obstacle à ce que des amendements puissent, comme en l'espèce, être déposés devant la seconde assemblée saisie, y compris immédiatement avant la réunion de la commission mixte paritaire, dès lors qu'ils respectent les règles de recevabilité mentionnées ci-dessus. Par ailleurs, les dispositions nouvelles introduites à l'Assemblée nationale par voie d'amendement du Gouvernement n'ont, ni en raison de leur nombre, ni en raison de leur objet, porté atteinte au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
    6. D'autre part, l'article 39 de la Constitution et la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus n'imposent la présentation d'une étude d'impact, la consultation du Conseil d'Etat et une délibération en conseil des ministres que pour les projets de loi avant leur dépôt sur le bureau de la première assemblée saisie et non pour les amendements. Par conséquent, est inopérant le grief selon lequel le Gouvernement aurait contourné ces exigences procédurales en exerçant le droit d'amendement qu'il tient du premier alinéa de l'article 44 de la Constitution.


    - En ce qui concerne la procédure accélérée :


    7. Selon le deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Lorsque, par suite d'un désaccord entre les deux assemblées, un projet ou une proposition de loi n'a pu être adopté après deux lectures par chaque assemblée ou, si le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée sans que les Conférences des présidents s'y soient conjointement opposées, après une seule lecture par chacune d'entre elles, le Premier ministre ou, pour une proposition de loi, les présidents des deux assemblées agissant conjointement, ont la faculté de provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion ». Ces dispositions permettent au Gouvernement, postérieurement au dépôt d'un projet ou d'une proposition de loi, de faire part à tout moment de sa décision d'engager la procédure accélérée, dès lors que les Conférences des présidents des deux assemblées sont en mesure, avant le début de l'examen du texte en première lecture, de s'y opposer conjointement.
    8. En l'espèce, la procédure accélérée a été régulièrement engagée et n'a pas eu pour effet de priver les sénateurs de leurs prérogatives, dès lors qu'ils ont pu, après l'échec de la commission mixte paritaire, délibérer et exercer leur droit d'amendement en nouvelle lecture. Ni le droit d'amendement, ni l'article 45 de la Constitution n'ont ainsi été méconnus. L'engagement de la procédure accélérée n'a pas eu non plus pour effet de porter atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
    9. Il résulte de ce qui précède qu'en dépit du cumul de l'engagement de la procédure accélérée et de l'introduction de nombreuses dispositions par voie d'amendement, la loi déférée n'a pas été adoptée en l'espèce selon une procédure contraire à la Constitution.


    - Sur certaines dispositions de l'article 3 :


    10. Le paragraphe I de l'article 3 de la loi déférée prévoit que les huissiers de justice, les notaires, les commissaires-priseurs judiciaires, les avocats, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les commissaires aux comptes et les experts-comptables proposent à leur clientèle une « relation numérique dans un format garantissant l'interopérabilité de l'ensemble des échanges ». Le paragraphe II de ce même article prévoit que les professions mentionnées au paragraphe I rendent librement accessibles certaines de leurs données afin de garantir cette interopérabilité. Le paragraphe IV de ce même article dispose que les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires proposent également une « relation numérique » du même type aux « personnes intéressées ».
    11. Les sénateurs requérants soutiennent que les paragraphes I, II et IV de l'article 3 méconnaissent le principe de « clarté de la loi » et l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi dans la mesure où ne sont définis ni la notion de « relation numérique » ni les destinataires des données rendues accessibles. Ces paragraphes seraient, pour les mêmes motifs, également entachés d'incompétence négative.
    12. L'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. Il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d'arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi.
    13. D'une part, la notion de « relation numérique » est claire. Elle recouvre la communication et l'échange d'informations et de documents par voie électronique. D'autre part, les dispositions contestées sont suffisamment précises dès lors que toute personne aura accès aux données figurant dans les annuaires et tables nationales des professions mentionnées au paragraphe I.
    14. Les paragraphes I, II et IV de l'article 3 ne sont donc ni inintelligibles ni entachés d'incompétence négative. Ces dispositions, qui ne sont contraires à aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur certaines dispositions de l'article 5 :


