Décision n° 2017-871 du 22 novembre 2017 portant sanction à l'encontre de la SAS NRJ

Version initiale


Le Conseil supérieur de l'audiovisuel,
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, notamment ses articles 3-1, 28, 42-1, 42-2 et 42-7 ;
Vu le décret n° 2013-1196 du 19 décembre 2013 relatif à la procédure de sanction mise en œuvre par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en application de l'article 42-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
Vu l'ensemble des décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel autorisant la SAS NRJ à exploiter un service de radio en modulation de fréquence dénommé « NRJ » ;
Vu la convention conclue entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel et la SAS NRJ le 2 octobre 2012 en ce qui concerne le service de radio « NRJ », et notamment ses articles 2-6, 4-2-2 et 4-2-4 ;
Vu la décision n° 2016-736 du 28 septembre 2016 mettant en demeure la SAS NRJ de respecter, notamment, les dispositions de l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 en ce qu'elles lui imposent de veiller à respecter l'image des femmes ainsi que les stipulations de l'article 2-6 de la convention du 2 octobre 2012 ;
Vu le compte rendu d'écoute de l'émission C'Cauet diffusée le 9 décembre 2016 sur l'antenne du service NRJ ;
Vu le courrier du 5 juillet 2017 du rapporteur mentionné à l'article 42-7 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 notifiant à la SAS NRJ la décision d'engager à son encontre une procédure de sanction et l'invitant à présenter ses observations dans le délai d'un mois ;
Vu le courriel du 11 juillet 2017 de la SAS NRJ demandant la transmission des pièces versées à la procédure de sanction engagée par le rapporteur à son encontre ;
Vu le courrier du 13 juillet 2017 du directeur général du Conseil supérieur de l'audiovisuel adressant à la SAS NRJ les pièces versées à la procédure de sanction engagée par le rapporteur à son encontre ;
Vu les observations écrites de la SAS NRJ communiquées au rapporteur par courrier du 31 juillet 2017 ;
Vu le rapport établi par le rapporteur et communiqué à la SAS NRJ ainsi qu'au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel par courriers du 25 septembre 2017 ;
Vu la décision du 25 octobre 2017 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a décidé de ne pas faire usage de la faculté qu'il tient du 6° de l'article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986 ;
Vu le courrier du 27 octobre 2017 par lequel la SAS NRJ a décliné la possibilité de rendre publique l'audition du 8 novembre 2017 devant le Conseil supérieur de l'audiovisuel, en réponse au courrier de ce dernier du 23 octobre 2017 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu, lors de la séance du 8 novembre 2017, le rapporteur ainsi que Mmes Maryam SALEHI,directrice déléguée à la direction générale de NRJ GROUP, Aurélie BREVAN MASSET, directrice des relations institutionnelles de NRJ GROUP, Christine NGUYEN DUC LONG, directrice juridique de NRJ GROUP, MM. Yves TAIEB, directeur opérationnel des activités radio du Groupe NRJ, et Davy SERRANO, président de la SAS NRJ ;
1. Considérant que l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 dispose notamment que le Conseil supérieur de l'audiovisuel « assure le respect des droits des femmes dans le domaine de la communication audiovisuelle. A cette fin, il veille (…) à l'image des femmes qui apparaît dans ces programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein des couples. Dans ce but, il porte une attention particulière aux programmes des services de communication audiovisuelle destinés à l'enfance et à la jeunesse » ;
2. Considérant que l'article 2-6 de la convention du service NRJ stipule notamment que : « Le titulaire (…) respecte les droits de la personne relatifs à sa vie privée, son honneur et sa réputation tels qu'ils sont définis par la loi et la jurisprudence. Il veille en particulier : - à ce qu'il soit fait preuve de retenue dans la diffusion de témoignages susceptibles d'humilier les personnes (…) » ;
