Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 mars 2019, 17-22.366, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :





Sur le moyen unique, pris en sa première branche :



Vu les articles 4, 2, h) du règlement CE n° 1346/2000 du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, L. 622-24, alinéa 2, du code de commerce et 416 du code de procédure civile ;



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Landsbanki, exploitant un établissement de crédit, a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, au sens du droit luxembourgeois, ouverte par un jugement du tribunal d'arrondissement de Luxembourg du 12 décembre 2008 qui a nommé Mme G... en qualité de liquidateur ; que la SCI Stephini (la SCI) a été mise en liquidation judiciaire, au sens du droit français, par un jugement du 19 décembre 2013 du tribunal de grande instance de Grasse, M. K... étant désigné liquidateur ; que, le 13 mars 2014, la société Landsbanki a déclaré une créance à la procédure collective de la SCI par l'intermédiaire d'un avocat ; que M. K..., ès qualités, a contesté la régularité de cette déclaration, en faisant valoir qu'elle aurait dû être faite par Mme G..., ès qualités ;



Attendu que pour juger irrégulière la déclaration de créance du 13 mars 2014, l'arrêt retient que la société Landsbanki qui est en liquidation judiciaire est dépourvue de qualité à agir en justice, le liquidateur de la personne morale n'étant ni son mandataire social, ni son représentant légal, mais le mandataire de la liquidation judiciaire, qui exerce en cette qualité, pendant toute la durée de la procédure, les droits et actions à vocation patrimoniale du débiteur dessaisi ; qu'il en déduit que l'avocat, bien que dispensé de justifier de son mandat, ne représente pas valablement la personne ayant qualité à déclarer la créance ;



Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait des constatations de l'arrêt que l'avocat signataire de la déclaration litigieuse, qui, conformément au droit français applicable, était dispensé de justifier de son mandat de déclarer les créances, avait seulement omis d'indiquer qui était le représentant légal de la société Landsbanki, ce dont il résultait que rien n'excluait que cet avocat ait agi au nom et pour le compte du liquidateur de cette société, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;



PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :



CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;



Condamne M. K..., en qualité de liquidateur de la SCI Stephini, aux dépens ;



Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;



Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt



Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Landsbanki Luxembourg



Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la déclaration de créance du 13 mars 2014 présentée par la SA Landsbanki Luxembourg par l'intermédiaire de son avocat était irrégulière faute de qualité à y procéder du fait de son dessaisissement résultant de sa liquidation judiciaire, et d'avoir dit que cette irrégularité n'avait pas été valablement régularisée,



AUX MOTIFS QUE la SCI Stephini considère que la déclaration de créance faite par la SA Landsbanki Luxembourg est irrégulière, faute de la mention de sa représentation par son liquidateur judiciaire, et Me K... ès qualités, soutient pareillement que par suite du prononcé de sa faillite le 12 décembre 2008, Landsbanki était dessaisie de ses droits et actions au profit de son liquidateur, qui pouvait seul rédiger la déclaration de créance ; qu'il en conclut qu'elle n'avait donc pas qualité pour adresser la déclaration de créance par l'intermédiaire de son conseil; que cette irrégularité ne peut être couverte par aucune rectification et que le défaut de pouvoir constitue, en application des articles 117 et suivants du CPC, une irrégularité de fond entraînant la nullité de la déclaration de créance et en tout état de cause son inopposabilité ; que ceci est contesté par la SA Landsbanki, qui fait valoir que la déclaration de créance a été faite par l'avocat la représentant, seul signataire et auteur de celle-ci au sens de l'article L 622-24 alinéa 2 du code de commerce ; que l'omission dans cet acte de la liquidation judiciaire et du liquidateur judiciaire désigné n'entraînent pas sa nullité et que le fait que l'auteur de cette déclaration soit un avocat couvre l'irrégularité résultant de la représentation de la personne morale ; que la possibilité offerte au créancier de déclarer sa créance par l'intermédiaire d'un mandataire, pouvant être un avocat, ne saurait couvrir l'irrégularité de fond entachant cette demande du fait du défaut de qualité à agir du créancier déclarant placé en liquidation judiciaire, dessaisi de ses droits et actions s'agissant de son patrimoine, la question en litige n'étant pas celle du défaut de mention du représentant légal d'une personne morale dans une assignation, mais celle de l'exercice d'une action par un débiteur dépourvu de qualité, le liquidateur judiciaire d'une personne morale en liquidation judiciaire n'étant ni son mandataire social ni son représentant légal mais le mandataire judiciaire de la liquidation judiciaire, exerçant en tant que tel pendant toute la durée de la procédure les droits et actions du débiteur dessaisi concernant son patrimoine ; que la déclaration de créance présentée par la seule SA Landsbanki Luxembourg par l'intermédiaire de son avocat, alors qu'elle était dessaisie de ses droits et actions du fait de la procédure de liquidation judiciaire, est par conséquent irrégulière comme ayant été faite par une partie dépourvue de qualité ; que la déclaration de créance présentée par Me G... en qualité de liquidateur de la SA Landsbanki Luxembourg le 29 octobre 2014 et celle du 14 janvier 2015, postérieures de plusieurs mois à la publication au Bodacc du jugement d'ouverture, n'ont pas pu régulariser celle présentée le 13 mars 2014 par la société Landsbanki Luxembourg, non affectée d'erreur ni d'omission matérielle ; qu'en conséquence, la déclaration de créance du 13 mars 2014 sera rejetée comme étant irrecevable et l'ordonnance attaquée sera réformée,



1) ALORS QUE la déclaration faite par l'avocat du créancier est régulière, peu important l'erreur concernant la désignation de la personne représentant le créancier ; que la déclaration faite pour le compte de sa cliente par l'avocat de la société Landsbanki était régulière, quand bien même elle ne mentionnait pas Mme G... ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé article L.622-24 du code de commerce ;



2) ALORS QUE, subsidiairement, dans le cas où elle est susceptible d'être couverte, la nullité n'est pas encourue si sa cause a disparu au moment où le juge statue ; qu'à supposer que la déclaration de créance initiale soit considérée comme irrégulière et que l'absence de mention, dans la déclaration de créance, du fait que le créancier était en liquidation judiciaire et était représenté par son liquidateur constituait une irrégularité de fond, celle-ci avait été régularisée par les déclarations de créance des 30 octobre 2014 et 14 janvier 2015, avant que le juge statue ; qu'en considérant que l'intervention de Mme G..., pour reprendre la déclaration de son administrée à son compte, n'avait pas régularisé la déclaration de créance, la cour d'appel a violé l'article L.622-24 du code de commerce, ensemble l'article 121 du code de procédure civile ;



3) ALORS QU'en tout état de cause, en s'abstenant de rechercher si Mme G..., qui avait repris à son profit le mandat de représentation de l'avocat de son administrée, ne devait pas bénéficier des actes accomplis par ce dernier pour le compte de la société Landsbanki, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.622-24 du code de commerce ensemble 1984 du code civil.ECLI:FR:CCASS:2019:CO00175
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