    15. Le paragraphe IV de l'article 5 permet, à titre expérimental pour une durée de quatre ans, de soumettre à une médiation préalable obligatoire la recevabilité des recours contentieux exercés par certains agents publics à l'encontre d'actes relatifs à leur situation personnelle et la recevabilité de certaines requêtes relatives à des prestations, allocations ou droits, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
    16. Les sénateurs requérants soutiennent que ce paragraphe méconnaît le principe de « clarté de la loi » et l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi en raison de l'absence de précision quant aux personnes chargées d'effectuer la médiation préalable. En confiant au pouvoir réglementaire la fixation des conditions de l'expérimentation et en ne prévoyant pas les modalités d'évaluation de celle-ci, ce paragraphe méconnaîtrait également l'article 37-1 de la Constitution.
    17. Si, sur le fondement de l'article 37-1 de la Constitution, le Parlement peut autoriser, dans la perspective de leur éventuelle généralisation, des expérimentations dérogeant, pour un objet et une durée limités, au principe d'égalité devant la loi, il doit en définir de façon suffisamment précise l'objet et les conditions et ne pas méconnaître les autres exigences de valeur constitutionnelle.
    18. En premier lieu, les dispositions contestées prévoient que l'expérimentation ne pourra porter que, d'une part, sur des recours formés par des agents de la fonction publique soumis aux dispositions de la loi du 13 juillet 1983 mentionnée ci-dessus et portant sur des actes relatifs à leur situation personnelle et, d'autre part, sur des requêtes relatives aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi. Le législateur, qui n'était pas tenu de préciser les personnes ou autorités chargées de la médiation, a ainsi suffisamment défini l'objet de l'expérimentation qu'il a instituée.
    19. En second lieu, aucune exigence constitutionnelle n'impose au législateur de déterminer les modalités de l'évaluation consécutive à une expérimentation.
    20. Il en résulte que les dispositions du paragraphe IV de l'article 5, qui ne sont pas inintelligibles et ne méconnaissent ni l'article 37-1 de la Constitution ni aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur l'article 6 et sur certaines dispositions de l'article 7 :


    21. Le deuxième alinéa de l'article 373-2-10 du code civil prévoit que le juge aux affaires familiales peut proposer aux parents une mesure de médiation afin de faciliter la recherche d'un exercice consensuel de l'autorité parentale. Le troisième alinéa de cet article prévoit que le juge aux affaires familiales peut enjoindre aux parents de recevoir une information sur l'objet et le déroulement de cette mesure de médiation. L'article 6 de la loi déférée modifie le troisième alinéa de l'article 373-2-10 pour interdire au juge aux affaires familiales de prononcer l'injonction mentionnée ci-dessus, en cas de violences commises par l'un des parents sur l'autre parent ou sur l'enfant.
    22. L'article 15 de la loi du 13 décembre 2011 mentionnée ci-dessus prévoyait, à titre expérimental, que la saisine du juge par les parents aux fins de modification d'une décision fixant les modalités d'exercice de l'autorité parentale ou fixant la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant doit être précédée d'une tentative de médiation familiale. L'article 7 de la loi déférée renouvelle cette expérimentation. Toutefois, le 3° de cet article 7 dispense les parents de cette tentative de médiation lorsque des violences ont été commises par l'un des parents sur l'autre parent ou sur l'enfant.
    23. Les sénateurs requérants soutiennent que l'article 6 et le 3° de l'article 7 méconnaissent l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi dès lors qu'ils ne précisent pas si les violences doivent être constatées par le juge ou simplement alléguées. Ils reprochent également au 3° de l'article 7 de ne pas prévoir les modalités d'évaluation de l'expérimentation qu'il institue.
    24. En adoptant l'article 6, le législateur n'a pas entendu subordonner l'interdiction faite au juge aux affaires familiales d'enjoindre aux parents de recevoir une information sur l'objet et le déroulement d'une mesure de médiation en cas de violences intrafamiliales à la condition que ces violences aient donné lieu à condamnation pénale ou au dépôt d'une plainte. Il n'a pas davantage entendu dispenser les parents séparés de faire une tentative de médiation dans ces seules hypothèses. Il appartiendra donc au juge d'apprécier la réalité des violences pour l'application du troisième alinéa de l'article 373-2-10 du code civil et du 3° de l'article 7 de la loi déférée.
    25. En second lieu, aucune exigence constitutionnelle n'impose au législateur de déterminer les modalités de l'évaluation consécutive à une expérimentation.
    26. L'article 6 et le 3° de l'article 7, qui ne méconnaissent ni l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ni aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur l'article 48, le paragraphe I de l'article 56 et certaines dispositions de l'article 57 :


    27. L'article 48 de la loi déférée confie aux officiers de l'état civil l'enregistrement des conclusions, modifications et dissolutions de pactes civils de solidarité, actuellement dévolu aux greffes des tribunaux d'instance. Le paragraphe I de l'article 56, qui réécrit l'article 60 du code civil relatif aux demandes de changement de prénom, transfère à l'officier d'état civil le traitement de ces demandes relevant aujourd'hui du juge aux affaires familiales. Le 1° du paragraphe I de l'article 57 de la loi déférée introduit une dérogation à la procédure de changement de nom par décret, en donnant compétence aux officiers de l'état civil pour autoriser les demandes de changement de nom des personnes inscrites sur le registre de l'état civil d'un autre Etat. Les 1° et 2° du paragraphe III de l'article 57 modifient l'ordonnance du 8 mars 2000 mentionnée ci-dessus pour instituer, à Mayotte, les mêmes procédures de changement de prénom et de nom.
    28. Les députés requérants reprochent à ces dispositions de transférer aux officiers de l'état civil, sans compensation financière aux communes, l'enregistrement des pactes civils de solidarité ainsi que le traitement des demandes de changement de prénom et de certaines demandes de changement de nom. Il en résulterait une méconnaissance de l'article 40 de la Constitution, du principe de libre administration des collectivités territoriales reconnu à son article 72 et du principe de compensation financière prévu au quatrième alinéa de son article 72-2.
    29. Selon l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus « dans les conditions prévues par la loi ». Selon le quatrième alinéa de son article 72-2 : « Tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi. »
    30. En premier lieu, les compétences confiées aux officiers de l'état civil en matière d'enregistrement des pactes civils de solidarité et de changement de prénom ou de nom sont exercées au nom de l'Etat. Par conséquent, est inopérant le grief tiré de la méconnaissance du quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, dont les dispositions ne sont relatives qu'aux compétences exercées par les collectivités territoriales.
    31. En deuxième lieu, si les dispositions contestées sont susceptibles d'entraîner un accroissement de charges pour les communes, elles n'ont, eu égard au montant des sommes en jeu, pas pour effet de dénaturer la libre administration de ces collectivités. Le grief tiré de la violation de l'article 72 de la Constitution doit donc être écarté.
    32. En dernier lieu, les dispositions critiquées ayant été introduites à l'initiative du Gouvernement, le grief fondé sur l'article 40 de la Constitution est inopérant.
    33. Par conséquent, l'article 48, le paragraphe I de l'article 56, le 1° du paragraphe I et les 1° et 2° du paragraphe III de l'article 57, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur l'article 50 :