3. Considérant que l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 dispose que : « Si la personne faisant l'objet de la mise en demeure ne se conforme pas à celle-ci, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut prononcer à son encontre, compte tenu de la gravité du manquement, et à la condition que celui-ci repose sur des faits distincts ou couvre une période distincte de ceux ayant déjà fait l'objet d'une mise en demeure, une des sanctions suivantes : (…) 3° Une sanction pécuniaire assortie éventuellement d'une suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou d'une partie du programme » ; qu'aux termes de l'article 4-2-2 de la convention du 2 octobre 2012 : « (…) le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut, en cas de non-respect des obligations qui sont imposées par la décision d'autorisation ou de l'une des stipulations de la convention ou des avenants qui pourraient lui être annexés, prononcer contre le titulaire une des sanctions suivantes compte tenu de la gravité du manquement et après mise en demeure : (…) 3° une sanction pécuniaire dont le montant ne peut dépasser le montant prévu à l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986 précitée (…) » ; que l'article 4-2-4 de la même convention stipule que les sanctions mentionnées à ses articles 4-2-2 et 4-2-3 sont prononcées dans le respect des garanties fixées par les articles 42 et suivants de la loi du 30 septembre 1986 modifiée ;
4. Considérant que, par la décision du 28 septembre 2016 visée ci-dessus, la SAS NRJ a été mise en demeure de respecter, à l'avenir, notamment les dispositions de l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 et les stipulations de l'article 2-6 de la convention du 2 octobre 2012 ;
5. Considérant qu'il ressort du compte-rendu visé ci-dessus de l'émission C'Cauet diffusée le 9 décembre 2016 que l'animateur a organisé un canular téléphonique au cours duquel une chroniqueuse de l'émission et sa complice, présentée comme la belle-sœur de la personne piégée, ont fait croire à celle-ci qu'elles avaient toutes les deux eu des relations sexuelles avec son compagnon ; que, pour justifier ces prétendus agissements, les auteurs du canular ont formulé des commentaires avilissants relatifs au physique de la personne concernée et proféré de nombreuses insultes ; que des propos dégradants concernant sa vie intime ont été prononcés et qu'elle a fait l'objet de comparaisons humiliantes et obscènes sur ce sujet ; que de tels propos tendent à réduire les femmes à des objets sexuels et en présentent une image stéréotypée et dégradante ; que la circonstance qu'ils aient été tenus par des femmes est à cet égard sans incidence sur la caractérisation de ce manquement ; que, par suite, ces propos méconnaissent gravement les dispositions précitées de l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 ;
6. Considérant par ailleurs que, au prétexte d'une plaisanterie, la personne victime de ce canular téléphonique a été publiquement humiliée par la divulgation d'informations intimes désobligeantes et l'énoncé de nombreux commentaires injurieux concernant son apparence physique ; qu'elle a ainsi été placée dans une situation de détresse et de vulnérabilité manifestes ; que la diffusion de témoignages susceptibles d'humilier les personnes constitue un manquement aux stipulations précitées de l'article 2-6 de la convention du service NRJ ; que le caractère prétendument humoristique de cette séquence, pas plus que le consentement de la victime à la diffusion de celle-ci, ne saurait exonérer l'éditeur de sa responsabilité ;
7. Considérant que la gravité de l'ensemble de ces faits justifie que soit prononcée à l'encontre de la SAS NRJ une sanction pécuniaire d'un montant d'un million d'euros ;
Après en avoir délibéré,
Décide :


  • Le Conseil supérieur de l'audiovisuel prononce à l'encontre de la SAS NRJ une sanction pécuniaire d'un montant d'un million d'euros à verser au Trésor public.


  • La présente décision sera notifiée à la SAS NRJ et publiée au Journal officiel de la République française.
    Délibéré le 22 novembre 2017 par M. Olivier Schrameck, président, Mme Sylvie Pierre-Brossolette, Mme Nathalie Sonnac, M. Nicolas Curien, Mme Carole Bienaimé-Besse et M. Jean-François Mary, conseillers.


Fait à Paris, le 22 novembre 2017.


Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel :
Le président,
O. Schrameck

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