    34. L'article 50 crée une procédure non judiciaire de divorce par consentement mutuel, intitulée « divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d'un notaire », se substituant à la procédure judiciaire actuelle.
    35. Son paragraphe I insère, au sein du titre VI du livre Ier du code civil, quatre articles 229-1 à 229-4 définissant le principe et le régime juridique de cette nouvelle procédure. En application de l'article 229-1, s'ils s'entendent sur la rupture de leur mariage et ses effets, les époux peuvent, à la condition d'être chacun assisté d'un avocat, constater leur accord, par acte sous seing privé, dans une convention contresignée par chacun de ces avocats et déposée au rang des minutes d'un notaire. L'article 229-2 interdit le recours à cette nouvelle procédure de divorce si l'un des enfants mineurs du couple a demandé à être entendu par le juge. Il appartient aux parents d'informer l'enfant de cette faculté. En application de l'article 229-3, la convention de divorce doit faire mention de la délivrance de cette information ainsi que du choix de l'enfant de renoncer à cette faculté. Il appartient au notaire de s'assurer du respect de cette formalité. L'article 229-4 impose à chaque époux un délai de réflexion de quinze jours avant de signer la convention, à compter du moment où le projet lui a été adressé par son avocat. Cet article reconnaît force exécutoire à cette convention au jour où elle acquiert date certaine. En application des articles 229, 230 et 247 du code civil dans leur rédaction résultant du même paragraphe I, l'actuelle procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel ne serait plus utilisée que lorsqu'un enfant a demandé à être entendu par un juge.
    36. Le paragraphe I de l'article 50 de la loi déférée modifie également plusieurs articles du code civil afin de faire produire à cette nouvelle procédure de divorce non judiciaire les mêmes effets que l'actuelle procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel. Les paragraphes II à VI de ce même article 50 procèdent de même au sein du code des procédures civiles d'exécution, du code de la sécurité sociale, du code général des impôts, du code pénal et de la loi du 11 juillet 1975 mentionnée ci-dessus. Le paragraphe VII de l'article 50 modifie la loi du 10 juillet 1991 mentionnée ci-dessus, afin de prévoir la prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle des frais d'avocat des époux divorçant selon la nouvelle procédure ainsi créée.


    - En ce qui concerne les griefs tirés de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi :


    37. Les députés et les sénateurs requérants font valoir que l'article 50 méconnaît le principe d'égalité devant la loi. Pour les députés requérants, en imposant aux époux le recours à deux avocats et à un notaire, et en renchérissant ainsi le coût du divorce, les dispositions contestées créent une première rupture d'égalité entre les couples, pour l'accès à la nouvelle procédure de divorce, selon leur fortune. Une deuxième rupture d'égalité serait instaurée entre les parents dont l'un des enfants demanderait à être entendu et les autres parents, puisque la nature, judiciaire ou non, de la procédure de divorce dépend de cette demande. Pour les sénateurs requérants, en liant indissolublement audition de l'enfant et déclenchement de la procédure judiciaire, les dispositions contestées excluent du bénéfice de la protection particulière qu'apporte cette procédure, les enfants qui, faute d'être capables de discernement, ne peuvent demander à être entendus par un juge ainsi que ceux qui ne le demanderont pas, afin de ne pas s'opposer au souhait de leurs parents de privilégier un règlement non judiciaire du divorce. En outre, selon eux, l'article 50 introduit une autre rupture d'égalité injustifiée entre les enfants dont les parents divorcent par consentement mutuel selon la procédure conventionnelle et ceux dont les parents divorceront selon une autre procédure, puisque seuls ces derniers voient leurs intérêts protégés par un juge.
    38. Aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant « l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ». Il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, dès lors que, dans l'exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. L'article 61 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois déférées à son examen.
    39. Aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789 : « La loi… doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. Si, en règle générale, ce principe impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes
    40. En premier lieu, dans le cadre de la nouvelle procédure de divorce qu'elles instituent, les dispositions contestées ont pour effet d'imposer à chacun des époux d'être assisté par son propre avocat. En soumettant ainsi à une même obligation tous les époux ayant recours à cette procédure, le législateur, qui leur a d'ailleurs ouvert le bénéfice de l'aide juridictionnelle, n'a pas méconnu le principe d'égalité devant la loi.
    41. En deuxième lieu, en prévoyant que lorsque l'un des enfants mineurs du couple demande à être entendu par un juge, les époux ne peuvent plus divorcer par consentement mutuel par la voie conventionnelle, mais seulement par la voie judiciaire, les dispositions contestées ne créent, par elles-mêmes, aucune différence de traitement entre les couples.
    42. En troisième lieu, d'une part, l'article 371-1 du code civil, qui définit l'autorité parentale comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant, impose aux parents d'associer l'enfant aux décisions qui le concernent selon son âge et son degré de maturité. D'autre part, en application de l'article 388-1 du code civil, tout mineur capable de discernement peut être entendu par un juge, dans toute procédure le concernant. Enfin, en application des articles 229, 229-2 et 230 du code civil, dans leur rédaction résultant de l'article 50 de la loi déférée, combinés avec l'article 388-1 du même code, le choix d'un enfant mineur capable de discernement de demander à être entendu par le juge fait obstacle à la poursuite de la procédure conventionnelle de divorce de ses parents, au profit de la procédure judiciaire. Dans ce cadre, il appartient alors au juge, conformément à l'article 232 du code civil, de refuser l'homologation et de ne pas prononcer le divorce « s'il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l'un des époux ».
    43. Ainsi, le texte déféré accorde au mineur qui a demandé à être entendu par le juge une protection spécifique. Or, il réserve aux mineurs capables de discernement la faculté de demander à être entendu par le juge. Par conséquent, les dispositions contestées instaurent, au regard de la protection judiciaire dont ils peuvent bénéficier, une différence de traitement entre ces mineurs et les autres enfants. Toutefois, cette différence de traitement repose sur une différence de situation entre les mineurs capables de discernement, qui sont en mesure de s'exprimer sur la situation résultant pour eux du choix de leurs parents, et les autres. Cette différence de traitement entre les mineurs, qui bénéficient en tout état de cause de la protection qui découle des exigences de l'autorité parentale, est en rapport direct avec l'objet de la loi. Elle n'entraîne donc pas de rupture d'égalité contraire à la Constitution.
    44. En dernier lieu, les enfants dont les parents divorcent par consentement mutuel ne sont pas placés dans la même situation que ceux dont les parents divorcent selon une autre procédure. L'intervention judiciaire systématique dans le second cas est justifiée par le fait que les époux n'ont pas trouvé un accord sur le principe ou les effets de leur divorce. La différence de traitement qui en résulte est en rapport direct avec l'objet de la loi et ne méconnaît par conséquent pas le principe d'égalité.
    45. Il résulte de tout ce qui précède que l'article 50 ne méconnaît pas le principe d'égalité.


    - En ce qui concerne les autres griefs :


    46. Les députés requérants font valoir qu'en autorisant le divorce conventionnel, sans intervention du juge, les dispositions contestées portent atteinte au « caractère d'ordre public du droit de la famille » découlant, selon eux, du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. Ils estiment aussi que la nouvelle procédure ainsi créée, qui prive le conjoint le plus faible de la protection judiciaire et l'expose au risque d'une convention de divorce protégeant insuffisamment ses intérêts, méconnaît les « principes généraux du droit civil », ainsi que le onzième alinéa du Préambule de 1946. Enfin, selon eux, en ne garantissant pas suffisamment l'information du mineur sur son droit à être entendu par le juge et en faisant peser sur lui la responsabilité du renoncement à la procédure conventionnelle, les dispositions contestées méconnaissent tout à la fois, l'article 388-1 du code civil, les « principes du droit du divorce qui placent l'intérêt de l'enfant au cœur du dispositif législatif », la convention internationale des droits de l'enfant et le onzième alinéa du Préambule de 1946.
    47. Les sénateurs requérants reprochent, pour leur part, au législateur d'avoir méconnu l'étendue de sa compétence faute d'avoir prévu, pour tous les enfants des couples concernés, un niveau de protection suffisant.
    48. Le droit de mener une vie familiale normale résulte du dixième alinéa du Préambule de 1946 qui dispose : « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».
    49. En premier lieu, il était loisible au législateur, compétent pour fixer les règles du divorce, de substituer à la procédure judiciaire de divorce par consentement mutuel une procédure conventionnelle.
    50. En deuxième lieu, le législateur a veillé à assortir cette nouvelle procédure de divorce de garanties destinées à assurer la protection des époux. Il a ainsi interdit d'y recourir si l'un des époux est placé sous un régime de protection juridique. Il a par ailleurs imposé à chacun d'entre eux l'assistance d'un avocat et prévu le respect d'un délai de réflexion de quinze jours, une fois le projet de convention de divorce établi, avant sa signature. Enfin, il a subordonné le caractère exécutoire de cette convention à son dépôt au rang des minutes d'un notaire, chargé d'en apprécier la validité formelle.
    51. En troisième lieu, le législateur a prévu, afin d'assurer la protection de l'intérêt de l'enfant, que ce dernier, s'il est capable de discernement, soit informé par ses parents de son droit à être entendu par le juge. En outre, il a exigé qu'il soit fait mention, sous le contrôle du notaire, dans la convention de divorce, de la délivrance de cette information et du souhait du mineur de ne pas faire usage de cette faculté. Si, en revanche, le mineur demande à être entendu, la procédure conventionnelle doit être abandonnée au profit de la procédure judiciaire. Le juge est alors chargé de s'assurer que la convention ne porte pas préjudice aux intérêts du mineur. En outre, conformément à l'article 373-2-13 du code civil, dans sa rédaction résultant de l'article 50 de la loi déférée, le juge aux affaires familiales peut être saisi, après le divorce, des dispositions de cette convention relatives à l'exercice de l'autorité parentale.
    52. Compte tenu des garanties ainsi apportées à la procédure conventionnelle de divorce par consentement mutuel qu'il a instaurée, le législateur n'a méconnu ni le dixième alinéa du Préambule de 1946, ni l'étendue de sa compétence.
    53. Par ailleurs, les griefs tirés de la méconnaissance de la convention internationale des droits de l'enfant mentionnée ci-dessus ainsi que de la méconnaissance de principes ou de dispositions à valeur législative et non constitutionnelle sont inopérants.
    54. Il résulte de tout ce qui précède que l'article 50 qui ne méconnaît pas non plus le onzième alinéa du Préambule de 1946 ni aucune autre exigence constitutionnelle est conforme à la Constitution.


    - Sur certaines dispositions de l'article 51 :


    55. Le 5° de l'article 51 modifie l'article 61 du code civil pour prévoir qu'une demande de changement de nom peut être justifiée par la volonté, pour un enfant majeur, d'adjoindre le nom de l'un ou l'autre de ses parents à son nom de naissance.
    56. Les sénateurs requérants soutiennent que ces dispositions, introduites en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, l'ont été en méconnaissance de l'article 45 de la Constitution, faute d'être en relation directe avec une disposition restant en discussion.
    57. Il ressort de l'article 45 de la Constitution et notamment de la première phrase de son premier alinéa, selon laquelle : « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l'adoption d'un texte identique », que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion. Toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle.
    58. Les dispositions du 5° de l'article 51 n'étaient pas, au stade de la nouvelle lecture, en relation directe avec une disposition restant en discussion. Elles n'étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.


    - Sur le paragraphe II de l'article 56 :


    59. Le paragraphe II de l'article 56 crée, dans le chapitre II du titre II du livre Ier du code civil, une section 2 bis intitulée « De la modification de la mention du sexe à l'état civil », comprenant les articles 61-5, 61-6, 61-7 et 61-8. L'article 61-5 prévoit que toute personne majeure ou mineure émancipée qui prouve, par une réunion suffisante de faits, que la mention relative à son sexe à l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue, peut en obtenir la modification. Ce même article 61-5 énumère une liste indicative de trois principaux faits susceptibles de révéler le changement de sexe dont la preuve peut être rapportée par tout moyen : se présenter publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ; être connu sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ; avoir obtenu le changement de son prénom afin qu'il corresponde au sexe revendiqué. L'article 61-6 confie au tribunal de grande instance le soin de statuer sur les demandes de changement de sexe à l'état civil. Il dispose, par ailleurs, que le fait de ne pas avoir subi de traitements médicaux, d'opération chirurgicale ou de stérilisation ne peut fonder le refus d'une telle demande. En vertu de l'article 61-7, la mention du changement de sexe et, le cas échéant, de prénom est portée en marge de l'acte de naissance de l'intéressé à la requête du procureur de la République.
    60. Les sénateurs requérants soutiennent que le paragraphe II de l'article 56 a été introduit en première lecture à l'Assemblée nationale alors que ces dispositions sont dépourvues de lien, même indirect, avec le projet de loi initial. Ces dispositions auraient donc été adoptées en méconnaissance du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution.
    61. Les députés requérants soutiennent qu'en attribuant à l'officier d'état civil la compétence pour connaître des demandes de changement de sexe, le législateur a méconnu le second alinéa de l'article 66 de la Constitution dès lors que cette matière relève de la liberté individuelle. Ils soutiennent également que l'abandon de l'exigence d'une attestation médicale démontrant la perte totale ou partielle des caractères de son sexe d'origine pour obtenir un changement de sexe à l'état civil porte atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
    62. En premier lieu, selon la dernière phrase du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ».
    63. Les dispositions du paragraphe II de l'article 56 de la loi déférée, relatives à la modification de la mention du sexe à l'état civil, ont été introduites en première lecture à l'Assemblée nationale. Cependant, ce paragraphe II ne peut être regardé comme dépourvu de lien, même indirect, avec le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat, qui comportait des dispositions relatives à l'état civil et à la compétence des autorités judiciaires en la matière. Le grief tiré de la méconnaissance du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution doit donc être écarté.
    64. En deuxième lieu, selon le second alinéa de l'article 66 de la Constitution : « L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
    65. Toutefois, la modification de la mention du sexe à l'état civil n'entre pas dans le champ de l'article 66 de la Constitution. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance de cet article est inopérant.
    66. En dernier lieu, il ressort du Préambule de 1946 que la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle.
    67. En permettant à une personne d'obtenir la modification de la mention de son sexe à l'état civil sans lui imposer des traitements médicaux, des interventions chirurgicales ou une stérilisation, les dispositions ne portent aucune atteinte au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. Le grief tiré de la méconnaissance de ce principe manque en fait.
    68. Les dispositions du paragraphe II de l'article 56, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur certaines dispositions de l'article 58 :


    69. Les dispositions du paragraphe I de l'article 58 modifient plusieurs articles du livre VII du code de la consommation. Elles ont notamment pour objet de supprimer l'homologation judiciaire nécessaire au caractère exécutoire de certaines décisions de la commission de surendettement accordant le rééchelonnement, la remise ou la suspension d'exigibilité de créances. Ainsi le 15° de ce paragraphe réécrit l'article L. 733-4 du code de la consommation, lequel prévoit dans son 1° que la commission de surendettement peut imposer, en cas de vente forcée ou amiable du logement principal du débiteur, sous certaines conditions, la réduction du montant de la fraction du prêt restant due aux établissements de crédit ou aux sociétés de financement après la vente. Le 2° de l'article L. 733-4 tel que réécrit permet également à la commission de surendettement d'imposer l'effacement partiel des créances. Ces mesures peuvent être combinées avec un rééchelonnement des dettes. Le 18° du paragraphe I de l'article 58 réécrit notamment les articles L. 741-1 et L. 741-2 du même code. L'article L. 741-1 dispose que la commission de surendettement peut imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. L'article L. 741-2 prévoit que celui-ci entraîne l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur.
    70. Les sénateurs requérants soutiennent tout d'abord que l'article 58 a été adopté en méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire dans la mesure où, d'une part, la procédure de surendettement a fait l'objet d'une réforme législative récente et où, d'autre part, une autre loi en cours de discussion aurait également pour effet de la modifier. Ils soutiennent enfin que les articles L. 733-4, L. 741-1 et L. 741-2 du code de la consommation issus des 15° et 18° du paragraphe I de l'article 58, en ce qu'ils permettent à la commission de surendettement de porter atteinte au droit de propriété des créanciers, méconnaissent la protection constitutionnelle de ce droit.


    - En ce qui concerne la procédure d'adoption de l'article 58 :


    71. La seule circonstance que des dispositions connexes à des dispositions en discussion devant le Parlement aient été modifiées par une loi récemment adoptée ou qu'elles soient en discussion concomitamment dans d'autres projets ou propositions de loi ne constitue pas une atteinte à l'exigence de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
    72. L'article 58 a donc été adopté selon une procédure conforme à la Constitution.


    - En ce qui concerne le grief tiré de l'atteinte au droit de propriété :


    73. La propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789. En l'absence de privation du droit de propriété au sens de l'article 17, il résulte néanmoins de l'article 2 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi.
    74. Les dispositions contestées, en ce qu'elles prévoient la possibilité pour la commission de surendettement d'imposer le rééchelonnement d'une créance et son effacement partiel ou total, portent atteinte au droit de propriété des titulaires de ces créances.
    75. Toutefois, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi un motif d'intérêt général de règlement des situations de surendettement.
    76. En second lieu, d'une part, la commission de surendettement ne peut imposer le rééchelonnement de dettes et leur effacement partiel ou total que si le débiteur est dans l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles. L'effacement total des dettes dans le cadre d'une décision de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ne peut en outre intervenir que si le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise et ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante, des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, ou des biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.
    77. D'autre part, le rééchelonnement et l'effacement ne peuvent, sauf accord du créancier, porter sur les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale, les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice de certains organismes de protection sociale et les amendes pénales. L'effacement ne peut non plus porter sur une créance dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé personnes physiques.
    78. Enfin, ces mesures ne s'imposent qu'en l'absence de contestation par l'une des parties devant le juge du tribunal d'instance.
    79. Compte tenu de l'objectif poursuivi et des garanties prévues, le législateur n'a pas, par les dispositions contestées, porté une atteinte disproportionnée au droit de propriété. Le grief tiré de la méconnaissance de l'article 2 de la Déclaration de 1789 doit donc être écarté. Les articles L. 733-4, L. 741-1 et L. 741-2 du code de la consommation issus des 15° et 18° du paragraphe I de l'article 58, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur les articles 62, 63, 89 et 93 :


    80. Le chapitre Ier du titre V de la loi déférée institue un corps de règles procédurales applicables à l'ensemble des actions de groupe devant le juge judiciaire. La section 1 de ce chapitre, relative à l'objet de l'action de groupe, à la qualité pour agir et à l'introduction de l'instance, comprend les articles 62, 63 et 64. L'article 62 est relatif à l'objet de l'action de groupe. Son premier alinéa détermine les conditions qui permettent à un demandeur d'engager une telle action : cette dernière est possible lorsque plusieurs personnes placées dans une situation similaire subissent un dommage causé par une même personne, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles. Le second alinéa de cet article énumère les finalités de l'action de groupe : elle peut être exercée en vue soit de la cessation du manquement, soit de l'engagement de la responsabilité de l'auteur du dommage pour obtenir la réparation des préjudices subis, soit de ces deux finalités. L'article 63 réserve la possibilité d'engager cette action aux associations agréées et aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans, dont l'objet statutaire comporte la défense d'intérêts auxquels il a été porté atteinte.
    81. Par ailleurs, l'article 89 insère, dans le code de l'environnement, un article L. 142-3-1 qui institue une telle action de groupe en matière environnementale. Cet article précise la qualité des associations susceptibles d'engager cette action ainsi que la nature des manquements et des dommages sur lesquels elle peut porter. L'article 93 insère dans le code de justice administrative les articles L. 77-12-1 à L. 77-12-5 qui instituent une action en reconnaissance de droits en matière administrative et en fixe le régime procédural.
    82. Les sénateurs requérants soutiennent que les articles 62 et 63 sont dépourvus de portée normative dès lors que le régime juridique qu'ils définissent dépend, pour sa mise en œuvre, d'autres dispositions propres à des actions de groupe spécifiques. Il en résulterait également une méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence. Enfin, ces dispositions, ainsi que l'article 89, méconnaîtraient l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.
    83. Les députés requérants reprochent aux articles 62 et 63 de porter atteinte au principe de « sécurité juridique ». Ils soutiennent également que le législateur n'a pas épuisé l'étendue de sa compétence. Enfin, ils reprochent à ces articles, ainsi qu'à l'article 93, de méconnaître le principe de la légalité des délits et des peines ainsi que celui d'individualisation des peines.
    84. En premier lieu, les dispositions des articles 62 et 63, qui déterminent respectivement l'objet de l'action de groupe et la qualité pour engager une telle action, ne sont, en tout état de cause, pas dépourvues de portée normative. Elles ne sont pas non plus entachées d'incompétence négative.
    85. En second lieu, les dispositions des articles 62, 63 et 93, n'instituent aucune sanction ayant le caractère d'une punition. Les griefs tirés de la méconnaissance du principe de la légalité des délits et des peines et du principe d'individualisation des peines, garantis par l'article 8 de la Déclaration de 1789, sont donc inopérants.
    86. Les dispositions des articles 62, 63, 89 et 93, qui ne sont pas inintelligibles et ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur les articles 109 et 110 :


    87. Les articles 109 et 110 de la loi déférée habilitent le Gouvernement, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnances des mesures relevant normalement du domaine de la loi. Le 1° du paragraphe I de l'article 109 l'autorise ainsi à prendre les mesures nécessaires à la mise en œuvre de la réforme, prévue à l'article 12 de la loi déférée, du traitement de certains contentieux de la sécurité sociale et de l'admission à l'aide sociale. Le 2° du même paragraphe I habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances des dispositions limitant la présence des magistrats au sein des commissions administratives. Les 3° et 4° l'autorisent à adapter la législation en matière de propriété intellectuelle. Le 5° habilite le Gouvernement à définir les conditions dans lesquelles les avocats inscrits aux barreaux d'Etats non membres de l'Union européenne pourront donner des consultations juridiques et rédiger certains actes sous seing privé. Le 6° prévoit l'élaboration par ordonnances de la partie législative du code pénitentiaire. Le 7° habilite le Gouvernement à modifier les règles relatives au permis de conduire. Le 8° l'autorise à encadrer par ordonnances le recours, dans chaque cour d'appel, à des experts interprètes ou à des traducteurs non-inscrits sur les listes des experts judiciaires. Le 9° permet de modifier les règles d'accès à la profession d'avocat. Les paragraphes II et III de l'article 109 fixent le délai dans lequel doivent être prises ces ordonnances ainsi que le délai de dépôt des projets de loi de ratification. Enfin, le paragraphe I de l'article 110 de la loi déférée habilite le Gouvernement à mettre en conformité, par ordonnances, le droit français avec un règlement européen relatif à l'insolvabilité. Le paragraphe III de l'article 110 fixe le délai de dépôt du projet de loi de ratification.
    88. Les députés requérants soutiennent que, compte tenu de l'accroissement du nombre des habilitations au cours de la discussion parlementaire, les articles 109 et 110 « démontrent un usage abusif » de la procédure prévue à l'article 38 de la Constitution. Ils contestent également l'insuffisante précision des habilitations prévues aux 4°, 7° et 10° du paragraphe I de l'article 109, ainsi qu'à l'article 110. Il en résulterait une méconnaissance de l'article 38 de la Constitution. Ils estiment par ailleurs que les 6° et 7° du paragraphe I de l'article 109 sont entachés d'incompétence négative.
    89. Les sénateurs requérants soutiennent que le 10° du paragraphe I de l'article 109 a été introduit par un amendement dépourvu de lien, même indirect, avec le texte initial du projet de loi et que l'habilitation qu'il prévoit est formulée en des termes insuffisamment précis.


    - En ce qui concerne la place du 10° du paragraphe I de l'article 109 dans la loi déférée :


    90. Introduites en première lecture à l'Assemblée nationale, les dispositions du 10° du paragraphe I de l'article 109, qui habilitent le Gouvernement à réformer par ordonnances l'activité de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.


    - En ce qui concerne la place d'autres dispositions de l'article 109 dans la loi déférée :


    91. Introduites en première lecture à l'Assemblée nationale, les dispositions du 6° et du 9° du paragraphe I de l'article 109, qui habilitent le Gouvernement à recourir à des ordonnances pour, d'une part, élaborer la partie législative du code pénitentiaire et, d'autre part, modifier les règles d'accès à la profession d'avocat, ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.


    - En ce qui concerne le recours aux ordonnances :


    92. Selon le premier alinéa de l'article 38 de la Constitution : « Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Si cette disposition fait obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement, afin de justifier la demande qu'il présente, la finalité des mesures qu'il se propose de prendre par voie d'ordonnances ainsi que leur domaine d'intervention, elle n'impose pas au Gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu'il prendra en vertu de cette habilitation.
    93. En premier lieu, le 4° du paragraphe I de l'article 109 autorise le Gouvernement à prendre les mesures législatives nécessaires à la mise en œuvre de l'accord signé à Bruxelles le 19 février 2013 relatif à la juridiction unifiée du brevet, qui dispose d'une compétence exclusive pour les litiges civils liés à la contrefaçon et à la validité des brevets européens. Le 7° du même paragraphe I habilite le Gouvernement à modifier la partie législative du code de la route, afin d'aménager les modalités de majoration du nombre de points affectés pendant le délai probatoire postérieur à l'obtention du permis de conduire, pour les jeunes conducteurs suivant une formation après l'obtention de ce permis. L'article 110 de la loi déférée autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures nécessaires à l'application du règlement européen du 20 mai 2015 mentionné ci-dessus.
    94. Il résulte de ce qui précède que les habilitations prévues aux 4° et 7° du paragraphe I de l'article 109 et à l'article 110 sont précisément définies dans leur domaine et dans leurs finalités. Le grief tiré de leur insuffisante précision doit donc être rejeté.
    95. En second lieu, aux termes mêmes de l'article 38 de la Constitution, le domaine de l'habilitation peut comprendre toute matière qui relève du domaine de la loi. Est par conséquent inopérant le grief selon lequel le 7° du paragraphe I de l'article 109, qui permet au Gouvernement de modifier certaines dispositions du code de la route par ordonnances, est entaché d'incompétence négative.
    96. Le reste de l'article 109 et l'article 110, qui ne méconnaissent ni l'article 38 de la Constitution ni aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution.


    - Sur la place d'autres dispositions dans la loi déférée :


    97. L'article 106 de la loi déférée donne compétence au conseil national des barreaux pour délivrer un titre exécutoire à l'encontre des avocats en cas de non paiement de leurs cotisations. L'article 115 modifie des dispositions relatives à la prescription acquisitive dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Introduits en première lecture à l'Assemblée nationale, les articles 106 et 115 ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat. Adoptés selon une procédure contraire à la Constitution, ils lui sont donc contraires.


    - Sur les autres dispositions :


    98. L'article 108 de la loi déférée modifie le paragraphe I de l'article 63 de la loi du 3 juin 2016 mentionnée ci-dessus. D'une part, il corrige une erreur matérielle figurant au 1° de ce paragraphe, qui modifie l'article 61-3 du code de procédure pénale. D'autre part, il modifie le 10° du même paragraphe, relatif aux règles régissant le permis de visite et l'autorisation de téléphoner des prévenus incarcérés prévues à l'article 145-4 du même code.
    99. Les dispositions du paragraphe I de l'article 63 de la loi du 3 juin 2016 sont, conformément au paragraphe VI de cet article, entrées en vigueur le 15 novembre 2016. Par conséquent, les dispositions de l'article 108 de la loi déférée doivent être interprétées comme modifiant les articles 61-3 et 145-4 du code de procédure pénale dans leur rédaction résultant du paragraphe I de l'article 63 de la loi du 3 juin 2016. Sous cette réserve, l'article 108 n'est pas contraire à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi. Cet article, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution.
    100. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune autre question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision.
    Le Conseil constitutionnel décide :


  • Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de modernisation de la justice du xxie siècle :


    - le 5° de l'article 51 ;
    - l'article 106 ;
    - les 6°, 9° et 10° du paragraphe I de l'article 109 ;
    - l'article 115.


  • Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la même loi :


    - les paragraphes I, II et IV de l'article 3 ;
    - le paragraphe IV de l'article 5 ;
    - l'article 6 ;
    - le 3° de l'article 7 ;
    - les articles 48, 50 et 56 ;
    - le 1° du paragraphe I et les 1° et 2° du paragraphe III de l'article 57 ;
    - l'article L. 733-4 du code de la consommation, dans sa rédaction résultant du 15° du paragraphe I de l'article 58 et les articles L. 741-1 et L. 741-2 du même code, dans leur rédaction résultant du 18° du même paragraphe ;
    - les articles 62, 63, 89 et 93 ;
    - sous la réserve énoncée au paragraphe 99, l'article 108 ;
    - le reste de l'article 109 ;
    - l'article 110.


  • Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française.


  • Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 novembre 2016, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Michel CHARASSE, Valéry GISCARD d'ESTAING, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

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